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5 Entrer dans le cadre d’une écriture à contrainte

5.1. Le respect des consignes

Pour la rédaction des trois textes, nous avons dispensé des consignes différentes aux participants, qui paraissaient parfois ne pas tenir compte de la totalité comme nous pouvons l‟observer dans leurs productions.

Tous les textes de la première séance sont marqués par la contrainte de commencer son texte par « Moi tout seul », Gaëtan allant jusqu‟à faire une anaphore avec ces mots. Par contre, il est moins évident de dire qu‟ils ont respecté le thème du texte. Contrairement à Jonathan et Adrien : je suis libre et je passerais mon temps à faire des choses pour moi, peut- on lire respectivement dans les premiers mots de leur texte, Adrien ajoutant plus loin Ma plus

grande liberté c’est au rugby, Stéphane et Thomas n‟évoquent pas la liberté : Moi tout seul avec mon père alcoolique au bar,

On boit l’apéro ? me dit-il

Oui mais qu’un verre, je ne veux pas finir comme le patron qui se paye les poteaux et qui fait une répétition régulière de l’étude de bitume, en plus il y a la police, je vais avoir des ennuis,

écrit Stéphane.

Pour Gaëtan et Guillaume, il est moins aisé de savoir s‟ils ont répondu à cette partie de la consigne puisque leurs propos sont plus implicites : ils évoquent des activités symbolisant peut-être une certaine liberté telles que « je chante sur mon nuage » (Gaëtan) ou « je passerais du temps avec mes amis » (Guillaume). Leurs écrits demandent donc d‟être interprétés. En ce qui concerne le nombre de lignes demandées, aucun n‟a su le respecter, cette consigne étant sans doute trop difficile à réaliser dans le temps imparti pour un premier texte.

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Pour la deuxième production, hormis le début (“comme le slam de Grand corps malade”) et la fin (“phrase que vous avez relevée dans cette même chanson”) du texte de Gaëtan qui est en accord avec les consignes que nous avons délivrées, les écrits des cinq autres participants sont en accord avec les deux contraintes spécifiques. Pour ce qui est du thème imposé (“liberté et écriture”), la plupart des élèves a su le respecter en y dessinant des ébauches de leur définition de l‟écriture, comme par exemple Stéphane (liberté d'écriture et

de langage, liberté aux royaumes des illettrés), ou Jonathan (quand on commence par des ratures, des lettres qui deviennent des romans d'amour). Adrien est alors le seul à n‟évoquer

ni liberté, ni écrit, bloqué relativement tôt dans la séance car il n‟arrivait pas à réaliser le premier exercice d‟écriture :

C'était un soir sans histoire une fin de journée au destin sobre. Je dirais que j'aime sa façon de parler, de rimer, la façon dont il sort tout ça. Amour et tristesse. Il a la grande classe dans ces soirées où l'on se livre, ces moments où l'on se lève. Depuis j'ai de l'encre plein la bouche, depuis j'écris à l'oral.

En observant la trame des troisième et quatrième séances de l‟atelier d‟écriture, on remarque que les consignes d‟écriture sont plus contraignantes. En effet, les phrases initiale et finale que nous attendons de leur production sont très cadrées, on leur impose d‟utiliser un connecteur temporel marquant une rupture dans la narration, mais cela n‟a pas posé de problème aux élèves. Notons tout de même que Gaëtan a légèrement transgressé la consigne pour la conclusion de son texte : puisqu‟il ne termine pas par « depuis… », procédé qu‟il utilise plus haut : Depuis l’accident, Eimich et Jeffrey sont restés tout le temps ensemble,

comme si c’était un couple, de toutes manières chacun ressent quelque chose pour l’un et l’autre mais ils n’osent pas l’avouer. Ce passage précède alors les deux derniers paragraphes

de son texte.

Par ailleurs, tous les participants ont su rendre compte d‟une histoire évoquant la liberté ou son contraire, le terme liberté étant repris dans la plupart des textes, tandis que d‟autres mettent en scène des policiers par exemple.

C‟est au niveau du personnage qu‟ils mettent en scène que tous les éléments attendus ne sont pas présents. Certes, ils respectent tous le procédé pour créer le prénom de leur protagoniste en renversant les lettres d‟un mot choisi et en l‟adaptant, pour mettre en scène : Odomisiaque (dérivé de Quasimodo), Stanifiret (terrifiants), Eimich (chimie), Zeyov (voyez), Nahzugo (dérivé d‟un prénom).

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Par contre, ils ne réutilisent pas toujours les caractéristiques qu‟ils avaient établies à partir d‟un objet, d‟un animal et d‟une couleur pour le définir. Gaëtan n‟a en effet absolument pas repris le matériau qu‟il avait réuni et qui aurait pu l‟aider à établir une description physique de ses personnages sur laquelle il ne s‟arrête pas. En réalité, c‟est Thomas qui réussit le mieux dans cette exercice puisque, contrairement à ses camarades qui intègrent les caractéristiques qu‟ils avaient rassemblées à l‟histoire, il relie tous les attributs de l‟objet/animal/couleur choisis à son personnage : il avait choisi de créer son personnage à partir des mots « argent », « tigre » et « blanc ». Il dresse alors le portrait de Nahzugo, que « tout le monde le surnomme « TIGER » car il est connu pour avoir la force et la

persévérance d’un tigre », portant toujours un « costard blanc », et qui a réuni « pas mal de billets sur son compte en banque ».

Au regard des compétences des élèves à respecter la consigne, on peut insister sur le fait qu‟elles étaient plus nombreuses à chaque séance, mais que par leur réussite ils arrivaient à en intégrer plus chaque fois. A noter, leur difficulté à développer le thème de la liberté alors qu‟ils semblaient à l‟aise avec ce sujet l‟an passé, favorisant le respect de contraintes finalement plus pointues, donnant ainsi raison à l‟Oulipo.

5.2.

L’importance du cadre de l’atelier d’écriture : mise en place