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La suppression des J/ψ par le PQG est due `a l’´ecrantage de couleur. Ceci suppose que les quarks lourds ne se forment qu’aux premiers instants de la collision nucl´eon-nucl´eon. Par la suite, les interactions avec les nucl´eons et le PQG ne peuvent que r´eduire le nombre de J/ψ observ´e. Aux ´energies du RHIC et du LHC, la production de multiples paires de quarks lourds par collision est possible dans les collisions les plus centrales. Dans le cas de la formation d’un ´etat d´econfin´e, cette production multiple permet d’activer un nouveau m´ecanisme de formation du J/ψ appel´e la recombinaison. La mobilit´e des quarks lourds dans le milieu permet la combinaison des c et ¯c produits par diff´erentes collisions nucl´eon-nucl´eon. La production des J/ψ recombin´es est alors proportionnelle au nombre de combinaisons des quarks charm´es possibles et a donc comporte- ment quadratique avec la production de charme. Lorsque le nombre de paires c¯c produites est suffisament grand, les J/ψ recombin´es peuvent devenir la population dominante observ´ee apr`es la phase d’hadronisation. Les premi`eres mesures aux ´energies du RHIC montrent que la production de quarks charm´es est sup´erieure aux pr´edictions de pQCD. N´eanmoins, ces mesures souffrent d’une grande incertitude car elles sont bas´ees sur les mesures d’´electrons non photoniques, qui sont domin´ees par le bruit de fond `a basse impulsion transverse o`u se situe l’essentiel de la pro- duction.

Deux mod`eles du processus de recombinaison des J/ψ ont ´et´e developp´es : un premier mod`ele [57] utilise une approche cin´etique dans laquelle la production des J/ψ est une comp´etition entre sa production et sa suppression, ces deux processus d´ependant de la densit´e de charme produit. Le deuxi`eme mod`ele de recombinaison [58] a une approche statistique de la production des J/ψ. V.4.1 Mod`ele cin´etique

Le mod`ele de recombinaison cin´etique [57] ´etudie la production du J/ψ en calculant la produc- tion totale venant des effets de suppression et de formation dans un milieu d´econfin´e. Il suppose que la recombinaison se produit pendant la phase d´econfin´ee.

La production des J/ψ est alors une comp´etition entre la recombinaison des J/ψ et la suppres- sion caus´ee par les interactions du J/ψ dans le milieu d´econfin´e. La suppression est d´ecrite par la section efficace de dissociation du J/ψ par interaction avec les gluons dans le milieu d´econfin´e : Jψ + g → c¯c, o`u la paire c¯c r´esultante est dans un ´etat color´e. Cette « ionisation » du J/ψ est un processus dynamique analogue `a l’´ecrantage de la couleur. La recombinaison quant `a elle, est d´ecrite par la section efficace de formation qui est le processus inverse de celle de la suppression. L’´evolution du nombre de J/ψ total est d´ecrite suivant l’´equation de Boltzmann par :

dNJ/ψ

dt = λFNcN¯c[V (t)] −1− λ

DNJ/ψρg (V.5)

o`u ρg est la densit´e de gluons dans le milieu, les termes λ correspondent aux produits de la section efficace de r´eaction avec la vitesse relative des composants (les quarks c et ¯c dans le cas de formation et J/ψ et gluon dans le processus de suppression), V(t) correspond au volume du milieu et N est le nombre des composants. Dans les collisions or-or au RHIC, la production de J/ψ form´es par recombinaison, qui a un comportement quadratique avec le nombre de quarks charm´es, devient importante dans les collisions les plus centrales par rapport aux collisions p´eriph´eriques o`u la production de charme est moindre, et o`u l’on ne s’attend pas au d´eclenchement du processus de recombinaison. N´eanmoins l’amplitude de la production des J/ψ recombin´es pr´edite par ce

mod`ele d´epend fortement de la mesure de la production du charme ouvert et de sa distribution. La figure V.8 montre la comparaison des mesures RAuAu en fonction de la centralit´e avec les pr´edictions de ce mod`ele de recombinaison. La courbe en pointill´e (pour T0 = 0, 4 GeV ) s’ajuste pour tous les points except´e le point plus central (Ncoll = 779). Alors que la courbe en tiret´e (T0 = 0, 5 GeV ) sous-estime la zone intermediaire 60 < Ncoll< 140. L’amplitude de la production des J/ψ donn´ee par ces pr´edictions semble correspondre aux valeurs mesur´ees. N´eanmoins le comportement de la production en fonction de la centralit´e est moins bien d´ecrite.

10

0

10

1

10

2

10

3

NColl

0.0

0.2

0.4

0.6

0.8

1.0

1.2

1.4

RAA

AuAu µµ dAu µµ

J/Ψ Nuclear Modification factor R

AA

Au+Au @ √ s

NN

= 200 GeV

Thews T0 = 0.4 GeV Thews T0 = 0.5 GeV

Fig. V.8 – Comparaison des facteurs de modification nucl´eaire RAuAu mesur´es dans les collisions or-or dans PHENIX (ronds violets) avec les pr´edictions du mod`ele propos´e par R. Thews et al. [59] (courbes rouges).

Ce mod`ele s’interesse ´egalement aux distributions des J/ψ en fonction de la rapidit´e et de l’impulsion transverse dans les collisions or-or au RHIC. Les distributions en impulsion transverse des J/ψ recombin´es refl`etent en effet les distributions du charme initial (en ajoutant les effets de milieu). Pour ce faire, les distributions des quarks charm´es sont n´ecessaires pour ´evaluer les effets sur les J/ψ recombin´es. Le mod`ele [59] utilise les distributions du charme calcul´ees par pQCD et s´electionne les paires c¯c provenant de la mˆeme collision dure appel´ees paires diagonales et les

quarks c et ¯c non corr´el´es pour former des paires appel´ees non-diagonales. Dans les collisions proton-proton et proton-noyau lourds, la production des J/ψ est majoritairement produite avec les paires diagonales, alors que dans les collisions noyau-noyau, la production est domin´ee par les paires non-diagonales. Les distributions en rapidit´e attendues pour les J/ψ sont montr´ees dans la figure V.9. Cette figure pr´esente une comparaison qualitative des distributions des J/ψ form´es par les paires diagonales (triangles rouges) et celles des J/ψ produits par les paires diagonales et non-diagonales qui sont les paires dominantes. La production de charme ´etant importante dans dans la r´egion `a rapidit´e nulle, la production J/ψ par recombinaison y est alors favoris´ee. La distribution attendue est alors plus ´etroite dans les collisions centrales pour lesquelles les J/ψ recombin´es sont dominants.

-4 -2 0 2 4 y 0.2 0.4 0.6 [N -1 dN/dy] J/ ψ cc diagonal pairs Formation from all pairs

Fig.V.9 –Pr´edictions [59] qualitative des distributions en rapidit´e des J/ψ ne subissant pas la recombinaison en rouge (triangles) et la totalit´e des J/ψ dont la majorit´e est produite par recombinaison en bleu (ronds).

Fig. V.10 – Distribution en fonction de l’impul- sion transverse du charme mesur´ee dans les collisions proton-proton dans l’exp´erience PHENIX [60] dans la r´egion `a rapidit´e nulle en rouge et `a rapidit´e |y| = 2 en bleu.

Les mesures exp´erimentales d´ecrites dans le chapitre IV.3.3 ne montrent pas de modification significative de la distribution en rapidit´e des J/ψ en fonction de la centralit´e. N´eanmoins, les mesures du charme ouvert en fonction de la rapidit´e sont n´ecessaires pour quantifier un ´eventuel changement de la largeur des distributions en rapidit´e qui devrait ˆetre utilis´ees par ce mod`ele. La figure V.10 montre la distribution en fonction de l’impulsion transverse du charme dans deux r´egions de rapidit´e diff´erentes : `a rapidit´e nulle en rouge et `a rapidit´e |y| = 2 dans les collisions proton-proton. Elle montre que la formation du charme pr´esente le mˆeme taux de production dans ces deux r´egions et a un comportement similaire en fonction de pt. Malgr´e des incertitudes importantes, ces premi`eres mesures de charme laissent `a penser que la production des J/ψ recom- bin´es pourraient ˆetre peu d´ependante de la rapidit´e. Toutefois, ces mesures ne prennent pas en compte la r´egion de basse impulsion transverse o`u se situe l’essentiel de la production de charme ouvert. Des mesures pr´ecises du charme en fonction de la rapidit´e dans les collisions or-or seraient donc n´ecessaires pour mieux contraindre les mod`eles de recombinaison.

De la mˆeme mani`ere que pour les distributions en fonction de la rapidit´e, la production des J/ψ recombin´es est favoris´ee `a bas pt. En effet, la production de charme `a bas pt est plus importante et la combinaison des quarks c `a bas pt devient favoris´ee, entrainant une production plus importante des J/ψ dans cette r´egion. Ceci affecte alors les valeurs moyennes du carr´e de

l’impulsion transverse qui sont alors plus petites pour les J/ψ recombin´es.

La figure V.11 montre les valeurs moyennes du carr´e de l’impulsion transverse en fonction de la centralit´e pour trois classes de centralit´e en or-or. Les courbes repr´esentent les pr´edictions de Thews et al. [61] pour les valeurs de hp2ti. La ligne pointill´ee repr´esente les pr´edictions des hp2ti des J/ψ sans recombinaison. La diffusion d’un parton projectile par les partons du noyau cible dans l’´etat initial (effet Cronin), va donner une impulsion plus importante au parton initial et augmente ainsi la producton de J/ψ `a haut pt. Cet effet est d´ecrit en collision proton-noyau par :

hp2tipA− hp2tipp = λ2[¯nA− 1] (V.6)

o`u ¯nAest le nombre moyen des interactions in´elastiques du projectile sur le noyau de taille A, λ2 est l’impulsion carr´ee transferr´ee par interaction. Les valeurs ¯nA et λ2 sont d´etemin´ees `a partir des valeurs mesur´ees `a 200 GeV en proton-proton et deuton-or de PHENIX et sont : ¯nAu = 5,4 et λ2 = 0,35 ± 0,14 GeV2/c.

Dans les collisions noyau-noyau, les auteurs [61] d´ecrivent cette augmentation en pt par :

hp2tiAB − hp2tipp= λ2[¯nA+ ¯nB− 2] (V.7) La courbe en trait plein de la figure V.11 repr´esente la pr´ediction des hp2

ti des J/ψ qui sont produits par les paires non-diagonales uniquement et la courbe en trait pointill´e celle des paires diagonales. coll N 1 10 102 103 > (GeV/c) 2 T <p 1 2 3 4 5 6 7 8 Au+Au |y|[1.2,2.2] [-2.2,1.2]d+Au y [1.2,2.4]d+Au y [1.2,2.2]p+p |y|

Thews diag.- Au+Au

Thews all - Au+Au

Fig.V.11 –Les valeurs moyennes du carr´e de l’impulsion transverse en fonction du nombre de collisions binaires pour trois classes de centralit´e en or-or (carr´es jaunes). Les courbes sont les pr´edictions par [61] des hp2

ti en

fonction de la centralit´e avec recombinaison (trait plein) des J/ψ et sans (ligne pointill´ee). Les valeurs mesur´ees en proton-proton et deuton-or sont ´egalement repr´esent´ees dans la figure.

Les mesures exp´erimentales se situent entre ces deux pr´edictions, ce qui laisse supposer qu’aux ´energies du RHIC, les J/ψ mesur´es sont un m´elange de J/ψ qui survivraient `a la formation de

plasma et de J/ψ recombin´es. N´eanmoins, les incertitudes des mesures ne permettent pas de donner une conclusion forte sur cette comparaison, une autre fa¸con de calculer l’effet Cronin avec les mesures exp´erimentales sera propos´ee plus loin.

V.4.2 Mod`ele statistique

Un autre m´ecanisme de recombinaison a ´egalement ´et´e developp´e dans le cadre de l’hadro- nisation statistique [58]. En effet, l’hadronisation statistique donne une bonne description des rapports d’abondance des hadrons l´egers produits lors des collisions par une distribution statis- tique des quarks du bain thermique dans les hadrons. Dans le cas des quarks lourds comme le charme, qui sont uniquement produits dans les collisions nucl´eon-nucl´eon dures, il n’y a pas de thermalisation `a la phase d’hadronisation. En effet, la masse ´elev´ee du quark charm´e entraine un allongement du temps n´ecessaire pour atteindre la thermalisation. La densit´e des quarks charm´es est alors sup´erieure `a celle attendue au moment du gel cin´etique n´ecessitant une correction du taux de charme disponible dans le bain thermique. La fugacit´e γc est appliqu´ee comme correction dans le mod`ele d’hadronisation statistique, dans les collisions aux ´energies du RHIC, γc est de l’ordre de 13 `a T = 160 MeV, et de 6 `a T = 180 MeV.

Dans le cas de formation des charmonia par ce processus, le terme de fugacit´e est ´elev´e au carr´e ce qui entraine ´egalement un comportement quadratique avec le nombre de quarks charm´es dis- ponibles. Les productions d´ependant de l’abondance des saveurs des quarks dans le milieu au moment de l’hadronisation, la production des quarkornia devient alors tr`es sup´erieure `a la pro- duction du charme ouvert, et les rapports de production des quarkonia comme par exemple le rapport de production du J/ψ au ψ′, sont fortement contraints.

La production du J/ψ dans ce mod`ele [58] est d´ecrite comme une production totale par ce proces- sus en supposant que les J/ψ form´es sans ce m´ecanisme sont totalement supprim´es par l’´ecrantage de couleur. La figure V.12 montre les pr´edictions correspondantes ainsi que les valeurs mesur´ees exp´erimentalement en fonction de la centralit´e. Ce mod`ele ne semble pas reproduire correctement nos donn´ees, notons que ces pr´edictions sont effectu´ees pour y = 0.

Un autre mod`ele propos´e par Grandchamp et al. [62] associe la recombinaison par l’hadroni- sation statistique avec une suppression non totale des J/ψ produits initialement. La dissociation des J/ψ est mod`elis´ee par la suppression dans la phase hadronique par interaction avec les m´esons π et ρ et dans la phase PQG par interaction i + J/ψ → c + ¯c (i=g,q, ¯q) qui est l’effet dominant de la suppression. La figure V.13 compare les mesures RAuAuavec ces pr´edictions de recombinaison thermiques : la contribution dite directe (suppression) et la r´eg´eneration sont ´egalement montr´ees seules sur la figure, l’effet total ´etant la somme de ces deux contributions. Les points de mesure s’accordent avec la courbe except´e pour le point le plus central (Ncoll = 280). En revanche, si l’on compare les RAuAu mesur´es avec les pr´edictions sans la recombinaison (courbe rapp direct), la suppression est alors surestim´ee. La suppression du J/ψ dans un PQG seule ne d´ecrit pas correctement les mesures exp´erimentales. Il faut noter que ces pr´edictions sont calcul´ees pour y = 0 et que les effets nucl´eaires froids ne sont pas pris en compte.