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Le recours aux mathématiques.

Dans le document Monnaie et finance (Page 35-39)

IV. B La loi de l'économie en science économique.

3. Le recours aux mathématiques.

Et l'idée métaphysique du moindre effort, particularisation de la loi de l'économie, va recevoir des dénominations différentes ponctuelles sous l'influence des mathématiciens qui s'en sont emparés pour la mettre en équation :

"[ ] l'idée métaphysique du moindre effort a été

- particularisée par Fermat, pour les phénomènes physiques, en celle de moindre temps,

- et plus tard généralisée par Maupertuis, Euler, Lagrange, Laplace, Helmholtz, en celle de moindre action."

(ibid., pp.228-229)83

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On remarquera en passant que selon Poincaré:

"[ ] les méthodes d invention se ressemblent beaucoup. Dans un cas [sciences physiques] comme dans l autre [sciences mathématiques], elles consistent à remonter du fait à la loi, et à rechercher les faits susceptibles de conduire à une loi." (Poincaré, science et méthode)

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a) L'idée du moindre temps.

Pierre de Fermat (1601-1665) fit la proposition que les rayons lumineux répondaient à un principe très général selon lequel le chemin emprunté par la lumière pour se rendre d un point donné à un autre était celui pour lequel le temps de parcours était minimum (en fait un extremum qui peut être un minimum ou un maximum). De ce principe, Fermat a déduit les lois de la réflexion et de la réfraction de la lumière.

b) L'idée de la moindre action.

La démarche newtonienne consistait à aborder le mouvement d'un corps par sauts de puce infinitésimaux84, la nouvelle démarche va le prendre dans sa globalité.

* le principe de Maupertuis

Exprimé analytiquement (1744), le principe de Pierre-Louis Moreau de Maupertuis 1698 1759 s'énonce :

"Dans le mouvement d'un système de corps agissant les uns sur les autres, la somme des produits des masses par les vitesses et par les déplacements est minimum" (Ibid., p.229)85.

* le principe de Euler.

Quelques années plus tard, à partir d une intuition semblable à celle de Maupertuis, Leonhard Euler (1707 1783) parvint à un énoncé très similaire de l action mais en partant du constat que les corps tendent à adopter un état où l énergie potentielle est minimale. L action d Euler s exprimait en fonction de l énergie potentielle au lieu de l énergie cinétique.

" la loi sort de l expérience, mais elle n en sort pas immédiatement. L expérience est individuelle, la loi qu on en tire est générale, l expérience n est qu approchée, la loi est précise ou du moins prétend l être. L expérience se fait dans des conditions toujours complexes, l énoncé de la loi élimine ces complications. C est ce qu on appelle « corriger les erreurs systématiques ». En un mot, pour tirer la loi de l expérience, il faut généraliser ; c est une nécessité qui s impose à l observateur le plus circonspect. Mais comment généraliser ?" (Poincaré, La valeur de la science)

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On faisait le bilan de toutes les forces qui agissent sur un corps à un instant et en un point donnés, on calcule la nouvelle position à un autre instant infiniment proche du précédent puis on recommence, construisant ainsi de proche en proche la trajectoire du corps. Cette façon itérative de procéder peut être, dans certains cas particuliers, élégamment contractée en une équation différentielle qui permet de prédire, une fois résolue, la position du corps à tout instant.

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Selon Poincaré :

" Maupertuis a donc droit à sa part de gloire. Certes, elle ne vaudra pas celle de Newton qui avait reçu l étincelle divine ; ni même celle de son collaborateur Clairaut. Elle n est pas à dédaigner pourtant, parce que son uvre était nécessaire, et si la France, devancée par l Angleterre au XVIIe siècle, a si bien pris sa revanche au siècle suivant, ce n est pas seulement au génie des Clairaut, des d Alembert, des Laplace qu elle le doit ; c est aussi à la longue patience des Maupertuis et des La Condamine." (Poincaré, dernier chap.)

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* le principe de Lagrange

Joseph Louis de Lagrange (1736-1813) a mis au point une méthode «mécanique» pour résoudre un problème physique qu'au XVIIIè siècle, ceux qu'on allait dénommer par la suite "mécaniciens" se posaient.

Le problème était de définir le mouvement mécanique d'un système matériel. Le calcul des variations a suggéré et inspiré la méthode de Lagrange.

Pour pouvoir le définir en termes finis, Lagrange a fait dépendre l'état du système d'un certain nombre de paramètres indépendants (angles ou distances), à un instant quelconque, qui suffisent pour déterminer la position de toutes ses parties.

Il a combiné entre eux ces paramètres selon la règle suivante :

- il a supposé que, pendant que le phénomène naturel mécanique se déroule, la combinaison ne varie pas.

- il a supposé aussi que l'hypothèse doit être vraie, quelles que soient les variations des paramètres ; - cela a fourni autant d'équations différentielles qu'il y avait de paramètres indépendants.

En intégrant les équations différentielles, c'est-à-dire en résolvant le système, en calculant la solution, le mouvement du système est déterminé en termes finis. (cf. Matisse, 1925, p.228).

"[ ] l'emploi de paramètres peut être généralisé, et on peut s'en servir en physique, en chimie, en biologie, pour définir l'état d'un système [...]

["Des équations de Lagrange, il est facile de déduire les équations canoniques d'Hamilton.

On est conduit aux équations de Jacobi et à tout l'ensemble des développements de la mécanique analytique. »]" (Ibid., pp. 226-8)

Lagrange a donc concocté une méthode pour parvenir à mettre en équation les "phénomènes naturels mécaniques" ou, si on préfère, les "mouvements mécaniques d'un système matériel"86. Et il a sorti du "calcul des variations"87 disponible à l'époque une méthode de résolution, dont le

caractère géométrique fut démontré à la fin du XIXè siècle88. Elle tenait dans une intégration mathématique d'équations particulières (elles seront d'ailleurs dénommées "équations de Lagrange").

En 1925, beaucoup de "mécaniciens" considéraient les équations auxquelles donnait lieu la méthode comme le résultat de synthèse89 de leur discipline90. Ils partaient d'elles pour traiter tout

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Rappelons que la mécanique traite de la relation entre les forces - causes - qui s'exercent sur un corps et les mouvements de ce corps - effets - qu'elles produisent.

La force est un concept qui n'a pas une, mais plusieurs définitions possibles (statique, dynamique ou énergétique). Le mouvement d'un corps est un concept qui a deux grandes formes possibles de base (rectiligne ou circulaire). En ces deux formes, tout mouvement concevable peut être décomposé.

Le concept de mouvement sera généralisé et considéré indépendamment du temps, autre concept de la mécanique. 87

On rappellera en passant que c'est au début du XVIIIè siècle que les dérivées mathématiques ont été créées par Newton et Leibniz. 88

ibid., pp.228-9. 89

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problème mécanique. Elles leur permettaient aussi de décider si un phénomène physique donné pouvait se ramener à une explication mécanique.

* Le principe de la moindre contrainte

Carl Friedrich Gauss (1777-1855) a proposé pour sa part le principe de la moindre contrainte91. On l'énonce ainsi :

"le mouvement d'un système de points matériels, liés ensemble d'une manière quelconque et soumis à quelque sorte d'influence que ce soit, a lieu, à tout instant, en accord le plus parfait possible avec le mouvement que prendraient ces points s'ils devenaient tous libres, c'est-à-dire avec la moindre contrainte possible, en prenant pour mesure de la contrainte éprouvée pendant un intervalle de temps infiniment petit, la somme des produits des masses de chaque point par le carré de la quantité dont il s'éloigne de la position qu'il aurait occupé s'il avait été libre."

* Le principe de moindre action intrigue les physiciens d'aujourd'hui.

Selon Roland Omnès (1994), James Clerk Maxwell (1831-79) a été l'artisan de la mutation de la physique mécanique. Il a obtenu les équations de la dynamique pour son système de champs (Omnès, op.cit., p.90) 92. Avec ses travaux, la physique classique avait trouvé son terme Il venait d'introduire son remplacement par une physique formelle où les concepts de base sont mathématiques et où les principes (ici, les équations de Maxwell ou la forme donnée au principe de moindre action de Lagrange) sont devenus purement formels et mathématiques (cf. Omnès, op.cit., p.90)

Mais en plus :

"Par la même occasion, le principe de moindre action de Lagrange prenait soudain une ampleur nouvelle, pour devenir en quelque sorte le principe supérieur de la dynamique" (ibid.)

En d'autres termes, sous la dénomination "principe de moindre action", la "loi de l'économie" est en fait la base reconnue de la mécanique quantique même si elle intrigue ses développeurs :

"Le principe de moindre action, sous sa forme classique, garde encore une grande part de son mystère, mais ce mystère se confond avec celui de la mécanique quantique. Richard Feynman a déduit ce principe à partir de la mécanique quantique en 1946" (ibid., pp.90n-91n)

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On comprend dès lors que certains économistes s'en emparent alors pour l'appliquer au domaine économique en général et à la théorie du consommateur en particulier, comme Sir John Hicks.

Il reste que dès la fin du XIXè siècle Pareto (1896) écrivait que les équations jouent dans l'étude de l'équilibre économique un rôle analogue à celui des équations de Lagrange dans l'étude de l'équilibre mécanique (§59) ou encore que l'équilibre d'un système économique présente des analogies frappantes avec l'équilibre d'un système mécanique (§592).

91

Selon Matisse : "Gauss a donné un principe qui convient à la fois aux systèmes holonomes et aux systèmes non-holonomes [les liaisons imposées ne peuvent pas s'écrire en termes finis, sont non intégrables] (Ibid., pp.233-4).

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Précisément:

"The mathematical theory of electromagnetism by James Clerk Maxwell, set up in 1864, led to the view that light is of electromagnetic nature, propagating as a wave from the source to the receiver.

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4. Remarques de l'ordre des sciences physiques.

Dans le document Monnaie et finance (Page 35-39)

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