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Chapitre 4 : De la dispersion au solide poreux

4.1. Relation structurale entre la dispersion et le solide final

4.1.1. Filiation de la microstructure de la dispersion au solide (SAXS)

4.1.1.1. Echantillons étudiés

Des mesures SAXS ont été réalisées sur les échantillons de boehmite à différentes fractions volumiques, des particules en dispersion jusqu’aux poudres séchée et calcinée (tableau 4. 1). Le but est de comprendre à quelle étape se structure les matériaux. Les dispersions ont été préparées comme dans la partie 3.1.1. Les poudres caractérisées sont les solides élaborés comme suivant le protocole présenté à la partie 2.1.2.

Tableau 4. 1 : Pourcentages volumiques des dispersions de boehmite préparées dans l’eau, éthanol et tert-butanol

Système « eau » Système « éthanol » Système « tert-butanol »

1,8% 1,7% 0,5%

3,0% 3,0% 1,0%

5,4% 5,1% 1,5%

6,8% 16,0% 2,0%

16,0% Boeh-p-éthanol Boeh-p-tert-butanol

Boeh-p-eau Al-p-éthanol Al-p-tert-butanol

Al-p-eau

4.1.1.2. Calcul de l’épaisseur traversée sur poudre

Pour pouvoir comparer les différentes fractions volumiques entre elles, les spectres doivent être renormalisés par l’épaisseur de l’échantillon. Pour les mesures sur dispersion, l’épaisseur du capillaire peut être déterminée facilement. La mesure de l’épaisseur macroscopique es d’un système désordonné de grains poreux est souvent pratiquement impossible car une épaisseur très fine de l’échantillon est considérée pour éviter la forte absorption du matériau. On peut alors calculer une épaisseur apparente eb à partir de la transmission T qui est le rapport entre le faisceau transmis par l’échantillon et le faisceau transmis par la cellule. Ainsi, l’épaisseur apparente que nous utiliserons pour traiter nos données est calculée suivant l’équation suivante [158] :

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 

solide

b

T

e ln

Equation 4. 1

Où μsolide est le coefficient d’absorption calculé à partir de la composition de la poudre sèche (μboehmite=100,01 cm-1) et calcinée (μalumine=83,97 cm-1).

4.1.1.3. Evolution structurale

Les spectres SAXS correspondant aux systèmes « eau », « éthanol » et « tert-butanol » aux diverses concentrations sont présentés sur la figure 4. 2. Pour le système dans l’eau, on observe un pic de corrélation, correspondant à la distance inter-particules, qui se déplace vers les plus grandes valeurs de q en concentrant les particules jusqu’au produit sec. Plus les particules sont concentrées, plus la distance les séparant est faible. Dans l’éthanol, un pic de corrélation moins bien défini apparaît et suit la même tendance. En revanche, dans le tert-butanol, les courbes se superposent dès les plus faibles fractions volumiques en dispersion jusqu’au produit sec. Chaque système suit une évolution continue en fonction de la concentration (évolution continue des pics avec Φv). Il y a donc une correspondance entre les propriétés de la dispersion et celles du matériau final séché. On observe une légère oscillation à des valeurs de q intermédiaires autour de 0,05 Å-1 dans le cas de la poudre calcinée. Cette oscillation est probablement due à une légère réorganisation des cristallites lors de la calcination. Une analyse plus poussée n’a pas été entreprise dans cette étude.

Figure 4. 2 : Spectres SAXS de particules de boehmite dispersées dans l’eau (a), l’éthanol (b) et le tert-butanol (c) à différentes fractions volumiques, du régime dilué à concentré, puis séché et calciné

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4.1.1.4. Loi de gonflement

A partir de la position des pics de structure, les distances caractéristiques d’interaction peuvent être extraites en fonction de la fraction volumique de solvant. La distance interparticulaire est donnée par la relation :

pic

q

D2

Equation 4. 2

L’évolution de cette distance avec la concentration revient à déterminer la loi de gonflement d’un système. Cette loi renseigne sur la géométrie des particules. La figure 4. 3 illustre les trois lois de gonflement pouvant être rencontrées. Une géométrie très plane développe une loi de gonflement en 1D, des objets cylindriques en 2D, et des objets sphériques en 3D. La représentation logarithmique de la distance caractéristique D en fonction de la fraction volumique en boehmite est une manière simple de déterminer la loi de gonflement. De cette manière, les objets de dimension 1 suivent une loi de gonflement de pente -1, ceux de dimensions 2 et 3 des pentes -1/2 et -1/3 respectivement.

Figure 4. 3 : Relations entre la loi de gonflement et la forme des particules (tiré de Eyssautier [5]) La loi de gonflement des particules a été identifiée uniquement pour le système « eau » car les pics sont bien définis. Nous avons calculé la distance inter-objets sur les spectres des fractions volumiques précédentes. Pour avoir plus de points et donc plus de précision, nous avons également déterminé les pics de structure des dispersions dans l’eau analysées en rhéo-SAXS au cisaillement nul (chapitre 3). La figure 4. 4 montre que la pente de la droite reliant la distance inter-particules à la fraction volumique est de -1/2, et correspond donc à une loi de gonflement 2D. La géométrie des agrégats dans l’eau est donc plutôt cylindrique. Ce résultat confirme que les objets sont anisotropes dans l’eau et sont donc susceptibles de s’orienter sous cisaillement (chapitre 3). La fraction volumique

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de 100% correspond à la poudre séchée et calcinée. La distance inter-cristallite a été déterminée à environ 10 nm sur le produit séché calciné. En considérant que les particules de la poudre ne sont pas en contact après séchage et calcination (porosité), cette distance inter-particulaire correspondrait au diamètre poreux. La physisorption d’azote sur le solide calciné donne un diamètre poreux de 6,2 nm en accord avec la distance inter-particulaire d’une dizaine de nanomètres, à la précision de la détermination des pics près.

4.1.2. Evolution de l’agrégation/agglomération

Nous avons mis en évidence dans le chapitre 2 (partie 2.3.2) que le diamètre et le volume poreux suivaient une évolution linéaire avec la fraction massique de solvants miscibles introduits. Comme nous venons de voir que les propriétés structurales du matériau final étaient héritées des propriétés de la dispersion, nous avons suivi l’évolution de la taille des agrégats en dispersion et du diamètre poreux du matériau en fonction de la quantité de tert-butanol introduit par rapport à l’éthanol. La figure 4. 5 présente ces évolutions. La taille des agrégats de boehmite a été mesurée par DLS et la taille des pores de l’alumine résultante sous forme de poudre est le diamètre poreux médian déterminé par physisorption d’azote. Alors que le diamètre poreux évolue linéairement, la taille des agrégats augmentent presque exponentiellement avec la quantité de tert-butanol du mélange.

Figure 4. 4 : Loi de gonflement 2D pour le système « eau ». Les pentes des lois de gonflement 1D et 3D sont données à titre indicatif.

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L’agrégation est bien favorisée par l’ajout de tert-butanol et les propriétés texturales en sont directement impactées. Mélanger plusieurs solvants revient à considérer un solvant dont les propriétés, comme la constante diélectrique et l’encombrement stérique, sont intermédiaires, pondérées par la quantité de chacun des solvants. En conséquence, les interactions entre les particules et donc l’agrégation sont également moyennées [159].