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Au Royaume-Uni, la Charte d’égalité Athena SWAN lancée en 2005 a pour objectif de faire progresser la représentation des femmes dans la science, la technologie, l’ingénierie, la médecine et les mathématiques. Elle permet aux organisations de demander un prix en reconnaissance de leur engagement envers l’égalité et la diversité, et de progrès en ce sens. Le programme a eu un impact favorable sur la mixité dans les institutions participantes.

Cette action doit s’accompagner d’une politique de formation et de sensi-bilisation des enseignants à ces questions, afin de les aider à détecter les biais et les inciter à mieux orienter les jeunes filles vers ces disciplines. Les chefs et cheffes d’établissement devraient être tenus pour garants de la bonne mise en œuvre des politiques éducatives en faveur de l’égalité et du numérique.

Une action nationale en faveur de la mixité dans la technologie

L’ensemble des actions en faveur de la diversité dans les entreprises du numérique pourraient être portées par une action nationale en faveur de la mixité et de la diversité dans la technologie. Co-construit avec l’ensemble des acteurs du secteur, il afficherait un objectif ambitieux et clair. Par exemple : + 30 % de femmes dans le secteur numérique d’ici à 2 ans. Ce plan pourrait être lancé via un événement d’envergure nationale. Il devrait s’appuyer sur les associations existantes, en leur donnant plus de moyens pour s’organiser et se mettre en réseau. De nombreuses associations sont en effet très présentes dans les territoires pour permettre aux femmes de prendre toute leur place dans le secteur numérique (voir encadré). Les syndicats sont également mobilisés.

Aux niveaux national et régional, différentes instances ont vocation à contribuer à l’impulsion d’une action nationale en faveur de la mixité dans le numérique, à l’instar du Haut Conseil à l’Égalité entre les femmes et les hommes, du Conseil Supérieur de l’Égalité Professionnelle entre les femmes et les hommes ou encore du Centre Hubertine Auclert (centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes).

Ces réseaux seraient constitués d’ambassadrices et d’ambassadeurs, qui seront notamment appelés à témoigner dans les écoles, les lycées et les formations supérieures, et à parrainer les nouvelles arrivantes et les nouveaux arrivants au sein de leurs organisations.

Quelques exemples d’associations pour aider les femmes à prendre toute leur place dans le secteur numérique

En France, les associations Girlz in web, Duchess France ou Women in Tech, sont actives pour essayer de faire évoluer les choses en ce domaine et pour faire profiter les femmes des opportunités offertes par le secteur du numérique. Ainsi, Girlz in web organise des événements mensuels comme des master class, des tables rondes, agit en réseau, noue des partenariats toujours dans le but de rendre plus visibles les femmes dans le monde du numérique et d’augmenter leur part dans cette économie.

Source : d’après les exemples du rapport d’information de l’Assemblée nationale no 3318, Femmes et numérique : dépasser les écueils, saisir les opportunités, Délégation aux droits des femmes, par la députée Catherine COUTELLE, décembre 2015

Afin de sensibiliser le grand public aux besoins humains du secteur du numérique et de l’IA, une large campagne nationale pourrait être menée en parallèle afin de mettre en lumière les métiers du numérique et leur ouverture aux femmes. Plus précisément, il s’agit de lancer une campagne de commu-nication visant à modifier la culture masculine du monde du numérique et à lutter contre les mécanismes d’exclusion et d’auto-exclusion. Cette campagne pourrait s’attacher à la mise en avant des biais décisionnels, des biais d’inté-gration, mais également des phénomènes d’autocensure des femmes.

Quelles sont les conséquences d’une culture hyper masculine pour les carrières des femmes ?

De nombreuses études se sont penchées sur l’importance du taux d’attrition, soit du taux de départ, des femmes dans le secteur des STEM, science, technologies sciences de l’ingénieur, mathématiques. Ainsi, aux États-Unis, dix ans après leur diplomation dans ces matières, seules 25 % des femmes travaillent encore dans le secteur (source : Women in STEM: Realizing the Potential, livre blanc STEMconnector, mars 2014).

Après dix ans d’expérience, 41 % des femmes quittent le secteur, contre seulement 17 % d’hommes (source : Women in IT: The Facts, National Center for Women and Information Technology, 2010). Il est difficile de comprendre les causes de ces départs. Les chercheurs montrent que le taux d’attrition atteint un pic en milieu de carrière, à l’âge de 35 ans, après une ou deux promotions (source : voir The Athena Factor: Reversing the Brain Drain in Science, Engineering, and Technology, 2008 et Women in IT : The Facts, National Center for Women and Information Technology, 2010, à nouveau.) Passée cette période, les femmes ont parfois le sentiment de ne pas pouvoir continuer à avancer (source : sondage Women in Tech survey réalisé aux États-Unis sur 1000 femmes du secteur des STEM, novembre 2014). Elles se sentiraient isolées dans des équipes majoritairement masculines, sans mentor, sans sponsor ni projet. Elles partent car elles se seraient également senties traitées de manière injuste, moins payées, moins susceptibles d’évoluer que leurs collègues masculins.

En 2017, les géants de la Tech ont été particulièrement touchés par des scandales liés au sexisme. Google a été au cœur d’une controverse après la prise de position d’un ingénieur dans une note diffusée en interne où il justifiait la sous-représentation des femmes dans la Tech… par des « causes biologiques ». Chez Uber, l’ingénieure Susan Fowler a évoqué une prise en compte insuffisante des cas de harcèlement sexuel par les ressources humaines, ainsi que d’autres formes de discriminations et d’humiliations quotidiennes.

2017 a également été marquée par la publication de l’ouvrage d’Ellen Pao Reset, narrant son expérience du machisme au sein de la Silicon Valley. Le sujet

ne semble pas épuisé. En 2018 est sorti l’ouvrage Brotopia : Breaking Up the Boys’ Club of Silicon Valley, d’Emily Chang, racontant les « e-parties » de la Silicon Valley, soit des soirées à forte dominante sexuelle, où les femmes ne sont invitées que pour leurs qualités physiques.

Par ailleurs, de nombreuses études ont démontré l’impact positif que pouvaient avoir les rôles modèles pour encourager les filles vers les filières scientifiques et techniques. C’est pourquoi ces campagnes pourraient mettre en avant des exemples féminins de réussite. C’est notamment ce que propose la Commission européenne dans son plan d’action pour l’éducation numérique récemment dévoilé : mobiliser les parties prenantes pour doter les filles de modèles inspirants, de rôles modèles, auxquels elles peuvent s’identifier.

Ces modèles inspirants pourraient être des femmes de notre temps, qui se réalisent avec brio dans le secteur du numérique et de l’IA, ou des figures historiques (voir encadré).

Le rôle des femmes dans le développement de l’informatique

La sous-représentation des femmes dans le secteur numérique depuis les années 1980 peut s’expliquer en partie par des facteurs sociohistoriques et notamment par le fait que les stéréotypes de l’informaticien et du geek sont de plus en plus prégnants dans l’imaginaire social. Cet imaginaire et l’absence de rôles modèles féminins ont une influence importante sur les filles mais aussi sur les garçons. Pourtant l’informatique n’a pas toujours été l’apanage des hommes. Des femmes ont été pionnières dans ce domaine.

Ainsi, le développement du premier programme informatique a été réalisé par Ada Lovelace en 1843. La première thèse en informatique a été soutenue aux États-Unis par Mary Keller. Le premier compilateur ouvrant la voie aux langages de programmation a été créé par Grace Hopper. On doit égale-ment à des femmes égaleégale-ment la programmation du premier ordinateur entièrement électronique en 1946 ou encore l’atterrissage sur la lune à des équipes dirigées par Margaret Hamilton.

Mettre en place une base de données nationale sur les inégalités entre les femmes et les hommes au travail

De nombreuses études s’attachent à identifier les facteurs qui mènent les femmes à quitter le secteur numérique. Organisation du travail, biais collec-tivement intériorisés dans les interactions, phénomènes d’invisibilisation, difficultés de promotion… : les raisons peuvent être nombreuses. Cependant, avant de commencer à agir sur l’une d’entre elles en particulier, il est nécessaire de disposer de données plus précises quant aux discriminations hommes-femmes à l’œuvre, au sein des entreprises.

Si les milieux de l’informatique et de l’IA sont peu attractifs pour les femmes, pour des raisons qui peuvent être complexes à formaliser, ils peuvent aussi l’être pour des raisons qui peuvent être pointées de manière objective. Il serait donc utile de constituer une base de données permettant de les identifier, dans ce secteur, comme dans les autres.

Quantifier les inégalités au travail

La contribution à cette base de données pourrait être rendue obligatoire, à l’instar des obligations de reporting RSE qui s’appliquent aux grandes entreprises. Cette base permettrait ainsi de mesurer les progrès accomplis d’année en année et de donner un cap aux politiques publiques. Ce corpus n’a pas pour objectif de dénoncer une entreprise particulière, mais de faire avancer la réflexion collective et l’analyse publique. Les données qui seraient rendues publiques seraient donc anonymisées. Les entreprises qui auraient contribué à cette base pourraient s’en prévaloir et mettre en avant leur ambition de diversité (voir encadré). Cette base de données devrait également être alimentée par la puissance publique, afin d’encourager son exemplarité dans ce domaine. Cette base de données devrait être exigeante dans les indicateurs retenus :

– taux de mixité comex et comdir ; – taux de mixité dans les équipes ;

– taux de mixité dans les nominations, les promotions et les embauches ; – taux de mixité par niveau hiérarchique et par type de poste ;

– différence de salaire sur différents postes, à différents niveaux hiérarchiques ;

– soutien à l’intrapreunariat et à la constitution de réseaux féminins.

S’inspirer des indicateurs produits par le Syntec numérique sur la fémi-nisation des métiers du numérique

Créé en juillet 2011, le Programme Femmes du Numérique du Syntec numérique a pour objectif de promouvoir l’égalité entre les hommes et les femmes dans l’écosystème numérique et de mettre en avant l’attractivité de la profession auprès des jeunes femmes. À cette fin, Femmes du numérique s’est doté d’indicateurs référents pour suivre les efforts accomplis dans le secteur du numérique en vue de favoriser l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. Cette enquête pourrait ainsi fournir des éléments dans le cadre de la base nationale proposée.

Cette base de données permettrait de mesurer l’impact des actions engagées en matière d’égalité et de mixité. La production de ces indicateurs et la gouvernance de cette base pourraient être pilotée par le Conseil Supérieur de l’Égalité Professionnelle entre les femmes et les hommes (CSEP) dans le cadre de sa mission d’évaluation et du suivi des politiques relatives à l’égalité professionnelle.

Promouvoir la transparence des processus de recrutement et de promotion Il est nécessaire d’accompagner cette politique de la donnée d’une politique de transparence sur les processus de recrutement et de promotion. Si les processus sont souvent formalisés dans les grands groupes, ils le sont moins dans les petites entreprises et les startups. En lien avec la FrenchTech, une action de sensibilisation à la transparence dans la gestion des ressources humaines pourrait être mise en place. Cette action pourrait être accompa-gnée d’une mise à disposition de conseils pour les jeunes entreprises sous dotées en compétences RH.

Mener une enquête permettant de mesurer effectivement les discriminations entre les femmes et les hommes dans le secteur du numérique

Deux entrepreneures ont récemment fait l’exercice de se doter d’un colla-borateur masculin fictif, et ont constaté un changement de considération important de la part des financeurs et investisseur3. Cette expérience intéres-sante et alarmante mérite d’être prise au sérieux.

Une action d’évaluation pourrait être menée, pourquoi pas via des A/B tests mesurant la différence de financements obtenus avec ou sans collaborateur masculin. Toutes choses égales par ailleurs (égalité de qualification, identité de proposition de valeur etc.), l’enquête pourrait permettre de mieux mesurer l’existence, ou non, de biais de financement, de recrutement ou tout autre élément décisif pour la progression de carrière, de perception des femmes – par les femmes ou les hommes – dans leur rapport à l’ambition, à la compé-tition et à l’argent.

Favoriser la recherche en IA en faveur de la détection des discriminations

Il existe déjà des solutions permettant d’identifier les discriminations profes-sionnelles. Ainsi, la société Palatine analytics, en analysant des enquêtes, des témoignages d’employés, des données salariales, de promotion etc. a pu détecter de nombreux biais en défaveur des femmes. Il serait intéressant de favoriser la recherche permettant de développer des solutions similaires.

Réserver des fonds en faveur de la diversité

Un fonds en faveur de projets développant des IA inclusives et non discri-minantes pourrait être mis en place chez BPI France ou à la FrenchTech, également en faveur d’entreprises du numérique porteurs de projets à fort impact social et environnemental, et s’engageant en faveur de la diversité et de la mixité. Par exemple, des projets en IA liés au débiaisage des données utilisées par les algorithmes d'apprentissage pourraient être soutenus. Les entreprises financées devront être particulièrement actives dans la promo-tion de la diversité au sein de leurs effectifs, et s’engageront à témoigner au sein des écoles.

Des bourses d’étude et de recherche pourraient également être prioritaire-ment octroyées par le secteur privé à des femmes et des personnes issues des minorités, ou socialement défavorisées. À titre d’exemple, la Fondation L’Oréal récompense les femmes scientifiques et met en valeur leur travail avec le programme Pour les femmes et la science.

Développer la médiation numérique et l’innovation sociale pour que

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