I.1 Généralités
I.1.3 Rotation Faraday
La rotation Faraday θF est décrite par la rotation du plan de polarisation de la lu-mière initialement rectiligne lors de sa propagation dans un milieu soumis à un champ
magnétique parallèle à la direction de propagation de la lumière (−→H parallèle à−→k) où −→k est le vecteur d'onde de norme k = 2π/λ .
L'origine physique de la rotation Faraday vient de l'interaction entre un électron en mouvement sur son orbite au sein d'un atome d'un matériau magnéto-optique quelconque soumis à un champ magnétique statique −→H = H−→u
z et une onde électromagnétique (la lumière) qui s'y propage (−→E =−→
E0exp(wt − kz)).
En eet, la résolution de l'équation du mouvement de l'électron, en tenant compte de toutes les interactions, montre que la permittivité diélectrique pour un matériau soumis à un champ magnétique longitudinal (oz) s'écrit [3] :
ε = ε0(1 + χ) = ε1 −iε2 iε2 ε1
!
(oxy)
(I.1) Dans cette expression, les termes hors diagonaux sont proportionnels au champ ma-gnétique appliqué et l'indice n = √ε1.
Ainsi, la résolution des équations de Maxwell, dans un matériau possédant la per-mittivité représentée par l'expression I.1, montre que seuls deux types d'onde peuvent se propager sans altération :
les vibrations circulaires droites (vcd) caractérisées par un indice de propagation νd=√
ε1− ε2 et la relation Edy = −iEdx.
les vibrations circulaires gauches (vcg) caractérisées par un indice de propagation νg =√
ε1+ ε2 et la relation Egy = −iEgx.
Ces polarisations circulaires droite et gauche constituent les états propres de propaga-tion. L'application d'un champ magnétique au matériau a ainsi créé une symétrie circulaire qui permet la propagation d'onde électromagnétique ayant une polarisation circulaire sans altération.
La projection sur les états propres de propagation d'une onde polarisée linéairement correspond à deux états de polarisation circulaire droit et gauche d'égale amplitude (voir gure I.4). Lorsque cette polarisation linéaire arrive sur le matériau, les deux polarisations circulaires la composant se propagent à des vitesses diérentes. Au bout d'une longueur l, elles sont déphasées l'une par rapport à l'autre de :
Φ = 2πlRe(νg− νd)
λ (I.2)
En sortie du matériau, les deux ondes se recombinent pour donner une vibration polarisée rectilignement ayant tournée d'un angle ΘF par rapport à la direction de l'onde incidente avec [21] :
I.1. Généralités 9 l QF Ei Ed Eg Ed Eg Et H
Fig. I.4 Évolution de l'état de polarisation d'une onde rectiligne au cours de la traversée d'un matériau soumis à un champ magnétique.
ΘF = Φ 2 = πlRe(√ ε1+ ε2−√ε1− ε2) λ ' πlRe(ε2) λ√ ε1 = πlRe(ε2) λn (I.3)
Cet angle de rotation, appelé rotation Faraday est directement proportionnel au terme hors diagonal ε2. Dans le cas simple d'un électron élastiquement lié, elle est proportionnel au champ magnétique appliqué [3].
Il est souvent plus utile de noter cette rotation en terme de rotation spécique par unité de longueur : θF = ΘF/l.
I.1.3.1 Non réciprocité
L'orientation du champ magnétique par rapport à la direction de la propagation de l'onde lumineuse est importante. Pour la mettre en évidence, nous supposons que le champ magnétique est orienté dans le sens opposé soit :−→H = −H−→u
z. En reprenant le cheminement précédent, on peut montrer que la rotation Faraday change de signe et prend la valeur :
ΘF = −πlRe(ε2) λ√
ε1 (I.4)
Ainsi, une onde rectiligne faisant un aller retour dans le matériau subit une rotation de polarisation égale à 2ΘF et ne retrouve donc pas son état initial. Cette évolution de l'onde lumineuse, présentée sur la gure I.5, est une illustration de l'eet non réciproque à la base du fonctionnement de l'isolateur optique en espace libre [15].
Un tel isolateur optique est constitué de deux polariseurs placés respectivement à l'entrée et en sortie d'un tronçon magnéto-optique fournissant une rotation Faraday de 45 ◦. Son principe de fonctionnement est illustré sur la gure I.6.
Miroir Matériau à effet Faraday QF H 2QF
Fig. I.5 Évolution de l'état de polarisation d'une onde rectiligne lors d'un aller-retour au sein d'un matériau soumis à un champ magnétique.
Le polariseur du sortie orienté, à 45◦ par rapport à celui de l'entrée, permet le passage de la lumière qui a subit une rotation de 45 ◦. Dans le sens de retour, la rotation de 45 ◦
se fait dans le sens opposé et la direction de polarisation de la lumière se retrouve inclinée de 90 ◦ par rapport au polariseur d'entrée. Elle est donc bloquée.
Au travers de cet exemple introductif, nous avons mis en évidence que l'application d'un champ magnétique à un matériau permet de créer un couplage entre les composantes transverses d'un champ électromagnétique s'y propageant. Ce phénomène est à la base des eets non réciproques. Dans le tenseur permittivité, cette activité magnéto-optique se retrouve sous la forme de termes hors diagonaux.
Polariseur Rotateur Faraday 45° 90° Polariseur à 45° 45° Sens passant Sens bloquant Signal transmis Signal réfléchi H
I.1. Généralités 11 I.1.3.2 Cas de matériaux ferro ou ferri-magnétique
Nous avons illustré précédemment le modèle d'un électron élastiquement lié pour mon-trer l'origine physique de la rotation Faraday. Dans ce cas simple, la permittivité est don-née par la matrice I.1 et la rotation Faraday est proportionnelle au champ magnétique appliqué.
Dans le cas général des matériaux ferro ou ferrimagnétiques qui s'aimantent très for-tement sous l'eet d'un champ magnétique extérieur tels que la ferrite de Cobalt ou la Maghémite, le tenseur permittivité prend la forme suivante [22] :
ε = ε1 −iε2 0 iε2 ε1 0 0 0 ε1 oxyz (I.5) où ε2 est souvent noté εmo et proportionnel à l'aimantation régnant au sein du maté-riau : εmo = γM. La rotation Faraday spécique s'écrit :
θF = (πRe(εmo)/(nλ) (I.6)
Avec n et λ respectivement l'indice du milieu et la longueur d'onde de travail.
Ce tenseur est très courant pour étudier les eets magnéto-optiques. Nous l'utiliserons au paragraphe I.2.2 pour détailler la conversion de mode TE-TM.
I.1.3.3 Cas de matériaux diamagnétiques
Pour un matériau diamagnétique les éléments non diagonaux du tenseur permittivité I.5, ε2 = εmo, sont proportionnels à l'amplitude du champ magnétique appliqué H. La rotation Faraday est ainsi proportionnelle à H et à la longueur du matériau traversé de sorte que l'on a :
ΘF = V Z −→
H .d−→
l (I.7)
avec V est la constante de verdet spécique exprimé en ◦/cm.A.m−1.
Dans cette partie, le principe de fonctionnement des composants à eet magnéto-optique a été présenté en prenant l'exemple de l'isolateur magnéto-optique et du capteur de courant. La rotation Faraday, à la base de ces composants, ainsi que son origine physique ont également été détaillées. Pour une meilleure situation de notre étude, la partie suivante est consacrée à l'étude des guides d'onde magnéto-optiques.