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« La volonté d’un individu ou d’un groupe de perpétuer ou de manifester sa situation privilégiée après la mort semble un trait commun à beaucoup de sociétés humaines. En cela, la tombe constitue un outil idéal pour la conservation de la mémoire. Les gestes accomplis avant et pendant l’inhumation, le choix du lieu de la sépulture et la structure de la tombe sont très souvent des expressions symboliques d’une dimension politique, sociale, religieuse ou économique que l’on souhaite affirmer au-delà de la vie ».

ARMELLE ALDUC-LE BAGOUSSE et al., « Avant-Propos », ARMELLE ALDUC- LE BAGOUSSE et al. Inhumation de prestige ou prestige de l’inhumation ?

Expressions du pouvoir dans l’au-delà (IVe

-XVe siècle). Actes de la table ronde

organisée par le CRAHM, Université de Caen (Mars 2007). Caen, CRAHM, 2009, p. VII.

Ce chapitre est consacré aux monuments funéraires de l’abbaye de Valmont. Plusieurs membres de la famille d’Estouteville ont eu leurs sépultures à l’intérieur de l’église abbatiale entre le XIIIe et le XVIe siècle. À l’aide de la littérature et des travaux de restaurations réalisés par Dominique Moufle, nous avons été en mesure de dresser le paysage funéraire de l’abbaye de Valmont à différentes époques. Une attention particulière a été portée aux cinq tombeaux toujours présents à Valmont, puisque nous avons les dessins de la Collection Gaignières et les données recueillies sur le terrain. Les autres tombeaux n’ont toutefois pas été négligés. Leurs divers emplacements au fil des siècles ont été étudiés pour saisir les stratégies funéraires et sociales des Estouteville. Dans le but de savoir pourquoi ces derniers ont été inhumés à Valmont, nous avons cru nécessaire de faire une histoire des liens entre la famille d’Estouteville et cette abbaye. De fait, au cours de son histoire, l’abbaye de Valmont a été la nécropole pour au moins treize membres de cette famille, majoritairement les aînés mâles des descendants de Robert Ier d’Estouteville, grand-père du fondateur de l’abbaye de

Valmont. L’histoire de cette abbaye nous a également permis de mieux comprendre l’emplacement des sépultures des abbés. Néanmoins, son histoire est assez lacunaire pour ce qui est du Moyen Âge. Le chartrier de Valmont et d’autres documents relatifs à l’abbaye n’ont pas été complètement traités. Par ce fait même, il manque probablement beaucoup d’informations sur cette époque.

La fondation d’une nécropole familiale n’était pas à la portée de tous. Au début du Xe

pratique s’est toutefois rapidement répandue aux grandes familles seigneuriales vers la fin de ce siècle et au début du XIe siècle. Les recherches de Florian Mazel sur les familles d’Agoult- Simiane, de Baux et de Marseille ont démontré que « très souvent ces gestes [fondation, restauration ou dotation d’établissements monastiques, de prieurés ou même de simples églises] sont interprétés comme la recherche d’une sorte de légitimation de ces pouvoirs [aristocratiques], et même parfois comme une entreprise de justification d’une position politique particulière172 ». En d’autres termes, la fondation d’une église par une famille

seigneuriale était sans contredit une manière d’exprimer sa domination sociale et son statut particulier au sein de la société féodale. Les recherches de Mazel, de Michel Lauwers et de Patrick Geary ont également démontré que les fondations et les donations étaient des pratiques aristocratiques répandues visant à mettre en scène les relations sociales entre l’élite laïque et l’Église. De fait, « l’aumône et les dons aux églises étaient récompensés par la

memoria. Le pouvoir qu’avaient les communautés ecclésiastiques de faire ou de défaire la

mémoire des morts participait à une sorte de contrat social qui les liait, au moins aux aristocraties locales173 ». Les diverses fondations et donations, mises par écrit par des ecclésiastiques avec les chartes, permettaient de créer une memoria familiale basée sur la terre et sur le pouvoir seigneurial. Cela se faisait au bénéfice d’une communauté religieuse qui recevait des terres en contrepartie de la conservation de « la mémoire des morts174 ». Lauwers précise aussi que « la notion de commémoraison, qui renvoie tout à la fois à la commémoration et à l’oraison, à la mémoire et à la prière, traduit une réalité complexe, dans laquelle les dimensions religieuses et sociales furent inextricablement liées175 ». En ce sens, la fondation de l’abbaye de Valmont par Nicolas Ier d’Estouteville sur ses terres démontre

bien que les Estouteville consolidaient leur appartenance à l’aristocratie normande en plus d’entretenir des liens avec la communauté religieuse de Valmont. Nombre d’Estouteville ont fait des donations à l’abbaye de Valmont au cours du Moyen Âge, comme l’attestent les descriptions des chartes des Archives départementales de Rouen.

172 FLORIAN MAZEL, La noblesse et l’Église en Provence, fin Xe – début XIVe siècle. L’exemple des familles

d’Agoult-Simiane, de Baux et de Marseille, Paris, CTHS, 2002, p. 127.

173 MICHEL LAUWERS, La mémoire des ancêtres, le souci des morts, 1997, p. 183.

174 PATRICK GEARY, La mémoire et l’oubli à la fin du premier millénaire, 1996, p. 123-124. 175 MICHEL LAUWERS, La mémoire des ancêtres, le souci des morts, 1997, p. 126.

Les Estouteville, seigneurs de Valmont

Nicolas Ier d’Estouteville s’est établi en Normandie vers 1140 et a repris possession de Valmont, où il a fait reconstruire le château pour ancrer et affirmer son autorité sur ses terres. Signe de cette domination sociale, il fonde en 1169 l’abbaye de Valmont pour le salut de son âme et celui de son lignage en la dotant de plusieurs terres et de rentes176. La fondation

de cette abbaye répond à une stratégie sociale de la part des Estouteville, puisqu’elle est devenue au fil des siècles le lieu de mémoire de cette famille en les liant aux terres ancestrales et à leur parenté charnelle (patrilinéaire). L’emplacement des tombeaux des membres de la famille d’Estouteville joue également un rôle important dans cette stratégie sociale et mémorielle autour de la fondation de Valmont. Dédiée à la Vierge, l’abbaye de Valmont a été confiée à des moines bénédictins provenant de l’abbaye de Hambye177. C’est le fils de

Nicolas Ier d’Estouteville, Robert III d’Estouteville, qui a fait consacrer l’abbaye en 1173178. Nicolas Ier meurt vers 1177 après plusieurs années de combats et il est inhumé dans l’église abbatiale179. Plusieurs de ses descendants ont fait des donations à la communauté monastique de Valmont, mais ils n’ont pas toujours été présents pour conserver l’intégrité des bâtiments abbatiaux, qui en était vraisemblablement la responsabilité des moines de Valmont.

Dès le XIIIe siècle, l’abbaye de Valmont a connu plusieurs remaniements. Eudes Rigaud, archevêque de Rouen, a fait réparer le chœur de l’église abbatiale en 1262, puisqu’il était déjà endommagé180. Afin de veiller à ce que l’abbaye soit bien entretenue, Rigaud a visité Valmont à plusieurs reprises durant le XIIIe siècle. Par la suite, Rigaud a décidé que l’abbaye de Valmont ne dépendrait plus de l’abbaye de Hambye, mais bien de l’archevêque de Rouen. Vers la fin du XIVe siècle et le début du XVe siècle, Gérald de la Roche, 10e abbé

de Valmont, aurait fait construire une chapelle latérale nommée Notre-Dame-de-Pitié, dont les détails ne sont pas connus181. Durant la guerre de Cent Ans, l’abbaye de Valmont a été

saccagée par les Anglais qui l’auraient complètement démolie, n’eut été le serment

176 Fonds de l’abbaye de Valmont, 1169-1210, Arch. dép. Seine-Maritime 19H201.

177 Sur l’abbaye de Hambye : GUYLAINE JOYEUX, L’abbaye de Hambye, Cully, OREP, 2003, 30 p.

178 Toutefois, Nicolas Ier d’Estouteville pourrait être décédé en 1173, ce qui expliquerait pourquoi c’est son fils,

Robert III d’Estouteville, qui fit consacrer l’abbaye de Valmont cette même année.

179 L’emplacement du tombeau d’origine de Nicolas Ier d’Estouteville est inconnu.

180 Jean Benoît Désiré Cochet et d’autres auteurs utilisent la transcription de THEODOSE BONIN, Regestrum

visitationum archiepiscopi rothomagensis. Journal des visites pastorales d’Eude Rigaud, archevêque de Rouen (1247-1279), Rouen, Auguste le Brument, 1852, p. 341-342.

d’allégeance au roi d’Angleterre de Robert de Sotteville, 11e abbé de Valmont182. Aucune

mention n’est faite d’autres événements ou rénovations majeurs avant le XVIe siècle.

Pourtant, le rapport des fouilles archéologiques menées par Jean-Yves Langlois et Erik Follain à l’abbaye de Valmont en 1993 indique que le transept et le chœur de l’église du XVe

siècle (et du XVIe siècle) étaient toujours visibles183. L’absence de mention de cette

construction au XVe siècle est intrigante. En revanche, comme le propose Henry Decaëns, la

guerre de Cent Ans peut avoir causé une interruption de chantier et ainsi expliquer l’absence de source184.

Louis II d’Estouteville, deuxième fils de Jacques Ier d’Estouteville et de Louise

d’Albret, devient le premier abbé commendataire de Valmont vers la fin du XVe siècle185,

mais il ne semble pas s’être occupé de la nécropole familiale. De fait, il renonce à son titre d’abbé commendataire de Valmont en 1517 pour devenir celui de l’abbaye de Savigny186.

L’abbaye de Valmont a subi maintes restaurations qui se sont échelonnées sur plusieurs décennies au cours du XVIe siècle. Orchestrées par Jean Ribaud187, 18e abbé de Valmont, ces rénovations visaient à moderniser l’abbaye : la sacristie, le chœur, le transept, la nef ainsi que le déambulatoire de l’église abbatiale188. Ribaud a également entrepris la construction d’une chapelle axiale dans le style Renaissance (la chapelle de la Vierge ou la chapelle des Six Heures). Les restaurations réalisées par Jean Ribaud se sont étalées de 1517 à 1552189. Durant

182 MARCEL BOISSIÈRE, Notice pour servir à l’histoire de Valmont, Paris, Le Livre d’histoire, 2005, p. 71. 183 JEAN-YVES LANGLOIS et ÉRIC FOLLAIN. Valmont (Seine-Maritime). Abbaye Notre-Dame. Diagnostic

archéologique 1er juillet 1993 – 30 septembre 1993, Rapport d’étude dactylographié, SRA Haute-Normandie,

p.4 et 7.

184 HENRY DECAËNS, « Abbaye Notre-Dame du Pré, Valmont », PIERRE BOUET et al., L’âge d’or des abbayes

normandes, 1066-1204, Rouen, Points de Vues, 2017, p. 168.

185 Il aurait été nommé en 1487 selon MARCEL BOISSIÈRE, Notice pour servir à l’histoire de Valmont, 2005,

p. 118 ; en 1494 selon BERNARD BECK, « Le mécénat des d’Estouteville », 2003, p. 30 ; en 1505 selon EUPHEMIE DE BUSSEROLLE, Recherches historiques sur Fécamp et sur quelques des anciens chateaux et

seigneurs du Pays de Caux, 1859, p. 122et FRANÇOIS ALEXANDRE AUBERT deLACHESNAYE-DESBOIS,

Dictionnaire de la noblesse, 1865, p. 566.

186 CLAUDE AUVRY, Histoire de la congrégation de Savigny, Tome I, Paris, Picard et Fils, 1896, p. xx. 187 Également orthographié Ribault.

188 JEAN BENOIT DésiréCOCHET, Les églises dans l’arrondissement d’Yvetot, 1852, p. 154

189 Il ressort une superposition de différents styles architecturaux à l’intérieur de l’église abbatiale de Valmont.

Les croisillons, les bas-côtés et les chapelles latérales ont été construits dans le style gothique flamboyant tandis que le triforium et les culées des bas-côtés ont été édifiés dans le style Renaissance : JEAN VALLERY-RADOT,

« Troisième excursion. Valmont », 1927, p. 395-396. L’abbé Ribaud aurait pu faire affaire avec « des ouvriers italiens qui travaillaient à l’époque à Gaillon et à Fécamp : JEAN FOLHIC, « Canton de Valmont », JEAN

ces trente-cinq années, des querelles éclatent entre la famille d’Estouteville – en la personne de Jacqueline d’Estouteville, femme de Jean III d’Estouteville – et l’abbé Ribaud. Bien qu’il ne cite pas ses sources et fait seulement référence à des devis, Gabriel de la Morandière en cite un dans lequel il est écrit « Nostre abbé, écrivait en 1534 Heuzé, à l’intention de faire un monastère tout neuf; il commence tout sans rien mettre à fin… Il fait tout cela pour soi venger de Madame [Jacqueline d’Estouteville] et lui laisse de la besognée taillée… Il a des ouvriers de tous lieux et forts experts190 ». À travers ces quelques lignes, une tension est perceptible

entre Jacqueline d’Estouteville et Jean Ribaud. Il semble que ce dernier voulait gérer l’abbaye comme bon lui semblait, ce qui ne plaisait pas aux Estouteville191. Cette tension peut avoir

mené à l’arrêt temporaire des travaux de Ribaud à l’abbaye de Valmont, puisque de la Morandière cite un autre devis, postérieur à 1540, relatant les travaux qu’il restait à faire pour que la rénovation de l’église abbatiale soit complétée192. L’église abbatiale de Valmont était

presque totalement à refaire et devait être un chantier permanent.

La querelle entre Jacqueline d’Estouteville et Jean Ribaud semble s’être arrêtée vers 1550, puisqu’il a écrit une lettre à cette dernière en mentionnant qu’il recommencerait à « célébrer les messes et obits en mémoire de ses ancêtres [à Jacqueline d’Estouteville] et de faire rétablir leurs sépultures193 ». De fait, les travaux ont pu reprendre à Valmont, car la construction de la chapelle de la Vierge et de l’église abbatiale a été terminée autour de 1552. Toutefois, cette même année, Jean Ribaud renonce à son abbatiat194 aux profits de Charles Ier ou II de Bourbon195. Étant archevêque de Rouen, Charles Ier a envoyé comme

190 GABRIEL DELAMORANDIÈRE, Histoire de la Maison d’Estouteville en Normandie, 1903, p. 607. Repris

par JEAN VALLERY-RADOT, « Troisième excursion. Valmont », 1927, p. 388-389.

191 BERNARD BECK, « Le mécénat des d’Estouteville », 2003, p. 32.

192 GABRIEL DELAMORANDIÈRE, Histoire de la Maison d’Estouteville en Normandie, 1903, p. 607. 193 Arch. dép. Seine-Maritime, vers 1550, 33 J 111.

194 JEAN VALLERY-RADOT, « Troisième excursion. Valmont », 1927, p. 389. & CHARLES DE ROBILLARD DE

BEAUREPAIRE, « Note sur l’abbaye de Valmont », 1899, p. 419.

195 Selon Jules Thieury et Eugène Saulnier, il s’agit de Charles Ier de Bourbon (JULES THIEURY, Armorial des

archevêques de Rouen avec des notes généalogiques et biographiques orné de 45 blasons, Rouen, Imprimerie

Lecointe Frères, 1864, p. 72-73 ; EUGÈNE SAULNIER, Le rôle politique du cardinal de Bourbon (Charles X),

1523-1590, Paris, Librairie ancienne Honoré Champion, 1912, p. 262.). Pour Euphémie de Busserolle et Marcel

Boissière, il s’agirait de Charles II de Bourbon (EUPHÉMIE DE BUSSEROLLE, Recherches historiques sur

Fécamp et sur quelques des anciens chateaux et seigneurs du Pays de Caux, Fécamp, Ch. Hue, 1859, p. 124 ;

MARCEL BOISSIÈRE, Notice pour servir à l’histoire de Valmont, Paris, Le Livre d’histoire, 2005, p. 118). Nous croyons qu’il s’agit de Charles Ier de Bourbon, car Charles II de Bourbon est né en 1562. Il ne peut donc

représentant Abraham Vibert, son vicaire général, pour qu’il puisse s’occuper de l’abbaye de Valmont à sa place.

Les vitraux qui ornent la chapelle de la Vierge ne semblent pas être l’œuvre de Ribaud, mais bien de l’abbé Charles Ier de Bourbon et d’Adrienne d’Estouteville, fille unique

de Jean III et Jacqueline d’Estouteville. Les armoiries d’Adrienne d’Estouteville et la représentation de cette dernière sont visibles dans le coin inférieur gauche du vitrail de la Présentation de Jésus au Temple qui se trouve à la droite du retable de la Visitation de la chapelle de la Vierge (fig. 31). Les armes de Charles Ier de Bourbon et le millésime 1552 se

situent dans le coin inférieur droit du vitrail de la Visitation qui se trouve à gauche du même retable (fig. 32)196. Ce faisant, les Estouteville reprennent d’une certaine manière le contrôle de l’abbatiale de Valmont. Jean Ribaud meurt en 1558 et se fait enterrer dans la chapelle qu’il avait fait construire. En 1560, Adrienne d’Estouteville meurt et est inhumée auprès de son mari François Ier de Bourbon et de leur fils François II de Bourbon-Saint-Pol dans le caveau familial situé sous la chapelle de la Vierge197. Étant donné qu’Adrienne d’Estouteville était la dernière descendante de la branche aînée de la famille à l’étude, les autres seigneurs de Valmont n’avaient pas le même attachement vis-à-vis l’abbaye Valmont qu’avaient les Estouteville. Par la suite, cette abbaye a lentement été laissée à l’abandon.

L’abbaye de Valmont, dont les abbés étaient des abbés commendataires séculiers de 1670 jusqu’à l’implantation de la réforme bénédictine de la congrégation de Saint-Maur en 1753, a connu plusieurs événements marquants au cours des XVIIe et XVIIIe siècles198.

D’abord, deux incendies se sont abattus sur l’abbaye à quelques années d’intervalle durant le XVIIe siècle. Le cloître a pris feu le 3 octobre 1671, causant d’importants dommages sur les bâtiments à proximité. Puis, le clocher de l’église est foudroyé vers 1674, provoquant un brasier qui a détruit en grande partie le chœur de l’église, sur lequel le clocher s’est effondré199. Louis II de la Fayette, 27e abbé de Valmont, a fait réparer à la hâte les dégâts causés par ces deux incendies et a fait construire un dortoir pour accueillir de nouveaux

196 Gaignières a fait reproduire les diverses armoires qui se trouvaient dans la chapelle de la Vierge (fig. 33). 197 JEAN BENOIT DESIRE COCHET, Les églises dans l’arrondissement d’Yvetot, 1852, Tome II, Paris, Didron

& Derache, 1852, p. 164. La mère abbesse de Valmont nous a confirmer la présence d’un caveau funéraire sous la chapelle des Six-Heures où nous pouvons toujours observer l’accès, scellé, de ce caveau (fig. 34).

198 CHARLES DE ROBILLARD DE BEAUREPAIRE, « Note sur l’abbaye de Valmont », 1899, p. 421. 199 EUPHÉMIE DE BUSSEROLLE, Recherches historiques sur Fécamp, 1859, p. 154.

moines. En effet, il a, sans succès, voulu instaurer en 1676 la réforme bénédictine de Saint- Maur à l’abbaye de Valmont200. Malgré les réparations entreprises par Louis II de la Fayette,

l’abbaye de Valmont finit par être laissée à l’abandon. Lors de sa visite en 1697, l’archevêque de Rouen, Jacques-Nicolas Colbert, retrouve l’église abbatiale et plusieurs bâtiments claustraux « complètement en ruines »201. Pourtant, selon le dessin de Louis Boudan réalisé

vers 1702 pour Gaignières, l’abbaye semble être en bon état, du moins pour ce qui est de l’extérieur (fig. 35)202. Plusieurs rénovations ont été effectuées entre 1697 et 1700, telles que

la construction d’un toit en chaume pour l’église abbatiale et la consolidation de certains édifices de l’abbaye de Valmont. Les efforts déployés pour restaurer cette abbaye n’ont cependant pas été suffisants, puisque le chœur, la nef ainsi que le cloître de l’église abbatiale se sont de nouveau effondrés vers 1730. La majorité des tombeaux de cette abbaye ont probablement été endommagés lors de cet effondrement. Après l’introduction de la réforme mauriste autour de 1753, d’autres modifications ont été apportées à l’abbaye de Valmont par Henri de Lort de Serignan de Valras, 29e abbé de Valmont et évêque de Mâcon. Les Mauristes ont rénové et dallé le chœur, le sanctuaire et le chapitre de l’église abbatiale. Pour ce qui est du pavement, ils ont utilisé des dalles funéraires d’anciens abbés – dont vraisemblablement celle de Vincent Antebert, 4e abbé de Valmont – qu’ils ont morcelées en plus petites dalles de tailles similaires203. En 1771, les Mauristes ont fait voûter l’église avec un dôme de verre réalisé par le vitrier Lecoq204.

Enfin, l’abbaye de Valmont a été vendue comme bien national à la famille Bataille aux lendemains de la Révolution française, le 11 juillet 1791205. Cette abbaye n’a retrouvé sa fonction religieuse qu’en 1994, lorsque les bénédictines de Notre-Dame-du-Pré de Lisieux ont repris possession des lieux. Les moniales ont alors entrepris plusieurs rénovations, car l’abbaye avait souffert des dégâts du temps. Elles ont notamment fait reconstruire une voûte et fait restaurer les monuments funéraires toujours existants de la famille d’Estouteville : le

200 CHARLES DE Robillard deBEAUREPAIRE, « Note sur l’abbaye de Valmont », 1899, p. 427. 201 GABRIEL DELAMORANDIÈRE, Histoire de la Maison d’Estouteville en Normandie, 1903, p. 642. 202 Les dessins des monuments funéraires de l’abbaye de Valmont de la Collection Gaignières ont sans doute

été exécutés à cette même période.

203 JEAN BENOIT DESIRE COCHET, Les églises dans l’arrondissement d’Yvetot, 1852, p. 166. 204 JEAN BENOIT DESIRE COCHET, 1852, p. 154.

cénotaphe de Nicolas Ier d’Estouteville, le tombeau à gisants de Jacques Ier d’Estouteville et de Louise d’Albret, et la dalle funéraire de Robert V d’Estouteville et de Marguerite de Hotot.

L’emplacement des tombeaux dans l’église abbatiale de Valmont

L’emplacement du monument funéraire à l’intérieur d’un bâtiment ecclésial était important pour le salut de l’âme du défunt. Tout comme le lieu d’inhumation, l’emplacement

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