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II. Principes de modélisation en futaie régulière

II.3 Relation densité-production, indice de densité

La relation densité-production est l’un des principes fondamentaux de la modélisation de la croissance. Cette relation porte sur l’effet de la sylviculture (fréquence et intensité des éclaircies) sur la production. Cette question s’est posée en foresterie depuis 1930 lorsque l’éclaircie des peuplements denses a été commencée (Houllier, 1994). C’est dans ce contexte que les dendrométriciens se sont intéressés d’abord, à définir l’indice de densité, et ensuite, à le mettre en

relation avec la production du peuplement. Les fondements théoriques de l’indice de densité et la relation densité-production sont respectivement présentés par la suite.

Concept et fondements théoriques de l'indice de densité

Initialement, la densité était exprimée souvent par certaines variables descriptives du peuplement, telles que le nombre de tiges et la surface terrière par hectare. Aucune de ces deux variables n’est un indice idéal pour la densité car elles dépendent de l’âge et de la fertilité. En effet, la raison évidente de comparabilité (comparer l'indice de densité des peuplements d’âge et de fertilité variée) exige que l'indice de densité soit indépendant de l’âge et de la fertilité. Il s’agit d'un indice qui soit stable au cours du temps, lorsque la compétition est stable, indépendamment de l’âge et de la fertilité (Dhôte, 2002, Czudek, 1998). Selon la littérature, la loi d’auto-éclaircie permet de définir un indice pertinent de densité, pour les peuplements réguliers et monospécifiques. Avant d'expliquer cet indice de densité, faisons un petit rappel sur la loi d’auto- éclaircie :

Les nombreux auteurs, étudiant aussi bien les espèces forestières que d’autres espèces végétales, ont observé une limite naturelle de la croissance qui ne peut pas être dépassée. En effet, pour une essence et une région donnée, il existe une limite supérieure quant à la relation biomasse-nombre qui ne dépend ni de l’âge ni de la station. Cette relation est une fonction puissance, d’exposant proche de -3/2, qui a été appelée "loi d’auto-éclaircie" ou "loi de puissance -3/2". En foresterie, on remplace la biomasse par le diamètre moyen (Dg16). Elle s'énonce

comme suit : pour une région et une espèce données, il existe une limite naturelle de croissance qui relie le nombre d’arbres et le diamètre moyen (Dg) indépendamment de l’âge et de la station (Dhôte, 2002).

Figure 1.3 : Présentation schématique de la forme logarithmique (linéaire) de la loi d’auto-éclaircie (d’après Dhôte, 2002)

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Sur la figure 1.3, on constate que pour un diamètre moyen donné, il existe un nombre maximal de tiges qui ne peut pas être dépassé. Pour une essence donnée, ce nombre maximal dépend du diamètre moyen du peuplement. Une fois arrivé à cette limite naturelle, tout accroissement se traduira par la mortalité naturelle.

L’équation suivante donne la forme mathématique de la loi d’auto-éclaircie. β α − = Dg Max N . (1.18) avec

NMax : Nombre maximal de tiges que le peuplement peut comporter

Dg : Diamètre moyen

α

et

β

: Paramètres du modèle

Dans l'équation (1.18), les paramètres

α

et

β

déterminent le niveau de la courbe d’auto- éclaircie et dépendent principalement de l’essence. Ils sont théoriquement plus élevés pour les espèces d’ombre que pour celles de lumière. Par exemple, selon Reineke (1933), le niveau de la courbe d’auto-éclaircie (quel que soit le diamètre) pour le sapin, est deux fois plus élevé que pour le pin. Le paramètre β est une valeur comprise entre -1.5 et -1.9 qui prend souvent une valeur de –3/2.

La densité est un concept relatif par rapport au stade de développement (diamètre) et à l’espèce en question. Pour une espèce donnée, Reineke (1933) a donc défini son indice de densité (RDI)17 en divisant le nombre de tiges du peuplement, N, (à un diamètre donné) par le

nombre maximal de tiges au même diamètre.

β α Dg N N N RDI Max . ) ( = = (1.19)

L’indice de densité de Reineke prend donc une valeur comprise entre 0 et 1.18 Selon cet indice,

dans chaque stade de développement, plus la densité du peuplement se rapproche de son nombre maximal, plus la concurrence pour toutes les ressources va augmenter. Selon Long (1985), la variation de l’indice de densité de 0 à 1 correspond à quatre phases différentes :

- Début de la concurrence

- Limite inférieure de l’occupation complète du terrain - Limite inférieure de l’auto-éclaircie

- Densité maximale

Long (1985) a estimé que, pour les peuplements purs, les indices de densité correspondant à ces quatre phases sont respectivement, 0.25, 0.35, 0.6 et 1.

A la différence des indicateurs de concurrence comme la surface terrière et le nombre de tiges, l’indice RDI est comparable pour toutes les essences et tous les peuplements de différents

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"Relative Density Index " (RDI)

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Dans les peuplements non gérés, RDI est voisin de 1 et, dans les peuplements gérés, RDI est souvent nettement inférieur à 1.

âges sur différentes stations. Cependant, en raison des difficultés empiriques de l’estimation de la courbe d’auto-éclaircie, cet indice a été utilisé plutôt par les chercheurs que par les forestiers.

Relation densité-production ; effet de la sylviculture sur la production

Selon la loi de Eichhorn et le premier principe d’Assmann (1970), dans un large intervalle de densité, la densité n’a aucun effet sur la production totale. De nombreux travaux ont étudié l'accroissement relatif (par rapport à l'accroissement d'un peuplement hyper dense) et la densité relative (RDI) du peuplement (Mohler, 1945, Johnson, 1967 et Bartet et Pleines, 197219). La mise en évidence de cette relation avec les différentes bases de données a montré que la réaction du peuplement à l’éclaircie peut se manifester sous l’une des formes suivantes (Dhôte, 2002) : - Saturation exponentielle

- A optimum - Monotone

Ces trois types de la relation densité-production sont présentés sur la figure 1.4.

Figure 1.4 : Différentes formes de la relation densité-production (d’après Dhôte, 2000)

Sur la figure 1.4, on s'aperçoit que pour des densités de 50 à 100 % de celle d'un peuplement hyper dense (RDI=1), la production peut rester presque constante dans le cas d'une saturation exponentielle alors qu'elle peut diminuer jusqu'à 20 % (par rapport à celui d'un peuplement hyper dense) dans le cas monotone. Ainsi, dans ce dernier cas, on voit que la baisse de la densité peut entrainer une perte de production. Dans le troisième cas, l'accroissement optimal du peuplement s'obtient avec une densité relative inférieure à 1.

A la différence de la relation densité-production, l’effet de la densité sur l’accroissement individuel est l'inverse. En effet, l’effet de la densité sur la croissance individuelle est toujours limitant dans le sens où toute baisse de la densité du peuplement (baisse de la compétition) accélère la croissance radiale (Dhôte, 2002). C’est pourquoi, le diamètre moyen d’un peuplement

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avec éclaircie est supérieur à celui sans éclaircie. Ainsi, il faut trouver un compromis entre la perte de production liée à la baisse de densité, d'une part, et l'accélération de la croissance des arbres qui en résulte, d'autre part.

A l'issue de cet aperçu bibliographique sur la relation densité-production, on voit pourquoi l'intégration de la densité dans le modèle de croissance est un aspect fondamental.