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Le renforcement de la subsidiarité entre les collectivités territoriales grâce à l’exercice du pouvoir territorial par l’État

116. L’idée de subsidiarité vise à désigner le niveau le plus adéquat pour l’exercice d’une compétence donnée. Son rôle peut être rendu par des formules impératives : « [elle] traduit la nécessité de », « [elle] veut que »363. Elle fait partie de ces « standards de “bonne gestion” »364, « de [ces] normes, de [ces] principes, de [ces] styles, de [ces] représentations, ou de [ces] croyances » partagés365. La subsidiarité imprègne les stipulations de l’article 5 du Traité sur l’Union européenne aux termes duquel, « dans les domaines qui ne relèvent pas de sa compétence exclusive, l’Union intervient seulement si, et dans la mesure où, les objectifs de l’action envisagée ne peuvent pas être atteints de manière suffisante par les États membres, tant au niveau central qu’au niveau régional et local, mais peuvent l’être mieux, en raison des dimensions ou des effets de l’action envisagée, au niveau de l’Union ».

117. La France a embrassé ce mouvement, en deux temps. D’abord, l’idée de subsidiarité a été affirmée dans la Constitution française à l’occasion de la révision constitutionnelle du 28 mars 2003. L’article 72, alinéa 2, de la Constitution est ainsi rédigé : « Les collectivités territoriales ont vocation à prendre les décisions pour l’ensemble des compétences qui peuvent le mieux être mises en œuvre à leur échelon. » La révision constitutionnelle a annoncé la ratification de la Charte européenne de l’autonomie locale366 qui stipule, à l’article 4,

363 B. FAURE, Droit des collectivités territoriales, op. cit., p. 481.

364 J. CAILLOSSE, Les « mises en scène » juridiques de la décentralisation : sur la question du territoire en droit

public français, LGDJ, coll. « Droit et société », n° 52, 2009, p. 207. Adde J.-F. BRISSON, « Les nouvelles clefs constitutionnelles de répartition matérielle des compétences entre l’État et les collectivités locales », AJDA 2003, p. 531.

365 R. PASQUIER, « Politiques européennes : les paramètres européens qui font bouger les lignes », Pouvoirs locaux, n° 81, 2009, p. 37.

366 Loi n° 2006-823 du 10 juillet 2006 autorisant l’approbation de la Charte européenne de l’autonomie locale, adoptée à Strasbourg le 15 octobre 1985, JO du 11 juillet 2006, p. 10335.

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paragraphe 3, que « l’exercice des responsabilités publiques doit, de façon générale, incomber, de préférence, aux autorités les plus proches des citoyens ; [et que l’] attribution d’une responsabilité à une autre autorité doit tenir compte de l’ampleur et de la nature de la tâche et des exigences d’efficacité et d’économie ».

Alors que la subsidiarité fait intervenir des considérations tenant à l’efficacité de l’action publique367, la Charte affirme la proximité des citoyens comme premier principe de répartition des compétences. La Charte semble ne donner qu’un rôle secondaire à l’efficacité en mettant l’accent sur la proximité. Le principe qui veut que les compétences soient exercées au niveau le plus proche du citoyen peut céder pour des considérations tenant à l’efficacité. Si la répartition des compétences ne se fait pas en considérant la proximité, alors elle doit se faire à en considérant l’efficacité. Certes, s’opposent ainsi la logique européenne fondée sur « la proximité démocratique du pouvoir de décision » et la « logique [française] plus technocratique exclusivement axée sur l’efficacité de l’action publique »368. Mais la divergence doit être relativisée dans la mesure où la Charte semble postuler l’interdépendance entre les idées d’efficacité et de proximité. La Charte privilégierait l’action des autorités les plus proches des citoyens parce que leur action est présumée plus efficace en raison, précisément, de leur proximité. Le fait que cette présomption peut être renversée explique la deuxième partie du paragraphe 3 de la Charte : proximité ne rimant pas toujours avec efficacité, on peut alors ne s’intéresser qu’à l’efficacité. La proximité n’est privilégiée par la Charte que parce qu’elle est un indice, voire le facteur, de l’efficacité de l’action publique. Par conséquent, l’idée d’efficacité sous-tend l’intégralité de l’article 4, paragraphe 3, de la Charte. D’ailleurs, comme le rapport explicatif de la Charte le signale369, la proximité ne doit pas s’opposer à l’efficacité de l’action publique. Et la Charte n’implique pas de décentraliser une compétence à une collectivité seulement pour sa proximité alors même que, en raison de sa nature ou de sa taille, cette collectivité ne pourrait l’assumer.

367 Du latin subsidium : réserve ; secours, renfort ; aide, appui ; refuge, asile. B. AUZANNEAU et Y. AVRIL,

Dictionnaire latin de poche, Le livre de poche, 2000.

368 J.-F. BRISSON, « Les nouvelles clefs constitutionnelles de répartition matérielle des compétences entre l’État et les collectivités locales », loc. cit., p. 529.

369 Voir Rapport explicatif sur la Charte européenne de l’autonomie locale, STE n° 122, [http://conventions.coe.int/Treaty/FR/Reports/Html/122.htm], (page consultée le 30 août 2011).

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118. Dès 2003, des doutes surgirent quant à l’effectivité du principe de subsidiarité pour la ventilation des compétences entre les collectivités territoriales et l’évaluation ex post les confirmera370. Le professeur Brisson note à propos de l’article 72, alinéa 2, que « son énoncé, qui s’inspire du principe de subsidiarité, ne fournira sans doute ni à la loi, ni aux juges, ni même à la doctrine la clef qui manquait à l’explication de notre système administratif de répartition des compétences [et que] le principe de subsidiarité ne permet en effet d’établir aucune délimitation matérielle des compétences locales […] ». En réalité, cet article pose bien, en des termes contraignants, l’obligation pour le législateur de répartir les compétences entre les collectivités territoriales en tenant compte de la subsidiarité (§1). En revanche ce principe, effectif, se révèle peu efficace pour répartir les compétences entre les collectivités territoriales. Le manque d’efficacité du principe de subsidiarité doit être imputé non à l’énoncé constitutionnel mais à la carte des collectivités territoriales. Aussi l’exercice du pouvoir territorial permettrait de renforcer l’efficacité du principe de subsidiarité (§2).

§1. L’obligation pour le législateur de respecter le

principe de subsidiarité lors de la répartition des

compétences entre les collectivités territoriales

119. L’énoncé du principe de subsidiarité n’en affecte pas l’effectivité. Tel qu’énoncé à l’article 72 de la Constitution, le principe de subsidiarité trouve à s’appliquer à la répartition des compétences entre collectivités territoriales (A) et il en découle des obligations pour son destinataire (B).

370 Voir J.- L. WARSMANN, La clarification des compétences des collectivités territoriales, op. cit., p. 29 : « Toutefois, les nouveaux instruments issus de la révision constitutionnelle du 28 mars 2003 (l’expérimentation, le recours au chef de file, le principe de subsidiarité) n’ont guère permis, à ce jour, de lutter contre l’enchevêtrement des compétences. »

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A. L’applicabilité du principe de subsidiarité à la répartition des compétences entre collectivités

120. Il est évident que le principe de subsidiarité ne pourrait résoudre l’enchevêtrement des compétences entre les collectivités territoriales si son énoncé le cantonnait à la ventilation des compétences entre l’État et les collectivités territoriales, prises en bloc. Mais l’énoncé du principe de subsidiarité à l’article 72, alinéa 2, de la Constitution permet d’envisager son application y compris pour la répartition des compétences entre les collectivités territoriales (1). D’ailleurs, le législateur n’a pas attendu la consécration de ce principe pour appliquer l’idée de subsidiarité dans cette hypothèse, ce qui peut constituer un indice de la volonté du constituant (2).

1. L’interprétation de l’énoncé du principe de subsidiarité

résultant de l’article 72, alinéa 2 de la Constitution

121.

Malgré son imprécision, l’énoncé du principe de subsidiarité peut être interprété comme

imposant son application par le législateur pour la répartition des compétences non seulement entre l’État et les collectivités mais également entre les collectivités.

122. La révision constitutionnelle du 28 mars 2003 est considérée comme la consécration en droit français de l’idée de subsidiarité. Pourtant, la portée du principe posé à l’article 72, alinéa 2, de la Constitution peut s’avérer incertaine tant l’énoncé est ambigu quant au champ d’application : le législateur doit-il se déterminer eu égard à la vocation des collectivités territoriales pour la ventilation des compétences uniquement entre l’État et les collectivités territoriales ou également entre les collectivités ? Ces dernières étant envisagées ensemble dans cette disposition, la subsidiarité n’est peut-être pas appelée à guider le départ des compétences entre chaque niveau. L’exposé des motifs de la loi constitutionnelle de 2003 semble corroborer cette lecture, dans la mesure où le principe de subsidiarité n’y est considéré que comme « traçant

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une ligne de partage, dans le domaine administratif, entre l’action des services de l’État et celle des collectivités territoriales »371. À l’action de l’État répond l’action de toutes les collectivités et non celle de chaque niveau de collectivités territoriales. Le professeur Marcou exprime sa conviction selon laquelle l’article 72, alinéa 2, « n’est sans doute pas de nature à autoriser le Conseil constitutionnel à contrôler l’appréciation portée par le législateur sur la question de savoir si telle compétence pourra être mieux mise en œuvre par la commune, la région ou le département [mais que,] en revanche, [il] pourrait être opposé à une mesure de déconcentration »372. Insusceptible de donner lieu à une censure du législateur qualifiant à tort de niveau le plus adapté pour l’exercice d’une compétence un niveau de collectivités plutôt qu’un autre, l’énoncé juridique conférerait au principe de subsidiarité un champ d’application restreint à la ventilation des compétences entre l’État et les collectivités territoriales. Le Conseil constitutionnel n’a pas encore eu l’occasion d’apporter les éclairages nécessaires sur ce point puisqu’il ne s’est, pour le moment, prononcé que sur la simple déconcentration d’une compétence373. Seul l’examen d’une loi transférant une compétence à une collectivité territoriale, plutôt qu’à une autre, peut amener à se poser la question du choix entre collectivités et donc à fixer la portée exacte des dispositions de l’article 72, alinéa 2, de la Constitution374.

371 « Exposé des motifs », Projet de loi constitutionnelle relative à l’organisation décentralisée de la République, Sénat, Doc. parl. n° 24, 16 octobre 2002. Voir E. HERVÉ, Contribution à un bilan de la décentralisation. Rapport

d’information fait au nom de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, Sénat, Doc. parl.

n° 679, 28 juin 2011, p. 75.

372 G. MARCOU, « Le bilan en demi-teinte de l’Acte II : décentraliser plus ou décentraliser mieux ? », RFDA 2008, p. 300.

373 Cons. const., décis. n° 2005-516 DC du 7 juillet 2005, Loi de programme fixant les orientations de la politique

énergétique, JO du 14 juillet 2005, p. 11589 : « Il résulte de la généralité des termes retenus par le constituant que le choix du législateur d’attribuer une compétence à l’État plutôt qu’à une collectivité territoriale ne pourrait être

remis en cause, sur le fondement de cette disposition, que s’il était manifeste qu’eu égard à ses caractéristiques et aux intérêts concernés, cette compétence pouvait être mieux exercée par une collectivité territoriale. » Nous soulignons.

374 La décision du Conseil constitutionnel du 12 août 2004 ne traite pas la question du respect de l’article 72, alinéa 2, de la Constitution par la future loi du 13 août 2004 de sorte que l’observateur ne peut déterminer si le moyen tiré du principe de subsidiarité était inopérant ou s’il n’était pas fondé en l’espèce. Voir Cons. const., décis. n° 2004-503 du 12 août 2004, Loi relative aux libertés et responsabilités locales, JO du 17 août 2004, p. 14648.

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123. Il paraît douteux que le constituant, qui entendait débrouiller l’écheveau des compétences375, ait entendu n’agir que sur la répartition des compétences entre l’État et les collectivités. D’ailleurs, un mécanisme comme celui de la collectivité-chef de file, introduit par la même loi constitutionnelle du 28 mars 2003 et défini au même article 72 de la Constitution et destiné à structurer l’action commune des collectivités territoriales, témoigne de la volonté du constituant d’agir sur la ventilation des compétences entre les collectivités et de ne pas s’intéresser qu’au départ des compétences entre l’État et les collectivités territoriales. En outre, la redondance du thème de la simplification de la distribution des compétences entre les différents niveaux de collectivités territoriales376, et pas seulement entre le niveau national et le niveau local, laisse à penser que la généralité de l’article 72, alinéa 2, vise autant la répartition des compétences entre l’État et les collectivités territoriales que la répartition des compétences entre les collectivités territoriales. Aussi, pour la mission d’information présidée par Jean-Luc Warsmann, le législateur, aux termes de la Constitution, « doit s’efforcer d’éviter toute erreur manifeste d’appréciation lorsqu’il répartit les compétences entre les différents niveaux de

collectivités territoriales »377. Les rapporteurs, implicitement, étendent au transfert d’une compétence à une collectivité plutôt qu’à une autre la solution de 2005 du Conseil constitutionnel, dégagée à propos de la déconcentration d’une compétence. C’est d’ailleurs de cette façon que René Garrec interprétait le principe proposé par le projet de loi constitutionnelle sur l’organisation décentralisée de la République : « Il s’agit ainsi de donner […] un fondement à la répartition des compétences entre collectivités »378 et « de déterminer quelle sera la collectivité territoriale la mieux à même d’exercer les compétences transférées »379. De même,

375 Voir « Exposé des motifs », Projet de loi relatif à l’organisation décentralisée de la République, précité ; Voir également le député Piron pour qui la « recherche de la clarification des compétences » structure « l’acte II de la décentralisation », M. PIRON, L’équilibre territorial des pouvoirs, op. cit., p. 48.

376 Voir par exemple : Lettre de mission de M. Nicolas Sarkozy, Président de la République, adressée à Mme Michèle Alliot-Marie, Ministre de l’Intérieur, de l’Outre-mer et des Collectivités territoriales, 30 juillet 2007, [http://www.elysee.fr/elysee/elysee.fr/francais/interventions/2007/juillet/lettre_de_mission_adressee_a_mme_mi chele_alliot-marie_ministre_de_l_interieur_de_l_outre-mer_et_des_collectivites_territoriales.79197.html] (page consultée le 10 août 2009) : « Nous vous demandons de rechercher […] les moyens de clarifier les compétences des différents niveaux de collectivités locales […]. »

377 J.- L. WARSMANN, La clarification des compétences des collectivités territoriales, op. cit., p. 66. Nous soulignons.

378 R. GARREC, Le projet de loi relatif à l’organisation décentralisée de la République. Rapport fait au nom de la

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale, Sénat, Doc. parl. n° 27, 23 octobre 2002, p. 99. Nous soulignons.

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le Comité pour la réforme des collectivités locales se prononce pour une « révision générale des compétences » en distinguant chaque niveau de collectivités afin de « [donner] corps au principe de subsidiarité que la loi constitutionnelle du 28 mars 2003 a érigé en principe de valeur constitutionnelle »380.

Depuis, le législateur paraît avoir été guidé par le principe de subsidiarité, notamment dans sa loi du 13 août 2004. Pour le député Warsmann, la méthode mise en œuvre pour la détermination de la propriété de certaines infrastructures, dans le cadre de cette loi, est une « application législative du principe de subsidiarité »381. Certes, les collectivités territoriales pouvaient d’ores et déjà créer et exploiter des aérodromes au titre de la clause générale de compétence382 et il ne s’agissait que de transférer la propriété des équipements relevant de la responsabilité de l’État et non à proprement parler d’un transfert de compétences. Toutefois, la présence d’un aérodrome appartenant à l’État est susceptible d’empêcher, de fait, les collectivités territoriales d’en créer un autre, concurrent, dans le même secteur. Le transfert de cet équipement doit alors permettre aux collectivités bénéficiaires du transfert d’assumer cette compétence qu’elles n’étaient en mesure de mettre en œuvre qu’en droit. La loi du 13 août 2004 organise le transfert des aérodromes civils de l’État autres que ceux d’intérêt national ou international en confiant aux préfets la responsabilité de désigner les collectivités bénéficiaires de ces transferts dans les conditions qu’elle pose383. Dans un premier temps, les collectivités ou leurs groupements sont invités à candidater afin de devenir propriétaires des infrastructures transférées. Dans l’hypothèse d’une candidature unique, le préfet transfère l’aérodrome à la collectivité ou au groupement de collectivités candidat. Dans l’hypothèse de candidatures multiples, le préfet engage une procédure de concertation avec tous les candidats afin de parvenir à un candidat unique384, auquel le préfet transfère la propriété. À défaut de candidature unique in fine comme à défaut de candidature, le préfet désignera la collectivité bénéficiaire du transfert. L’article 28

380 COMITÉ POUR LA RÉFORME DES COLLECTIVITÉS LOCALES, Il est temps de décider, op. cit., p. 33.

381 J.- L. WARSMANN, La clarification des compétences des collectivités territoriales, op. cit., p. 21

382 Voir J.-F. BRISSON, « Aéroports décentralisés et libre administration des collectivités territoriales », RFDA 2009, p. 1153.

383 Art. 28. La méthode est similaire pour la propriété et la gestion des ports non autonomes (art. 30), pour la propriété et la gestion des cours d’eau et canaux et ports intérieurs (art. 31) et pour la propriété des immeubles classés ou inscrits (art. 97).

384 Soit par le désistement de certaines collectivités et groupements soit par l’agglomération de tous les candidats au sein d’un groupement de collectivités.

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de la loi précise que le préfet doit alors prendre en compte les « caractéristiques de l’aérodrome, notamment son trafic et sa zone de chalandise, ainsi que les enjeux économiques et d’aménagement du territoire ». La loi du 13 août 2004 s’avère irriguée par le principe de subsidiarité, d’abord en faisant intervenir les collectivités territoriales dans le processus de répartition des compétences385, ensuite et surtout, en guidant le choix du préfet par des considérations tenant à la subsidiarité en cas de candidatures multiples386.

124. En somme, l’énoncé du principe de subsidiarité ne permet pas d’exclure son application pour la répartition des compétences entre les collectivités territoriales. Au contraire, le constituant n’a sans doute pas entendu être en retrait par rapport aux pratiques antérieures du législateur qui, avant même la consécration constitutionnelle du principe de subsidiarité, a pu répartir les compétences entre les collectivités territoriales dans une optique de subsidiarité.

2. L’application traditionnelle par le législateur de l’idée de

subsidiarité dans la répartition des compétences entre les collectivités territoriales

125. Certaines dispositions législatives relatives à la distribution des compétences entre les collectivités semblent dictées par les exigences de la subsidiarité qui ont, en quelque sorte, été anticipées par le législateur. L’idée de subsidiarité n’est en effet pas étrangère au législateur

385 L’appel à candidatures est également la démarche adoptée par le législateur pour le transfert des ports non autonomes relevant de l’État (art. 30, loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, JO du 17 août 2004, p. 14545) ; Voir G. MERLAND, « La décentralisation des ports maritimes : comment désigner la collectivité territoriale bénéficiaire du transfert en cas de candidatures multiples ? », AJDA 2008, p. 1041.

386 Voir J. MOREAU, « La loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales. Caractères généraux de la loi », JCP G 2005, n° 4, p. 135 ; A. GEST, La mise en application de la loi n° 2004-809 du 13 août

2004 relative aux libertés et responsabilités locales. Rapport d’information déposé par la Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, Assemblée nationale, Doc.

parl. n° 3199, 28 juin 2006, p. 42 ; J.-F. BRISSON, « Aéroports décentralisés et libre administration des collectivités territoriales », loc. cit., p. 1154.

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lorsqu’il arrête la distribution des compétences entre les collectivités territoriales et quand il permet aux collectivités territoriales d’y déroger.

126. Le rapport Vivre ensemble d’Olivier Guichard invitait déjà le législateur à répartir les compétences entre les collectivités territoriales en tenant compte de l’idée de subsidiarité387. Aussi le professeur Brisson s’interroge : « N’était-ce pas […] déjà raisonner en termes de subsidiarité quand le législateur confia [en 1983] l’urbanisme à la commune plutôt qu’au département ou l’aide sociale au département plutôt qu’à la région ? »388 De même, la subsidiarité structure les rapports des communes avec leur intercommunalité via la notion « d’intérêt communautaire » à laquelle renvoient les dispositions législatives sur l’intercommunalité389. L’attachement – conscient ou non – du législateur à l’idée de subsidiarité transparaît surtout des dérogations qu’il envisage à la répartition initiale des compétences.

127. En aménageant des dérogations à la répartition initiale des compétences, le législateur permet l’action du niveau de collectivités a posteriori le plus pertinent pour assumer une compétence décentralisée. La démarche du législateur est alors bien guidée par l’idée de subsidiarité. L’appel à compétences offre ainsi une souplesse permettant de mieux cerner la vocation des collectivités territoriales. L’article 65, III°, de la loi n° 95-115390 prévoit que la future loi de clarification des compétences entre l’État et les collectivités locales devra déterminer « les conditions dans lesquelles [...] une collectivité territoriale pourra, à sa demande, se voir confier une compétence susceptible d’être exercée pour le compte d’une autre

387 COMMISSION DE DÉVELOPPEMENT DES RESPONSABILITÉS LOCALES, Vivre ensemble, op. cit., 432 p.

388 J.-F. BRISSON, « Les nouvelles clefs constitutionnelles de répartition matérielle des compétences entre l’État et les collectivités locales », loc. cit., p. 531. Voir également C. MOLITOR, « La subsidiarité et les collectivités