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4. DES ÉLÉMENTS DE CONTEXTE EN PERSPECTIVE

4.5.2. La science et la technologie au service des océans

Comme il est possible de le constater au chapitre 2, la recherche et le développement concernant la création de plastique biosourcé, le nettoyage des océans et le recyclage des plastiques en fin de vie vont bon train. C’est pourquoi Cordier et Uehara (2019) évaluent les investissements nécessaires pour atteindre différents objectifs en termes de quantité de déchets plastique présents dans les océans. Par exemple, pour faire pla- fonner la quantité de plastique présent dans les océans au niveau de 2021 d’ici 2030 en se concentrant uniquement sur la récupération en aval, il serait nécessaire de récupérer 4,22 % de la quantité totale de déchets marins par année. Ce rendement représente des coûts d’environ 250 milliards de dollars, soit 0,3 % du PIB mondial. En comparant ces résultats avec divers scénarios, les auteurs en viennent à la conclusion qu’aucune solution ne peut résoudre le problème par elle-même : la technologie est utile à la cause, mais doit être accompagnée de mesures politiques, économiques et sociales pour couper le flux de déchets che- minant jusqu’aux océans. (Cordier et Uehara, 2019) Toujours en est-il que trois volets scientifiques techno- logiques représentent des éléments clés afin d’optimiser l’ensemble des solutions à adopter pour résoudre le problème :

• le recyclage du plastique;

• la production de plastique biosourcé;

• la récupération du plastique présent dans l’environnement marin.

Premièrement, les technologies de recyclage des plastiques existent pour les flux de matières les plus purs. Dans les pays développés, les taux de contamination acceptés dépassent rarement 1 %, et de plus en plus, les pays en voie de développement vers lesquels étaient jusqu’à récemment exportés les ballots de matières trop contaminées resserrent leurs exigences. Bien que des technologies existent, la problématique du recy- clage des plastiques est bien présente, même dans les pays développés. Au Québec, 18 % des plastiques post-consommation résidentiels sont récupérés en 2015, et cette quantité n’est pas entièrement recyclée

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(Recyc-Québec, 2015). De plus, le recyclage de certains plastiques émergents représente de nouveaux défis à relever dans ce secteur d’activité. D’une part, le recyclage des bioplastiques est un problème majeur à aborder, d’autant plus que l’utilisation de ces derniers est de plus en plus encouragée pour réduire l’impact de la production et des débris sur l’environnement. Étant donné la variété des bioplastiques existants et les diverses façons de les gérer en fin de vie – le recyclage, le compostage ou la biodégradation – il est complexe pour le consommateur de s’y retrouver, et plusieurs erreurs de tri sont susceptibles de se produire. D’autre part, plusieurs défis se posent également lorsqu’il est question de recycler les plastiques mélangés, comme ceux dérivant dans les océans. Comme présenté à la section 2, plusieurs technologies sont en développement pour régler ce problème, mais des preuves restent à faire et encore plus de chemin pour les rendre accessibles aux pays en voie de développement.

Deuxièmement, les bioplastiques, biosourcés et biodégradables, sont des matériaux permettant de réduire l’impact des rejets dans l’environnement, tout en conservant le plus possible les avantages des plastiques traditionnels, notamment dans les domaines de l’emballage alimentaire. Ils font partie de la solution pour une transition vers une économie circulaire, dans laquelle les déchets sont réintroduits pour un nouvel usage. Ces plastiques alternatifs ne sont toutefois pas au point; plusieurs critiques soulèvent leur faible biodégra- dabilité dans des conditions naturelles et, par conséquent, leur persistance considérable dans l’environne- ment. Cela est sans compter leur coût encore trop élevé pour faire compétition aux plastiques d’origine pétrolière (Shogren et al, 2019). Par exemple, le PLA, le bioplastique le plus couramment utilisé dans les emballages actuellement, est toujours plus coûteux à produire que les plastiques issus du pétrole, et ses propriétés techniques ne sont pas aussi intéressantes (Derome, 2019). De manière générale, « les plastiques compostables seraient deux à trois fois plus chers que les plastiques traditionnels; quant aux plastiques bio- sourcés, ils sont de 30 à 50 % plus chers » (Derome, 2019). En outre, des efforts doivent être consacrés au développement de bioplastiques issus de ressources renouvelables, sans faire concurrence au secteur agroa- limentaire en ayant recours au maïs ou au blé, entre autres (Derome, 2019). À l’heure actuelle, certaines compagnies chimiques, comme DuPont, investissent dans le développement de bioplastiques dans le but de réduire la dépendance du marché aux produits pétroliers (Krabbe, 2018).

Enfin, les technologies de récupération des plastiques émergent depuis quelques années, mais plusieurs d’entre elles sont encore à l’étape de prototype ou de projet pilote. Par exemple, depuis sa mise à l’eau, le mégaprojet d’accumulateur de plastique de The Ocean Cleanup a reçu plusieurs critiques quant à son efficacité. En effet, certains experts soulèvent le fait que l’invention est susceptible de récupérer non seulement des débris de plastique sur son passage, mais également des organismes vivants, comme le plancton ou d’autres petites espèces situées à la base de la chaîne alimentaire. On pointe aussi du doigt l’incapacité de l’engin à accumuler les microparticules de plastique, lesquelles sont les plus dommageables

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pour l’écosystème marin. Toujours en est-il que ce projet représente un pas en avant pour la cause de la pollution des océans par le plastique; il ne faut surtout pas sous-estimer l’importance des apprentissages associés à ce genre d’initiative, en plus de contribuer, à son échelle, au nettoyage des milieux marins. (Mercure, 2018, 8 septembre) Bref, des ajustements restent à faire avant de pouvoir déployer ces technologies à grande échelle. Toutefois, les idées ne manquent pas et plusieurs incitatifs seraient sans doute bienvenus afin de propulser le développement de celles-ci et les adapter aux cas de rejets de plastique les plus urgents.