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Mercredi 23 mai 2018

M. Robert del Picchia. – Ce rapport devrait être suivi par une deuxième mission

M. Christian Cambon, président. – Nous allons déjà faire rayonner celui-ci.

M. Michel Boutant. – « Je t’aime, moi non plus », disiez-vous. Je suis allé en 2009 à Djibouti, avec notre collègue Dulait, et les relations étaient alors empoisonnées par l’affaire Borel, du nom de ce magistrat français retrouvé mort au fond d’un ravin. Le dossier gêne-t-il toujours la relation bilatérale ?

Mme Marie-Françoise Perol-Dumont. – Le pilier socio-éducatif est fondamental. Les relations entre le ministère de l’éducation nationale et Djibouti étaient d’ailleurs très importantes. Où en sont-elles ? Vous avez parlé de la vétusté des locaux, mais pas du contenu de l’enseignement. Pouvez-vous nous donner des précisions ?

M. Ladislas Poniatowski. – Merci pour ce passionnant rapport. Trois pays sont incontournables en Afrique : la République Démocratique du Congo, le Nigéria et l’Éthiopie.

Djibouti est le port de l’Éthiopie. Face à la Chine, nous ne sommes plus l’acteur principal, mais il faut rester, bien sûr, si la France veut rester la France ! Et où en est la lutte contre la piraterie ?

M. Philippe Paul, rapporteur. – Il y a trois semaines, un avion américain se posait à Djibouti, après que son pilote a été ébloui par un laser vert peut-être opéré depuis la base chinoise – les Chinois le démentent. Cet incident montre la tension qui s’accumule avec la nouvelle stratégie chinoise.

Ce que les Djiboutiens attendent, c’est que les entreprises françaises recommencent à investir. Ils se méfient désormais des financements chinois. Mais nos acteurs économiques sont arrêtés par l’absence de garanties et certains problèmes de corruption. Les Djiboutiens souhaitent aussi acquérir du matériel militaire français. Une mission militaire récente a souligné l’importance de leurs besoins, mais le financement dont ils disposent, en provenance d’Arabie Saoudite, se limiterait pour l’instant à 50 millions d’euros. L’aide saoudienne pourrait permettre notamment d’acheter des vedettes rapides pour protéger les côtes djiboutiennes.

Nous avons peu évoqué l’Europe pendant notre mission, l’Union européenne s’investit dans la lutte contre l’islamisme en Somalie même si nous avons pu échanger brièvement avec le représentant de l’Union à l’ambassade de France. L’enseignement sur place est de qualité, mais j’ai senti le corps enseignant quelque peu tendu face aux difficultés matérielles.

M. Hugues Saury, rapporteur. – L’un des chantiers européens en cours est celui de l’usine de dessalement : l’Union européenne a donné 67,5 millions d’euros, contre 5,5 millions d’euros apporté par le Gouvernement. Quant à la solidarité régionale : chaque pays a des problématiques spécifiques. L’Érythrée n’a de relations ni avec l’Éthiopie, ni avec Djibouti. Partout, les ethnies sont multiples et en rivalité. À l’école française, l’enseignement est de qualité, mais les locaux posent problème. De plus, le conseil d’école est dirigé par les parents djiboutiens, qui n’ont pas forcément les mêmes conceptions et objectifs que le corps enseignant français.

M. Gilbert-Luc Devinaz, rapporteur. – Les fils de soie de la stratégie chinoise ne sont ni plus ni moins que des fils d’araignée – et notre propre consommation donne les moyens à la Chine de tendre sa toile. Oui, la région n’est pas sûre, mais quel point du monde l’est ? Voyez ce qui se passe chez nous… L’armée française, contrairement aux Américains et aux Chinois, ne reste pas dans ses casernes, mais se mélange à la population. La communauté française aime ce pays, mais pourrait être plus soudée. Sur le plan militaire, Djibouti est un porte-avions à moindre coût ! Je n’ai pas eu le sentiment qu’on cherchait à nous exclure : les Djiboutiens cherchent à desserrer l’étau chinois en se rapprochant de l’Éthiopie, mais sans exclure la France. L’affaire Borel n’a pas été évoquée.

M. Christian Cambon, président. – Merci. Ce rapport, qui fait honneur à notre commission, doit être suivi d’effet.

Nomination d’un rapporteur

La commission nomme rapporteur :

M. Bernard Fournier sur le projet de loi n° 360 (2017-2018) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République d'Ouzbékistan relatif aux services aériens, de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du

Kazakhstan relatif aux services aériens et de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Côte d'Ivoire relatif aux services aériens.

La séance est close à 12 h 15.

COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES Mercredi 23 mai 2018

- Présidence de M. Alain Milon, président - La réunion est ouverte à 9 heures.

Projet de loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel - Audition de M. Bertrand Martinot, directeur général adjoint des services de la région

Ile-de-France chargé du développement économique, de l'emploi et de la formation et de Mme Anne-Valérie Aujames et M. Alain Bao, représentants de

la Fédération nationale des associations régionales de directeurs de centres de formation d’apprentis (Fnadir)

M. Alain Milon, président. – Mes chers collègues, nous poursuivons ce matin nos travaux sur le projet de loi « pour la liberté de choisir son avenir professionnel », déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale le 27 avril dernier. Nous nous intéressons ce matin au volet « apprentissage » de ce texte et nous accueillons à ce titre M. Bertrand Martinot, directeur général adjoint des services de la région Ile-de-France chargé du développement économique, de l'emploi et de la formation ainsi que deux représentants de la Fédération nationale des associations régionales de directeurs de centres de formation d’apprentis (Fnadir), Mme Anne-Valérie Aujames, secrétaire national, directeur général du Pôle de formation Pasteur et M. Alain Bao, membre du conseil d'administration, directeur du CFA de la faculté des métiers de l'Essonne. Je demanderai à nos invités de nous présenter les enjeux de cette réforme, ainsi que leur point de vue sur ses orientations, les difficultés qu’ils identifient et les conditions nécessaires à sa réussite. Vous avez la parole pour un premier temps d’exposé, avant que je ne la donne à nos rapporteurs, puis aux commissaires.

M. Bertrand Martinot, directeur général adjoint des services de la région Ile-de-France chargé du développement économique, de l'emploi et de la formation. – Le Gouvernement a saisi l’importance stratégique de la formation professionnelle et de l’apprentissage. Outre le projet de loi qui nous occupe ce matin, le programme d’investissement dans les compétences (PIC) me paraît très correctement ciblé et cherche à répondre aux besoins du marché du travail.

Si le Gouvernement tient un discours en pointe sur l’apprentissage attendu par les régions, les chefs d’entreprise et les familles, son projet de loi présente des difficultés majeures. L’apprentissage est réformé en France en moyenne tous les quatre ans, tandis qu’en Allemagne, son dispositif demeure pérenne depuis 1969. L’assouplissement des modes de rupture et de l’amplitude horaire du contrat d’apprentissage fait l’objet d’un consensus parmi les représentants des entreprises.

Le problème de ce projet de loi réside avant tout dans les mécanismes de financement de l’apprentissage, qui sont radicalement modifiés. Cependant, cette démarche ne s’appuie sur aucune expertise préalable. Le seul document qui mentionne les modes de financement de l’apprentissage émane du Medef et a été publié en janvier 2017, soit quelques mois avant les élections présidentielles. Seules trois lignes de l’étude d’impact annexée au projet de loi sont consacrées à la justification de la suppression de la compétence régionale en matière d’apprentissage. Je les cite : « À cela [l’absence de personnalité juridique des CFA],

s’ajoute un processus de création d’un CFA considéré de façon quasi-unanime comme lourd et non réactif, qui s’avère être un frein au développement de l’apprentissage en empêchant de répondre rapidement à la demande des entreprises. »

Un tel constat n’est étayé par aucune donnée ; nous ne disposons d’aucun rapport parlementaire, de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) ou de la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares) sur cette question. En région Ile-de-France, qui représente 20 % de l’apprentissage en France, je n’ai pas entendu ce genre de critiques. De façon quasi-unanime, comme l’aurait dit un humoriste célèbre,

« on s’autorise à penser dans les milieux autorisés » que les CFA ne fonctionnent pas ! Aucune parmi les 400 branches ou les 1 000 fédérations professionnelles n’a souscrit à un tel constat ! Aucun chiffrage n’est également donné sur l’impact financier de cette réforme sur les 900 CFA. A masse financière constante, cette réforme générera nécessairement des gagnants et des perdants.

Retirer la compétence de l’apprentissage aux régions pour les transférer aux branches professionnelles et à leurs organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA) est le contraire de la démarche suivie par le Gouvernement en matière de formation professionnelle, qui vise à retirer à ces organismes une partie de leur mainmise sur un secteur suradministré en France. A l’inverse, le Gouvernement opère un mouvement historique inouï depuis 1919, en transférant aux quelque 400 branches et 400 commissions paritaires d’emploi et de formation la compétence pour fixer, au niveau national, les taux de prise en charge des contrats d’apprentissage. Les rapports de force entre organisations patronales et syndicales au sein des branches vont donc prévaloir sur la rationalité économique pour fixer ces taux. Le système, à l’encontre des annonces du Gouvernement, devrait être encore plus administré qu’aujourd’hui !

Une telle démarche va induire une augmentation des frais de gestion, via la création des observatoires de branches destinés à combler le manque de compétence des OPCA. Elle va consommer la rupture avec l’enseignement professionnel, dont la réforme aurait dû être conduite en même temps que celle de l’apprentissage. Alors que l’Allemagne n’a pas de lycée professionnel, la voie scolaire cannibalise, en France, l’apprentissage ; ce point n’est même pas abordé par la loi ! Plutôt que d’unir au sein de la région les CFA et les lycées professionnels, on va plutôt les éloigner les uns des autres. Ainsi, les CFA vont dériver dans le champ de la voie professionnelle, tandis que les lycées professionnels resteront dans le giron de l’Éducation nationale. Une telle évolution bat ainsi en brèche les efforts des régions chargées d’élaborer la carte de la formation professionnelle initiale. Les branches n’ont, sauf exception, aucune vision régionale et la réduction de leur nombre peine à se concrétiser. Seules les régions sont à même d’avoir cette vision territoriale.

En outre, la démarche du projet de loi me semble relever d’un contresens historique. En effet, l’évolution générale de l’économie française ne repose guère sur une logique de branches, mais plutôt sur la tertiarisation des activités et la transversalité des formations. Deux tiers des apprentis en Ile-de-France se trouvent dans des établissements supérieurs où les formations dispensées ne relèvent pas des branches, à l’instar du marketing, des fonctions RH ou support. Or, la réforme entraînera une disparité dans la prise en charge du contrat d’apprentissage en fonction de la branche d’activités. C’est là un contresens total ! L’économie nécessite des compétences transversales ! La plupart des CFA ressortissant de plusieurs branches, voire de chambres consulaires, ont pour fonction d’unifier la gouvernance des petites branches.

Le traitement des inégalités entre CFA et entre régions pose également problème.

Ainsi, le CFA Ferrandi propose un baccalauréat professionnel cuisine estimé à 12 000 euros par an, contre 8 000 euros en moyenne dans le reste du pays. Qu’adviendra-t-il lorsque la branche hôtellerie restauration fixera le coût de ce diplôme ? Que deviendra le CFA Ferrandi qui est plus cher que la moyenne, en raison de sa localisation et du coût de ses professeurs de réputation internationale ? Un contrat d’apprentissage en Ile-de-France coûte en moyenne 1 000 euros de plus que dans la moyenne nationale, en raison notamment du coût des loyers et du foncier. Que faire lorsque les opérateurs de compétences prendront en charge les contrats d’apprentissage à un coût moins élevé, de l’ordre de 1 000 euros que leur coût réel ?

Tous les contrats seront-ils financés ? La ministre nous a assuré qu’aucune entreprise ne se verrait opposer par l’opérateur des compétences une absence de financement.

Cependant, le projet de loi ne comporte aucun mécanisme assurant le financement à moyen terme de tous les contrats, notamment si l’on assiste à une forte augmentation du nombre d’apprentis. Comment l’augmentation du nombre d’apprentis sera-t-elle financée ? Les branches vont ainsi être incitées à fixer les taux de prise en charge les plus élevés possibles pour protéger leur appareil de formation, ce qui ne manquera pas d’amorcer une spirale inflationniste. Les recommandations de France Compétences ne seront pas coercitives et, par conséquent, faute d’un mécanisme automatique de financement aujourd’hui assuré par les régions, l’inflation des taux de prise en charge ne sera pas jugulée. Actuellement, l’ensemble des contrats est financé grâce au soutien des régions.

Selon la branche à laquelle l’apprenti appartient, le taux de prise en charge pour une même formation pourra être différent. Cette situation est absurde ! Les apprentis pourraient alors être orientés par les CFA vers les employeurs dont les branches sont les plus rémunératrices.

Les régions disposeront de ressources résiduelles pour assurer des compétences désormais non obligatoires, qu’il s’agisse du fonctionnement des CFA ou de subventions à l’investissement. Les régions, dans leur majorité, œuvrent désormais en faveur du développement de l’apprentissage. La subvention d’organismes privés, sur lesquels la région n’exercerait aucune prise, n’est par définition pas garantie. La région Ile-de-France consacre 30 millions d’euros annuellement à l’investissement des CFA au service d’une stratégie régionale matérialisée par des contrats de performance. Pourquoi une collectivité publique financerait-elle les activités d’organismes privés sur lesquels elle n’exerce aucun contrôle ? Quelle sera son incitation à agir et à investir ?

En outre, la question du contrôle se pose, l’apprentissage étant financé aujourd’hui sur fonds publics. Demain, la cotisation unique de formation professionnelle et l’apprentissage sera également une imposition de toute nature. Or, toute utilisation de l’argent public doit être contrôlée. Aujourd’hui, chaque CFA signe une convention avec la région qui comprend des éléments de reporting financier et de contrôle qui permettent de s’assurer de la bonne utilisation des deniers publics. L’apprentissage est alimenté à 100 % par les fonds publics, dont l’utilisation serait contrôlée par les services régionaux de contrôle. Ainsi, 150 agents devraient contrôler les quelques 75 000 organismes de formation que compte notre pays, ainsi que 20 organismes collecteurs de la taxe d’apprentissage (Octa), 13 Fonds de gestion des congés individuels de formation (Fongecif) et désormais près de 900 CFA ! Manifestement, la loi ne sera pas effective et des dérives sont prévisibles. Plusieurs milliards d’euros d’argent public ne seront pas soumis au contrôle de la puissance publique ! Que deviendront les excédents des CFA ? Ceux-ci sont actuellement réinvestis dans les plateaux techniques, dans le cadre de leur convention ou ils sont reversés à la région. Le financement

est ainsi bouclé sur lui-même et demeure dans la sphère publique. Avec cette nouvelle loi, que va désormais faire un CFA avec ses gains sur les contrats ? Va-t-il rémunérer ses actionnaires ? Je ne connais pas de système en France où il est possible de faire des profits avec de l’argent public ! Le projet de loi présenté ne mentionne aucun mécanisme assurant le fléchage de ces excédents vers l’apprentissage.

Enfin, aucune étude d’impact n’est consacrée à la transition vers ces nouveaux taux de prise en charge qui entreront en vigueur le 1er janvier 2020 ni à la problématique de trésorerie annuelle qu’ils entraîneront. Aucune simulation financière n’a été conduite sur cette réforme de l’apprentissage qui représente pourtant une masse financière de 2 milliards d’euros !

Mme Valérie Aujames, représentante de la Fédération nationale des associations régionales des directeurs de centres de formations d’apprentis. - La Fnadir regroupe 450 CFA de tous réseaux, qu’ils soient publics, privés, émanant des branches ou de l’Éducation nationale. L’apprentissage est très sensible aux turbulences. Toute annonce de modification risque d’induire une baisse du nombre des contrats, faute de visibilité pour les chefs d’entreprises. Attention donc au tuilage : il va falloir rassurer les entreprises en confortant la transition vers le nouveau système !

M. Alain Bao, membre du conseil d'administration et directeur du CFA de la Faculté des Métiers de l'Essonne. – Ce projet de loi remet en cause le pilotage et le financement de l’apprentissage par les régions. Si l’on veut enfin développer l’apprentissage, il nous faut plus de jeunes postulants et d’entreprises d’accueil. Ce point crucial est occulté par le projet de loi. Le financement de l’apprentissage inquiète les directeurs de CFA, puisque la plupart des centres se trouvent déjà en situation précaire. Le dispositif actuel permet de réguler le système et de soutenir les CFA confrontés à une baisse de leurs effectifs. L’effet amortisseur des régions est appelé à disparaître. La conjoncture économique favorable entraîne certes le développement de l’apprentissage. Mais qu’adviendra-t-il en cas de retournement de la croissance et en l’absence de mécanisme de stabilisation ? Le projet de loi, en conditionnant le financement des centres au nombre d’apprentis accueillis, les surexpose aux aléas de la conjoncture et risque d’entraîner une défaillance. En outre, certains métiers présentent de faibles effectifs, en raison d’un déficit d’attractivité. Pourtant, l’industrie a besoin de soudeurs. Si cette formation n’est pas rentable pour les CFA, les effectifs de cette filière vont diminuer. Imposer une logique de rentabilité sans aucun effet amortisseur aura ainsi des répercussions sur notre industrie.

M. Bertrand Martinot. – Le BTP a subi une crise terrible en France de 2008 à 2015 : il a en effet perdu 20 % de ses effectifs en Ile-de-France. Aucun CFA du BTP n’aurait survécu sans le soutien massif de la région !

Mme Anne-Valérie Aujames. – La définition du coût de prise en charge devra prendre en compte l’intégralité des missions assumées par les CFA. Les jeunes, pour la plupart en échec scolaire, viennent dans nos CFA où ils sont accompagnés de manière individuelle sur le marché du travail. Un tel accompagnement a un coût pour le CFA. La réforme prévoit une certification spécifique impliquant la délivrance d’un label qualité qui doit couvrir l’intégralité de ses missions. Cette certification doit être nationale et non pas conduire à une diversité de labels analogue à celle de la formation professionnelle. Certains CFA recrutent au niveau national. Cette certification devrait également concerner les unités de formation par apprentissage des lycées professionnels, pas seulement les CFA. Or, d’après le projet de loi, les établissements de l’Éducation nationale et de l’enseignement supérieur

échapperont à cette certification. Les coûts pourront être différents au sein d’une même section. Certains jeunes dans une même section seront pris en charge de manière distincte. Il sera alors tentant pour les directeurs de CFA d’orienter les apprentis vers les filières les plus rémunératrices pour les centres eux-mêmes. Le projet de loi n’aborde pas la problématique des apprentis dans le secteur public. Or, les régions avaient tendance à pousser le développement des apprentis dans ce secteur, avec une prise en charge exclusivement régionale. N’est-ce pas occulter une part importante de l’apprentissage dans notre pays ? Quand le financement au contrat va-t-il s’enclencher ? Sera-t-il rattaché au jeune ou à l’entreprise ? Le CFA a pour rôle de retrouver une nouvelle entreprise au jeune dont le contrat initial a été rompu avant son terme. Cette période de transition, qui peut durer jusqu’à six mois a un coût pour le CFA. Comment seront également financés les accompagnements spécifiques des jeunes en situation de handicap ?

M. Alain Bao. – Les jeunes des quartiers prioritaires de la ville requièrent un accompagnement plus poussé et induisent des coûts plus élevés. La problématique du coût national nous préoccupe. Certes, la péréquation est prévue par le Gouvernement à hauteur de 250 millions d’euros, mais cette enveloppe nous paraît sous-évaluée. L’Ile-de-France représentant, à elle seule, presque 30 % d’un tel montant !

Les reliquats de taxe, qui figurent dans les comptes des CFA, devront être restitués au 31 décembre 2019. Ils assuraient pourtant un fonds de roulement indispensable entre le versement de subventions régionales et celui de la taxe d’apprentissage. Si ce fonds de roulement venait à disparaître, le financement au contrat n’étant pas assuré dès le début de la formation, les trésoreries des CFA seraient exsangues à partir du 1er janvier 2020 et de nombreux centres ne pourraient plus acquitter leurs charges. La situation des apprentis s’en ressentirait ! Aucun montant n’est prévu pour soutenir les dispositifs de préparation à l’apprentissage, qui visent les élèves en difficulté scolaire à la fin du collège. Les CFA sont ainsi dans l’attente d’un soutien à leur démarche qui vise à favoriser l’insertion de ces jeunes dans le monde du travail. Il ne faudrait pas que chaque CFA soit, à l’avenir, laissé à lui-même pour trouver ces financements indispensables au maintien des effectifs des premiers niveaux de formation.

M. Michel Forissier, rapporteur. – Les rapporteurs partagent votre inquiétude.

Sur le financement de l’apprentissage, les comités régionaux de l'emploi, de la formation et de l'orientation professionnelles (Crefop) seront maintenus, mais leur lien n’est pas précisé avec France Compétences, dont le statut et l’organisation doivent également être définis.

Je ne vois pas de moyens supplémentaires alloués à l’apprentissage. Or, un effort est à faire dans ce domaine. Les enveloppes financières accordées aux régions représenteront 250 millions d’euros au titre de l’aménagement du territoire et 180 millions d’euros seront consacrés aux investissements dans les CFA. Que pensez-vous de ces chiffres par rapport aux besoins des territoires ?

Un certain nombre de contrats sont corrigés par les chambres consulaires à l’occasion de leur enregistrement. La nouvelle procédure de dépôt ne risque-t-elle pas de fragiliser les contrats d’apprentissage ?

Plus largement, comment appréhendez-vous les propositions d’assouplissement du contrat d’apprentissage et les nouvelles règles de fonctionnement et de création des CFA ?