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3 Relations du disciple avec l’extérieur notamment avec les autres disciples, avec le

Chapitre II : L’éducation spirituelle de Muhammad al-Harrâq à travers l’étude

II- 3 Relations du disciple avec l’extérieur notamment avec les autres disciples, avec le

Le thème des relations du disciple avec l’extérieur, c.à.d. avec les autres disciples, avec le maître et avec l’environnement comprend :

➢ la réunion (Ijtimâ’) du groupe pour l’invocation de Dieu (Dhikr) ➢ l’enracinement de l’amour de Dieu et entre les disciples (Ulfa),

➢ la compagnie (Suhba) du maître vivant éducateur et la fraternité en Dieu (Ukhuwwa) Ces notions sont développées notamment dans les lettres 1, 2 3,4,5,8,11, 20,23,26,27,30, 31,33,39,41,42 43,48 et 49.

Avant-propos :

Après avoir explicité le façonnement de l’intérieur et la relation verticale du disciple avec son Seigneur, il est utile de signaler qu’il n’est guère possible selon al-Harrâq d’évoluer dans la voie sans une relation exemplaire et bienveillante avec le prochain, car les créatures sont à la fois la porte et le voile ! Une porte qui permet d’accéder à l’Amour de Dieu si Ses créatures sont respectées et un voile si ces créatures sont méprisées ! La tradition abonde dans ce sens522. L’éducation d’al-Harrâq rejoint ainsi la voie de Junayd du soufisme éthique (akhlâq) et sa célèbre parole (déjà citée) : « celui qui te dépasse en bon comportement te dépasse en soufisme ». Malgré la beauté (jamâl) qui caractérise sa méthode (loin des épreuves initiatiques)

522 Le Prophète de l'islam dit : « Savez-vous qui a fait faillite (al-muflis)?» Ils dirent : "Nous considérons comme failli parmi nous celui qui a perdu son argent et ses biens". Il dit : "Le failli de ma communauté est celui qui viendra le jour de la résurrection ayant accompli les prières, observé le jeûne et payé la Zakat. Il vient après avoir insulté untel, calomnié untel, pris injustement les biens d’untel, versé le sang d’untel et frappé untel. On répartit ses bonnes actions entre ses victimes et, si elles ne suffisent pas à le racheter auprès d'elles, on prélèvera de leurs péchés pour les lui imputer et le jeter ensuite dans le Feu. » Muslim bi sharh al-Nawawî, kitâb al-birr wa al-sila wa al-âdâb Hadîth n°4806.

Les deux Hadiths suivants viennent également renforcer cette mise en garde :

« Quiconque a commis une injustice touchant à l’honneur ou aux biens de son frère, qu’il la répare avant que ne vienne le jour de la Résurrection où ne seront acceptés ni dinar ni dirham. S’il a quelque bonne action, on les lui prendra pour les donner à la personne [lésée] et s’il n’a aucune bonne action, on prélèvera des mauvaises actions de la personne lésée pour les lui imputer. » BUKHÂRÎ, Ju‘fî, , Muhammad, Ibn Ismaïl, Jâmi‘ Sahîh

al-musnad min hadîthi rasûli llah wa sunnatihi, wa ayyâmih, kitâb al-mazâlim, bâb man kânat lahu mazlamah ‘inda

al-rajul, hadîth n°2317.

« Quiconque meurt endetté, ce ne sont ni les dinars ni les dirhams [qui serviront de réparation], mais les bonnes et les mauvaises actions. » IBN MÂJA, Sunan, kitâb al-sadaqât, bâb al-tashdîd fi al-dayn, hadîth n°2414.

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le soufisme d’al-Harrâq n’est pas pour autant celui de l’illumination (ishrâq) ni des prodiges (karâmât).

Il s’agit d’un équilibre entre « haqîqa » et « sharî‘a » cette dernière ne se limite pas à un respect superficiel du culte (‘ibâdah) mais englobe l’aspect comportemental (mu‘âmalah) et la fraternité (ukhuwwa) également. Nous allons explorer dans ce chapitre les différents aspects relationnels de l’éducation d’al-Harrâq à travers les lettres citées.

Synthèse du sous chapitre

La voie spirituelle d’al-Harrâq insiste comme d’ailleurs le veut la tradition du soufisme confrérique sur l’obligation d’accompagner un maître spirituel (Mudhakkir), qui est un pilier fondamental pour l’aspirant vers la réalisation (tahqîq). Mais al-Harrâq se distingue par une exigence particulière concernant les qualités du maître, c’est qu’il soit aussi savant de la science religieuse et en parfaite conformité avec celle-ci. Car bien des imposteurs ont prétendu la place de maître éducateur et ont nui à la fois à ceux qui les ont suivis et à l’image du soufisme. Par sa propre expérience et sa science livresque al-Harrâq a certainement jugé bon de protéger les aspirants dans leur quête des manipulateurs et des bons orateurs gourous charismatiques sans aucune profondeur spirituelle (une forme sans fond). Le maître pour lui doit avoir à la fois la réalisation spirituelle par laquelle il est capable de porter les cœurs vers l’Absolu et la conformité à la législation coranique (Sharî‘a) pour redresser la pratique du disciple et l’amener à pratiquer son culte sans aucune dérive.

La réunion spirituelle pour le Dhikr (invocation) et la Mudhâkara (rappel) est aussi un pilier dans son éducation car c’est à travers elle que le maître agit et elle est la manifestation de la fraternité et de l’amour entre les disciples.

La fraternité et l’amour sont des termes qui se répètent dans plusieurs lettres et nous éclaire sur la bienveillance qu’al-Harrâq veut enseigner aux disciples. C’est la raison principale qui nous pousse à qualifier le soufisme d’al-Harrâq de « Jamâlî »523 essentiellement. C’est-à-dire à la fois humaniste et morale qui ne se contente pas d’une relation verticale mais insiste sur le comportement et la relation bienveillante avec le prochain. Il considère que l’Amour de Dieu ne peut être obtenu que par l’amour du maître et l’amour du maître ne peut être obtenu que par l’amour des frères en Dieu et leur amour implique l’amour du prochain, le service, l’humilité et la bienveillance envers toutes les créatures.

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L’articulation de ces formes d’Amour est ainsi hiérarchique, l’amour du maître (représentant vivant du Prophète) permet l’amour du Prophète qui mène ainsi vers l’amour de Dieu. Mais cet amour du maître ne peut être obtenu qu’en l’accompagnant et en lui obéissant, et donc inéluctablement par la fréquentation des frères dans la Voie (dans les moments d’aisance comme dans les moments de difficulté). Ils sont de ce fait la porte et le voile ! La porte lorsqu’ils sont respectés et servis et le voile lorsqu’ils méprisés et déconsidérés ! Cette attitude envers « les frères » est étendu par le maître vers toutes les créatures qui deviennent également « porte et voile », par l’humilité et le service le disciple s’approche d’eux et à travers eux au divin (leur Créateur) ! Toute bienveillance envers la créature est une marque d’Amour au Créateur !

Nous observons enfin que les signes d’une éducation spirituelle éclairée, selon al-Harrâq, sont manifestes à travers les fruits qu’elle procure pour la personne elle-même et son entourage. Nous aborderons dans le troisième sous-chapitre ces fruits.

116 Détails du sous chapitre

La réunion (Ijtimâ’) du groupe pour l’invocation de Dieu (Dhikr)

L’importance de la réunion spirituelle est mise en valeur524 en évoquant la miséricorde divine qui enveloppe le groupe des invocateurs, qui permet leur amour et le lien de fraternité entre eux, même s’ils sont différents (culturellement et socialement). Même une fois loin les uns des autres, si l’amour et la fraternité acquis à travers l’éducation spirituelle et les réunions du Dhikr s’enracinent dans les cœurs alors les cœurs et les esprits seront liés car ils n’ont guère besoin d’un lieu physique pour leur communion et ne pourront plus être séparés par les distances.

Il insiste sur le fait que s’occuper du Dhikr est le meilleur acte qui augmente la foi et éloigne l’angoisse et l’anxiété du monde sensible quand bien même l’âme charnelle s’y oppose en prétextant des occupations futiles.

Al-Harrâq insiste sur la réunion à la Zawiya chaque vendredi525 et les autres jours de la semaine même en dehors de la Zawiya chez des frères, il donne la métaphore suivante : « Le mur de la servitude/adoration pure est construit et scellé grâce aux « pierres solides » qui sont les frères ». Il évoque le parallélisme avec les piliers de l’Islam qui se font en groupe comme la prière du vendredi ou le Hajj renforçant ainsi la foi dans le cœur et l’amour entre la communauté.

Le ciment qui relie et renforce les pierres du mur sont la miséricorde de l’islam et de la foi et cette miséricorde s’intensifie grâce au fait de se réunir autour d’un seul maître ou de celui qui le remplace, ajoute-t-il. Il évoque également par rapport à ce point le parallélisme avec l’imâma de la prière quotidienne ou du vendredi, ou des fêtes, ou du Hajj. Il met en avant la tradition : « L’imam est établi afin qu’il soit suivi »526.

La formation juriste d’al-Harrâq est ainsi omniprésente et le pousse à justifier ses conseils à chaque fois par les sources scripturaires.

524Référence : lettre 1, envoyée à ses Fuqaras de Fès (référence déjà citée).

525 Jusqu’à ce jour les disciples de la Tariqa al-harrâqia continuent à se réunir à la Zawiya de Tétouan chaque vendredi après-midi après la prière du vendredi avec un programme de Dhikr puis de Samâ‘ rythmé.

526 BUKHÂRÎ, al-Jâmi‘ al-sahîh, Kitâb al-adhân, Bâb îjâbi al-takbîr wa iftitâh al-salât, Hadîth n° 732-733, d’après Anas Ibn Mâlik et Hadîth 734 d’après Abû Hurayra 1/228-229.

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Le maître-ajoute-t-il doit être expert des vices de la science de la « construction »527 afin que l’édifice ne souffre d’aucune faille. Tout nouveau-né (allusion au disciple entre les mains de son père spirituelle i.e. son maître) est né avec la nature primordiale (fitra), ensuite les insufflations du Diable et de l’âme charnelle l’envahissent. Se réunir et fréquenter les gens éloignés de Dieu et ivre du bas monde le souille. Se réunir et fréquenter les gens de l’invocation de Dieu l’élève et lui est profitable.

La même incitation sur la réunion avec les frères et dans le Dhikr est clairement répétée dans d’autres lettres528où ils citent plusieurs sources scripturaires comme « le croyant est pour le croyant comme l’édifice scellée »529 ou encore « cherchez les bienfaits de Dieu dans le groupe (tazâhum al-aqdâm) »530

Le point essentiel reste l’intention pure pour Dieu, car al-Harrâq incite les disciples à purifier leur intention et à se détacher même des mérites/récompenses (Hasanât) auxquelles l’adorateur normal s’attache au point d’oublier à qui il s’adresse (Dieu). Il affirme que la meilleure récompense est Dieu Lui-même et rien d’autre, ne demander que Lui et n’être absorbé que par Lui ainsi en retour le serviteur aura le meilleur dans les deux mondes. Al-Harrâq cite pour justifier cette idée la tradition divine : « Celui qui a été préoccupé par Mon invocation au point de ne rien me demander, Je lui donne le meilleur de ce que Je donne à ceux qui me demandent »531

Al-Harrâq rappelle les bienfaits des réunions spirituelles532 comparées, dans la tradition qu’al-Harrâq met en avant, aux jardins du Paradis533. Il fait le parallèle entre les jardins du Paradis dans l’au-delà et ici-bas et affirme qu’on peut accéder à cette « saveur » du Paradis céleste pendant ces réunions spirituelles du Dhikr avec les frères. Il précise : « L’on accède au Paradis [céleste] par la Grâce et la miséricorde de Dieu, mais au niveau des actes (les causes) qui permettent la proximité divine ce n’est pas la quantité qui importe mais la qualité, ainsi la proximité résultat du Dhikr est plus « rapide » et intense que celle par la prière car se réunir avec les gens sincères avec Dieu permet l’accès à la Vérité divine, de part cet amour qui les lie et le partage de l’aspiration spirituelle entre eux. L’invocation par le Nom « Allah » « al-ism

al-mufrad » notamment, procure le fanâ (l’extinction) de l’existence charnelle au profit de Son

527 Allusion faite ici à l’éducation et la formation du disciple auprès de son maître qui lui permet de construire sa personnalité et son identité spirituelle pour atteindre la maturité au sens spirituel.

528 En particulier la lettre n°4.

529Muslim bi sharh al-Nawawî, kitâb al-birr wa al-sila wa al-âdâb Hadîth n°6528. 530 ‘AJLÛNI, al-, dans Kashf al-khafâ n°898 1/325, il dit ce n’est pas un Hadîth.

531 Hadîth qudsî, BAYHAQÎ, Shu’ab al-imân, Hadîth n°573, 1/413-414. Extrait de la lettre n°4.

532 Référence : lettre n°23.

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existence éternelle, pour être par Lui et avec Lui. Le Coran confirme : « et l’invocation d’Allah est plus grande »534 »535

Enfin, il affirme que le mérite est proportionnel à l’effort et que l’effort du corps déployé par le commun des gens pour se conformer aux ordres divins est leur but et leur fin alors que pour les gens réalisés cela n’est que le début de leur chemin. L’effort suprême et le plus difficile est celui pour détacher la raison du monde illusoire vers le monde des réalités supérieures, le monde intérieur qui mène vers la Vérité et permet au disciple d’accéder à la manifestation des lumières de Son essence.

L’enracinement de l’amour de Dieu et entre les disciples (Ulfa)

Nous constatons l’insistance d’al-Harrâq sur l’importance de l’Amour (Mahabba, Ulfa)536

qui doit lier les disciples (les frères)537 qui est le reflet de l’Amour de Dieu. Le croyant est le miroir de son frère rapporte-t-il à ce sujet. Chacun se soucie de l’autre comme s’il faisait partie de lui-même. Les réunions du Dhikr doivent lier les cœurs tels « l’édifice scellé » sans aucune « rupture » ou « friction ». La seule pratique spirituelle n’est ainsi pas suffisante si cet amour n’est pas son essence. L’amour entre les disciples est la preuve que le Dhikr a eu son impact positif sur les cœurs.

Il aborde la notion de « Kulfa » avec les frères538, qui fait allusion à l’effort déployé pour alléger le fardeau des frères et les aider dans la voie. Il incite les disciples à prendre soin des plus fragiles et des plus pauvres parmi eux et de ne rien leur imposer comme charge pour ne pas les « fragiliser davantage ».

534 Coran, Sourate 29, verset 45. Le verset complet est le suivant : « Récite ce qui t’a été révélé des Ecritures et

accomplis la prière car elle empêche de s’abandonner à la turpitude et à ce qui est blâmable. Et l’invocation d’Allah est encore plus grande et Dieu est parfaitement informé de ce que vous faites. ». A propos de

« l’invocation de Dieu est encore plus grande » trois interprétations ont été retenues :

L’invocation de Dieu (Dhikr) est la prière elle-même et celle-ci est de toutes les œuvres la plus méritoire et la plus à même de préserver de la turpitude.

L’invocation de Dieu (Dhikr) est distincte de la prière et elle est « plus grande » que celle-ci car on doit se souvenir de Dieu en toutes circonstances alors que la prière canonique s’accomplit à des moments déterminés.

L’invocation de Dieu (Dhikr) est l’œuvre la plus méritoire conformément à ce qu’enseignent plusieurs traditions. Le Coran, traduit et annoté par A. Penot, éditions Alif, janvier 2005, page 460.

535 Extrait de la lettre n°23.

536 Al-Harrâq utilise les deux termes, bien que le terme Ulfa soit moins fort et désigne plutôt la bonne cohésion et la convergence qui peut mener aussi à l’Amour.

537A travers la lettre n°2 que nous avons traduite en entier en annexe (trois exemples de lettres),

538 A travers la lettre n°33. C’est sa lettre la plus courte et la plus synthétique :116 mots (incluant les louanges à Dieu et les salutations d’usage dans ses lettres).

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Il y a là une preuve claire de la bienveillance d’al-Harrâq et d’une sensibilité aux plus faibles qu’il veut inculquer à ses disciples. Il s’agit aussi de renforcer le lien d’Amour entre les « frères » qui est le pilier de la voie soufie pour lui.

Al-Harrâq affirme l’idée que l’entrée dans la voie soufie est comme l’entrée en islam539 avec des devoirs et une transformation (détachement) radicale du disciple sincère. Il évoque l’Amour réciproque entre le disciple et son Seigneur lorsqu’il fournit l’effort persévérant (mujâhada) pour Lui plaire. Il ne suffit pas pour le disciple d’accomplir les actes obligatoires, cela « ne lui permettra pas l’accès à la Vérité, car cet accès est tributaire de l’Amour ardent et l’anéantissement dans l’Aimé et ceci n’est possible que par les actes surérogatoires, supplémentaires et volontaires. Le fait d’accomplir les actes obligatoires est uniquement la condition du salut ». Fidèle à ses habitudes et grâce à sa formation de juriste, al-Harrâq argumente ses lettres par les textes scripturaires. Ici il évoque le hadîth du wali «…et Mon serviteur ne

cesse de se rapprocher de Moi par les actes surérogatoires au point que Je l’aime et lorsque Je l’aime je suis son ouïe par laquelle il entend, son regard par lequel il voit, sa main par laquelle il saisit, et son pied par lequel il marche ; s’il Me demande, assurément Je l’exaucerai ; s’il cherche près de Moi asile, assurément ; Je le lui donnerai. »540

Quant à la nature des actes surérogatoires qui permettent cet Amour, il précise que les maîtres recommandent à leur disciple les actes qui sont les plus lourds pour leurs âmes, si l’âme aime tel acte surérogatoire le maître lui recommande un autre qui lui est plus détestable. Il pourra ainsi s’agir de prières surérogatoires, de Dhikr ou d’aumônes volontaires ou même de services pour les frères…

Un élément notoire qu’al-Harrâq constate est que l’époque est devenue plus trouble et que le fait d’imposer aux disciples des charges (cultuelles) nombreuses ne les aidera pas à se rapprocher plus de Dieu mais les rebutera. Il fait le parallèle avec l’autorité temporelle qui lorsqu’elle impose aux sujets plus de charges elle ne fait que les amener vers la rupture et la « Fitna ».

Cette adaptation au contexte est très importante et caractérise l’éducation d’al-Harrâq comme nous l’avons déjà signalé, de part même sa propre initiation, qui a été sans épreuves ni conditions, marquée par la beauté (jamâl). Il se propose ainsi de guider par l’Amour et vers

539 A travers la lettre n°8 envoyée au ministre lettré Muhammad Ibn Idriss de Fès. Nous retrouvons aussi l’intégralité de cette lettre dans Târîkh Titwân, déjà cité, volume 6, pages 350 à 352.

540 C’est un Hadîth qudsî (divin) qui commence par : « Allah exalté a dit : celui qui fait montre d’hostilité envers un de Mes Wali (saints ou amis de Dieu) je lui déclare la guerre… ». BUKHÂRÎ, al-Jâmi‘ al-sahîh, kitâb al-raqâiq, bâb al-tawâdu‘, hadîth n°6164.

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l’Amour qui correspond à ce « jamâl » et qui permet pour le disciple un raccourci plus facile à la réalisation spirituelle selon al-Harrâq.

La compagnie (Suhba) du maître vivant éducateur et la fraternité en Dieu (Ukhuwwa)

Al-Harrâq précise que la condition pour la compagnie spirituelle du maître et pour arriver à Dieu est une nouvelle fois la pureté de l’intention et la sincérité dans la quête. C’est une condition qui ne concerne pas uniquement les débuts de la voie mais toutes les étapes du cheminement. Il affirme : « celui qui n’est pas sincère avec les frères, ne le sera pas avec le maître, et s’il n’est pas sincère avec le maître (représentant du secret muhammadien) il ne le sera pas avec le Messager de Dieu et s’il n’est pas sincère avec le Messager de Dieu, il ne le sera pas avec Dieu. Celui qui n’est pas sincère avec Dieu ne pourra en aucun cas atteindre le succès. »541

Dans les débuts de la voie, le disciple (selon al-Harrâq) se force à la sincérité ou imite le maître pour atteindre cette dernière. Après la réalisation (tahqîq), cette sincérité devient volontaire, naturelle et sera une confirmation du bon fruit de la compagnie du maître.

Il ajoute qu’à l’instar du Messager qui éduquait ses compagnons en considération de leurs états, leur prédisposition (isti‘dâd) et répondait différemment d’un compagnon à un autre, les maîtres spirituels également éduquaient leurs disciples tantôt avec la beauté (Jamâl) et tantôt avec la rigueur (Jalâl). Ils connaissent en effet, par leur expérience gustative, ce qui convient à