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3 Présentation de la base de données des bassins versants

3.2 Sélection d’une base de bassins versants pour la modélisation pluie-débit

3.2.2 Sélection d’événements de crue

3.2.2.1 Algorithme de sélection automatique

Dans une optique d’application de nos recherches à la prévision de crues, nous nous sommes parti- culièrement intéressés aux événements de crue. Etant donné la grande diversité des réponses des bassins (Figure 13), la détermination du début et de la fin d’un évènement de crue est complexe et très subjective. Pour des raisons pratiques, et d’objectivité, nous avons choisi de sélectionner des événements de crue par une procédure automatique sur la chronique des débits observés à l’exutoire de chaque bassin de notre échantillon. L’algorithme suivant a été appliqué sur les 181 bassins versants :

1) Recherche du pic de crue : le plus fort débit observé à l’exutoire du bassin versant est repé- ré sur la période d’étude (1997-2006)

2) Début de l’événement : c’est le moment des premières précipitations ayant entraîné la montée de crue. On commence par calculer un débit seuil déterminé par la formule sui- vante :

EF = max IQK⁄ ; Q4 O+ 0.05 . PQK− QOQR Eq. 11

avec Q0 le seuil de débit définissant le début de la montée de crue, Qp l’amplitude du pic de

crue et Qm la valeur minimale du débit observé sur les 15 jours précédant la crue.

Le début de la montée de crue est défini par rapport à la valeur seuil définie ci-dessus, puis, le début de l’événement est défini par la première heure précédant le début de la montée de crue pour laquelle les précipitations sont nulles.

3) Fin de l’événement : c’est la fin de la décrue. A partir de la montée de crue dont la durée correspond au temps entre le début de l’événement et le pic de crue, on définit une fenêtre temporelle de décrue : elle est fixée à quatre fois le temps de la montée de crue et bornée à 15 jours maximum. Le débit minimum Qm après le pic de crue est repéré sur cette période,

puis, similairement à la définition du début de l’événement, on détermine le débit seuil Q0.

La fin de l’événement est alors définie lorsque le débit franchit le seuilfixé après le pic de crue.

4) Vérification de la cohérence de l’événement : on vérifie que le nombre de données lacu- naires sur la période de l’événement n’est pas supérieur à la limite autorisée. Sinon, l’événement n’est pas retenu. De plus, on vérifie que l’événement sélectionné n’est pas un fort débit pendant une montée de crue ou une décrue : si le pic de crue défini à la première étape n’est pas le débit maximal sur l’événement ou si la durée de l’événement n’est pas supérieure à deux pas de temps, alors l’événement n’est pas retenu.

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89 Cet algorithme permet de sélectionner automatiquement le même nombre d’événements pour chaque bassin. Les événements sélectionnés correspondent aux plus grosses crues observées sur la période de recherche (1997-2006). Ils n’ont pas forcément la même durée et les dynamiques lentes (crue de nappe) aussi bien que les dynamiques rapides (crues éclairs) sont sélectionnées. Au total, nous avons sélectionné 3620 événements de crue que nous avons visualisés afin de vérifier la vali- dité de la procédure de sélection automatique.

3.2.2.2 Indice de variabilité spatiale

Nous cherchons à caractériser la variabilité spatiale des précipitations des événements de crue sé- lectionnés. Pour cela, nous bénéficions de la haute résolution spatiale de la réanalyse des lames d’eau (1 x 1 km) au pas de temps horaire. Sur cette base, deux indices proposés par Smith et al. (2004a) pour décrire l’organisation générale des champs de précipitation et leur variabilité à l’échelle des bassins versants sont calculés pour chaque événement :

L’indice de localisation des précipitations quantifie la localisation de l’événement indépen- damment de la variabilité spatiale au sein du champ de précipitation. Il s’agit de décrire l’organisation spatiale des précipitations par rapport à la distribution des distances du ré- seau de drainage (Woods and Sivapalan 1999; Viglione et al. 2010b; Zoccatelli et al. 2011) telle que définie par Bell and Moore (2000). Sur chaque événement, le centre de précipita- tion Ipcp est calculé à chaque pas de temps en fonction du centre de masse du bassin Cbsn et

du centre de masse des précipitations Cpcp :

ST = ∑ U2 . V2 W 2X ∑ UW2X 2 Eq. 12 -Y- Z" = ∑ 2 Z". U2. V2 W 2X ∑W2X 2 Z". U2 Eq. 13 *-Y- Z" = -Y- Z" ST Eq. 14

avec Pi(t) le cumul horaire de précipitation au temps t sur le pixel i de la grille de la base de

données, Ai l’aire du pixel sur la grille de la base de données (1 km² pour les grilles de préci-

pitation), Li la longueur hydraulique définie pour chaque pixel du réseau de drainage (défini

à partir du MNT de résolution 100x100 m) et N le nombre de pixels compris dans le bassin. Si Ipcp<1 alors les plus fortes précipitations pour ce pas de temps sont essentiellement con-

centrées dans une région proche de l’exutoire du bassin. Les valeurs supérieures à 1 indi- quent que le centre des précipitations est loin de l’exutoire du bassin. Les valeurs proches de 1 impliquent que le centre des précipitations est proche du centre du bassin : les précipi- tations sont uniformes sur le bassin versant, ou elles sont concentrées autour du centre de

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masse du bassin et/ou dans des régions distinctes à la fois proches et éloignées de l’exutoire. Pour chaque événement, la somme pondérée des ratios des centres de précipita- tion sur la durée de l’événement permet de calculer un indice de localisation :

*[ = ∑ *\+X-Y- Z". +

+ \ +X

Eq. 15

avec IL l’indice de localisation, T la durée de l’événement, Ipcp(t) le ratio du centre de précipi-

tation et Pt la pluie moyennée spatialement sur la bassin versant au pas de temps t.

L’indice de variabilité spatiale évalue la variabilité spatiale au sein du champ de précipita- tion. L’écart type est calculé pour chaque pas de temps puis, de la même manière que pré- cédemment, un indice général de variabilité est estimé par événement :

*] = ∑ ^+ . + \ +X ∑\ + +X Eq. 16

avec Iσ l’indice de variabilité spatiale de l’événement, σt l’écart-type des pixels 1 x 1 km des

données de précipitations horaires et Pt la pluie moyennée spatialement sur le bassin ver-

sant au pas de temps t.

Les deux indices IL et Iσ permettent de décrire explicitement la variabilité spatiale des précipitations.

Notons que nous avons utilisé les moyennes temporelles des précipitations de chaque pas de temps pour calculer ces indices. Ceci nous permet de caractériser la variabilité spatiale des champs de précipitations par rapport à l’importance des intensités précipitantes. Ainsi, nous ciblons les les cas à la fois variables et d’intensité suffisamment importante pour influer sur la dynamique du bas- sin puisque les événements de faible intensité sont généralement filtrés par le bassin.

3.2.2.3 Description des événements de crue sélectionnés

La Figure 16 présente la distribution des caractéristiques des 3620 événements de crue sélection- nés (20 événements par bassin) sur la période d’étude (1997-2006), leur saisonnalité et leur réparti- tion géographique. Cet échantillon d’événements présente une grande variété de crues avec une bonne diversité des caractéristiques des champs de précipitation :

• Les événements de crue peuvent avoir des durées très différentes (8 heures pour les crues les plus rapides et 702 heures pour les crues les plus lentes) avec une durée moyenne de 180 heures (1 semaine) (Figure 16a). Les événements les plus longs (d’environ 700 heures) correspondent à des événements d’hiver (Figure 16b) et sont observés sur les bassins de nappe du nord de la France (la Canche, l’Epte, l’Essonne …) et du bassin aquitain (l’Eyre et la Petite Leyre). A l’opposé, les crues les plus rapides sont observées en été jusqu’au début de l’automne (Figure 16b) et se concentrent autour du bassin méditerranéen (Figure 16c).

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• Les pics de crue moyens sont de 0.77 mm/h (Figure 16a). Les plus faibles amplitudes (infé- rieures à 0.03 mm) sont observées sur les bassins de nappe de l’Iton (1029 km² à Norman- ville) et de l’Essonne (587 km² à Boulancourt). La plus forte amplitude (36.7 mm) est obser- vée sur le plus petit bassin de notre échantillon : un débit de pointe de 167 m3/s a été mesu- ré à l’exutoire de la Massane à Argelès-sur-Mer (16 km²) le 12 Novembre 1999 en réponse à de fortes intensités de pluie atteignant jusqu’à 60 mm/h. Notons cependant qu’il s’agit d’un événement extrême puisque le 99ème quantile des amplitudes du pic est de 6 mm/h et seu- lement neuf crues ont des amplitudes du pic supérieures à 10 mm/h : elles sont observés sur les bassins cévenols de l’Ardèche, la Mimente et le Gardon de Mialet.

• En termes de débit absolu, les plus fortes crues (supérieures à 1000 m3/s) sont toutes ob- servées sur le bassin vosgien de la Moselle (6834 km² à Custines avec un pic maximal de 1840 m3/s observé en Octobre 2006) et les bassins cévenols de l’Hérault (1430 km² à Gignac avec un pic maximal de 1715 m3/s en Décembre 1997) et l’Ardèche (625 km² à Vogüé avec un pic maximal de 1362 m3/s en Décembre 1997).

• Les précipitations cumulées sur la durée de l’événement et moyennées sur le bassin versant varient entre 1 mm et 500 mm (Figure 16a) pour une valeur moyenne de 72 mm sur l’échantillon. Parmi les 3620 crues sélectionnées, seulement 32 événements ont de très forts cumuls de précipitations supérieurs à 300 mm, ils ont tous une durée inférieure à 138 heures (presque 6 jours) et ils sont observés autour de la Méditerranée sur les bassins de l’Ardèche, les Gardons, l’Hérault, la Mimente et l’Orbiel (Figure 16c). Le record de 500 mm (en 94 heures) a été mesuré sur l’Ardèche à Meyras (99 km²) et a engendré une crue dont le pic a atteint 310 m3/s le 19 Décembre 1997.

• En ce qui concerne la variabilité spatiale des champs de précipitation, l’indice de localisation

IL varie entre 0.65 et 1.23 (avec une valeur moyenne de 0.99) et l’indice de variabilité spa-

tiale Iσ varie entre 0.07 et 18.20 (avec une valeur moyenne de 0.98) (Figure 16b). Ces valeurs

sont du même ordre de grandeur que celles obtenues sur les trois bassins de l’Oklahoma et de l’Illinois étudiés par Smith et al. (2004a). Parmi les 3620 événements de crue sélectionnés sur nos 181 bassins versants, les événements orageux convectifs (qui présentent une forte hétérogénéité spatiale) sont moins fréquents que les événements stratiformes relativement uniformes spatialement (Figure 16b). Cependant, il est intéressant de remarquer que les champs de précipitation à forte variabilité spatiale sont généralement observés entre mai et octobre (Figure 16b). Ils entraînent des crues rapides de forte amplitude et sont essentiel- lement localisés autour de la méditerranéen et au nord des Vosges (Figure 16c).

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Figure 16 : (a) Distribution des caractéristiques des 3620 événements de crue sélectionnés; (b) distribution saison- nière ; (c) répartition spatiale des caractéristiques moyennées sur les 20 événements de chaque bassin

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