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La représentation sémantique en DRT

2.4 Une implémentation : Grail

2.4.3 La représentation sémantique en DRT

Comme nous l’avons présenté dans le chapitre précédent, la DRT est une théo-rie proposant de représenter la sémantique d’un discours comme une boîte (Discourse Representation Structure) dans laquelle on trouve premièrement le domaine, composé

des individus, puis les conditions d’interprétation sémantique de ce modèle. Les DRS créées se fusionnent les unes avec les autres par l’opération de "merge" et permettent d’interpréter les phénomènes de cohérence du discours comme par exemple la résolu-tion des anaphores pronominales. La descriprésolu-tion en λ -DRT des mots de la langue est simplement une variante de la description en λ -termes comme montré jusqu’ici.

Nous rappelons que la catégorie syntaxique S (qui correspond au type sémantique des phrases, les valeurs de vérités t) est un λ -terme, ou une λ -DRS dont les variables libres correspondent aux mots, et le lexique fournit des λ -termes du même type séman-tique : en les substituant et en réduisant le terme obtenu on obtient un terme normal de type t. C’est une formule logique, la représentation sémantique, et dans notre cas la λ -DRS.

Nous avons représenté de manière simplifiée le calcul en correspondance entre la dérivation dans la grammaire catégorielle de Lambek utilisée et la réduction en λ -DRT. On utilise dans cet exemple deux fois la règle d’élimination, une première fois à droite entre atteint et Cauterets puis une fois à gauche entre Azaïs et le reste de la phrase dans la figure 2.4.

Par ailleurs, il est important de montrer que la DRS finale peut exprimer une for-mule logique. Nous avons montré la traduction entre λ -terme et forfor-mule logique du premier ordre multisorte, ici il faut ajouter deux éléments pour que la traduction soit effective. Les éléments du domaines sont quantifiés par des existentiels, tandis que les conditions d’interprétation sont articulées par des conjonctions :

∃x∃y.atteindre(x, y) ∧Cauterets(x) ∧ Azaïs(y)

Puis on donne la représentation sémantique en DRS en figure 2.5. Le traitement des entités nommées est quelque peu divergente de celle introduite par notre présentation de la DRT. Ici les entités sont notées comme peuplant le domaine d’une DRS chacun mais qui est accessible pour la DRS contenant le prédicat atteindre. Par ailleurs c’est un traitement spécifique aux entités nommées qui dans chacune de ces DRS lie le mar-queur référentiel x0et y0à l’unité linguistique nom lui correspondant. Ici, Cauterets et Azaïsne sont plus des prédicats unaires appartenant à l’ensemble Name présenté plus tôt mais des arguments du prédicat nommé().7Par ailleurs, la variable z0représente l’évènement, terme auquel nous préférons éventualité afin de désigner sans distinction pour le moment les évènements des états par exemple. Nous dirons simplement que cette variable est une réification de l’éventualité qui permet de la manipuler et ainsi de la situer temporellement8

La syntaxe garantit que la représentation sémantique est bien formée conformément au principe de la compositionnalité. Néanmoins, c’est dans l’entrée du lexique séman-tique (du côté système, reflet du lexique du français) qu’il faut injecter les informations que l’on souhaite extraire de la représentation sémantique (en discours, des énoncés).

7. Néanmoins, c’est bien un seul univers du discours qui nous intéresse ici, les deux DRS entre parenthèse exprimant les présuppositions, que l’on peut se représenter comme appartenant au contexte. On peut les lire comme Il existe x0un individu dans le contexte nommé Azaïs. Par ailleurs avant de fusionner deux DRS, il faut d’abord résoudre les présuppositions si elles posent certaines ambigüités, que nous ne détaillons pas ici. 8. Nous ne précisons pas pour le moment la signification de temps(z0) ◦ maintenant que nous introdui-sons dans les chapitres suivants.

2.4. UNE IMPLÉMENTATION : GRAIL

FIGURE2.4 – Exemple de réduction sémantique simplifiée à partir de la structure syn-taxique pour l’exemple Azaïs atteint Cauterets

FIGURE2.5 – Représentation sémantique par Grail de la phrase : Azaïs atteint Caute-rets

Par exemple pour les positions sujet et objet dans la phrase, pour une bonne partie des verbes transitifs tels que manger on veut distinguer qui mange et qui est mangé,

au-FIGURE2.6 – Sortie sémantique de Grail, analyse de la phrase : La reine de Hollande traverse le Vignemale pour aller de Cauterets à Gavarnie par la Hourquéte.

FIGURE2.7 – Détail de la sortie sémantique de Grail, analyse de la phrase : La reine de Hollande traverse le Vignemale pour aller de Cauterets à Gavarnie par la Hourquéte.

trement dit les rôles thématiques de l’agent et du patient peuvent être respectivement représentés au sein de la structure syntaxique de la phrase par le sujet et l’objet à la voie passive.

On donne en figure 2.7 une autre sortie de Grail pour l’exemple 5.3, introduit plus tôt. Dans cette figure, les prédicats aller et traverser établissent une relation entre trois arguments, le premier est une réification de l’éventualité (évènement) qui lui est atta-chée, et les second et troisième arguments sont des marqueurs référentiels propres aux personnes et lieux. Plus précisément, la reine dont le marqueur référentiel est z0est le second argument du prédicat traverser, ici, son sujet. z1, marqueur référentiel pour le

2.5. CONCLUSION

Vignemale, est le troisième argument du prédicat traverser, et dans le cas présent, son objet.

Pour ce qui est du prédicat aller, il établit une relation entre un sujet y2dont on donne l’information qu’il est l’agent de l’évènement x2, évènement associé à traverser. Autrement dit, l’agent de l’évènement traverser est aussi impliqué dans la relation proposée par le prédicat aller. On comprend ici que la reine de Hollande est à la fois la personne qui "traverse" et qui "va". Le dernier argument du prédicat aller est y1 c’est-à-dire le marqueur référentiel pour Cauterets, on comprend qu’ici, le dernier argument de la relation aller est donc Cauterets. Malheureusement, cet argument devrait être l’origine mais code en réalité la destination, le lexique au moment de ce travail n’ayant pour entrée pour le verbe aller que deux possibilités, aucun des deux ne codant l’origine comme une de ses arguments. On représente dans un petit tableau la correspondance entre premier, second et troisième argument des prédicats traverser et aller :

traverser (x2, z0, z1 ) "la reine" "le Vignemale" aller (z2, y2, y1 )

=agent(x2) "Cauterets" = z0

"la reine"

La préposition à prend deux argument un lieu origine et un lieu destination, à savoir y1

et y0, respectivement Cauterets et Gavarnie. "La reine" "traverse le Vignemale" et "va de Cauterêt" "à Gavarnie". Il y a aussi une relation de but entre l’évènement "traverser" et l’évènement "aller", qui est porté par la préposition pour. Le Vignemale, Cauterets et Gavarnie sont tous trois dans le lexique sémantique pour lequel on a spécifié qu’ils étaient des lieux, voire on a même spécifié que le Vignemale était une montagne (mou-tain), tandis que la Hourquéte, n’est pas dans le lexique, néanmoins, il a été analysé comme étant une entité nommée à juste titre.

Le typage du lexique permet de vérifier de manière stricte la bonne formation de la représentation. Nous souhaitons intégrer à ce lexique sémantique les informations né-cessaires à l’extraction des itinéraires dans le discours. Nous avons donc choisit de tra-vailler sur les représentations sémantiques de la temporalité des événements de dépla-cement ponctuant le récit de voyage. Les exemples développés jusqu’ici montrent les possibilités de représenter des relations entre personnes et région par exemple, ce qui permet de donner les localisations d’un voyageur mais que faire d’une phrase telle que Azaïs quitta Cauteretsou encore Azaïs quittera tous les ans Cauterets pour quelques jours?

2.5 Conclusion

Nous avons présenté les bases du calcul syntaxique et sémantique qui régissent les analyses de l’un et de l’autre. Nous avons montré en quoi le principe de composition-nalité était respecté dans le détail du traitement opéré par Grail. Et enfin nous avons

montré le rôle prépondérant d’un lexique sémantique sophistiqué dans le cadre d’une telle analyse. Le traitement étant entièrement basé sur un système logique typé, dont les règles sont implémentées, il permet une analyse complètement automatique, qui nécessite un enrichissement du lexique pour affiner les représentations sémantiques et extraire les informations désirées. Néanmoins les seules informations extraites pour le moment dans le lexique tel que présenté sont les relations et les individus, nous abor-dons dans le chapitre suivant les méthodes pour traiter la temporalité des évènements en sémantique formelle.

Chapitre 3

De la temporalité des

éventualités pour la sémantique

formelle

Dans ce chapitre nous introduisons différents aspects du traitement de la temporalité des éventualités en sémantique formelle. Nous posons tous les concepts utiles à la compréhension des enjeux d’une telle tâche et contrastons les réponses apportées par les théories présentées. Plus préci-sément, nous abordons tout d’abord deux propositions phares, la première émanent d’Elements of Symbolic Logic de Reichenbach et la seconde de Maintaining knowledge about temporal intervalsd’Allen. Le premier per-met d’introduire la notion de système compositionnel du temps d’un verbe conjugué, et le second, les relations bases du modèle d’interprétation du temps le plus utilisé dans la communauté scientifique, les relations mini-males entre intervalles. Nous introduisons ensuite les théories de Vendler, Pustejovsky et Moens et Steedman, trois propositions traitant de la struc-ture des éventualités, c’est à dire trois typologies des éventualités basées sur leur sémantique en langue ainsi que leur sémantique une fois contex-tualisées au sein d’un énoncé. Ensuite, nous présentons les bases de deux systèmes de traitement de la temporalité des éventualités pour le français que proposent Gosselin et Battistelli. A la lumière de ces différents au-teurs, nous présentons le traitement classique de la temporalité en DRT (Kamp) et son articulation avec la SDRT pour Segmented Discourse Re-presentation Theory(Asher). Nous finissons ce chapitre par une synthèse de ces différentes théories et mettons en relief les spécifications de notre proposition.

3.1 Introduction

Dans le chapitre précédent, nous avons montré la méthode nous permettant d’obte-nir automatiquement une représentation de la sémantique d’un énoncé. Ces représenta-tions sont construites de manière compositionnelle, à partir de l’analyse syntaxique de l’énoncé et du lexique sémantique.

Nous avons présenté jusqu’à maintenant des exemples en sémantique formelle dans lesquels on observe des relations entre individus, il nous faut désormais aborder la tem-poralité de ces relations afin de leur accorder une validité en fonction du temps. Les conditions d’interprétations d’un énoncé tel que Azaïs quitte Cauterets ne sauraient être par défaut toujours vraies ou toujours fausses, particulièrement lorsqu’il s’agit d’un déplacement. Pour ceci, nous devons introduire les éléments essentiels à la présenta-tion de la sémantique de la temporalité de ces relaprésenta-tions en premier lieu, puis présenter ensuite différentes méthodes existantes pour un traitement de celle-ci en sémantique formelle.

Nous définissons dans ce chapitre plusieurs concepts importants pour le traitement de la temporalité en discours. Nous présentons tout d’abord deux propositions phares, de Reichenbach et d’Allen, permettant d’introduire d’une part la notion de système compositionnel du temps d’un verbe conjugué et de l’autre un modèle standard du temps, les intervalles temporels. Nous abordons ensuite trois théories traitant de la structure des éventualités, que nous aurons alors définies, c’est à dire trois typologies des éventualités basées sur leur sémantique en langue ainsi que leur sémantique une fois énoncés. Par la suite, nous présentons les bases de deux systèmes de traitement de la temporalité pour le français. A la lumière des différents travaux cités, nous pré-sentons le traitement classique de la temporalité en DRT et son articulation avec la SDRT pour Segmented Discourse Representation Theory. Nous finissons ce chapitre par une synthèse de ces différentes théories et mettons en relief les spécifications de notre proposition.