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le sacré comme principe d’organisation

Dans le document Sociologie des sociétés fermées (Page 149-165)

Aborder la question du sacré de nos jours, dans une société moderne laïcisée ou dans des organisations séculières, appelle quelques remarques préliminaires. Contrairement a une idée reçue, encore largement répan- due, la sphère dans laquelle se déploie le sacré ne se confond pas avec la sphère religieuse, et ce même s’il est évident que les deux domaines se sont souvent recoupés et même recouverts, au cours de l’histoire humaine, pour cette simple raison que leurs fonctions respectives sont proches (nous montrerons notamment que la notion de reliance — qui s’affirme dans le concept de sacré parallèlement à la notion de séparation —, leur est commune). Dans son ouvrage consacré aux Rites profanes, Claude Rivière précise fort justement que « le champ du sacré déborde de beau- coup le champ du religieux, a fortiori institutionnalisé » (, p. ), suivi en cela par Basarab Nicolescu, qui le qualifie de « transreligieux » (, p. ), et par Jean-Jacques Wunenburger ().

L’on ne s’étonnera donc pas de trouver du sacré dans des organisations non-religieuses, et notamment dans la plupart des institutions fermées que nous allons analyser. En tant qu’il instaure des règles séparatrices, le sacré, en effet, y est particulièrement présent. Les pages qui suivent seront consacrées à la compréhension du sacré comme principe d’organisation, établissant une frontière entre l’interne et l’externe, mais aussi pourvoyeur de représentations mentales, avant que d’être un moteur d’action. À tra- vers lui, nous saisirons également ce qui fonde et ce qui motive les institu- tions fermées, ainsi que la nature des messages que ces dernières diffusent et des relations qui unissent leurs membres.

 Les lois de la séparation : le sacré, garant d’ordre et de pureté

La notion de sacré n’est guère aisée à définir. D’abord parce qu’on l’assimile souvent au religieux, ainsi que nous l’avons relevé ; ensuite parce qu’elle recouvre une réalité mouvante, variable au fil du temps et en fonc- tion des cultures (les choses considérées comme sacrées à une période déterminée de l’histoire cessent de l’être à une autre époque, ainsi que le

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firent remarquer Henri Hubert et Marcel Mauss, et il en va de même lors-

qu’on passe d’un continent à un autre) ; enfin parce que le terme même de « sacré » est frappé d’une certaine ambiguïté, dans la mesure où il se rap-

porte tout à la fois à un substantif et à un adjectif, à un signe et à un signi- fié, ce qui peut entraîner quelque confusion, comme le souligne Michel Meslin (). Mais cette ambiguïté du sacré, que Sigmund Freud préfé- rait désigner par le mot « ambivalence » dans Totem et Tabou, fait aussi sa richesse. Par ailleurs ces deux définitions relatives au sacré, évoquant soit un champ englobant, soit des êtres, des choses ou des faits englobés, convergent cependant en ce qu’elles renvoient également à un principe de différenciation et d’organisation. Le champ sacral, par exemple, qui propose un système organisé de représentations et un mode particulier d’être au monde, se définit d’abord comme un domaine fortement balisé et délimité par rapport à tout ce qui lui est extérieur. Nous avons déjà rappelé que le terme « sacré » signifie, étymologiquement, « séparé ». Une conception traditionnelle du sacré — celles d’un Émile Durkheim (), d’un Mircea Eliade () ou d’un Roger Caillois () — tend ainsi à oppo- ser ce champ à un autre champ, qui lui est hétérogène, à savoir celui du profane. Dans un article paru dans L’Année sociologique, Émile Durkheim écrit ainsi que « les deux sexes doivent mettre à s’éviter le même soin que le profane à fuir le sacré, et le sacré à fuir le profane » (, p. ). Le sacré repose donc sur une idéologie ou un sentiment différentialiste. Exprimant une quête d’absolu, il exclut le domaine profane ainsi que les éléments humains qui s’y rattachent, comme l’extraordinaire exclut l’ordinaire (et ce même si la frontière entre les deux domaines est volontiers mobile, en tant que le sacré est une donnée de la conscience, et non un état, une nature ou encore une qualité essentielle des choses (Meslin, )).

Pour cette raison même, la plupart des cérémonies qui sont considérées comme sacrées par un groupe d’individus se déroulent à l’exclusion de ceux qui ne font pas partie de la communauté organisatrice de l’événe- ment, dans des lieux clos, éloignés des regards indiscrets : les rites d’ini- tiation grecs baptisés Mystères, par exemple, devaient leur nom à cette caractéristique. De la même manière, les rites conçus comme actes d’ins- titution, tels qu’analysés par le sociologue Pierre Bourdieu, répondent à cette logique séparatrice, distinguant ceux qui ont vécu le rituel et ceux qui ne le vivront jamais. La séparation est d’abord de nature culturelle et sociale : le militaire se différencie du civil, l’initié du non-initié, le croyant du mécréant ou de l’hérétique... Mais cette séparation repose en partie sur des dispositifs matériels : le décorum des temples, des églises, des

. « Si les dieux chacun à leur heure sortent du temple et deviennent profanes nous voyons par contre des choses humaines, mais sociales, la patrie, la propriété, le travail, la personne humaine y entrer l’une après l’autre. » (Mauss, , p. )

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mosquées et des synagogues fait partie de ces dispositifs, tout comme les tenues vestimentaires et autres accessoires que portent les officiants ou les participants au sacré, et qui rappellent la situation extraordinaire dans laquelle ils se trouvent. Le prêtre officie en soutane, le franc-maçon effectue ses travaux en gants et tablier blancs, le militaire possède un uniforme spécifiquement destiné aux cérémonies... Ces indices vestimen- taires, qui s’insèrent dans la catégorie de ce que Bernard Lamizet appelle les « médiats » de la personne (, p. -), ne sont pas seulement des formes relatives à l’image sociale d’un individu et à sa représentation dans l’espace public. Ils participent d’une caractérisation et d’une contextuali- sation particulières de leur mode de communication. Signes à part entière, composantes d’un système culturel, ils s’insèrent dans cette communica- tion intégrative précédemment analysée. En outre, ils aident les membres des institutions fermées à opérer la rupture entre l’intérieur et l’extérieur (les prisonniers, tout comme les patients traités dans les asiles, portent des tenues uniformes, distinctes de celles que les individus affichent à l’ex- térieur). Maurice Duval précise ainsi que les marins de commerce, bien que n’étant pas obligés de porter une tenue spécifique, s’habillent diffé- remment lorsqu’ils sont en mer et lorsqu’ils sont à terre, distinguant les vêtements de travail, dédiés à un milieu clos et à un travail de groupe, des vêtements portés dans des situations non-professionnelles (, p. -). Car « ce qui est reproduit dans le système vestimentaire, c’est le schéma classificatoire » (Sahlins, , p. ).

Enfin, la rupture entre le sacré et le profane se traduit concrètement par une séparation spatiale et temporelle, au moins sur un plan symbolique. Certains rituels opèrent ainsi un cadrage spatio-temporel, comme celui que nous avons étudié au sein du temple maçonnique dûment « couvert », et où les adeptes, qui ont « trois ans », « cinq ans » ou « sept ans » et plus, tra- vaillent dans un intervalle sacré, « de midi à minuit». Les rites participent

bien évidemment de cette séparation d’avec le temps profane. Antoine de Saint-Exupéry l’exprime fort bien dans Le Petit Prince : « Qu’est-ce qu’un rite ? dit le petit Prince. C’est ce qui fait qu’un jour est différent des autres jours, une heure, des autres heures. » Nous avons ainsi souligné le fait que les rites de passage opèrent à ce partage temporel, consacrant un « avant » et un « après », raison pour laquelle les concepts de seuil et de liminalité y jouent un rôle essentiel.

Mais l’espace et le temps sacrés ne sont pas seulement caractérisés par la frontière qu’ils établissent vis-à-vis du monde profane. Ils reposent

. En outre, les francs-maçons se réfèrent à un temps maçonnique qui diffère du temps profane : l’année profane  correspond ainsi à l’année maçonnique . Il en va de même pour l’espace. Une loge parisienne, par exemple, sera désignée comme implantée à l’Orient de Paris...

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également sur une appréhension originale de ce que Kant définissait comme deux « intuitions pures a priori ». L’espace-temps sacré est avant tout une représentation. Il ne relève pas d’une réalité mathématique, scientifiquement mesurable, mais du domaine de l’imagination symbo- lique. Ainsi l’Orient désigne-t-il bien plus qu’un repérage géographique et le Temple bien plus qu’un simple local où l’on se réunit, pour un franc- maçon, de même que le musulman voit bien plus qu’une direction spa- tiale lorsqu’il se tourne vers la Mecque pour prier, et le chrétien lorsqu’il regarde l’autel, où se trouve un Christ mis en croix. En effet, même s’il s’appuie souvent sur un dispositif matériel, le sacré ne dépend pas tant des choses, que de la représentation que l’homme a de ces choses et des attributs qu’il prête à ces dernières. Dans son Éloge des rituels, Denis Jef- frey souligne ainsi que la même eau peut être tour à tour conçue comme un composé chimique dont la formule est HO, comme une boisson sus- ceptible de désaltérer, et comme un liquide purificateur lorsqu’elle est « bénite » et utilisée à des fins baptismales (, p.  et p. ). Il en va de même pour le pain, utilisé au quotidien comme un aliment, et sacra- lisé lorsqu’il symbolise le corps du Christ dans la religion chrétienne, lors de l’eucharistie.

Cette représentation différenciée que le sacré introduit vis-à-vis de l’espace-temps profane explique sans doute la tendance des institutions fermées, et plus largement des communautés (lesquelles fonctionnent comme des organisations closes en excluant ce qui est extracommunau- taire), créatrices d’hétérotopies et d’hétérochronies, à rebaptiser ce qui est relatif à l’espace-temps sacré. Comment expliquer, sinon, l’appellation Orient/Occident qui remplace les termes Est/Ouest, Midi/Septentrion au lieu de Sud/Nord, et Zénith/Nadir au lieu de Haut/Bas, en franc- maçonnerie ? Maurice Duval constate un « découpage symbolique » assez similaire sur le navire, lieu clos par excellence (dont l’ethnologue fait d’ailleurs remarquer que le bateau en bouteille, réalisé par les marins au cours de leur traversée, est une sorte de reproduction, voire de mise en abyme), que Michel Foucault désigne d’ailleurs comme « l’hétérotopie

par excellence » (Foucault, , p. ). Tout bâtiment flottant est effec-

tivement scindé par une « ligne de foi » délimitant tribord et bâbord... Et Maurice Duval note que cette « division imaginaire » procède en outre à

. « La bouteille reproduit la structure de l’enfermement (on remarque qu’elle est qua- siment toujours bouchée). Elle exprime la maîtrise idéalisée des éléments, tous contenus dans cette bouteille : le huis-clos et la mer canalisés dont on s’est rendu maître. » (Duval, , p. -)

. « Le bateau, le grand bateau du xixesiècle, est un morceau d’espace flottant, un lieu sans lieu, vivant par lui-même, fermé sur soi » et porteur d’une « grande réserve d’imagi- naire » (Foucault, , p. -).

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une valorisation de tribord et à une dévalorisation de bâbord, qui recouvre l’opposition entre les activités du pont, jugées nobles, et celles de la machine, où œuvrent les « chiffons gras » (la même répartition peut être notée dans l’armée de l’air entre un haut positivé, où évoluent les pilotes, et un bas dénigré, où œuvrent les « rampants » et les « graisseux »). Nous pourrions ainsi multiplier les exemples à propos de nombreux lieux clos.

Dès lors qu’il est investi d’une dimension symbolique, l’espace se trans- forme en lieu. Or, tout lieu « con-sacré » est pourvu de repères et ancré dans une histoire particulière, comme le souligne Marc Augé dans Non-

lieux (). Dans un article intitulé « De la topique à la figuration spatiale »,

Denis Bertrand () rejoint ce point de vue lorsqu’il met au jour les diffé- rents aspects d’une « phénoménologie du lieu ». Il recense quatre modali- tés d’être principales : le « lieu comme base d’existence », proche du basho tel que le décrivent les phénoménologues japonais de l’école de Kyoto ; le « lieu du corporel », celui où le corps humain se meut et s’oriente ; le « lieu comme topos langagier », qui trouve une expression privilégiée dans la rhétorique ; et enfin le « lieu comme espace symbolique » qui nous inté- resse plus particulièrement, lieu bachelardien par excellence, support des rêveries matérielles et producteur d’une véritable esthétique, lieu ponctué de signes, mais surtout porteur de valeurs et d’identité. Dans les institu- tions closes, la scission la plus manifeste intervient donc entre un intérieur positivé et un extérieur chargé négativement ou caractérisé par la neu- tralité, autrement dit entre un lieu considéré comme sacré, formant une sorte de bulle protectrice, et un espace indifférencié, considéré comme profane. Cette scission intérieur sacré / extérieur profane recoupe d’autres divisions, dont l’équation pourrait se traduire par interne = ordre, sens, pureté/externe = chaos, insignifiance, impureté (Balandier, , p. ). Ce partage dualiste du monde, consacrant une rupture plus ou moins radicale avec la société, est particulièrement prégnant dans les sectes (de Saussure, ) et autres groupes fanatiques marqués par la clôture. Insti- tution fermée par excellence, le Ku Klux Klan (dont l’étymologie — du grec « kuklos » signifiant « cercle » —, traduit bien la fermeture), par exemple, prétend défendre la pureté et la suprématie de la race blanche, contre l’impureté des autres races.

René Girard fait remarquer que les procédés de différenciation sont nécessaires à toute vie sociale, et même à toute pensée humaine, sous peine de voir s’installer la confusion, le désordre et la vio- lence. Les catégories logiques, ou encore les interdits sociaux (vol, viol, meurtre...), contraires à la stabilité des groupements humains, rentrent dans ce processus de différenciation. Mais ce processus, aux effets ordonnateurs, se trouve plus marqué encore dans les institutions et les communautés fermées, ne serait-ce qu’à travers l’accentuation

 Sociologie des sociétés fermées

du clivage intérieur/extérieur, microcosme/macrocosme, dimension intra-groupale/dimension extra-groupale. De la même manière, ce proces- sus est davantage accusé dans le domaine sacré, dont nous avons vu que les institutions fermées font un usage abondant. Désir de pureté et ferme- ture vont souvent de pair, comme l’a montré Vladimir Jankélévitch dans Le

Pur et l’Impur, la mixtion, l’ouverture et la relation à l’autre étant perçues

comme source d’entropie et d’impureté :

Autant l’aseptie l’emporte sur l’antiseptie en efficacité, autant la préven- tion de l’infection est préférable à la désinfection la plus énergique : car celui qui n’est même pas malade, a fortiori n’a pas besoin de gué- rir ; et l’idéal du dogmatisme puriste serait évidemment que les médi- cations et la purgation elles-mêmes devinssent inutiles. Comment nous garderons-nous sains et diaphanes ? En réduisant au minimum notre relativité, c’est-à-dire nos rapports avec l’altérité.

(Jankélévitch, , p. -) Et de conclure que « l’ingérence de l’autre est le principe de la souillure par excellence » (p. ). L’autre, c’est évidemment celui qui est en dehors de la communauté et de la sphère du sacré. D’une manière générale, les membres de la communauté, sortes d’alter ego, ne sont pas appréhendés comme des êtres menaçants. Le désir de pureté distillé par le désir de sacré, lui-même principe de séparation, renforce donc à son tour le désir de clôture, enfermant ainsi les membres de la communauté dans un cercle dont on ne saurait dire s’il est vicieux ou vertueux.

Il convient d’ajouter que si elle privilégie généralement des lieux aux proportions réduites (église, temple, village...), la sacralisation de l’espace peut être étendue à l’ensemble d’un territoire, et les membres d’une com- munauté peuvent être considérés à l’échelle d’une nation, en accord avec les thèses développées par Benedict Anderson sur le nationalisme comme « communauté politique imaginaire, et imaginée comme intrinsèquement limitée et souveraine » (, p. ). Tel est également le cas lorsqu’un parti politique d’extrême droite, ou un groupe comme celui des jeunes mili- tants du Front national, élaborent une idéologie différentialiste construite autour d’un système de constructions identitaires et de représentations symboliques faisant de l’Autre une menace, ou à tout le moins un élé- ment indésirable qu’il convient d’exclure. Sylvain Crépon () montre ainsi que le nationalisme a visée expansionniste de l’ère coloniale, fondé sur le présupposé de la supériorité de certaines races, a cédé la place à un mouvement de repli, recentré sur l’idée d’« appartenance culturelle », de préservation de la « spécificité » et d’intégrité des peuples. La clôture, à travers le vœu d’un durcissement des frontières nationales, y est deve- nue un concept fondamental. Empêcher l’autre de franchir ces frontières,

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frontières qui constituent des barrières tant symboliques qu’administra- tives, constitue l’un des objectifs affichés de ces membres militants. L’ima- ginaire national qui guide leurs propos et leurs actions repose largement sur la sacralité supposée du sol français, et sa cohorte de métaphores afférentes, d’inspiration barresienne et maurrassienne, du type enracine- ment/déracinement (les immigrés étant précisément des « déracinés », des êtres « en dehors de toute culture », comme le précise Sylvain Crépon). L’opposition traditionnelle entre purs et impurs se retrouve aussi dans les discours des jeunes frontistes, et ce même si elle est plus volontiers déclinée sur un plan culturel que sur un plan racial, comme ce pouvait être le cas auparavant. La problématique centrale de l’intégration ou de la non-intégration de cet Autre qu’est l’étranger, et qui est traduite en termes économiques mais également sécuritaires, exprime clairement les enjeux d’inclusion et d’exclusion qui prévalent au sein des groupes fron- tistes, lesquels fonctionnent à la façon d’institutions fermées mais ne sont bien souvent que des loupes grossissantes de la nation, ou du moins des

groupes caricaturaux, poussant à leur paroxysme des sentiments éprouvés par nombre de citoyens non-frontistes.

Enfin, il convient de remarquer que le sacré ne se cantonne pas à réaliser un clivage entre l’intérieur du groupe et son environnement extérieur. Il opère une autre forme de scission en interne, au niveau intra-groupal, ainsi que nous l’avons précédemment montré à propos de l’armée et de la franc-maçonnerie. Au sein de la communauté rassemblée, en effet, le sacré peut être source de différenciation. Il établit des limites sépara- trices entre les divers membres, et même entre les objets utilisés et la nourriture consommée dans un contexte sacral. Lorsqu’elles s’appliquent aux membres de la communauté, lesdites différenciations peuvent être de nature hiérarchique, générique ou sociale : chaman/autres membres de la société, hommes/femmes, enfant/adulte... Nous avons notamment relevé qu’une nette séparation entre les hommes et les femmes existe en franc-maçonnerie, à l’exception de quelques obédiences qui pratiquent la mixité, ainsi que dans l’armée. L’institution religieuse, qui sépare depuis plusieurs siècles les moines et les moniales (Zarri, , p. -), en est une autre illustration. Lorsqu’elles s’appliquent à des objets ou à de la nourri- ture, ces différenciations peuvent donner lieu à une répartition oppositive entre le pur et l’impur. Les restrictions de nourriture et tabous alimen- taires rentrent dans ce cadre-là (Douglas, ). Jeûne eucharistique, jeûne du vendredi saint et Carême dans la religion catholique ; ramadan, nourri- ture halâl (par opposition à harâm) dans les rites musulmans ; nourriture

. Pour cette raison même, dans notre conclusion, nous changerons d’échelle de gran- deur et nous demanderons si la nation elle-même ne peut pas être considérée, au regard

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