1 MISE EN CONTEXTE 3
1.4 Encadrement de la responsabilité sociétale 19
1.4.7 Retour d’expérience 27
Le projet pilote du BNQ a permis de constater les facteurs affectant la volonté des entreprises à s’engager dans une démarche RSE. Une gradation dans la motivation des entreprises participantes a été constatée. Des 40 partenaires, seulement 45 % d’entre eux ont décidé de poursuivre la démarche RSE à la fin du pilote. Au final, l’expérience a permis de constater trois axes de gestion dont l’orientation témoigne du niveau de maturité des pratiques de gestion et de l’engagement envers l’application du DD. Les écarts dans les pratiques managériales des entreprises étudiées ont permis d’expliquer à la fois les progressions et les régressions en ce qui à trait à la mise en place d’une démarche RSE auprès des entreprises participantes. Au total, ces axes recouvrent le trois quarts des éléments à l’étude. Ces trois axes sont :
• La gestion des focus : la maturité du gestionnaire s’accroit lorsque celui-‐ci réalise les focus limitant sa capacité d’action et s’en dégage. Ce processus nécessite la mise en place d’un dialogue ouvert de concert avec la délégation des responsabilités par la simplification et la formalisation des procédures;
• La gestion des babines et des bottines : les entreprises maîtrisant un haut degré de maturité ont en commun une forte concordance entre discours et actions mue par l’engagement, la cohérence, la conviction, le respect et la constance;
• La gestion des priorités DD : l’importance accordée au DD au sein des priorités de l’entreprise réagit à différents stimuli positifs et négatifs dont plusieurs ont pu être révélés au cours du projet pilote. Par exemple, la présence de subventions, d’une situation économique favorable et d’une direction engagée sont des stimuli positifs renforçant l’intégration du DD par les entreprises. À l’opposé, un manque de conviction de la part des gestionnaires, une conjoncture économique incertaine et un manque de ressources auront un effet négatif (Cadieux et Taravella, 2014).
De plus, l’étude a révélé que les PP d’une organisation s’influencent mutuellement. Un effet synergique positif a été constaté entre les PP suivantes : conseils d’administration, employés et syndicats, appareil gouvernemental, grands donneurs d’ordres, grandes bannières, maisons mères, associations sectorielles ou professionnelles, communautés. On a également constaté que la motivation de certaines entreprises à s’engager dans le projet était étroitement liée à un désir de visibilité et qu’un manque de ressources était bien souvent un frein à la poursuite de la démarche. Quant à certaines entreprises prospères possédant les ressources à l’intégration du référentiel, une conjoncture économique défavorable, une incertitude règlementaire ou une satisfaction du statu quo sont autant de motifs justifiant de ne pas poursuivre l’expérience du BNQ 21000 (Cadieux et Taravella, 2014).
Il faut savoir que l’appropriation du DD dans les pratiques de gestion d’une entreprise requiert un changement de culture organisationnel global impliquant tous les niveaux de l’entreprise et que celui-‐ci s’effectue sur une longue période. À vrai dire, le référentiel se veut un processus
d’amélioration continue dans lequel les enjeux traités ne sont jamais conclus, mais en constante évolution. Il s’agit d’un engagement majeur qui risque de ne pas tenir la route si l’un des maillons de l’entreprise n’est pas prêt à emboîter le pas, l’engagement et la maturité de la haute direction sont donc primordiaux. L’expérience a également permis de mettre en lumière un facteur fort important dans le déploiement d’une démarche RSE/DD. Des entreprises capables et désireuses de s’investir dans une telle démarche sur le long terme, l’intérêt décroît considérablement en raison de l’absence de certification sous-‐jacente au BNQ 21000. Ainsi, des partenaires clés ont préféré consacrer leur effort à d’autres types de démarches DD leur offrant davantage de reconnaissance, de crédibilité et de visibilité. Enfin, le bilan de l’expérience a mis en évidence le fait que la performance financière et le contrôle de l’information sont les préoccupations premières des entreprises et constituent les freins majeurs aux changements organisationnels et à la progression de ces dernières sur la voie du DD. L’évolution des entreprises à travers l’appropriation effective de la RSE passe donc par l’intégration des préoccupations des PP à la prise de décision managériale, par la délégation de certains pouvoirs, et par les processus de reddition de compte des entreprises (Cadieux et Taravella, 2014).
Bien que la norme BNQ 21000 offre une méthode énonçant de manière complète la progression des organisations selon cinq niveaux de maturité recouvrant 21 enjeux du DD, la question de la capacité des consultants et des gestionnaires d’entreprises à mettre en œuvre l’ensemble des 21 enjeux a été soulevée. L’analyse démontre que les enjeux environnementaux et sociaux ont été dans l’ensemble bien maîtrisés, alors que des lacunes ont été rencontrées au niveau des enjeux économiques et moraux. Les difficultés vécues dans les domaines économiques étaient davantage attribuables à l’hermétisme des entreprises à propos de leurs informations financières qu’à un manque de compétence de la part des consultants. En ce qui concerne les enjeux moraux, les problèmes ont surtout été ressentis au niveau de la gouvernance, en ce sens où certaines entreprises considéraient que cet enjeu ne les concernait pas. Somme toute, l’expérience a permis de conclure que l’ensemble des 21 enjeux du référentiel couvraient bien les principes du RSE/DD et les besoins des entreprises. Toutefois, des lacunes au niveau des relations avec les communautés, des communications et de la gestion ont été soulignées (Cadieux et Taravella, 2014).
Au final, l’expérience acquise au cours du projet-‐pilote a mis en évidence la nécessité d’offrir aux entreprises une norme certifiable. En effet, une certification se portant garante de la crédibilité des efforts investis est un gage de reconnaissance et de réputation et donc, une motivation certaine à s’investir dans une telle démarche. De plus, dans l’éventualité où la norme BNQ 21000 ne mène à aucune certification, il y a un risque certain que celle-‐ci soit laissée de coté au profit d’une autre norme offrant davantage de bénéfices à ces adhérents. Enfin, puisque le référentiel a été développé sur la base de la loi sur le DD du Québec, sa portée est géographiquement limitée au Québec diminuant ainsi l’intérêt des entreprises internationales à se l’approprier.