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où on a supprimé le terme en D car il ne donnait que des termes d’ordre supérieur à 2 dans le calcul (puisque C est non nul). L’expression finale de ce développement est donc :

2 = dX2 dhψ| dX   d|ψi dX  − hψ|d|ψi dX 2 , (I.97)

où l’on reconnait l’expression (I.85) de l’information de Fisher quantique dérivée dans la section (I.3.2), ce qui nous permet d’écrire que :

2 = 1

4FQ(X) dX

2

. (I.98)

La métrique de Fubini-Study est donc directement proportionnelle à l’information de Fisher quantique. On retrouve ici géométriquement que plus l’information de Fisher quan-tique est grande et plus les états |ψ(X)i et |ψ(X + dX)i sont distinguables. Finalement, l’outil principal de l’estimation de la précision des mesures est intimement lié aux raison-nements que l’on peut faire dans l’espace des états.

I.5 Ressources et limites

I.5.1 Présentation générale

Lorsqu’on aborde l’épineuse question des limitations en métrologie quantique, la plus fondamentale se résume souvent à : quelle est la meilleure précision atteignable dans l’ab-solu ? Il s’agit toutefois d’une question qui mérite d’être reformulée parce que l’ “abl’ab-solu” en sciences expérimentales n’existe en fait que sous contraintes. Il dépend de ce à quoi l’expérimentateur a accès, indépendamment de la manière dont il organisera le processus de mesure. L’ensemble de ces possibilités de l’expérimentateur est regroupé sous le nom générique de ressources. Pour pouvoir comparer ce qui est comparable, la précision maxi-male atteignable sera toujours donnée à nombre et type de ressources fixés. Par exemple, en optique quantique, un type de ressource est le photon individuel et la précision que l’on peut espérer obtenir dépendra bien sûr du nombre de photons dont dispose l’expéri-mentateur, étant entendu qu’une précision infinie pourra être atteinte si le nombre de ces ressources est infini, ce qui n’est évidemment jamais le cas en pratique. Ces ressources sont en quelque sorte le facteur limitant de la précision. Elles définissent un cadre dans lequel l’expérimentateur pourra piocher les états initiaux utilisables, les autres états lui sont donc hors d’accès.

Nous avons représenté schématiquement la situation sur la figureI.5. La zone R délimite dans l’espace des états les états initiaux accessibles à l’expérimentateur, étant donné ses ressources. Chacun d’entre eux, représenté par un point rouge, est accompagné de son information de Fisher quantique FQqui quantifie, comme nous l’avons souligné, la précision maximale atteignable à partir de cet état. Dans cet ensemble d’état initiaux, celui qui a la plus grande information de Fisher quantique peut nous permettre en théorie d’atteindre la

34 Chapitre I. Estimation d’un paramètre

Figure I.5 – Espace des états

Les points représentent les états initiaux dans l’espace des états (on les prend discrets pour faciliter la

représentation). La zoneR délimite la région des états préparables par l’expérimentateur. A chacun de

ces étatsi, on peut associer une valeur de l’information de Fisher quantique FQ,i.

meilleure précision dans l’absolu pour l’expérimentateur à ressources fixées. Il marque une barrière physique dans la précision qui est donc infranchissable. On appelle cette limite la limite de Heisenberg (HL) :

HL = max ({FQ,i}, i ∈ R). (I.99)

Pour l’atteindre, il faut avoir la plus grande variance 

∆ ˆH

0. En pratique, cela revient à prendre l’état formé de la superposition équilibrée des deux états propres de ˆH, M et m correspondant respectivement aux valeurs propres maximale (λM) et minimale (λm) [74] :

|Ψ = M + |λm

2 . (I.100)

Dans ce cas, la variance devient : 

∆ ˆH

|Ψ = λM − λm

2 . (I.101)

On peut également raffiner notre appréhension de la Limite Quantique Standard dans cette représentation : lorsqu’on ne dispose pas d’états initiaux aux caractéristiques intrinsè-quement quantiques telles que des états comprimés ou intriqués, l’état initial ayant la plus grande information de Fisher quantique permet d’obtenir la meilleure précision “classique”. Cette précision marque la Limite Quantique Standard.

I.5.2 Dans notre expérience

Comme présentés dans l’introduction générale, les états initiaux de la mesure sont des superpositions de composantes cohérentes de champ préparées par intrication avec un atome à deux niveaux. Pour le système champ, on peut compter dans les ressources le

I.5. Ressources et limites 35 nombre de photons (déterminant l’énergie du système). Nous sommes aussi limités par la manière dont nous pouvons agir sur le champ : nous sommes capables de préparer n’importe quel état cohérent mais par contre, pour préparer un autre état à partir de celui-ci, il nous faut utiliser les interactions avec un atome qui sont limitées dans le temps. En pratique, nous pouvons, à partir d’un état cohérent, construire un état de champ dont la structure dans l’espace des phases tient dans un cercle de diamètre d ≈ 2, 8 centré sur l’état cohérent qui est donc en quelque sorte notre “zone de ressources”. En changeant le nombre moyen de photons injectés pour l’état cohérent de départ, nous pouvons a priori déplacer le centre de ce cercle dans l’espace des phases.

Dans le cas de notre expérience de métrologie, nous voulons distinguer deux champs différant d’une amplitude β. Nous pouvons prendre β réel sans perte de généralité. L’opé-rateur unitaire qui permet de passer d’un champ d’amplitude α à un champ d’amplitude α + β est l’opérateur déplacement ˆD(β) :

ˆ

D(β)|αi = e(βα−βα)/2|α + βi (I.102)

Pour reprendre les notations de la section I.5, le paramètre X est donc β et l’opérateur évolution associé est ainsi :

ˆ

U (X) ≡ ˆD(β) = eβ(ˆa−ˆa), (I.103)

car β est réel. Comme ˆD et ˆa− ˆa commutent, le générateur de cette opération unitaire devient alors :

ˆ

H = −i ˆa− ˆa . (I.104)

On retrouve l’idée naturelle que pour avoir une bonne précision dans un déplacement δX, il vaut mieux utiliser un état avec la plus grande variance en “impulsion” ( ˆH = −√

2 ˆP ). Ici, faisons un petit récapitulatif des différentes limites qui nous intéressent. Classique-ment, l’état initial ayant la meilleure information de Fisher quantique est l’état cohérent. Il définit la SQL pour la mesure de l’amplitude d’un champ électromagnétique :

FSQL = 4. (I.105)

Dans notre “zone de ressources”, il est évident que les états comprimés en amplitude peuvent par exemple faire mieux que l’état cohérent et permettent donc de battre la SQL. Il y a par ailleurs d’autres façons d’introduire des caractéristiques quantiques dans un état. Nous savons cependant que pour avoir la meilleure précision, l’état optimal est l’état initial à la plus grande information de Fisher quantique. Etant donnée la forme de ˆH dans notre ex-périence, l’état maximisant la variance est la superposition de deux états cohérents séparés dans l’espace de phase de la plus grande distance D possible dans la “zone de ressource” i.e. de part et d’autre du diamètre du cercle de diamètre d dans l’espace des phases. On peut noter que la position du cercle dans l’espace des phases ne changera rien à la forme de

36 Chapitre I. Estimation d’un paramètre l’état optimal. Autrement dit, la limite de Heisenberg dépend explicitement uniquement de d et non du nombre de photons moyens (donnant la position du centre du cercle), qui n’est donc pas chez nous la ressource limitante.

Si l’on place ce cercle au centre de l’espace des phases, cette fois le nombre de ressources en énergie disponible détermine le diamètre de la zone de ressource. On retrouve alors que la ressource limitante est le nombre de photons comme dans la plupart des autres expériences. Nous verrons toutefois dans la section II.6.6 que le diamètre d de notre zone dépend légèrement du nombre de photons moyens de l’état cohérent de départ et nous justifierons alors le positionnement du centre de notre “zone de ressources” en |α| =√

12,7.

Conclusions

À partir d’un exemple, nous avons fait apparaître les principaux tenants et aboutissants des problèmes d’estimation d’un paramètre par la mesure. Une mesure effectuée sans utiliser aucune des caractéristiques intrinsèques à la mécanique quantique permet d’atteindre un certain niveau de précision au mieux égal à celui de la SQL. L’emploi d’états comprimés ou intriqués peut permettre d’améliorer la précision sans toutefois pouvoir dépasser la limite ultime qu’est la limite d’Heisenberg, à type et nombre de ressources fixées. Celle-ci est fixée par une relation d’incertitude généralisée reliant la préCelle-cision de l’estimation du paramètre et la variance de l’opérateur qui génère l’évolution du système (évolution dépendant bien sûr du paramètre). En ce qui concerne la mesure qui nous intéresse dans ce manuscrit, à savoir la mesure de l’amplitude d’un petit champ électromagnétique, la “zone de ressources” dans laquelle nous pouvons choisir l’état initial de la mesure est un cercle de l’espace des phases de diamètre d contraint par notre dispositif expérimental. L’état cohérent au centre de ce cercle définit la SQL de notre mesure. L’état optimal marquant la limite de Heisenberg est une superposition d’états cohérents diamétralement opposés sur le cercle dans l’espace des phases. Pour montrer comment nous pouvons nous rapprocher de la limite de Heisenberg par notre mesure, nous choisirons donc toujours des états initiaux sous forme de superposition d’états cohérents.

Le cadre étant posé, nous pouvons décrire théoriquement le processus de mesure que nous avons mis en oeuvre pour l’espérience de métrologie. Nous présenterons le système quantique que nous manipulerons et la séquence expérimentale permettant à la fois la préparation de l’état initial, l’interaction de cet état avec le champ à mesurer et la mesure proprement dite. Nous utiliserons ensuite les outils d’information de Fisher et d’information de Fisher quantique pour essayer de quantifier la sensibilité de notre mesure par rapport à la mesure optimale.

Chapitre II