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Chapitre 1 : Bibliographie

1.4. Interaction des particules d’oxyde en dispersion

1.4.3. Organisation des particules d’oxyde en suspension

1.4.3.2. Comportement macroscopique

La détermination de la transition sol-gel, des propriétés d’écoulement et des modules élastiques d’une dispersion donne des informations précieuses sur la nature des interactions et l’organisation entre particules. Couplée à des analyses de diffusion dynamique de la lumière (DLS) ou diffusion des rayons X aux petits angles (SAXS), la rhéologie nous permet une description microscopique de l’évolution macroscopique d’une dispersion.

44 Dispersion colloïdale aqueuse

Mange et al. [107] ont suivi l’évolution de la viscosité (rhéologie) et de la distance interparticulaire (SAXS) en fonction de la fraction volumique de boehmite (Pural SB3 Sasol) dans l’eau à une force ionique fixe. Ils identifient une transition isotrope-nématique des particules au point de gélification. D’autre part, Islam et al. [108, 109] ont étudié l’évolution de cette transition sol-gel en fonction du pH, de la température, de la concentration de la suspension et ont montré le comportement rhéofluidifiant des suspensions de boehmite dans l’eau (diminution de la viscosité avec l’augmentation de la vitesse de cisaillement). Ce comportement est attribué à la destruction des agrégats sous cisaillement, dû aux faibles forces d’interactions interparticulaires (par exemple, les forces de Van der Waals). Les agrégats ou réseau formés sont cassés libérant partiellement le fluide piégé, rendant moins visqueuse la suspension car la fraction volumique réelle diminue [110].

A forte fraction volumique (après la transition sol-gel), les particules sont à l’état de pâte dont les propriétés viscoélastiques peuvent être évaluées par des essais oscillatoires à l’aide d’un rhéomètre de géométrie plan-plan. Drouin et al. [111] montrent ainsi que les pâtes présentent un caractère très élastique proche de celui d’un solide. L’augmentation de la quantité d’acide nitrique par rapport à la boehmite induit la formation d’un réseau tridimensionnel continu proche d’un gel, formé de particules nanométriques, emprisonnant du liquide dans leur porosité.

De nombreuses études rhéologiques impliquant d’autres oxydes comme les argiles ont été menées. Ses objets, généralement de morphologie anisotrope, présente des propriétés de cristaux liquides (biréfringence, transition isotrope-nématique…) [112-115].

Dispersion colloïdale non aqueuse

Beruto et al. [80] montrent l’apparition d’une contrainte seuil pour des dispersions de boehmite dans l’éthanol, qui est inexistante pour des suspensions à l’eau. Les dispersions à l’eau ont de plus un comportement rhéofluidifiant à plus faibles fractions volumiques, alors qu’il faut attendre que le cisaillement soit supérieur à la limite d’élasticité pour observer ce comportement dans le cas de la dispersion à l’éthanol. De plus, ils montrent que la thixotropie (variation réversible des propriétés d’écoulement avec le temps) est plus marquée dans le cas de l’eau que de l’éthanol. Toutes ces observations montrent que l’organisation spatiale des particules de boehmite est différente en fonction du solvant.

Pratiquement aucune autre étude ne traite des propriétés rhéologiques de dispersions de boehmite dans des solvants organiques. En revanche, on trouve plusieurs travaux examinant la mise en suspension de particules de silice dans des solvants organiques [116-119]. Nous détaillerons certaines d’entre elles qui peuvent nous donner des clés de compréhension pour nos systèmes. La silice est

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hydrophile, recouverte de silanols (Si-OH) [120] en surface et est donc susceptible d’interagir avec les solvants tels que les alcools par liaisons hydrogène. Rhagavan et al. [116] montrent notamment que la dispersion de la silice dans du 1-heptanol est bien plus visqueuse et rhéofluidifiante que celle de la silice dans du 1-propanol à même concentration. La mesure des modules élastiques indique qu’un gel est formé avec le 1-heptanol. Ils distinguent ainsi deux types de solvants : les solvants formant un sol stable de silice, non agrégé, transparent, non visqueux, et les solvants favorisant la formation d’un gel organisé en réseau tridimensionnel, de forte viscosité. Pour comprendre les mécanismes d’interaction entre ces différentes catégories de solvants, trois facteurs sont considérés : les interactions électrostatiques, les forces de Van der Waals et les phénomènes de solvatation. Selon cette étude, les interactions électrostatiques jouent un rôle négligeable. Quant aux forces de Van der Waals, Rhagavan conclue que pour qu’elles soient significatives, il faut qu’il y ait assez de différences entre les constantes de Hamaker du liquide et du solide. La contribution dispersive de la constante de Hamaker (dépendant de l’indice de réfraction) est le terme dominant de la constante de Hamaker totale. Or, les indices de réfraction des liquides et de la silice ne sont pas assez différents pour expliquer les différences de microstructure en dispersion. Ainsi, la formation d’un gel ou d’un sol en fonction du solvant s’expliquerait par le troisième facteur considéré : la capacité du solvant à former des liaisons hydrogène avec le solide. Les liquides de forte capacité à créer des liaisons hydrogène s’adsorberaient facilement sur la surface et formeraient une couche de solvatation autour de la particule la protégeant de l’agrégation (figure 1. 29 a). Au contraire, un liquide de faible affinité avec la surface favoriserait l’interaction entre deux particules et engendrerait la formation d’un gel (figure 1. 29 b). D’une manière générale, il y a compétition entre les silanols de surface de deux particules et les silanols de surface et groupe OH de l’alcool. La force relative de ces interactions (silice-liquide et silice-silice) détermine la formation d’une couche de solvatation et donc la microstructure. Malheureusement, il est pour le moment difficile de quantifier la capacité d’un solvant à former des liaisons hydrogène, qui n’est décrite par aucune propriété caractéristique de celui-ci.

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