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L’annotation n’est pas une fin en soi, mais elle vise à réaliser certains objectifs de l’annotateur. Plusieurs auteurs [Marshall 1998], [Veron 1997], [Huart 1996], [Kahan et al. 2002] et plus récemment les travaux de Mille en ([Mille 2001] et [Mille 2005]) ont essayé d’identifier les différents objectifs d’une annotation.

L’objectif de l’annotation représente sa sémantique. Cette sémantique est essentielle pour pouvoir réutiliser ultérieurement cette annotation. Nous trouvons dans la littérature plusieurs recherches visant à identifier et classifier les différents objectifs de l’annotateur de créer une annotation donnée.

Les objectifs selon [Marshall 1998]

Marshall a étudié les annotations faites par des étudiants américains. Le support de son étude est un ensemble de documents (support de cours) annotés par des étudiants universitaires. Elle a étudié leurs valeurs pour les personnes qui annotent et pour les autres lecteurs, leurs caractéristiques et leurs fonctions. A partir de ses observations, elle a fait apparaître les correspondances les plus communes:

Procédure pour signaler une attention future. Dans ce cas l’étudiant annote afin

d’attirer son attention ultérieurement sur un point particulier, ou pour prévoir une tâche qu’il devrait faire ultérieurement. Par exemple le fait qu’il devrait relire un paragraphe. L’étude des documents (de cours) annotés par les étudiants, donne l’impression que les étudiants sont entrain de produire leurs propres versions du texte qui reflètent les circonstances du cours.

Aide Mémoire et indication d’emplacement. Quand nous annotons des petits

extraits de texte (souvent en le surlignant, mais des fois en le soulignant ou en l’encerclant) c’est souvent pour se souvenir de ces extraits, car ils sont importants et doivent être mémorisés.

Résolution du problème (Problem-working). Il arrive que les étudiants préfèrent

approcher les problèmes dans leur contexte, plutôt que de risquer de les reporter, et d’avoir une discontinuité dans l’attention. Ainsi, souvent, dans les livres d’exercices, la personne note sa solution sur les marges à côté de l’exercice.

Interprétation. Les notes sur les marges, les interpolations dans les textes sont

considérées comme des annotations interprétatives. Marshall a observé trois types de ces annotations, le premier concerne les mots difficiles dont le lecteur essaye d’en donner la définition, c’est le cas aussi pour les mots de langues étrangères dont les lecteurs annotent les traductions. Le deuxième type concerne l’annotation des structures du texte, par exemple dans un document de théâtre, où le nom des pièces célèbres sera annoté. Enfin le troisième type (le plus commun) concerne l’interprétation du sens du texte lui même.

Trace visible de l’attention du lecteur. L’annotation peut être considérée comme

une trace de l’attention du lecteur, quand il travaille sur un texte difficile et dans une forme narrative. En d’autres termes, l’attention est plus facile quand le texte est plus simple. Ceci est la conclusion que tire Marshall, en observant la densité des annotations dans certains articles narratifs de philosophie, où page après page les lecteurs ont utilisé le surlignage et le soulignement, et cela pour mieux gérer la charge cognitive d’une sémantique complexe.

Réflexion fortuite des circonstances matérielles de la lecture. Ces annotations sont faites indépendamment du texte du document, et pour des circonstances externes, dues au fait que le lecteur est distrait par autres chose que le document. L’auteur cite en exemple une opération de calcul mathématique qu’elle a retrouvé dans un manuel de philosophie.

Les objectifs selon Virbel

Virbel (cité par [Veron 1997] et [Huart 1996]), dans le cadre du projet de réalisation d’un poste de lecture active pour la BNF (Bibliothèque Nationale de France), a identifier huit (8) objectifs pour l’annotation :

Classifier

o Hiérarchiser. C’est l’affectation d’une valeur numérique à un objet, afin de le

situer sur une échelle relativement à d’autres objets.

o Architecturer. C’est expliciter les composants de la structure logique du texte,

en déclarant par exemple qu’un passage est une section ou un chapitre…etc.

o Contextualiser. Il s'agit de déclarer un contexte à l'intérieur duquel l'objet

support a un certain sens qu'il n'a pas au-delà.

Compléter

o Reformuler. C'est donner une nouvelle représentation de l'objet support, par

exemple une suite numérique peut être reformulée par un graphe, une abréviation peut être étendue au mot en entier, etc.

o Commenter. C'est faire un commentaire sur l'objet support. Il peut s'agir par

exemple de critiques, de l'expression d'une idée associée.

o Documenter. C'est ajouter à l'objet support, un autre objet qui complète

celui-ci, par exemple une photo pour un passage.

Corréler. Il s'agit de lier deux entités entre elles. Il est souhaitable voire nécessaire,

de spécifier le lien qui lie ces objets.

Programmer. Il s'agit de déclarer que l'on prévoit une action, comme par exemple:

à traduire, à relire, à analyser, etc.

Les objectifs des annotations dans Annotea [Kahan et al. 2002]

Conseil. Une classe d’annotations représentant un conseil pour le lecteur.

Changement. Une classe d’annotations représentant une notice ou une

proposition de changement.

Commentaire. Une classe d’annotations représentant des commentaires

généraux.

Exemple. Une classe d’annotations représentant des exemples.

Explication. Des explications du contenu.

Question. Une classe d’annotations représentant des questions sur le contenu.

Voir-aussi. Une classe d’annotations représentant une référence à une autre

Les objectifs selon [Mille 2001]

Enfin, un travail plus récent dans notre équipe, celui de [Mille 2001], a permis d’identifier les objectifs d’annotations dans un contexte d’apprentissage. L’auteur a réalisé une expérience où la tâche du sujet consiste à annoter un document en vue d’un examen. Après analyse des résultats, l’auteur a identifié les objectifs suivants :

Comprendre le document. Les sujets annotent afin de comprendre le contenu du

document. Ils relèvent les notions incomprises ou mal comprises, des exemples. Cela afin de les traiter ultérieurement et de mieux les comprendre.

Retrouver des informations. Les étudiants annotent certaines définitions et mots

clés, afin de pouvoir les retrouver rapidement le jour de l’examen. Certains titrent ou résument des paragraphes pour pouvoir retrouver des idées sans avoir à lire la totalité du passage.

Les objectifs selon [Mille 2005]

Mille propose une ontologie plus exhaustive dans sa thèse. Cette ontologie concerne les objectifs de lecture active de l’apprenant. Pour la concevoir l’auteur s’est appuyé sur ses propres expériences et sur les auteurs cités précédemment.

1.Restructurer 1.1.Donner un titre 1.2.Hiérarchiser 1.3.Synthétiser 1.4.Reformuler

2.Ajouter une remarque personnelle 2.1.Critiquer

2.1.1.Positivement 2.1.2.Négativement 2.2.Exprimer une idée connexe 2.3.Développer

2.3.1.Compléter

2.3.2.Ajouter un exemple 2.3.3.Résoudre un problème

2.3.4.Expliquer textuellement/graphiquement 2.4.Faire référence à un autre document

3.Catégoriser

3.1.Objectivement

3.1.1.Par type prédéfini 3.1.2.Par similarité de forme 3.2.Subjectivement

3.2.1.Par valeur d'importance (du passage, pas de l’annotation) 3.2.2.Par similarité de sens

4.Créer une relation entre deux passages 5.Planifier une action

5.1.Approfondir 5.2.Réviser 5.2.1.Supprimer un passage 5.2.2.Insérer un passage 5.2.3.Reformuler un passage 5.2.4.Déplacer un passage 6.Soutenir l’attention

Synthèse par rapport aux objectifs

Nous retenons de cet état de l’art, l’importance de l’objectif de l’annotation car son identification permet de retrouver la sémantique de l’annotation, voulue par l’annotateur. Plusieurs auteurs ont étudié cet objectif et ont essayé d’identifié ses valeurs potentielles. Ces études ont abouti à des résultats différents car elles ont été faites dans des contextes différents, en particulier les études ont été menées avec des annotateurs différents (étudiants, lecteurs en bibliothèque, apprenants… cela confirme le résultat concernant l’activité de l’annotation (voir 2.4) qui affirme que la sémantique de l’annotation, dépend non seulement de la forme mais aussi du contexte.