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des centaines d’enfants des établissements de Seine-Saint-Denis n’avaient pas d’ensei-gnants ou se sont retrouvés face à des enseignants contractuels qui n’avaient reçu aucune formation. Face à cette situation alarmante, plusieurs parents d’élèves ont constitué le Collectif des Bonnets d’ânes et ont saisi le Défenseur des droits.

Après examen des faits, le Défenseur des droits a caractérisé l’existence d’une rupture du principe d’égalité des usagers devant le service public, reconnu constitutionnelle-ment. En conséquence, il a notamment été recommandé au ministère de l’Education nationale d’évaluer les besoins dans cette académie « de poursuivre le mouvement de rééquilibrage concernant l’ancienneté des enseignants […] et de prendre les disposi-tions leur permettant de rester durablement attachés aux établissements dans lesquels ils sont affectés  », démontrant ainsi une volonté de lutter contre le cumul des inéga-lités sociales et territoriales.

Afin de répondre aux difficultés rencontrées dans le département de la Seine-Saint-Denis, le ministère de l’Education nationale a présenté le 19 novembre 2014 le plan triennal d’action « 9 mesures pour les écoles de Seine-Saint-Denis  ». S’étendant jusqu’en 2017, le plan prévoit une série de mesures en matière de création d’emplois, d’affectation des ensei-gnants titulaires, d’accroissement des réseaux d’éducation prioritaire, d’accompagnement et de formation des enseignants contrac-tuels et enfin, d’amélioration de l’organisation administrative de l’académie de Créteil. Tout en relevant les efforts engagés par le minis-tère de l’Education nationale en termes de renforcement des moyens d’enseignement

de ressources humaines et de révision des procédures, le Défenseur des Droits continue de s’interroger sur le caractère suffisant des moyens déployés pour rendre effectifs, dans la ville de Saint-Denis, l’ensemble des objec-tifs relaobjec-tifs à la présence d’enseignants dans toutes les classes, l’absorption de la crois-sance démographique et ceux de l’éducation prioritaire.

En effet, le Défenseur des droits a de nouveau été saisi par les réclamants, réunis au sein du collectif du «  ministère des bonnets d’âne », qui indiquent que des diffi-cultés de remplacement des enseignants absents se sont à nouveau manifestées au cours de l’année 2015/2016. Les nombreux témoignages adressés au Défenseur des droits, concernant principalement des écoles de la commune de Saint-Denis mais aussi d’autres établissements du départe-ment, font état de problèmes récurrents et persistants de succession de remplaçants

devant les élèves sur plusieurs semaines ou d’absence de remplacement des ensei-gnants. Outre la perte d’heures de cours, cette situation entraîne la répartition des élèves dans les classes dont les enseignants sont présents, avec pour effet de surcharger les classes, de rendre plus difficiles les conditions de travail des enseignants et de favoriser l’échec scolaire des enfants qui relèvent de territoires déjà défavorisés.

Cette situation porte donc atteinte au droit de l’enfant à l’éducation garanti par la CIDE et l’Etat doit en faire plus pour respecter ses obligations en matière de recrutement et de gestion du personnel, d’une part, et une juste répartition des moyens afin d’assurer en particulier l’égalité d’accès au service public, d’autre part128.

Décision MSP-2015-262 du 9 novembre 2015 relative aux difficultés rencontrées par des élèves de la commune de Seine-Saint-Denis à la rentrée scolaire 2014

Recommandation 18

Le Défenseur des droits recommande au ministère de l’Education nationale de dresser un bilan des besoins des écoles du département de la Seine-Saint-Denis, de continuer à mobiliser les ressources nécessaires en vue de pouvoir atteindre l’ensemble des objectifs fixés au titre de l’éducation prioritaire. Il recommande également au ministère de l’Education nationale de poursuivre le mouvement de rééquilibrage concernant l’ancienneté des enseignants au sein des écoles de la commune de Saint-Denis et de prendre les dispositions leur permettant de rester durablement attachés aux établissements dans lesquels ils sont affectés.

Si ce constat illustre une rupture du principe d’égalité dans le système éducatif français, cette situation ne doit pas masquer les réussites individuelles. Fort heureusement, de nombreux enfants issus de familles défavorisées et résidant dans des quartiers populaires parviennent à réussir leur scola-rité brillamment malgré les obstacles et les carences de l’institution scolaire. L’origine sociale peut être un facteur de motivation qui

pousse l’élève à se dépasser et à dépasser les préjugés pour réussir sa scolarité, pour peu que le climat scolaire soit bienveillant et que l’enfant puisse se sentir suffisamment soutenu, en confiance et valorisé par ses enseignants.

Cette influence des interactions élèves/

enseignant sur la motivation des élèves a été ainsi notamment démontrée dans une étude financée par le Défenseur des droits129.

De manière plus globale, la loi n° 2013-595 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République du 8 juillet 2013 a redéfini les principes fonda-mentaux sur lesquels doit s’appuyer désor-mais le service public de l’éducation « conçu et organisé en fonction des élèves et des étudiants. Il contribue à l’égalité des chances et à lutter contre les inégalités sociales et territoriales en matière de réussite scolaire et éducative. Il reconnaît que tous les enfants partagent la capacité d’apprendre et de progresser. Il veille à l’inclusion scolaire de tous les enfants, sans aucune distinc-tion. Il veille également à la mixité sociale des publics scolarisés au sein des établis-sements d’enseignement. Pour garantir la réussite de tous, l’école se construit avec la participation des parents, quelle que soit leur origine sociale. Elle s’enrichit et se conforte par le dialogue et la coopération entre tous les acteurs de la communauté éducative ».

Dans ce cadre, la refonte de l’éducation prioritaire, préfigurée à la rentrée 2014 et pleinement mise en œuvre depuis la rentrée 2015, s’inscrit dans l’objectif de corriger l’impact des inégalités sociales et écono-miques sur la réussite scolaire. Cet objectif doit se traduire très concrètement par une réduction à moins de 10 % des écarts entre les élèves scolarisés en éducation prioritaire et ceux scolarisés hors éducation prioritaire dans la maîtrise des compétences de base en français et en mathématiques sans que les résultats globaux ne baissent.

Pour cela, un ensemble de 14 mesures-clés ont été définies autour de trois axes : 1) des élèves accompagnés dans leurs appren-tissages et dans la construction de leur parcours scolaire ; 2) des équipes éducatives formées, stables et soutenues ; 3) un cadre propice aux apprentissages.

Relevons que ce plan est issu d’importants travaux sur la refondation de l’éducation prioritaire, conduits durant l’année 2013 dans le cadre d’une démarche d’évaluation des politiques publiques mais que les délais rapportés aux objectifs restent flous130. A cet égard, le diagnostic dresse un bilan de l’Education prioritaire globalement plutôt décevant même s’il est difficile d’évaluer ce qui se serait passé sur la même période hors politique d’éducation prioritaire.

Le ministère de l’Education nationale a également entrepris une réforme de l’allo-cation des moyens pour toutes les écoles et tous les collèges afin de réduire les inégalités territoriales et donner plus de moyens aux départements et aux territoires infra-dé-partementaux qui en ont le plus besoin.

Le nouveau modèle de répartition déployé depuis la rentrée 2015, qui ne se limite plus au critère démographique, vise à tenir compte des caractéristiques sociales et territoriales constatées au niveau des communes et à les agréger au niveau départemental et acadé-mique, traduisant ainsi l’hétérogénéité des situations locales et autorisant un réglage plus fin de l’allocation de moyens.

Recommandation 19

Le Défenseur des droits recommande au gouvernement de poursuivre sa réforme de l’éduca-tion et d’évaluer cette politique publique afin d’atteindre les objectifs énoncés à l’article L. 111-1 du code de l’éducation.

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