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CHAPITRE 1: L’ANTITHROMBINE UN ANTICOAGULANT NATUREL MAJEUR

C. L’antithrombine

2) Relation structure fonction

comme les Serpin-enzym complex receptor (SEC-R), ou encore, des récepteurs récepteurs de la famille des lipoprotéines (LRP : Low density lipoprotein receptor-related protein). La cytokeratine 18 (CK18) de la famille des filaments intermédiaires, la vitronectine et les protéoglycanes joueraient aussi un rôle dans la clairance des complexes TAT (30). Un modèle intégrant l’ensemble de ces acteurs a été proposé : les complexes TAT se lient aux protéoglycanes à héparans sulfates (HSPGs) par l’intermédiaire de la vitronectine, et ces HSPGs vont permettre le transfert du complexe TAT-vitronectine à la CK18 et au récepteur LRP responsable de leur internalisation (31).

2) Relation structure fonction

L’AT appartient à la superfamille des Serpines dont les membres présentent une très grande analogie structurale.

a) Superfamille des Serpines

En 1980, Hunt and Dayhoff ont été les premiers à montrer des similitudes entre l’AT humaine et l’ovalbumine chez le poulet (32). Plus tard, Carrell a utilisé pour la première fois l’acronyme de SERPIN (pour SERine Protease INhibitors) (33) car la majorité des membres de cette famille étaient des inhibiteurs des serine protéases. Par la suite, plus de 500 protéines de type Serpine ont été identifiées dans le génome des procaryotes et des eucaryotes, et ont été impliquées dans des fonctions biologiques très variées (34). Chez l’homme, 37 Serpines ont été clonées et représentent à elles seules 10% des protéines circulantes totales (19). Elles possèdent très peu d’homologie de séquence (≈25%) les unes par rapport aux autres, mais gardent toutefois une grande homologie de structure dont l’archétype est la structure cristallographique de l’α1-antitrypsine résolue dans les années 80 (35). La structure des serpines se caractérise par la présence de 3 feuillets β (A–C) et de 7 à 9 hélices α (A-I)

(Fig-3). En outre, elles possèdent toutes un feuillet β A central à 5 brins et une boucle réactive

flexible, au sommet de la protéine, capable d’interagir avec les protéases (Fig-3). Chez les eucaryotes, elles sont classées en 16 familles (A-P) et la protéine est désignée de la façon suivante: SERPINXy, « X » indiquant la famille d’appartenance et « y » le numéro de la Serpine dans la famille). L’AT est ainsi nommée SERPINC1 (36).

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Comme leur acronyme l’indique, la majorité des Serpines sont des inhibiteurs des serine protéases mais certaines participent en outre à d’autres fonctions, comme le transport d’hormones ou la signalisation cellulaire (37). Leur structure caractéristique leur permet de fonctionner comme des inhibiteurs suicides. En effet, la boucle réactive de la Serpine est clivée par les protéases cibles et forme un complexe acyl-enzyme covalent, ceci entrainant un réarrangement structural par l’insertion de la boucle réactive pour former un brin supplémentaire au sein du feuillet β A, tout en entrainant l’enzyme liée vers le bas de la Serpine, comme dans un mécanisme de piège à souris (38).

Chez l’homme, les Serpines possèdent un rôle important dans des phénomènes physiologiques nécessitant une étroite régulation, comme l’inflammation et le système du complément (α-antitrypsine, l’inhibiteur de la protéine C1 du complément), la fibrinolyse (α2 -antiplasmine) et la coagulation (antithrombine, protéase nexine-1, second cofacteur de l’héparine)(39).

Figure 3 : L’archétype de structure tridimensionnelle des Serpines

: «

-1 antitrypsine » le

feuillet A coloré en violet ; feuillet B coloré en orange; feuillet C coloré en vert. 9 hélices  (A à I) colorées en gris. Boucle réactive (RCL) colorée en bleu ciel (code PDB 1QLP) (40).

Acylation Translocation

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La flexibilité de la structure des Serpines est nécessaire à son activité inhibitrice, et des mutations affectant une région charnière (Hinge region dans la Fig-4), responsable de la mobilité de la boucle réactive, peuvent entrainer une rétention intracellulaire, une perte de fonction, ou la génération d’autres conformères (39). Ces dysfonctions et/ou déficits de différentes Serpines peuvent causer de graves pathologies appelées « Serpinopathies » allant de la démence concernant la Neuroserpine, à des emphysèmes pulmonaires pour l’α1-antitrypsine, ou à des thromboses veineuses dans le cas de l’AT (41).

b) Caracteristiques structurales de l’antithrombine native

La première structure cristallographique de l’AT native a été résolue par Carrell R.et al. en 1994 (42). Elle adopte l’arrangement tridimensionnel des Serpines avec 3 feuillets

centraux (A, B, C) et 9 hélices  (A à I). Ainsi, les feuillets A, B, et Cde l’AT sont organisés respectivement en 5, 6, et4 brins, respectivement (Fig-4). De plus, comme toutes les Serpines, l’AT présente une séquence de 24 résidus (377-400) organisée en une boucle très flexible exposée au solvant qui est responsable de sa fonction inhibitrice.

Figure 4 : Structure de l’AT native avec le feuillet β A (bleu), l’hélice D (cyan) constituant le

site de liaison à l’héparine, la boucle réactive (rouge) avec le résidu P1 (arg 393) critique pour l’activité anticoagulante de la Serpine, la région charnière (Hinge, rouge) partiellement insérée dans le feuillet β A. (Code PDB 1T1F) (44)

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Cette boucle réactive de l’AT possède une arginine en position 393 critique à l’activité de l’AT (43), désignée P1 selon la nomenclature de Schechter et Berger. Les acides aminés situés à l’extrémité N-terminale du résidu P1 sont numérotés P2 jusqu’à P17 alors que les résidus situés en C-terminal du résidu P1 sont désignés P1’ jusqu’à la position P7’.

c) Différents conformères d’Antithrombine c.1 La forme latente et clivée

Contrairement à la majorité des protéines, la structure de la forme native de l’AT ne représente pas sa conformation la plus stable. En effet, la boucle réactive est capable de s’insérer dans le feuillet β A constituant le 4ème

brin d’un feuillet qui devient à 6 brins pour adopter une structure plus stable. En absence de clivage de la boucle réactive, cette transition entraine l’apparition d’une forme dite « Latente » qui participerait à la sénescence de la protéine (45).

Cette conformation condamnant la boucle réactive à rester insérée au sein du feuillet β A entraine l’inactivité irréversible de l’AT vis-à-vis de la coagulation (Fig- 5A). De plus, la forme latente de l’AT possède une affinité diminuée à l’héparine et une résistance aux agents dénaturants comme le chauffage jusqu’à 127°C ou l’urée à une concentration de 7 M (46). L’AT latente peut être obtenue in vitro par chauffage à 60°C de l’AT native en présence de citrate ou de sulfate d’ammonium (47) et possède une migration électrophorétique plus rapide que celle de la forme native. In vivo, environ 3% de l’AT totale circulante se convertit en forme latente chaque jour (46). Il existe cependant des variants naturels d’AT (N187K/D, T85M/K) thermolabiles qui se convertissent facilement en forme latente in vitro et conduisent à la présence d’environ 10% de forme latente dans la circulation (48,49). Cette instabilité participe fortement au risque thrombotique observé chez les sujets présentant ces mutations.

Cette conformation hyper stable de la Serpine sous sa forme latente est aussi appelée « relachée » alors que l’AT native adopte une conformation dite « stressée ». En plus de la forme latente, l’AT peut se trouver sous forme clivée. En effet, le clivage au niveau de la boucle réactive par des protéases cibles, ou à différents niveaux dans la boucle réactive, entraine l’insertion de celle-ci au sein du feuillet β A (Fig-5B). L’AT latente et clivée, toutes

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deux inactives vis-à-vis de la coagulation, possèdent en outre des propriétés antiprolifératives (50,51).

Figure 5 : Structures cristallographiques de la forme latente (A) de l’-1 antitrypsine avec la boucle réactive (jaune) insérée dans le feuillet β (rouge) formant le 4ème brin. (B) Forme d’AT clivée avec la boucle clivée (jaune) insérée au sein du feuillet β (rouge) (52)

c.2 Les hétérodimères

La structure tridimensionnelle de l’AT a été résolue par deux groupes différents en 1994 (54,45). Tous deux ont réussi à obtenir la cristallisation de l’AT, mais sous forme dimérique et non monomérique. En effet, le dimère cristallisé est constitué de l’association non covalente d’une molécule d’AT native et d’une seconde molécule d’AT latente (Fig-6). L’hétérodimère est facilement obtenu dans le plasma après une incubation à 37°C pendant 72 h ou simplement par un mélange équimolaire des deux espèces d’AT, native et latente (55). Cet hétérodimère est caractérisé par une mobilité électrophorétique légèrement plus lente que celle de chacune des deux formes d’AT, latente et native. Deux types de dimères ont été décrits selon qu’il résulte de l’association d’une AT latente avec soit une AT native de type α soit avec l’isoforme β de l’AT, ce dernier hétérodimère apparait le plus stabilisé en présence d’héparine (55). In vivo, l’existence et le rôle potentiel de ces hétérodimères restent cependant peu explorés.

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Figure 6 : Structure de l’hétérodimère de l’AT formé de deux molécules d’AT montrant

l’interaction étroite de la boucle réactive (rouge) de l’AT native (en bas) avec le brin 2C du feuillet β C (jaune) de l’AT latente (en haut), l’hélice D des deux AT représentée en couleur

Cyan et le feuillet β A en magenta (44).

c.3 Les polymères

Les polymères sont les derniers conformères décrits dans la littérature pour l’AT. En effet, l’AT et certaines Serpines sont capables de s’auto-assembler dans certaines conditions dénaturantes (températures élevées, pH acide…) (56) in vitro ou lors de la présence de mutations particulières. Lors du repliement protéique, les Serpines adoptent un état intermédiaire « polymérogène » transitoire à demi-vie très courte. Très peu de polymères peuvent alors être formés mais dans certains cas, la présence de mutations ralentit la renaturation de cet état transitoire en forme native et favorise cet état intermédiaire polymérisé (52). Deux modèles de polymérisation ont été proposés : Le premier par insertion de la boucle réactive d’un monomère dans le feuillet β d’un second monomère, le deuxième modèle a été mis en évidence par étude de la structure cristallographique d’un dimère d’AT stable après incubation à pH 5.7 à 37°C (57,58). Dans ce modèle, les monomères d’AT adoptent une structure particulière avec l’externalisation d’un ensemble constitué de la boucle (brin 4a) et

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du brin 5a du feuillet β A, qui viennent s’insérer dans un monomère adoptant la même structure (52).

d) Mécanisme d’inhibition des serine protéases

L’AT suit le mécanisme d’inhibition des membres de la superfamille des Serpines en agissant comme un substrat suicide. En effet, les serine protéases reconnaissent une séquence peptidique particulière et clive la cible après formation d’un complexe acyl-enzyme avec le substrat. Dans le cas d’un substrat classique, il y a une déacylation et libération du substrat clivé. Lors de l’interaction de la protéase avec l’AT, il y a d’abord la formation d’un complexe Michaelis-like non covalent grâce aux chaines latérales des résidus P1-P1’ au niveau de la boucle réactive (37). Cette première étape aboutit à la formation d’une liaison covalente de type ester entre le résidu de la protéase (Ser195) avec le groupement carboxyle du résidu P1 (Arg393) issu du clivage de la liaison P1-P1’ de l’AT. Les résidus P1-P1’ définissent la spécificité de la Serpine envers une protéase cible. Enfin, la boucle réactive de l’AT s’insère au niveau du feuillet β A tout entrainant la protéase liée avec elle comme dans un piège à souris (Fig-7) (37).

Figure 7 : Mécanisme d’inhibition des Serpines en plusieurs étapes, la formation du

complexe Michaelien entre la protéase (bleu) et la Serpine qui aboutit à la formation d’un intermédiaire acyl-enzyme irréversible par l’incorporation de la boucle (jaune) au sein du feuillet β A (rouge), entrainant la protéase (60).

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La dislocation de la protéase entraine une distorsion de son site actif et permet d’éviter une dissociation du complexe Serpine-enzyme, jouant ainsi le rôle d’un substrat suicide

(Fig-7). Enfin, le changement conformationnel du complexe protéase-Serpine permet alors sa

reconnaissance par des récepteurs responsables de sa clairance rapide de la circulation (59).

La séquence P4-P4′ au sein de la boucle réactive joue un rôle important dans l’activité des Serpines présentant une fonction d’inhibiteur enzymatique. Ainsi, les mutations affectant cette région entrainent une perte d’activité anticoagulante comme pour l’AT. De plus, une seconde région appelée « région charnière » (Fig-4 et Fig-8) possède des résidus à chaines latérales courtes qui permettent la flexibilité de la boucle nécessaire à la formation du complexe Serpine-enzyme (61). En dépit du rôle de l’arginine 393 en P1 qui est critique pour l’activité anticoagulante de l’antithrombine, d’autres résidus au sein de la boucle possède un rôle important, comme le résidu P1’ à chaine latérale courte plutôt polaire qui détermine sa sélectivité. En effet, ce résidu interagit avec la poche S1’ de l’enzyme (adjacente au résidu S1 du site actif), cette poche est étroite pour le FXa et plus large pour la thrombine par l’occupation d’une lysine. Ainsi, la substitution du résidu P1’ de l’AT par une isoleucine conduit à une perte de l’activité inhibitrice vis-à-vis de la thrombine (anti-FIIa) et la conservation de l’activité vis-à-vis du FXa (anti-FXa) (62). Des mutations combinées des résidus P3 et P3’ permettent aussi de dissocier ces deux activités. Enfin, la glycine en P2 semble jouer un rôle dans la présentation du site actif dans une conformation optimale afin de faciliter l’interaction avec la sérine 195 de la poche catalytique de l’enzyme. Elle interagirait avec le résidu S2 apolaire de l’enzyme cible, et des mutations l’affectant entrainent une perte de l’activité anticoagulante (63) (Tab-1).

La structure de l’AT native possède la particularité par rapport aux autres Serpines de présenter une région charnière (P13-P15) G379-S380-E381 partiellement incorporée dans le feuillet A grâce à des liaisons ioniques avec le domaine d’interaction avec l’héparine (64,65). L’expulsion de cette région charnière suffit à l’activation allostérique de l’AT en favorisant son interaction avec les protéases (66). De plus, certaines structures cristallographiques montrent que le résidu P1 est dirigé vers l’intérieur de la protéine (44) grâce à une liaison ionique entre l’arginine 393 et l’acide glutamique 255. Cette indisponibilité du résidu P1 aux protéases permet de placer l’AT dans une conformation moins active mais il semblerait que l’AT native soit en équilibre sous plusieurs conformations dans lesquelles le résidu P1 est plus ou moins exposé (52).

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Table 1: Mutations au sein de la région P3-P3’ de la boucle réactive obtenues par

recombinaison génétique ou présentes dans des variants naturels chez des patients

e) La potentialisation de l’activité anticoagulante de l’antithrombine par les dérivés hépariniques

Bien que l’AT soit un inhibiteur physiologique lent dans la circulation, son activité est accélérée grâce à sa liaison aux héparans sulfates ou à l’héparine. Ce mécanisme est à la base de l’utilisation des dérivés hépariniques comme médicaments anticoagulants. In vivo, des GAGs de type héparans sulfates tapissent la paroi vasculaire et semblent potentialiser physiologiquement l’activité anticoagulante de l’AT (69). Dès lors, les patients présentant certaines mutations à l’état homozygote touchant la région de l’AT impliquée dans la liaison aux héparans sulfates présentent une augmentation du risque de thrombose (70). Cette région riche en arginines et lysines de l’AT impliquée dans l’accélération de son activité par l’héparine, a été décrite par Rosenberg et Damus en 1973 (71). Par la suite, la caractérisation de variants naturels d’AT présentant une affinité réduite pour l’héparine a permis d’identifier les résidus basiques impliqués dans le site de liaison à l’héparine (72,73). Cette région appelée « heparin binding site » (HBS) est constituée par une partie de l’hélice A, l’extrémité N-terminale, et la totalité de l’hélice D.

L’héparine ou les héparans sulfates présentent une séquence pentasaccharidique spécifique (représentant 30% de l’héparine) responsable de l’activation allostérique de l’AT.

Position Résidu

Mutations recombinantes /variants naturels

Conséquence sur l’activité de l’AT P1 : Arg R393H « Glasgow », R393P

« Pescara »

- Perte de l’activité anticoagulante (67)

P1’ : Ser S394L « Denver », S394V, C - Baisse modérée de l’activité anticoagulante (68) S394G, A, T -Légère baisse de l’activité anticoagulante (68) S394P, M - Perte totale de l’activité anticoagulante

S394I -Conservation de l’activité anti-Xa et perte de l’activité anti-IIa (62)

P2 : Gly G392D « Stockholm », G392P, V, Q, D

- Perte de l’activité anticoagulante (63) P3 : Ala

P3’ : Asn

Double mutant : A391D N396E - Conservation de l’activité anti-Xa et perte de l’activité anti-IIa (62)

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L’identification de la structure de ce motif, désigné par « DEFGH » où chaque lettre représente un sucre, a permis de mieux comprendre le changement conformationnel de l’AT nécessaire à son activité anticoagulante, et de mettre en évidence le rôle des différents résidus de l’AT impliqués dans la liaison au pentasaccharide : Lys11, Arg13 (extrémité N-terminale) Arg46, Arg47 (hélice A) Lys114, Lys125 et Arg129 (Hélice D)(74). Ces résidus interagissent principalement par l’intermédiaire de liaisons ioniques avec les groupements sulfates et carboxyles du pentasaccharide, et de liaisons hydrogène (59).

L’activation allostérique de l’AT ne participe qu’à l’accélération de son activité inhibitrice vis-à-vis des facteurs FIXa et FXa. En effet, son activité inhibitrice vis-à-vis de la thrombine nécessite la présence de chaines assez longues d’héparine capables de former un complexe ternaire thrombine/héparine/AT.

e.1 Activation allostérique de l’AT par le motif pentasaccharidique

La comparaison des structures cristallographiques de l’AT libre et liée à l’héparine montre des changements conformationnels au niveau de l’HBS et de la région charnière. Dans un premier temps, l’extrémité N-terminale de l’hélice A subit une réorientation. Ensuite, l’hélice D subit une rotation avec une élongation de l’extrémité supérieure (située en C-terminal de l’hélice D) et formation d’une nouvelle hélice α P (P pour Pentasaccharide) de l’autre extrémité (en N-terminal de l’hélice D), entrainant finalement un réarrangement des différents résidus basiques impliqués (75). Enfin, la région charnière, enfouie à proximité du feuillet A, est expulsée pour permettre l’exposition de la boucle réactive. En effet, l’activation allostérique de l’AT avec l’élongation de l’hélice D entraine le resserrement du feuillet A et l’expulsion de la boucle réactive qui devient ainsi plus exposée aux enzymes cibles (76)

(Fig-8). En plus de la boucle réactive, une deuxième surface d’interaction de l’AT avec les

protéases a été mise en évidence à partir des années 2000. Située au niveau du feuillet β C au sommet de la protéine, cette région proche de la boucle réactive est appelée « Exosite ». Cet exosite joue un rôle dans l’interaction de l’AT avec les protéases FXa et FIXa, en absence ou en présence d’héparine. L’équipe d’Olson a localisé l’exosite grâce à des mutations de la région du brin 3 du feuillet B (246-258) et mis en évidence deux résidus particulièrement importants (Tyr 253 et Glu 255) et conservés dans les séquences d’AT chez les vertébrés (77).

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Récemment, un modèle a été proposé pour expliquer le rôle de différents résidus de l’exosite au niveau de la forme native ou activée par l’héparine de l’AT. Sous forme native, l’exosite participe à un équilibre entre des forces d’attraction et de répulsion avec la protéase. Après activation allostérique de l’AT par de l’héparine, les forces de répulsions sont diminuées grâce au changement conformationnel de la protéine (78). Finalement, des interactions directes de l’exosite de l’AT avec le FXa et le FIXa, en plus de l’exposition de la boucle réactive, participent à l’activation allostérique de l’AT vis-à-vis de ces facteurs.

Figure 8 : Activation allostérique de la forme native de l’AT présentant la région charnière

(encadrée) partiellement insérée dans le feuillet β A (rouge), après liaison du pentasaccharide (66).

e.2 Potentialisation de l’activité de l’AT matricielle par l’héparine

L’activation allostérique de l’AT par sa liaison au pentasaccharide n’a qu’un rôle mineur dans l’activité inhibitrice de l’AT vis-à-vis de la thrombine puisqu’elle n’augmente que d’un facteur 2 la vitesse de la réaction d’inhibition alors qu’elle accélère l’inhibition du FXa d’un facteur 300 (59). Cette faible accélération contraste avec l’effet de rapprochement de l’AT et de la thrombine engendré par la présence des chaines hépariniques d’au moins 18 unités saccharidiques, qui entraine une accélération de l’activité anti-IIa d’un facteur 4500 (79). En 2004, la résolution de la structure cristallographique du complexe ternaire «

AT-+ pentasaccharide

Native Activé

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