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La diffusion thermique est une propriété qui est très anisotrope à l’échelle du monocristal et elle est définie par un tenseur d’ordre 2. Elle est généralement plus anisotrope que les vitesses acoustiques. Ainsi pour l’olivine et le quartz sous conditions ambiantes, l’anisotropie maximale des vitesses d’onde de compression est d’environ 25%, alors que celle de la diffusivité thermique est d’environ 50% et 60% (Chai et al., 1996; Höfer et Schilling, 2002). La prédiction théorique de l’anisotropie de la diffusion de la chaleur dans un cristal reste un problème très peu documenté et seules des mesures sur un grand nombre de cristaux permettent de comprendre les mécanismes intrinsèques de l’anisotropie. Des liens qualitatifs entre les propriétés thermiques anisotropes et d’autres propriétés anisotropes (expansion thermique, compressibilité, vitesses acoustiques, paramètres de Grüneisen) sont possibles. D’après la discussion précédente, deux phénomènes peuvent expliquer l’anisotropie de diffusivité thermique: tout d’abord une distribution préférentielle des défauts dans le cristal ou bien des variations de la probabilité de collisions phonons-phonons qui dépendrait alors de la direction cristallographique considérée. Les défauts influençant faiblement la conductivité thermique des silicates à température ambiante et haute température, leur influence est considérée comme négligeable. Pour les collisions phonons-phonons, l’expression (2.23) n’est valable que pour les matériaux isotropes, mais certains de ses termes sont anisotropes, comme la vitesse des phonons ou le paramètre de Grüneisen. Le rôle des collisions phonons-phonons sur l'anisotropie de diffusivité thermique des cristaux est aussi suggéré par les comportements similaires entre les différentes propriétés anisotropes liées à l’anharmonicité du réseau

cristallin (diffusivité et expansion thermique, par exemple) qui montrent que l’anharmonicité contrôle l’anisotropie de ces propriétés.

De façon générale, deux remarques qualitatives peuvent se dégager des mesures de diffusivité thermique sur les silicates. La première se fonde sur la structure des silicates : la disposition des tétraèdres [SiO4]4- semble être un facteur déterminant pour la diffusion thermique. En effet, la conduction est avant tout permise par les vibrations des liaisons Si-O, qui ont un fort caractère covalent (Horai et Simmons, 1969). Pour certains silicates (en chaînes, phyllosilicates…), ces tétraèdres sont liés entre eux par liaison covalente Si-O suivant des directions ou des plans donnés, qui correspondent alors aux directions de conductivité maximales (voir données de Clauser et Huenges, 1995 pour la biotite et la muscovite). Pour l’orthopyroxène, la direction [001] est celle selon laquelle les tétraèdres sont liés entre eux par liaisons covalentes, et [001] est aussi la direction de plus forte conductivité (Chai et al., 1996).

La deuxième remarque concerne le lien avec la vitesse des phonons (vitesses acoustiques), naturellement introduit dans l’expression du libre parcours moyen. Les directions le long desquelles les vitesses acoustiques sont les plus élevées sont souvent les directions où la conduction thermique est la plus forte (e.g., Höfer et Schilling, 2002). Cependant pour des minéraux tels que les pyroxenes , le liens entre conductivité thermique et vitesses acoustiques n’est plus aussi direct et c’est l’effet de la disposition des tétraèdres qui prévaut.

Pour l’olivine, la situation est plus complexe car, d’une part, les tétraèdres ne sont pas liés entre eux et, d’autre part, les données antérieures montrent que la relation entre vitesses acoustiques et conductivité thermique n’est pas aussi évidente. Cela fera l’objet d’une discussion plus approfondie dans le chapitre 5.

Enfin, la variation de l’anisotropie en fonction de la température est mal documentée, mais l’essentiel des études montre que l’anisotropie observée à basse température se conserve à haute température (Harrell et al., 2002; Höfer et Schilling, 2002; Kobayashi, 1974). Cependant, ces études ont été conduites à pression ambiante et l’expansion thermique anisotrope peut induire aussi une contribution à l’anisotropie de conduction thermique (voir plus haut l’effet possible des variations de volume sur la conductivité). Que se passe-t-il si l’expansion thermique est compensée par la compressibilité? Une étude à 2.5 GPa sur l’olivine montre une nette diminution de l’anisotropie en fonction de la température (jusqu’à 1500K) (Schärmeli, 1982). Cependant, ce point demeure très mal documenté, car aucune autre étude à très haute pression (plusieurs GPa) ne tient compte de l’anisotropie. Compte tenu du fait que la pression ne fait que très peu varier les dépendances en température (Beck et al., 1978), on peut toutefois envisager que selon chaque direction, la dépendance en température à pression ambiante et haute pression devrait être la même et donc que la variation de l’anisotropie à basse où haute pression devrait être identique.

2.3 Transport de chaleur par le rayonnement électromagnétique.

2.3.1 Caractéristiques d’un milieu rayonnant.

Tout corps porté à une température T émet un rayonnement électromagnétique caractéristique, par l’énergie qu’il émet et par la gamme de longueur d’onde dans laquelle il rayonne. Ce sont les travaux de Planck au début du siècle qui ont permit de quantifier ce rayonnement. Pour un corps réel, l’énergie rayonnée suit la loi de Stefan-Boltzman qui lie l’excitance M d’une source à sa température :

M=E(",T).#.T4 (2.28)

Où E(λ,T) est l’émissivité (égale à l’unité pour le corps noir) et σ est la constante de Stefan-Boltzman égale à 56,71.10-9

W.m-2

.K-4.

L’énergie interne volumique spectrale εν à la fréquence ν et à la température T d’une cavité rayonnante en équilibre est :

"(#,T) = 8$h#

3

c3exp h#

kBT %1

(2.29)

où c est la vitesse de la lumière dans le milieu, h est la constante de Planck et kB est la constante de Boltzman. Le spectre d’émission du corps noir est ainsi déduit (fig. 2.3).

L’énergie rayonnée est échangée avec le milieu extérieur. Un corps a une température T échange de l’énergie Q par rayonnement avec le milieu environnant à la température T0selon:

Q=".E.(T4#T04) (2.30) 0,0E+00 2,0E+02 4,0E+02 6,0E+02 8,0E+02 1,0E+03 1,2E+03 1,4E+03

0,E+00 2,E-06 4,E-06 6,E-06 8,E-06 1,E-05

longueur d'onde (m) En e rg ie i n te rn e v o lu m iq u e s p e c tr a le (J .m -4 ) 1500K 1200K 1000K Figure 2.3 : Spectre d’émission du corps noir d’après la loi de Planck et illustration de la loi de Wien (Déplacement du maximum d’émission vers les faibles longueurs d’onde lorsque la température augmente).

qui pour des faibles gradients de température, devient :

Q = 4." .E .T03.(T # T0) (2.31)

L’échange d’énergie par rayonnement entre deux milieux de températures proches est proportionnel à leur température élevée au cube. La contribution de ce processus au transport thermique peut donc devenir très importante à haute température, ce qui justifie l’intérêt d’étudier les échanges radiatifs dans un corps soumis à un gradient de température. La quantification du rayonnement par les photons est introduite pour rendre compte, comme avec les phonons, de la quantification des niveaux d’énergie des ondes électromagnétiques. A la notion de gaz de photon sont associés les notions de capacité thermique de ce gaz et du libre parcours moyen des photons lphoton dans le milieu. L’inverse du libre parcours moyen est le coefficient d’extinction, noté αe . Pour caractériser ce libre parcours moyen par rapport aux dimensions du milieu, l’épaisseur optique t du milieu est introduite comme :

t= ds lphoton 0 l

"

= l lphoton (2.32)

où l est la dimension du milieu dans la direction de propagation étudiée et ds est un élément de longueur dans cette direction. L’intégrale se simplifie si le milieu est uniforme.

Si t < 0,1 alors le milieu est dit optiquement fin. Si t > 2-3 alors le milieu est dit optiquement épais.

Ce concept d’épaisseur optique est fondamental pour l’étude du transfert radiatif.