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CHAPITRE 1 INTRODUCTION

1.2 Recouvrements d’ingénierie de type multicouches

1.2.1 Généralités

Les recouvrements d’ingénierie de type multicouche visant à prévenir la production de DMA sont généralement faits de 5 couches de sol (figure 1-1) ayant chacune une fonction particulière (Aubertin et al., 1995).

Figure 1-1 : Principales composantes d’un système de recouvrement multicouche (Aubertin et al., 2002)

La couche de support (E) est installée au-dessus des rejets miniers. Comme son nom l’indique, elle sert de support aux couches de matériaux sus-jacente et doit généralement posséder une bonne capacité portante et une bonne résistance aux déformations. Elle peut également être utilisée pour créer un bris de capillarité avec les rejets miniers sous-jacents, pour empêcher la remontée capillaire du DMA contenu dans les rejets, et avec la couche de sol sus-jacente (D), si la rétention d’eau doit être favorisée dans cette dernière couche. Cette couche est généralement faite de sable ou de gravier. La couche D est la barrière à l’eau ou à l’oxygène, dépendamment des objectifs recherchés. Dans le cas d’une barrière à l’oxygène, le degré de saturation de la couche D doit demeurer élevé, de manière à limiter la diffusion de l’oxygène vers les résidus miniers sous-jacents. En effet, la diffusion de l’oxygène est environ 10 000 fois plus faible dans l’eau que dans l’air (Cussler, 2009; Lide, 1995). Dans le cas d’une barrière à l’eau, la couche D doit avoir une très faible conductivité hydraulique afin de limiter l’infiltration d’eau dans les résidus sous-jacents. Les matériaux pouvant être utilisés dans la couche D sont multiples et dépendent des objectifs visés ; ce sont généralement des sols fins tels les silts et les argiles peu plastique ou encore des résidus miniers (Bussière et al., 2007). La couche C est généralement une couche drainante (sable ou gravier) qui permet l’évacuation latérale des eaux et la diminution des gradients hydrauliques et pressions interstitielles par le fait même. Dans le cas d’une barrière à l’oxygène, cette couche sera également utilisée pour créer un bris de capillarité et éviter la désaturation de la couche D. La couche B vise à protéger l’intégrité des couches A, B et C des effets climatiques, des animaux et de la biointrusion. Dans plusieurs cas, cette couche est combinée à la couche C. Finalement, la couche A fait la transition entre les couches sous-jacentes et le milieu environnant. Elle sert de support à la végétation, de protection contre l’érosion et réduit les effets des fluctuations météorologiques.

1.2.2 Barrières à l’eau

Tel que mentionné précédemment, la couche D d’un recouvrement d’ingénierie de type multicouche agissant comme barrière à l’eau doit avoir une faible conductivité hydraulique saturée (ksat). Une valeur de 10-7 cm/s est généralement visée (Aubertin et al., 2015). Les matériaux

généralement considérés au sein de cette couche sont l’argile, les géomembranes et, depuis plus récemment, les géocomposites bentonitiques.

Il est possible d’obtenir un ksat de 10-7 cm/s et moins en mettant en place une couche d’argile

compactée. Toutefois, lorsque l’argile est mise en place à une teneur en eau sous-optimale pour le compactage, elle a tendance à former une structure agrégée favorisant la présence de macropores, ce qui résulte en un ksat plus élevé qu’attendu, tandis que si l’argile est placée à une teneur en eau

sus-optimale, elle est difficile à compacter, ce qui se traduit également par un ksat plus élevé

qu’attendu en raison de la porosité élevée (Holtz & Kovacs, 1991). Les argiles plastiques sont également sensibles aux effets des cycles de gel-dégel qui peuvent induire une augmentation de ksat de 1 à 3 ordres de grandeur (Chapuis, 2002; Chapuis et al., 2006) et il peut d’avérer

économiquement non viable de placer une couche d’argile à une profondeur la protégeant de ces cycles.

Les géomembranes en polyéthylène sont régulièrement utilisées comme barrière à l’eau en génie civil, et ont été utilisée à quelques reprises au sein de recouvrement miniers au Québec (p.ex., sites Poirier, Normétal, Aldermac et Barvue). Le matériau a un ksat de 10-11 cm/s en laboratoire, mais sa

mise en place est inévitablement accompagnée de perforations et autres défectuosités. L’exposition prolongée du matériau au soleil peut également réduire la durabilité du matériau à des durées insuffisantes pour un contexte de restauration minière (Aubertin et al., 2015).

Les géocomposites bentonitiques sont faits de bentonite (argile gonflante) contenue entre 2 géotextiles et sont manufacturés sous forme de rouleau, tout comme les géomembranes. Le matériau fait environ 1 cm d’épaisseur et a été développé comme alternative aux couches d’argiles compactée (Bouazza, 2002). Lorsqu’hydraté avec de l’eau, les GCB ont une faible conductivité hydraulique (de l’ordre de 5 x 10-9 cm/s). Les propriétés gonflantes de la bentonite confèrent au

matériau une capacité d’auto-réparation des perforations et une bonne résistance aux cycles de mouillage-séchage et de gel-dégel (Bouazza, 2002; Daniel et al., 1997; Eigenbrod, 2003a; Lange et al., 2007; Melchior, 2002; Sari & Chai, 2013; Sivakumar Babu et al., 2001). Les panneaux de GCB n’ont pas besoin d’être liés mécaniquement entre eux, ce qui en réduits les coûts d’installation et de main d’œuvre (Aubertin et al., 2015). Cependant, lorsqu’un GCB est hydraté avec une solution ayant une force ionique élevée, la conductivité hydraulique du matériau peut augmenter de plusieurs ordres de grandeur, et sa capacité de gonflement peut être réduite (Egloffstein, 2001; Mesri & Olson, 1971; Shackelford, 1994; Shackelford et al., 2000; Shackelford et al., 2010). La performance du matériau au sein d’un recouvrement en contact avec du DMA pourrait donc être amoindrie. Toutefois, les données disponibles à ce sujet sont limitées.

Tableau 1-1 Synthèse des recouvrement miniers agissant comme barrière à l’eau et utilisant un GCB

Site minier

(Localisation) Utilisation du GCB Nature des rejets Recouvrement minier (de haut en bas) Suivi réalisé Références Somex

(Lac Édouard, Québec)

Recouvrement d’un site minier abandonné (1 ha)

Résidus miniers générateurs d’acide

­ 1,0 m sable

­ GCB Inconnu ­ Aubertin et al. (2002)

Kam Kotia

(Timmins, Ontario)

Recouvrement d’un site minier abandonné (80 ha) Résidus miniers générateurs d’acide ­ 0,15 m terre végétale ­ 0,60 m granulaire ­ 0,15 m argile ­ GCB ­ Ancien recouvrement (0.3 m de stériles et 0.3m de granulaire)

Inconnu ­ Hamblin (2009) ­ INAP (2012)

Whistle (Capreol, Ontario) Cellule expérimentale de terrain (12 m x 24 m) Stériles miniers générateurs d’acide ­ 0,9 m sable graveleux ­ GCB

­ Conditions météorologiques au site ­ Teneur en eau, succion, température et

teneur en oxygène dans le recouvrement

­ Ruissellement sur le recouvrement ­ Infiltrations dans les stériles miniers

­ Adu-Wusu et Yanful (2006) ­ Adu-Wusu et Yanful (2007) Premier Gold (Steward, Colombie- Britannique) Cellule expérimentale de terrain (15 x 16 m) Résidus miniers potentiellement générateurs d’acide ­ 0,10 m terre végétale ­ 0,30 m sable et gravier ­ GCL ­ 0,10 m sable et gravier

­ Teneur en eau, succion, température et en oxygène dans le recouvrement et les résidus miniers

­ Ruissellement sur le recouvrement ­ Infiltrations dans les résidus miniers ­ Qualité de l’eau interstitielle dans les

résidus miniers ­ Renken (2006) ­ Renken et al. (2009) Montague Gold (Darmouth, Nouvelle-Écosse) Cellule expérimentale de terrain (8 m x 10 m) avec diverses configurations de recouvrement intégrées à la cellule Résidus miniers générateur de drainage neutre contaminé (arsenic) Diverses configurations avec : ­ Ensemencement (gazon) ­ 0 à 1 m de sable et gravier ­ GCL conventionnel ou

amendé avec des polymères

­ 0 ou 0,15 m de sable et gravier

­ Teneur en eau des résidus miniers et matériaux granulaires

­ Essais en laboratoire sur des échantillons de GCB exhumés :

 Conductivité hydraulique  Essais de gonflement libre  Cations liés, solubles et

échangeables  Composition élémentaire ­ Hosney et Rowe (2013) ­ Hosney et Rowe (2016) .

Le tableau 1-1 présente les cas documentés d’utilisation de GCB dans un recouvrement minier. Tous ces cas sont situés en climat continental humide selon la classification climatique de Köppen (Peel et al., 2007).