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I.2 Les m´ecanismes de production de J/ψ dans les collisions hadroniques

I.2.2 Les effets nucl´eaires froids

I.2.2.1 Effet de l’´etat initial : le shadowing

Les distributions des partons dans les nucl´eons li´es dans un noyau se comportent diff´eremment des partons dans un proton libre. Si on d´efinit le rapport RiA(x, Q2) ≡ fiA(x, Q2)/fip(x, Q2) o`u fip et fiA sont respectivement les distributions des partons i (i ´etant le type de parton consid´er´e : gluons, quarks) dans un proton libre et dans un noyau de num´ero atomique A, ce rapport est diff´erent de 1 (RA

un noyau (de num´ero atomique A = 208) en fonction de x avec une analyse DGLAP21. Les effets nucl´eaires sont cat´egoris´es selon diff´erentes r´egions de x : la r´egion dite de shadowing correspond `

a x ≤ 0, 1 pour RA

g ≤ 1, la r´egion d’antishadowing `a 0, 1 ≤ x ≤ 0, 3 pour RAg ≥ 1, la r´egion dite de l’effet EMC `a 0, 3 ≤ x ≤ 0, 7 pour RA

g ≤ 1 et enfin la r´egion du mouvement de Fermi pour RA g ≥ 1 lorsque x → 1.

10

-5

10

-4

10

-3

10

-2

10

-1

1

0.6

0.7

0.8

0.9

1.0

1.1

1.2

1.3

(

,

2

)

LHC

RHIC

SPS

2

=2.25 GeV

2

10000 GeV

2

=208

Fig. I.32 – Modification des distributions des gluons RA

g(x, Q2) dans un noyau de num´ero atomique A = 208

en fonction de x pour diff´erent Q2 : Q2= 2, 25 GeV2 (trait plein), Q2= 5, 39 GeV2 (pointill´e), Q2= 14, 7 GeV2

(tiret´e), Q2 = 39, 9 GeV2 (tiret´e-pointill´e), Q2= 108 GeV2 (double tiret´e) et Q2= 10000 GeV2(tiret´e).

Les J/ψ que nous d´etectons sont produits par des partons qui poss`edent une certaine propor- tion de x de l’impulsion du nucl´eon auquel ils appartiennent. Cette proportion x d´epend de l’im- pulsion des nucl´eons et donc de l’´energie de collision. Cette modification des distributions entraˆıne ainsi une modification de la production des J/ψ par rapport `a la production mesur´ee en proton- proton multipli´ee par la superposition des collisions incoh´erentes nucl´eon-nucl´eon produites en noyau-noyau. Les r´egions en x accessibles aupr`es des acc´el´erateurs du SPS (√s = 17, 3 GeV pour les J/ψ d´etect´es `a y entre 0 et 1), RHIC (√s = 200 GeV pour |y| < 0,35 et pour 1,2 < |y| < 2,4) et LHC (√s = 5500 GeV) sont ´egalement montr´ees sur la figure I.32. Ainsi, au SPS (NA50 et NA60), on explore la zone d’antishadowing qui va favoriser une augmentation de la production des J/ψ. Par contre au RHIC (PHENIX) et au LHC (ALICE) ce sera la zone de shadowing qui favorisera alors une suppression de la production des J/ψ qui sera explor´ee.

Les mesures dans les collisions pA constituent une ligne de r´eference puisqu’elles ´etudient les effets nucl´eaires froids sans les complications dues `a une phase de plasma. De plus, la production des quarks lourds ´etant domin´ee par la fusion de gluons dans les collisions hadroniques, la production

21On utilise les ´equations d’´evolution de Dokshitzer-Gribov-Lipatov-Altarelli-Parisi pour d´ecrire l’´evolution des

du charme ouvert porte ´egalement l’information des distributions de gluons dans les noyaux et permet en principe de calculer fiAet d’obtenir RAi .

Dans l’exp´erience PHENIX, une campagne de prise de donn´ees en deuton-or `a √s = 200 GeV permet de quantifier le shadowing aux ´energies du RHIC. La mesure de la production de charme ouvert est toutefois difficile dans les collisions deuton-or dues aux grandes incertitudes li´ees aux mesures. Pour am´eliorer les mesures, il est n´ecessaire d’utiliser un d´etecteur de vertex afin d’iden- tifier les muons ou ´electrons provenant de la d´esint´egration des m´esons D.

N´eanmoins, il a ´et´e possible de mesurer les effets de shadowing directement sur la production des J/ψ [34]. La figure I.33 montre la section efficace de la production de J/ψ en fonction de la rapidit´e dans les collisions proton-proton (figure de gauche). Dans les collisions deuton-or, les me- sures `a rapidit´e n´egative correspondent `a la fusion d’un gluon `a grand x (x ∼ 10−1) dans le noyau d’or. Ces mesures sondent alors la r´egion d’anti-shadowing. En revanche, les mesures de J/ψ `a rapidit´e positive correspondent `a la fusion d’un gluon de petit x (x ∼ 10−3) dans le noyau d’or qui correspond `a la r´egion dite de shadowing. Enfin, les mesures `a rapidit´e nulle correspondent `a la r´egion en x de faible shadowing (x ∼ 10−2).

Le rapport RdAu pr´esent´e dans la figure I.33 de droite, montre la rapport entre la section efficace mesur´ee dans les collisions deuton-or `a celle mesur´ee en proton-proton multipli´ee par le nombre de collisions binaires correspondant au syst`eme deuton-or 22. Sans modification nucl´eaire R

dAu serait ´egale `a 1.

Les mesures de RdAu en fonction de la rapidit´e sont compatibles avec l’unit´e, `a l’exception du point `a y = 2. Cette r´egion correspond au domaine en x de l’or qui subit un shadowing plus important. N´eanmoins, les faibles variations de RdAu `a rapidit´e n´egative et positive o`u les effets des modifications nucl´eaires (anti-shadowing et shadowing respectivement) sont oppos´es, montrent que ces effets sont faibles.

I.2.2.2 Effet de l’´etat final nucl´eaire : l’absorption nucl´eaire

L’absorption nucl´eaire dite normale du J/ψ correspond `a la disparition du charmonium par collision in´elastique avec les nucl´eons (J/ψ + N → charme ouvert). Pour les mˆemes raisons ´evoqu´ees pour l’´etude du shadowing, les mesures dans les collisions pA constituent une base de r´ef´erence pour les ´etudes en particulier pour les ´etudes de suppression anormale du J/ψ en noyau- noyau.

La production du J/ψ dans les collisions pA peut ˆetre exprim´ee comme : σpA = σpN Z d2b Z ∞ 0 dzρA(b, z)Sabs(b, z) (I.14)

o`u σpNest la section efficace proton-nucl´eon, b est le param`etre d’impact, z le point de production selon l’axe longitudinal, ρAla densit´e locale de nucl´eons et la probabilit´e de survie `a l’absorption nucl´eaire Sabs(b, z) = exp −R dz′ρA(b, z

abs(z′− z).

Le terme σabs d´epend de l’´evolution de la paire c¯c pendant la travers´ee dans le milieu nucl´eaire. Lorsque la paire c¯c est produite dans un ´etat de singulet de couleur, elle va ´evoluer dans la mati`ere nucl´eaire dans cet ´etat et s’hadroniser apr`es avoir travers´e les noyaux. En revanche, la paire produite dans un ´etat d’octet de couleur, va ´evoluer dans la mati`ere nucl´eaire sous la forme de |(c¯c)8gi. Le temps d’hadronisation est plus long de l’ordre de 0,2 `a 0,25 fm, et un ´echange de gluon avec les nucl´eons peut briser la paire avant l’hadronisation, ce qui la rend plus fragile.

22

−2 −1

0

1

2

Rapidity

0

20

40

60

B

ll

*d

σ

pp

/dy(nb)

PHENIX µ+µ− PHENIX e+e−

−2 −1 0

1

2

0

0.2

0.4

0.6

0.8

1

1.2

1.4

R

dA

Kopeliovich EKS 3mb (Vogt) EKS 1mb (Vogt) FGS 3mb (Vogt)

Accepted

Events, shape

vs Rapidity

(a) J/ψ

(b) dAu/pp J/ψ

Fig. I.33 – Figure gauche : Section efficace de la production de J/ψ dans les collisions proton-proton `a √

s = 200 GeV en fonction de la rapidit´e (multipli´ee par le rapport de branchement) [34]. La courbe rouge est un ajustement des points de mesure avec diff´erentes formes de distribution en rapidit´e obtenues grˆace au g´en´erateur PYTHIA. Figure droite : rapport RdAuen fonction de la rapidit´e pour toutes centralit´es confondues. Les courbes

Les r´esultats obtenus dans les collisions pA au SPS b´en´eficient d’une large gamme de syst`emes pA. Ces mesures montrent une absorption nucl´eaire de σabs = 4,18 ± 0,35 mb [36]. L’exp´erience PHENIX ne dispose que des donn´ees deuton-or pour mesurer l’absorption nucl´eaire. Dans la figure I.33, les ajustements des courbes th´eoriques prennent en compte `a la fois des effets de shadowing et d’absorption nucl´eaire.

La figure I.34 montre les facteurs de modification nucl´eaire mesur´es dans les collisions deuton- or en fonction de la centralit´e, et indique que les effets nucl´eaires froids, le shadowing et l’absorp- tion nucl´eaire, varient en fonction la centralit´e des collisions. Les courbes noires repr´esentent les pr´edictions de ces deux effets en utilisant la param`etrisation EKS98 pour les effets de shadowing et incluent les effets de l’absorption nucl´eaire pour diff´erentes valeurs de section efficace : σabs= 0 mb (effet du shadowing seul), 1, 2 et 3 mb sont utilis´es. Les mesures semblent favoriser un faible effet de shadowing avec une absorption nucl´eaire de 1 mb et σabs = 3 mb d´etermine la limite sup´erieure en terme d’absorption nucl´eaire.

Fig.I.34 –Facteurs de modification nucl´eaire RdAen fonction du nombre de collisions binaires mesur´es dans trois r´egions en rapidit´e : les mesures dans la figure du haut repr´esentent les mesures `a rapidit´e n´egative, celles du milieu sont celles `a rapidit´e nulle et celles de la figure du bas sont celles `a rapidit´e positive [34]. Ces derni`eres montrent un effet significatif du shadowing en fonction de la centralit´e. Les courbes repr´esentent les calculs th´eoriques ([35] et communications priv´ees), les courbes noires utilisent la param`etrisation EKS98 avec σabs = 0 (trait plein), 1

(tirets courts), 2 (pointill´es) et 3 mb (tiret´es-pointill´es). La courbe rouge utilise la param`etrisation FGS et une section efficace de σabs = 3 mb.