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Le 3 mars 1980, les psychorééducateurs accèdent au statut hospitalier grâce au décret n° 80-253.

1.2.2. Des représentations encore floues

Comme vu plus tôt, la psychomotricité peut parfois être décrite de manière simpliste et peu précise comme étant une héritière des neurosciences et de la psychiatrie, se situant entre la kinésithérapie et la psychologie. Pourquoi ne pas se décrire en fonction de ce que la pratique apporte, plutôt qu'en fonction des autres professions ? Est-il si difficile d'expliquer en quoi

consiste la psychomotricité ?

Peut-être que le corps, cher aux psychomotriciens et qui semble si familier, reste trop mystérieux. Il est impossible de tout voir d'un corps, ou même de tout sentir. Il est parfois

compliqué de contrôler son propre corps et d'identifier ou verbaliser ses tourments, de le libérer d'une tension ou de comportements à valeur protectrice, ou encore de lui accorder suffisamment d'attention. Suivant les époques et les cultures, les rapports des personnes à leur propre corps sont tellement différents qu'il n'est pas évident d'expliquer ce que la psychomotricité peut apporter ou non à chacun.

Le principe selon lequel le psychomotricien doit laisser au patient le temps dont il a besoin, et ne pas lui coller une étiquette diagnostique peut donner l'impression que la pratique psychomotrice fait preuve de légèreté face aux troubles et besoins des patients. Peut-être faudrait-il commencer par expliquer les apports des activités d'exploration, du jeu, des médiations ou autres références des psychomotriciens pour justifier leur positionnement sans

qu'ils aient l'air d'animateurs ou de gourous...

Les différentes façons utilisées pour décrire la pratique psychomotrice peuvent sembler opposées en fonction des convictions de la personne qui explique ; les psychomotriciens eux-mêmes définissent la psychomotricité avec des mêmes termes différents en fonction de leurs orientations théoriques. Parler de thérapie psychomotrice, de psychothérapie à médiation corporelle ou encore de rééducation psychomotrice semble tendre vers un soin propre aux psychomotriciens, ou vers la psychologie, ou encore vers l'idée de la rééducation fonctionnelle pure. Ces conclusions hâtives font fi des spécificités des psychomotriciens qui ne sont ni de purs rééducateurs fonctionnels, ni des psychothérapeutes. L'approche psychomotrice considère l'individu dans son entièreté, y compris dans ses fonctionnements anatomique et psychique. Cela implique que les psychomotriciens doivent acquérir des savoirs dans ces domaines sans pour autant se prétendre kinésithérapeute ou psychologue, parce que « la psychomotricité ne peut faire autrement que de convoquer et d'articuler les apports les plus fondamentalistes (des neurosciences, de la cognition, et des sciences développementales) avec les apports les plus subjectifs et relationnels de notre être (psychanalyse ou phénoménologie) ; […] à perdre un élément de ce nouage, de cette intrication subjective serrée entre corps et psyché, on perd la psychomotricité toute entière... » (JOLY, F., in GIRARDIER, N., 2016).

Les différences dans les explications données par les psychomotriciens pour présenter leur métier peuvent aussi être dues à la diversité des lieux d'exercice. Suivant la vocation de la

structure dans laquelle un psychomotricien travaille, il peut avoir des missions et des pratiques différentes. Un psychomotricien exerçant en crèche ne décrira pas ses actions de la même façon qu'un psychomotricien libéral ou hospitalier par exemple.

La nomenclature de la PCS-ESE des professions et catégories socioprofessionnelles des emplois salariés des employeurs privés et publics publiée en septembre 2017 par l'Insee situe plus clairement la psychomotricité :

Professions intermédiaires de la santé et du travail social

Masseur kinésithérapeute et

rééducateur

Autres professionnels

de la rééducation Spécialistes de l'intervention socio-éducative

Masseur kinésithérapeute Psychomotricien, orthophoniste, pédicure-podologue orthoptiste, diététicien

Éducateur spécialisé Éducateur de jeunes enfants

Professionnels salariés réalisant, de façon manuelle ou

instrumentale, des actes entrepris à des fins de rééducation, dans le but de prévenir l'altération des capacités fonctionnelles, de concourir à leur maintien et, lorsqu'elles sont altérées, de les rétablir ou d'y suppléer.

Professionnels diplômés qui exercent des actions thérapeutiques de rééducation sur prescription médicale, ainsi éventuellement que des soins hygiéniques ou esthétiques. Concourt à l'éducation d'enfants, d'adolescents ou au soutien d'adultes présentant un handicap ou des difficultés d'insertion. Par le soutien qu'il apporte, soit en milieu ouvert, soit dans des

institutions sociales ou médico-sociales par les projets qu'il élabore, il aide les personnes en difficulté à restaurer ou à préserver leur autonomie. Il favorise également les actions de prévention.

Spécialiste de la petite enfance, ses fonctions se situent à trois niveaux : éducation, prévention,

coordination. Il intervient auprès des enfants de 0 à 7 ans qui se situent hors de leur cadre familial, soit temporairement, soit de façon permanente. Il s'attache à favoriser le développement global et harmonieux des enfants, en stimulant leurs potentialités intellectuelles, affectives, artistiques.

Professions libérales exercées sous statut de salarié ; cadres et professions intellectuelles supérieures

Psychologue, psychanalyste, psychothérapeute (non médecin)

Professionnels non docteurs en médecine chargés d'analyser les phénomènes de la vie affective, intellectuelle et comportementale des personnes. Ils peuvent être chargés de mettre en œuvre des thérapies destinées à améliorer l'état psychologique de leurs patients.

Cette nomenclature sépare les psychologues, psychanalystes et psychothérapeutes des professions intermédiaires de la santé et du social dont font partie les masseur- kinésithérapeutes, les psychomotriciens et les éducateurs. Sans grande surprise, les psychologues, psychanalystes et psychothérapeutes ont pour particularité de viser à améliorer l'état psychique des patients.

Dans les professions intermédiaires de la santé et du social, les masseur- kinésithérapeutes ont leur propre sous-catégorie. Leur spécificité est donc la rééducation et la prévention des capacités fonctionnelles des patients.

Les psychomotriciens appartiennent, avec les orthophonistes, les orthoptistes, les pédicure-podologues et les diététiciens, à la sous-catégorie des autres professionnels de la rééducation. Ils sont alors séparés des éducateurs qui appartiennent à la sous-catégorie des

spécialistes de l'intervention socio-éducative.

Les éducateurs spécialisés ont un rôle de soutien auprès de personnes en difficulté alors que les éducateurs de jeunes enfants ont un rôle d'éducation, de prévention et de coordination. Ils stimulent les capacités d'enfants de moins de 7 ans pour favoriser un développement harmonieux.

Il reste encore à différencier les psychomotriciens des autres professionnels de la rééducation. D'après le décret de compétence, les psychomotriciens sont habilités « à accomplir, sur prescription médicale et après examen neuropsychologique du patient par le médecin, les actes professionnels suivants :

1. Bilan psychomoteur.

2. Éducation précoce et stimulation psychomotrices.

3. Rééducation des troubles du développement psychomoteur ou des désordres psychomoteurs suivants au moyen de techniques de relaxation dynamique, d'éducation gestuelle, d'expression corporelle ou plastique et par des activités rythmiques, de jeu, d'équilibration et de coordination :

- retards du développement psychomoteur ;

- troubles de la maturation et de la régulation tonique ; - troubles du schéma corporel ;

- troubles de la latéralité ;

- troubles de l'organisation spatio-temporelle ; - dysharmonies psychomotrices ;

- troubles tonico-émotionnels ;

- maladresses motrices et gestuelles, dyspraxies ; - débilité motrice ;

- inhibition psychomotrice ; - instabilité psychomotrice ;

4. Contribution, par des techniques d'approche corporelle, au traitement des déficiences intellectuelles, des troubles caractériels ou de la personnalité, des troubles des régulations émotionnelles et relationnelles et des troubles de la représentation du corps d'origine psychique ou physique. »

Découlent de ce décret les missions de dépistage de troubles psychomoteurs, grâce à l'utilisation de bilans psychomoteurs, mais aussi d'éducation psychomotrice, de rééducation et de soin. Il n'est donc pas question d'effectuer une rééducation propre aux kinésithérapeutes ou autres professionnels de la rééducation, ni une psychothérapie, mais de rééduquer des syndromes dits psychomoteurs, ou de participer au traitements de troubles touchant des fonctions psychomotrices et pouvant être d'origine psychique.

La confusion peut se faire sur l'éducation et la stimulation psychomotrice, et le travail des éducateurs de jeunes enfants auprès des tout petits. L'éducateur de jeunes enfants veille à ce que l'environnement soit sécurisant et stimulant pour les enfants, et peut repérer des difficultés avant de passer le relais à un professionnel spécialisé. Le psychomotricien, de par son statut de thérapeute rééducateur, est aussi qualifié pour soutenir le développement psychomoteur d'enfants porteurs de handicap et il a un regard plus aiguisé en ce qui concerne l'apparition de troubles psychomoteurs. Il propose également des activités favorisant l'éveil

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