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Introduction. § 2.1. La formation progressive du concept de la responsabilité pénale des États. § 2.2. L’évolution de la responsabilité criminelle des États dans les sources du droit international (coutume et traités). § 2.3. La responsabilité criminelle des États dans la jurisprudence internationale. § 2.4. L’évolution de la doctrine sur la responsabilité criminelle des États pendant la deuxième moitié du XIX et le début du XX siècle. § 2.5. La conception de la responsabilité criminelle des États en doctrine entre les deux guerres mondiales. § 2.6. La conception de la responsabilité criminelle des États en doctrine après la seconde guerre mondiale. § 2.7. Le Projet d’articles sur le droit de la responsabilité des États: historique. § 2.8. Les grandes lignes du Projet d’articles sur le droit de la responsabilité des États adopté en première lecture en 1996. § 2.9. L’évolution du Projet sur la responsabilité des États en matière criminelle jusqu’à la dernière lecture de 2001. § 2.10. L’emploi du terme “crime” en droit international. Conclusion.

Introduction.

L’État est le sujet par excellence de l’ordre juridique international: probablement pour cette raison et à cause du principe de l’égalité souveraine la question de sa responsabilité, notamment pénale, est complexe. La possibilité de responsabiliser les États du point de vue criminel constitue la problématique fondamentale de notre thèse: est-il possible de criminaliser un État? La réponse à cette question est fondamentale pour la recherche de solutions aux questions juridiques qui naissent d’une vision d’ensemble, systématique et synthétique, de la responsabilité internationale pénale.304

Le problème, qui soulève un large débat en doctrine, doit être analysé en même temps que le sujet, plus général, de la responsabilité des États, dont la distinction entre la responsabilité ordinaire et criminelle représente un sous-ensemble.305

Des règles de droit international qui affirment, de façon satisfaisante, la responsabilité pénale des États, de iure condito, n’existent pas; en revanche les règles de iure condendo nous donnent des indications controversées.

Dans son évolution historique le droit international a vu naître la distinction entre une responsabilité plus et moins grave du sujet étatique306. L’idée d’une responsabilité

majeure se lie, au moins à partir du XVII siècle, à la guerre d’agression, entendue, stricto sensu, comme emploi de la force armée, car celle-ci constitue, naturellement, la conduite la plus dangereuse pour l’intégrité de l’ordre international de la paix, étant contraire au principe même de souveraineté. Au cours du XX siècle quelques doctrines essayent de concevoir la responsabilité majeure des États de façon pénale, tandis que la jurisprudence affirme, au plus, une distinction entre les violations ordinaires et les violations qui lèsent les intérêts fondamentaux de la communauté internationale dans son ensemble. Quant aux dispositions normatives, quelques conventions et déclarations qualifient certaines conduites des États comme “criminelles”: tel est le cas de la violation de la paix par le biais de l’agression, qualifiée de “crime”, parmi d’autres textes, par la Résolution 3314 (XXIX) de l’Assemblée générale des N.U. du 14 décembre 1974. Finalement, l’article 19 du Projet de la C.D.I. sur la responsabilité des

304 Voir S. GLASER, L’État en tant que personne morale est-il pénalement responsable?, in R.D.P.C.,

1948-1949, février, n. 5, p. 425 s.

305 Pour un aperçu de l’importance de la question voir J. BARBOZA, International Criminal Law, cit., p.

84 s.; M. SPINEDI, La responsabilité de l’État pour “crime”: une responsabilité pénale?, cit., p. 91; D.D. CARON, State Crimes in the I.L.C. Draft Articles on State Responsibility: Insights from Municipal Experience with Corporate Crimes, in Proc. A.S.I.L., 1998, p. 307; D.W. BOWETT, Crimes of State and the 1996 Report of the I.L.C. on State Responsibility, in E.J.I.L., 1998, vol. 9, n. 1, p. 163 s.

États, déjà formulé en 1976 et adopté dans le cadre de la première lecture complète du Projet en 1996, affirme la distinction entre les “crimes” et les “délits” internationaux des États. L’article 40 du Projet adopté en 2001, en deuxième lecture, se base sur la distinction entre normes internationales cogentes et ordinaires. Étant donné un tel cadre normatif, la question de la responsabilité criminelle des États ne se présente pas comme une question aisée.307

Dans ce chapitre nous traçons l’évolution historique du concept de la responsabilité “pénale” de l’État, depuis sa naissance comme responsabilité majeure, liée à la guerre d’agression, jusqu’à son apogée dans l’article 19 du Projet de la C.D.I. de 1996 sur la responsabilité des États. Cet article constitue une référence indispensable de notre thèse, car il contient la reconnaissance la plus claire de la responsabilité criminelle des États. Nous étudions, ensuite, l’évolution de cette responsabilité qui, dans le texte du Projet sur la responsabilité des États adopté en 2001 et soumis à l’attention de l’Assemblée générale des N.U., se transforme, à la suite de l’effacement de l’article 19, en violation des normes internationales cogentes. Finalement, à la lumière de cette analyse, nous faisons des réflexions générales sur l’emploi du terme “crime” dans l’article 19 et dans d’autres textes de droit international, pour essayer d’en tirer des indications sur la nature de la responsabilité étatique.

§ 2.1. La formation progressive du concept de la responsabilité pénale des États.

Le concept de la responsabilité pénale des États, a été élaboré, progressivement, jusqu’à la formulation, en 1976, dans le cadre du Projet de la C.D.I. sur la responsabilité des États, de l’article 19, qui établit une différence essentielle entre la responsabilité des États pour “délit” et pour “crime”.308 L’article en question creuse un fossé, du point de

vue du droit matériel, en établissant un double type d’infraction étatique: l’infraction délictuelle, catégorie large, selon laquelle toute infraction d’une obligation par l’État entraîne une sanction, correspondant au principe général alterum non laedere, et l’infraction criminelle, catégorie étroite, qui inclut un petit nombre de violations. Les crimes et les délits, d’après cette disposition, se distingueraient tant du point de vue de la gravité, car les violations criminelles seraient plus graves que les simples délits, que du point de vue de la forme logique, car le crime constituerait la violation d’une obligation erga omnes absolue indivisible (ius cogens).

L’article 19 du Projet sur la responsabilité des États représente le point d’arrivée d’une longue marche de la pensée en matière de droit international et il est possible qu’il soit prématuré ou, même, d’application impossible, étant données les vicissitudes qu’il a rencontrées depuis sa naissance.309 L’idée des crimes des États contenue dans cet

article plonge ses racines dans la pensée de certains auteurs qui ont approché le problème de la guerre, entendue, stricto sensu, comme emploi de la force armée, car cette conduite, pour la gravité des dégâts qu’elle entraîne, peut constituer une infraction

307 Sur cette question voir O. TRIFFTERER, Prosecution of States for Crimes of State, in R.I.D.P., 1996,

1/2 trim., p. 345.

308 Sur l’évolution du principe de la responsabilité étatique du XVI au XX siècle voir P. REUTER, Le

développement de l’ordre juridique international – Écrits de droit international, Paris, Economica, 1995, p. 379-420.

309 Pour un cadre synthétique de l’évolution de la distinction entre deux formes de responsabilité

internationale étatique depuis le XVIII siècle jusqu’à la formulation de l’article 19 du Projet de la C.D.I. sur la responsabilité des États voir P.M. DUPUY, Infraction, in D. CARREAU et al. (sous la dir. de), Encyclopédie juridique Dalloz – Répertoire de droit international, Paris, Dalloz, 1998, t. II, p. 1 s., § 33- 42.

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grave, dans le cadre du droit international de la paix.310 D’après l’opinion de V. Pella

“les guerres d’agression commises au cours des siècles passés, si on les conçoit du point de vue de la notion nouvelle du crime international se présentent comme des manifestations évidentes de criminalité collective”.311

Jusqu’en 1600 prévalait la conception selon laquelle la guerre serait implicite dans la nature humaine. Dans cet ordre d’idée, la solution du problème ne pouvait pas être cherchée dans le cadre du droit international, selon lequel la guerre était légitime, conception soutenue encore aujourd’hui par certains auteurs.312 Ainsi la paix ne pouvait

être réalisée que par l’accord des souverains, le principe général du droit à la guerre étant de nature divisible.

A partir de 1600, au moins dès la pensée de Hobbes, prévaut la conception de la guerre comme fait illicite dans l’organisation sociale, suite à l’aliénation du ius omnium contra omnes par le biais du contrat social (pax est quaerenda). Dans ce cadre idéologique s’épanouit complètement l’idée que la guerre, une fois banni l’état de nature, est légitime seulement si elle répond à une juste cause, donc, essentiellement, en contre-mesure, comme l’avaient déjà soutenu des esprits célèbres, dans la tradition du droit naturel, tels que Aristote, Cicéron, Saint Augustin et Saint Thomas d’Aquin.313

Ainsi le Traité de Westphalie, du 24 octobre 1648, affirme l’exigence d’une paix chrétienne et universelle (article 1). Se développent de plus en plus, en outre, des projets pour la réalisation d’une paix effective par le biais du changement de l’ordre juridique étatique et international.

Pierre Dubois, avocat de Constances, proposait, déjà vers 1305, dans son “De recuperatione terrae sanctae”, un plan de paix universelle chrétienne pour l’institution d’une République chrétienne, régie par un Congrès de chefs d’États et où le règlement des différends aurait dû passer par l’Arbitrage ou, en dernière instance, par le verdict du Sainte Siège.314

François de Vitoria, théologien dominicain espagnol, en 1500, dans son “Relectiones de Indis et de iure belli”, substituait au concept d’indépendance des États celui de l’interdépendance, justifié par la solidarité politique qui est à la base de la société internationale et résuma ce concept dans l’idée du ius inter gentes. Selon Vitoria, la guerre de réaction, juste, donnerait au vainqueur le pouvoir d’imposer à l’ennemi des

310 Sur la guerre, stricto sensu, comme emploi de la force armée, voir, L. DELBEZ, La notion juridique

de guerre, in R.G.D.I.P., 1953, t. 57, p. 178 . Sur la guerre comme point de départ de la “criminalisation” des rapports internationaux voir J. VERHOEVEN, Vers un ordre répressif universel? Quelques observations, cit., p. 57; J.C. WITENBERG, De Grotius à Nuremberg – Quelques réflexions, in R.G.D.I.P., 1947, t. 51, p. 89 s.; J. DESCHEEMAEKER, Le jugement des grands criminels de guerre, cit., p. 211-218. Pour une approche de la guerre, en tant qu’emploi de la force armée, et de son évolution voir M. VOELCKEL, Guerre, in D. CARREAU et al., Encyclopédie juridique Dalloz – Répertoire de droit international, Paris, Dalloz, 1998, t. II, p. 1-3, § 1-10; M.-C. BASSIOUNI, Le droit pénal international: son histoire, son objet, son contenu, cit., p. 46 s.

311 Voir S.G., Mémorandum concernant le Projet de Code des crimes contre la paix et la sécurité de

l’humanité, préparé par V. Pella, doc. A/CN.4/39, cit., p. 239, § 35.

312 Voir L. DELBEZ, Les principes généraux du droit international public – Droit de la paix, droit

préventif de la guerre, droit de la guerre, 3ème

éd., cit., p. 396.

313 Sur le concept de iustum bellum voir N. BOBBIO, D. ZOLO, Hans Kelsen, the Theory of Law and the

International Legal System: a Talk, cit., p. 367; I. BIBÓ, Le dogme du “bellum iustum” et la théorie de l’infaillibilité juridique. Essay critique sur la théorie pure du droit, in Revue internationale de la théorie du droit, 1936, n. 10, p. 14 s. Sur l’évolution historique du droit international de l’antiquité au XX siècle voir S. KORFF, Introduction à l’histoire du droit international, in R.C.A.D.I., 1923, vol. 1, p. 1 s.

sanctions pénales: “Après la victoire, on peut punir la violation du droit dont les ennemis se sont rendus coupables, sévir contre eux, les châtier de leurs fautes...”315

François Suarez, théologien jésuite (1548-1617), soutint de nouveau l’idée d’une société des États basée sur le ius gentium, dans son “Tractatus de legibus ac Deo legislatore”, de 1613, et se déclara favorable à la solution des conflits par le biais de l’arbitrage mais, trouvant cette solution difficile à mettre en pratique, il soutint la thèse de la guerre juste, légitime en tant qu’exercice d’un droit et conforme à la morale.316

Émir Crucé, dans “Le nouveau Cysne ou Discours des occasions et moyens d’établir une paix générale et la liberté de commerce par tout le monde”, de 1623, proposait la constitution d’une Assemblée d’ambassadeurs des souverains des États pour résoudre les différends internationaux.317

Hugues Grotius, qui soutint, également, l’idée de la constitution d’une Assemblée à laquelle les Princes chrétiens auraient dû soumettre leurs différends, douée du pouvoir de contrainte nécessaire pour assurer l’exécution de ses jugements, réaffirma l’idée du iustum bellum dans son “De iure belli ac pacis”, ouvrage exhaustive et, en large mesure, fondatrice du droit moderne, qui remonte à 1625. Le concept de la guerre juste, dans la pensée de Grotius, se précise dans le sens que le monarque aurait la possibilité de réagir et de punir non seulement les violations commises contre soi et ses sujets, mais aussi en réponse à des infractions commises contre des sujets tiers: il s’agit de la formulation de l’idée d’obligation erga omnes absolue indivisible d’ordre naturel en droit international.318

Maximilien de Béthune, Duc de Sully, dans ses “Mémoires”, datables entre 1623 et 1628, proposa un Projet de paix définitive par le biais de l’équilibre entre quinze grandes puissances européennes et la constitution d’un tribunal arbitral chargé de régler les différends.319

William Penn, quaker convaincu, fondateur de la colonie américaine de Pennsylvanie, dans ses “Essays toward the Present and Future Peace of Europe” de 1963, bannissait la guerre, toujours injuste, de la société internationale et proposait la

315 Voir F. DE VITORIA, De Indis et de iure belli (Leçons sur les indiens et sur le droit de la guerre),

trad. fr. M. Barbier, Genève, Libr. Droz, 1966, n. 18. Sur la pensée de F. de Vitoria voir C. BARCIA TRELLES, Francisco de Vitoria et l’école moderne du droit international, in R.C.A.D.I., 1927-II, vol. 17, p. 109 s.

316 Voir F. SUAREZ, De legibus ac Deo legislatore (Des lois et du Dieu législateur), 1613, trad. fr. J.-P.

Coujou, Paris, Dalloz, 2003. Sur la pensée de F. Suarez C. BARCIA TRELLES, Francisco Suarez (1548- 1617) (les théologiens espagnols du XVI siècle et l’école moderne du droit international), in R.C.A.D.I., 1933-I, vol. 43, p. 385 s.

317 Voir E. CRUCÉ, Le nouveau Cysne ou discours des occasions et moyens d’établir une paix générale

et la liberté de commerce par tout le monde, 1623, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2004.

318 Voir H. GROTIUS, De iure belli ac pacis (Le droit de la guerre et de la paix), cit., Prolégomènes,

XXV, p. 17, Livre II, Chapitre XXV, p. 562 s. Sur la pensée de Grotius voir W. VAN DER VLUGT, L’œuvre de Grotius et son influence sur le droit international, in R.C.A.D.I., 1925-II, vol. 7, p. 396-509; R. POUND, Grotius in the Science of Law, in A.J.I.L., 1925, october, vol. 19, n. 4, p. 685-688; C. VAN VOLLENHOVEN, Grotius and the Study of Law, in A.J.I.L., 1925, january, vol. 19, n. 1, p. 1-11; P. HAGGENMACHER, Grotius et la doctrine de la guerre juste, Paris, P.U.F., 1985; H. LAUTERPACHT, The Grotian Tradition in International Law, in B.Y.B.I.L., 1946, XXIII, p. 23 s. Sur la conception du droit international d’après Grotius et après Grotius voir J.S. REEVES, La communauté internationale, in R.C.A.D.I., 1924-II, vol. 3, p. 19-31.

319 Voir S. MAXIMILIEN DE BÉTHUNE, Mémoires sages et royales économies d’État, domestiques,

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constitution d’une Diète, composée de représentants des souverains, chargée de trancher les différends entre souverains, pour établir la paix en Europe.320

L’Abbé de Saint-Pierre, dans ses “Mémoires pour la paix perpétuelle en Europe”, de 1719, rééditées en forme abrégée et renouvelée en 1729, proposait l’institution d’une société européenne de toutes les souverainetés chrétiennes où le règlement des conflits, la guerre étant bannie, aurait dû passer par la voie de l’arbitrage ou par la Conciliation à travers l’institut du Sénat.321

Emer de Vattel, en 1758, dans son “Le droit des gens ou principes de loi naturelle” s’opposa, en revanche, à l’idée du iustum bellum, en soutenant l’idée que la souveraineté étatique prime sur tout autre principe.322

Emmanuel Kant, dans son “De la paix perpétuelle. Essai philosophique”, de 1796, repère les causes de la guerre dans l’organisation de la puissance libre dans les relations entre les États et recherche la solution par la formation d’un État mondial fédéral d’ordre républicain, sur la voie d’un État cosmopolite. Il propose, ainsi, la constitution d’une Fédération mondiale universelle d’États libres, tous Républicains, prévoyant le principe de non-ingérence dans les affaires internes et la disparition des armées permanentes.323

En 1800, suite à la Restauration, scellée par l’Acte final du Congrès de Vienne du 9 juin 1815, l’idée de la guerre inévitable revient dans la pensée d’auteurs tels que Putter, mais le droit international reste inspiré, fondamentalement, par le principe général de la paix, tant dans la pensée des partisans du droit naturel (Liszt, Maussbach), que dans les idées des positivistes (Jellineck, Triepel). La fin du siècle connaît, en outre, par la pensée de Bluntschli, la première formulation de la différenciation entre une responsabilité mineure et majeure des États, notamment en cas de guerre, que l’on retrouvera, au cours de 1900, dans la pensée de plusieurs auteurs et, surtout, dans certains textes normatifs de droit international.

Au XX siècle, dans le cadre d’un droit international dominé par le principe fondamental de la paix (Verdross, Radbruck parmi les jus-naturalistes, Anzilotti, Kelsen, Simma et Reuter parmi les positivistes), l’éclat des deux conflits mondiaux impose une réflexion sur la possibilité concevoir la guerre d’agression comme un crime

320 Voir W. PENN, An Essay towards The Present and Future Peace of Europe, 1693, Hildesheim,

Olms, 1983.

321 Voir CHARLES-IRÉNÉE (Abbé de Saint-Pierre), Projet pour rendre la paix perpétuelle en Europe,

1719/1729, Paris, Fayard, 1986.

322 Voir E. DE VATTEL, Le droit des gens ou principes de la loi naturelle, 1758, Genève, Institut Henry

Dunant, 1983, vol. I, § 348, vol. II, § 70.

323 Voir I. KANT, Zum ewigen frieden (Per la pace perpetua), trad. it. Roberto Bodiga, Bologna,

Feltrinelli, 1991. Pour le texte des projets des différents auteurs et une présentation synthétique voir G. DEROCQUE, Le Projet de paix perpétuelle de l’Abbé de Saint-Pierre comparé au Pacte de la Société des Nations, thèse, Paris, Librairie Arthur Rousseau, 1929, p. 1-160. Sur les projets d’institutionnalisation de la communauté internationale voir Ch. DUPUY, Les antécédents de la Société des Nations, in R.C.A.D.I., 1937-II, vol. 60, p. 1 s. Sur l’évolution de la perception de la guerre et de la réglementation des conflits de la conception de l’état de nature, chez Hobbes, comme bellum omnium contra omnes, jusqu’à la communauté universelle de Kant, en passant, notamment, par Grotius et Vattel, voir B. SIMMA, A. PAULUS, The “International Community”: Facing the Challenge of Globalization, cit., in E.J.I.L., 1998, vol. 9, n. 2, p. 266 s.; P.-M. DUPUY, International Law: Torn between Coexistence, Cooperation and Globalization. General Conclusions, in E.J.I.L., 1998, vol. 9, n. 2, p. 278 s.; B. SIMMA, The Contribution of A. Verdross to the Theory of International Law, cit., p. 40 s. Face à l’actuelle internationalisation du crime, la doctrine remarque “l’étonnante actualité du modèle cosmopolite imaginé par Kant, seule façon d’éviter que la notion de crime globale ne conduise tout droit à celle de guerre globale” (voir M. DELMAS-MARTY, A crime global, justice globale, in Le Monde, n. 17733, mercredi 30 janvier 2002, Horizons – Débats, p. 30).

international de l’État. Ainsi d’après H. Donnedieu de Vabres “le fait de déclarer une guerre injuste, que nous avons appelé, en nous plaçant au point de vue des particulier, un ‘crime impossible’, est le manquement le plus grave qu’un État puisse commettre à son devoir de solidarité vis-à-vis des autres États. C’est pour en assurer la répression, et aussi pour la prévenir, qu’au lendemain de la guerre l’idée de créer une juridiction criminelle internationale s’est imposée à la conscience publique”.324 Selon Q. Saldaña

le concept de guerre “juste” amène à affirmer que “dans la pénologie internationale – encore bien primitive – règne le vieux talion”.325 Finalement la formulation extrême,

criminelle, de la responsabilité majeure des États, notamment, mais non exclusivement, en cas de guerre d’agression, est affirmée explicitement, au niveau normatif, par l’article 19 du Projet sur la responsabilité des États, en 1976. Cette disposition, toutefois est destinée, pour l’instant, à demeurer une simple possibilité, car elle a été supplantée, dans l’article 40 du Projet adopté en 2001, par la notion, moins connotée au sens pénal,