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et des agrégats d’olivine

5.4 Valeurs absolues de la diffusivité thermique de l'olivine et des roches mantelliques sous conditions ambiantes

5.4.1 Comparaison des trois méthodes

Les valeurs de diffusivité thermique sous conditions ambiantes obtenues par les trois méthodes sont très différentes. Pour des roches riches en olivine et isotrope, on peut retenir approximativement :

- Dmoy=1.30 mm2.s-1 pour la méthode 1 (moyenne dunite 00VS24)

- Dmoy=2.25 mm2.s-1 pour la méthode 2 (dunite OMAN, moyenne dunite 00VS24) - Dmoy=2.05 mm2.s-1 pour la méthode 3 (dunite OMAN)

La méthode 2 donne des valeurs supérieures d’environ 70% à celles de la méthode 1 et d’environ 10% à celles de la méthode 3. La différence de 10 % entre les méthodes 2 et 3 est difficilement explicable car ces deux méthodes ont été calibrées sur les mêmes matériaux (quartz et verres). Pour ces matériaux, les valeurs absolues de la diffusivité thermique obtenues avec les deux méthodes à température ambiante et à haute température (inférieures à 300-400°C, où le rayonnement n’est pas encore trop important) sont très semblables et très proches des valeurs standard. D'autre part, les mesures sur la dunite OMAN sont très reproductibles pour chacune des deux méthodes. La méthode 3 souffre d’incertitudes sur la position des thermocouples, qui peuvent entraîner une erreur d’environ 5%. La méthode 2 ne présente pas cet inconvénient et l’erreur attendue pour une roche (pour laquelle le transfert balistique est très faible) est inférieure à 3%. Une différence de 10% est toutefois acceptable pour deux méthodes dont le principe, la géométrie et le traitement des données sont très différents. Une telle différence est commune dans la comparaison entre plusieurs méthodes (e.g., Benigni et Rogez, 1997).

Par contre, la méthode 1 donne des valeurs très faibles comparées à celles obtenues par les méthodes 2 et 3. Les données à haute pression montrent qu’un mauvais contact entre la roche et le thermocouple ou le fil chauffant ne peut pas être à l’origine de cette différence. Un problème lié au principe même de la méthode pourrait par contre expliquer la sous-estimation de la diffusivité thermique par cette méthode. Le principal inconvénient de la méthode 1, comme beaucoup de méthodes utilisées pour des roches, est qu’elle ne peut pas être calibrée sur des monocristaux, mais seulement sur des céramiques [e.g., Benigni et Rogez, 1997) ou sur des roches à cause de la quantité de matériau requise. Ces céramiques sont généralement très opaques au rayonnement (grains très fins) et ne permettent pas de vérifier l’efficacité et la validité de la méthode pour des matériaux transparents ou semi-transparents tels que les roches à gros grains (comme les péridotites de cette étude). Pour des méthodes non-stationnaires (pulses ou harmoniques), les effets de transferts balistiques ou directs ne sont généralement pas décelables expérimentalement et ne sont donc pas pris en compte lors du traitement des données. La séparation des transferts balistiques et intrinsèques est uniquement possible avec la méthode 2. Les effets des transferts balistiques sont doubles : d’une part l’énergie fournie (fil chauffant) est transmise sans diffusion thermique et n’élève donc pas la température du matériau comme elle le devrait théoriquement : dans ce cas, la diffusion thermique est sous-estimée (voir modèles numériques de Chui et Gardon, (1969)). D’autre part, cette énergie fournie peut directement chauffer le thermocouple sans diffusion thermique dans le matériau, et mener à une surestimation de la diffusivité thermique. Ceci est illustré par la figure 5.11, issue des modèles de Chui et Gardon, (1969). Dans ces modèles, deux cas sont envisagés : les sources sont en contact thermique (a) ou non (b) avec l’échantillon. Dans les deux cas, une opacité α élevée permet d’équilibrer la température du matériau avec le gradient imposé par les deux sources. Les surfaces en contact avec l’échantillon sont aux températures T1 et T2 et l’équilibre s’établit grâce aux phonons. Dans le cas (a), si l’opacité est faible, les surfaces de l’échantillon ne sont pas équilibrées avec les sources et l’échantillon n’est pas chauffé (dans le cas extrême où α est nul). Si l’échantillon absorbe partiellement le rayonnement émis, il élève progressivement la température de l’échantillon, qui est alors équilibrée par la conduction thermique. Cela donne un champ de température caractéristique en forme de S. Dans le cas (b), les effets sont moins importants puisque les surfaces de l’échantillon sont nécessairement aux températures des sources. Pour limiter les effets de ce type de transfert thermique, l’équilibre thermique entre la source et la surface de l’échantillon doit être le meilleur possible. La qualité du contact thermique doit être maximale et le déséquilibre généré par la source minimal.On peut ainsi éviter la configuration (a).

Dans la méthode harmonique (3), seulement 1 à 2 watts sont fournis au maximum de l’oscillation, et la température varie faiblement au cours du temps (période du signal d’au moins 30s). L’équilibre entre l’élément chauffant et l’échantillon est toujours atteint : la

température, mesurée par le TC1 est représentative de la température à la surface supérieure de l’échantillon et donc de la condition aux limites imposée. Cette configuration peut être représentée par le cas de la figure 5.11b.

La méthode 2 correspond au cas de la figure 5.11a, avec une surface absorbante (laque d’argent). La fraction d’énergie non absorbée à la surface est transmise directement au thermocouple (partie 1 de la réponse). Celle qui est absorbée élève la température de l’échantillon par conduction thermique. Cette méthode, bien qu'induisant un déséquilibre thermique, a donc l’avantage de le caractériser clairement. Cet effet peut donc être pris en compte lors du traitement de données.

Par contre, dans la méthode 1, un pulse d'énergie de plus de 80J est délivré sur 3s, soit environ 30W. Si le matériau est transparent (un grain d’olivine par exemple), une part de l’énergie délivrée par le fil sera directement transmise par rayonnement et n'aménera pas une élevation de la température au point de contact entre le fil et le premier grain. Par conséquent, la condition aux limites appliquée à l’axe du cylindre est biaisée et la diffusivité thermique est sous-estimée. Par ailleurs, ce rayonnement direct peut atteindre le thermocouple. Dans le cas de la méthode 2, un thermocouple fin (temps de réponse très court, faible inertie) est utilisé, ce qui permet d’évaluer ce transfert direct. Pour la méthode 1, le transfert direct peut difficilement être enregistré par le thermocouple car son inertie est plus grande : il est en effet enrobé par le ciment et la roche et il intègre la température du matériau environnant. La présence d’un transfert balistique dans l’olivine (mis clairement en évidence par la méthode 2, fig. 5.4) conduit probablement à une sous estimation de la diffusivité mesurée par la méthode 1.

Figure 5.11 :Illustration de l’effet du coefficient d’absorption sur le champ de température établit dans un matériau soumis à un gradient de température. (a) les transferts aux limites de l’échantillon se font seulement par rayonnement depuis les sources de chaleur aux températures T2 et T1. (b) les transferts se font par contact thermique. L’axe vertical représente la température (T2>T1). D’après les modélisations numériques de Chui et Gardon, (1969) et Schilling et al. (2002).

Par ailleurs, bien que seulement les données de diffusivité thermique obtenues par la méthode 1 aient été exploitées (chapitre 4), les conductivités thermiques ont aussi été calculées. L’obtention de la diffusivité et de la conductivité thermique se fait au cours de la même expérience (la courbe de réponse en température permet l’évaluation des 2 paramètres – voir chapitre 3 pour la description de la méthode). Malheureusement, les mesures de conductivité ont montré d’importantes incohérences. Contrairement aux mesures de diffusivité thermique, de nombreux problèmes sont apparus. D’une part, la reproductibilité des mesures est très faible pour deux carottes différentes appartenant à une même roche et taillées dans la même direction (fig.5.12), contrairement à ce qui était observé pour la diffusivité thermique (chapitre 4). D’autre part, l’anisotropie est dans certains cas contraire à celle attendue. Enfin, les données obtenues à haute température sont très dispersées (plus de 3%). Pour les mesures de conductivité, le bilan d’énergie suppose la connaissance de l’énergie du pulse Q et de la température maximale Tmax observée au thermocouple. Conformément à la discussion précédente, un déséquilibre thermique important associé à l’émission du pulse fait que la température de l’échantillon (mesurée par le thermocouple) n’est pas nécessairement liée à la quantité de chaleur émise. C’est ce que semblent indiquer les incohérences présentes dans les mesures de conductivité. Pour ces mesures, la nature du matériau (opaque ou non – pyroxène ou olivine, par exemple) en contact avec le fil chauffant, ainsi que la quantité d’énergie libérée (déséquilibre généré) sont deux facteurs importants. A cela s’ajoutent les problèmes d’évaluation de l’énergie Q dû à d’éventuels problèmes de résistance de contact électriques (l’énergie est calculée par simple mesure de l’intensité et de la tension).

Dans le chapitre 6, traitant du rayonnement thermique, le problème du transfert balistique dans la méthode 1 sera également mis en évidence à haute température.

0 1 2 3 4 5 6 200 400 600 800 1000 1200 1400 Température (K) C o n d u c ti v ité th e rm iq u e (W /m /K ) BALM4 x1 BALM4 x2 BALM4 z2 BALM4 z3

Figure 5.12 : Mesures de conductivités thermiques réalisées simultanément avec les mesures de diffusivité thermique par la méthode 1 (pour la roche BALM4). La reproductibilité des mesures, ainsi que la cohérence vis à vis de l’anisotropie obtenue en mesurant la diffusivité thermique (voir chapitre 4 –JGR) n’est pas reproduite par les mesures de conductivités thermique.