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CHAPITRE I : ÉTAT DES CONNAISSANCES

I. 1.4.2.2 Élimination/Récupération du Phosphore de la phase liquide

I.2 PROCÉDÉS MEMBRANAIRES : QUELQUES ÉLÉMENTS DE BASE

I.2.3 Séparation par OI

A l’inverse des membranes précédentes, les membranes d’osmose inverse (haute pression notamment) sont des membranes denses. Ces membranes n’offrent pas de porosité ouverte, ce qui empêche les transports convectifs (loi de Darcy) au travers de la membrane.Le transport est alors diffusif. Le composé, transporté sous l’action d’une différence de potentiel thermodynamique (qui se traduit par une différence de pression pour l’osmose inverse), doit d’abord entrer (se dissoudre) dans la matrice membranaire pour y être transporté sous l’action du potentiel imposé et se re-solubilise sur la face aval de la membrane. On note alors (Kiso et al., 2000 ; Bellona et Drewes, 2007 ; Yoon et al., 2007 ; Bellona et al., 2004, 2010) que la rétention des composés est fortement influencée par (i) les caractéristiques des solutés en terme de taille moléculaire (longueur et rayon) et valence ionique pour NF notamment, constante de dissociation acide (pKa), coefficient de diffusion (d), caractère hydrophile (Kow), et (ii) les propriétés de la membrane, seuils de coupure (NF), morphologie de surface (rugosité), charge de surface

(potentiel zêta), angle de contact, critères liés à la nature de la couche active. Fukutani et Ogawa, (1983a, 1983b) ; Sheu et Wiley, (1983) ; et Hong et al., (2006), Bellona et al., (2010), montrent ainsi respectivement que cette couche active a une influence directe sur le flux de perméation et la qualité de la rétention lors de séparation de composés ioniques en solutions salines.

Le flux spécifique de composés transportés est supposé proportionnel à la pression effective imposée pour la séparation :

J = A (

D

P –

sDP

) (I.11)

Avec A, coefficient de proportionnalité, DP pression transmembranaire appliquée (Pa), s taux de rétention des composés ciblés par la membrane et DP différence de pression osmotique de part et d’autre de la membrane, la valeur de DP peut être calculée avec la relation de Van’t Hoff :

(I.12)

Avec i qui correspond au nombre de composants ioniques dans la suspension, Ci laconcentration (g.m-3) et Mi la masse molaire (g.mol-1) de ces solutés, R la constante molaire des gaz parfaits (8,314 J.mol-1.K-1), et T température thermodynamique (K).

Cette relation met en avant le rôle de la concentration en solutés (le transfert est d’autant plus difficile que la concentration en composés ioniques en solution est importante), et de la masse molaire.

I.2.3.1 Evolution de la perméabilité en cours d’opération

L’opération de séparation recherchée va provoquer l’arrêt de certains composés par la membrane. Cette rétention va provoquer une accumulation de composés sur la surface membranaire (et ainsi augmenter localement leur concentration au voisinage de la membrane) mais aussi à l’intérieur des pores (Figure I.11). Ces accumulations de matière sur et dans la membrane vont induire une baisse plus ou moins significative de la perméabilité apparente de la membrane. Les processus liés à la baisse de perméabilité en cours d’opération sont souvent regroupés sous le terme générique de colmatage membranaire mais dont les différentes origines sont souvent identifiées comme suit :

· Accumulation de composés dont la taille est nettement plus importante que la taille des pores, en surface ou au voisinage immédiat de la membrane sous la forme d’un dépôt de particules ou de couche de polarisation de macromolécules.

· Blocage (progressif ou total) de pores par des composés dont la taille est proche de celle des pores.

· Accumulation de petites molécules solubles en surface et dans les pores par interactions physico-chimiques avec le matériau membranaire.

· Dans le cas de suspensions biologiques, le développement d’un biofilm adhérant à la surface membranaire peut aussi être une cause de colmatage dominant.

Figure I.11 : Différents processus de colmatage avec 1, la résistance membranaire ; 2, l’adsorption/scaling, voire bouchage de pores ; 3, le blocage de pores ; 4a, la formation de gâteau par formation d’un dépôt

(gel) ; 4b, d’une couche de polarisation (rétrodiffusion et/ou remise en suspension).

Les modules industriels de nanofiltration et d’osmose inverse étant essentiellement des modules spiralés (Annexe I.6), les solutions à traiter doivent être au préalable clarifiées. Les origines de colmatage sont alors essentiellement dues à la présence d’une couche de polarisation, à la précipitation de sels minéraux en surface membranaire, voire à la présence d’un biofilm en présence de germes et composés assimilables dans la solution à traiter.

Tous ces processus provoquent un accroissement de la résistance hydraulique du milieu qui, en cours d’opération, peut apparaître très supérieure (facteur 10 et plus) à la résistance initiale de la membrane R (Ognier et al., 2002 ; Lebègue et al., 2008 ; Waeger et al., 2010 ; Andrade et al.,

Force motrice de

2014). Ces différents processus ont été modélisés au travers d’outils conventionnels (couche de polarisation et loi de Fick, dépôt en surface, blocage de pores et colmatage progressif des pores par les modèles synthétisés par Hermia, 1982 (Annexe I.7)).

Leurs conséquences sur la chute de perméabilité en cours d’opération sont souvent représentées, pour les membranes poreuses, par l’introduction de résistances additionnelles à la résistance de la membrane dans la relation de Darcy :

(I.13)

En cours d’opération, l’opérateur devra alors mettre en place des actions pour limiter l’impact des mécanismes dominants du colmatage :

· Filtration tangentielle pour limiter Rdépot et Rpolarisation, · Rétro-lavage pour éliminer Rblocage pore et Rdépôt, · Lavage chimique pour éliminer Radsorption.

Il faut noter que l’accumulation de matière sur et dans la membrane modifie la sélectivité initiale de la membrane.

De la même façon, les conditions physiques et chimiques de régénération des membranes peuvent aussi modifier sa fonctionnalité et sa durée de vie.

I.2.3.2 Impact d’une filtration en mode tangentiel

Lorsque les suspensions à traiter sont très concentrées en composés à retenir, les processus de couche de polarisation et/ou dépôt en surface de membranes deviennent dominants et prépondérants dans la dynamique de colmatage.

En cours d’opération, des contraintes pariétales peuvent alors être pratiquées en surface membranaire pour déstructurer ces couches et minimiser le processus d’accumulation en amont de la membrane (Hoek et al., 2002). Ces contraintes peuvent provenir d’une circulation tangentielle de la suspension au voisinage de la surface fonctionnelle de la membrane, d’injection d’un fluide gazeux ou de la mise en mouvement des membranes (Da Silva-Deronzier, 1994 ;

Dans ce cas, les composés accumulés en surface sont soumis à deux familles de contraintes principales, celles liées au potentiel de transfert qui tendent à les plaquer sur la membrane, celles liées aux contraintes pariétales (tangentielles et turbulentes) qui les arrachent de la zone d’accumulation pour les renvoyer dans le flux de suspension circulant (Figure I.12).

Le rapport « contraintes de cisaillement/contraintes de pression » est alors un critère déterminant qui permet de définir deux régimes de filtration :

· Sub-critique (proportionnalité entre flux transféré et pression appliquée car peu de particules restent en surface membranaire), l’évolution de la résistance hydraulique est alors limitée par les processus non sensibles aux contraintes pariétales imposées en surface (blocage de pores, adsorption dans les pores, voire biofilm).

· Supra-critique (arrêt de la proportionnalité entre flux et pression en raison de la matière accumulée qui induit des résistances hydrauliques supplémentaires compensant l’augmentation de pression).

Les contraintes de cisaillement (Annexe I.8) sont dépendantes du régime hydraulique imposé (Re) au voisinage de la membrane qui peut être caractérisé dans le cas d’une circulation de liquide par le nombre de Reynolds par exemple tel que :

(I.14)

Avec r qui est la masse volumique de la suspension (kg.m-3), Uc la vitesse moyenne de circulation du fluide (m.s-1), Dh le diamètre hydraulique (m) et m la viscosité de la suspension (Pa.s). Les contraintes pariétales sont des fonctions croissantes de ce nombre de Reynolds qui augmente avec la vitesse de circulation tangentielle (dont la valeur impose aussi les dépenses énergétiques associées), et avec un diamètre hydraulique grand (donc de la configuration du module) mais diminue avec la viscosité de la suspension dépendante de la nature et de la concentration des composés en suspension/solution.

Figure I.12 : Influence d’un mode tangentiel de filtration (b) par rapport au mode frontal (a) (Aimar et al., 2010).

La condition critique séparant ces deux régimes sera ainsi fonction de la concentration en composés retenus dans la suspension initiale, plus elle est élevée, plus le régime supra-critique sera atteint pour de faible pression (à contraintes de cisaillement imposées).

I.2.3.3 Impact du facteur de concentration volumique (FCV)

Dans le cas d’effluents industriels concentrés, la volonté de traiter les effluents pour récupérer un flux d’eau de qualité réutilisable le plus important possible et minimiser ainsi le flux d’effluents ultimes concentrés, oblige à travailler sous facteur de concentration volumique (FCV) élevé, ce facteur étant défini en système ouvert ou fermé (Figure I.13) respectivement par :

(Système fermé), (Système ouvert) (I.15) Avec VA le volume initial d’effluent à traiter et VP le volume final d’eau traitée récupéré et VR le volume final de rétentat (circuit fermé). Et avec QA le débit volumique d’effluent à traiter, QP le débit volumique d’eau traitée récupéré et QR le débit volumique de rétentat (circuit ouvert).

Figure I.13 : Schéma opératoire d’une filtration tangentielle.

Le bilan matière se traduit par une relation liant les concentrations en composés dans les différents flux (effluent à traiter, perméat et rétentat, ce dernier correspondant à la solution concentrée finale extraite du système,) :

(I.16) Ou

(I.17) Avec CA, CP, CR les concentrations respectives dans l’effluent à traiter, le perméat et le rétentat. En supposant CP constant, soit une sélectivité de la membrane indépendante de la concentration en composés dans la solution à traiter (en fait CP augmente avec CR), il est facile de comprendre que CR augmente avec le FCV et que les grandeurs liées à cette concentration (viscosité, pression osmotique…) seront aussi augmentées avec des conséquences directes sur les performances du procédé en terme de sélectivité, dynamique d’évolution de la perméabilité, besoins énergétiques et fréquence et intensité de nettoyage notamment.

(« scaling ») sur les membranes deviennent très importants et peuvent être à l’origine d’un blocage de circulation dans les modules spiralés (Migliorini et Luzzo, 2004). Ce processus peut être minimisé par l’apport de composés « antiscaling » (polyphosphates par exemple) qui empêchent cette précipitation en enrobant les cations (notamment Ca2+ et Mg2+) pour empêcher leurs associations et précipitations avec les ions électro-négatifs de type phosphates, carbonates, et sulfates par exemple (Jaffer et al., 2002 ; Al-Rammah, 2000).

I.2.4 Exemples de performances et limitations de procédés membranaires pour le