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Chapitre 3 : Le réseau de microtubules et les MAPs associées

III. Organisation et rôle des microtubules dans le muscle

2) Rôles du réseau de microtubules

a) Myogenèse

De façon générale, les microtubules permettent de maintenir l’architecture de la cellule (Boudriau et al., 1993). Au cours de la myogenèse, des vagues de remodelage subcellulaire apparaissent et affectent entre autre, le réseau de microtubules et les MTOCs, les sites de sorties du reticulum (ERES) et l’appareil de Golgi (Lu et al., 2001; Tassin et al., 1985a; Zaal et al., 2011). Dans les myoblastes les microtubules sont nucléés à partir d’un centrosome juxta-nucléaire (Tassin et al., 1985a). Au cours de la différenciation cellulaire, les myotubes acquièrent des microtubules plus denses, avec une orientation parallèle, et les centrosomes sont clusterisés proches des noyaux (Kano et al., 1991; Tassin et al., 1985a, 1985b). Les microtubules sont ainsi nucléés par les éléments de Golgi dispersés dans toute la cellule et autour des noyaux (Tassin et al., 1985a).

Durant la myogenèse, les microtubules forment une structure type « échafaudage » pour positionner la myosine nécessaire à la formation des sarcomères (Pizon et al., 2005). Au début, les précurseurs des filaments de myosine sont situés le long des microtubules au centre de la cellule puis au cours de la différenciation, ils se déplacent en direction des bouts (+) des microtubules donc vers les membranes cellulaires. A ce moment là, ils formeront des filaments associés avec l’actine (Pizon et al., 2005).

83 Il a été montré que les microtubules ont un rôle à jouer dans la fusion et l’élongation des cellules musculaires (Saitoh et al., 1988) notamment via les protéines EB1 et EB3 qui ont des rôles différents suivant l’étape de différenciation. EB1 est plutôt impliquée dans les phases précoces de la maturation musculaire tandis qu’EB3 joue un rôle plutôt dans les phases tardives (Straube and Merdes, 2007; Zhang et al., 2009). MAP4 et la dynéine interviendraient également dans la polarisation et l’élongation de la cellule (Mogessie et al., 2015).

Le réseau de microtubules est également impliqué dans le mouvement et l’ancrage des noyaux au cours de la myogenèse par l’intermédiaire de protéines régulatrices comme MAP7, Kif5b, nesprine ou dynéine (Cadot et al., 2012; Metzger et al., 2012; Wilson and Holzbaur, 2015) qui seront présentées plus en détails dans le paragraphe 2b ci-dessous.

Le cytosquelette de microtubules intervient également dans la contraction musculaire. La tubuline détyrosinée régule la méchanotransduction en augmentant la vitesse de contraction et la rigidité du cytosquelette (Kerr et al., 2015), ce qui, via la production de ROS par la NADPH2 (Nox2) à proximité du RyR, régule les relâchements de calcium (Kerr et al., 2015; Prosser et al., 2011). De plus, les microtubules sont localisés proches des triades et interagissent avec le complexe de relâchement du calcium (CRC) (Fourest-Lieuvin et al., 2012; Kano et al., 1991; Osseni et al., 2016). Ces résultats suggèrent que les microtubules pourraient avoir une fonction dans la régulation des libérations de calcium dans la triade ainsi que dans l’adressage des protéines du CRC à la triade (Figure 28). L’étude de Vega et al., appuie ce rôle des microtubules dans la réorganisation des structures du reticulum nécessaire à l’établissement du couplage excitation-contraction au cours de la différenciation (Vega et al., 2011). Ces auteurs ont montré dans des cardiomyocytes que le reticulum est une structure mobile et que sa dynamique est dépendante des mouvements microtubulaires de la dynéine et de la kinésine-1 (Kif5b).

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Figure 28 : Les microtubules sont localisés proches des triades. (A) Coupe transversale de

muscle de diaphragme de souris observée en microscopie électronique à transmission. Les microtubules (orange) sont à proximité des triades et sont entourés par les myofilaments (points noirs). Mt = Mitochondrie. Barre d’échelle = 0,5 µm. Modifiée de Kano et al., 1991. (B) Marquage des microtubules par la tubuline (rouge) et des triades par RyR (vert) dans une fibre musculaire adulte (FDB). Les flèches indiquent les régions où les triades et les microtubules colocalisent. Barre d’échelle = 2,5 µm. Tirée de (Fourest-Lieuvin et al., 2012).

Des défauts dans l’organisation des microtubules sont retrouvés dans les souris mdx, modèle de la Dystrophie Musculaire de Duchenne. Ces souris caractérisées par l’absence de dystrophine présentent une altération de la localisation de leur appareil de Golgi, probablement à la base de la désorganisation du cytosquelette de microtubules (Percival et al., 2007; Percival and Froehner, 2007). Ces défauts au sein des microtubules aboutissent à la modification des ROS dérégulant à leur tour les sorties de calcium (Khairallah et al., 2012).

Une altération du réseau de microtubules peut également entrainer une mauvaise position des noyaux au sein des cellules musculaires en cours de développement, à la base de myopathies centronucléaires (Jungbluth et al., 2008).

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b) Protéines régulatrices

Comme déjà cité au début de ce chapitre, plusieurs protéines régulent la dynamique des microtubules et la différenciation cellulaire.

En 2000, Spencer et al., décrivent une nouvelle protéine MURF (MUscle-specific Ring-Finger protein) exprimée spécifiquement dans les cellules musculaires cardiaques et squelettiques (Spencer et al., 2000). MURF serait un régulateur myogénique en lien avec le réseau de microtubule et impliqué dans le développement et la différenciation des myoblastes (Spencer et al., 2000) mais également dans l’atrophie musculaire (Bodine et al., 2001).

L’isoforme MAP4o est une protéine impliquée dans le maintien des microtubules en position anti-parallèle et dans l’élongation de la cellule au cours de la myogenèse (Mogessie et al., 2015). En effet, il a été montré que MAP4 et la dynéine coopèrent pour former un réseau de microtubule parfaitement organisé au sein des cellules musculaires (Mogessie et al., 2015). Sans MAP4o, il y a une motilité excessive des microtubules via les moteurs moléculaires alors que sans dynéine, MAP4o est incapable d’aligner les microtubules (Figure 29).

Figure 29 : MAP4o et dynéine coopèrent pour maintenir l’organisation anti-parallèle du réseau de microtubules dans des cellules musculaires différenciées. Les microtubules sont en vert,

86 L’étude portant sur les mouvements des noyaux microtubules-dépendant, a montré que d’autres protéines pouvaient réguler ce phénomène. Par exemple, Cadot et al., ont montré qu’après la fusion des myoblastes, leurs noyaux migrent vers le centre du myotube grâce au complexe dynéine/dynactine et ce mécanisme est contrôlé par Cdc42, une GTPase connue pour réguler entre autre le positionnement des noyaux (Cadot et al., 2012). Il a également été démontré que MAP7 et Kif5b sont impliquées dans le positionnement nucléaire le long de la fibre musculaire (Metzger et al., 2012; Wilson and Holzbaur, 2015, 2012). Néanmoins d’autres moteurs moléculaires sont également impliqués dans le positionnement nucléaire au cours de la différenciation musculaire. C’est ce que Gache et al., ont récemment montré en réalisant un criblage avec des siRNA ciblant différentes kinésines et sous-unités de la dynéine, afin d’observer l’impact de chaque moteurs sur chaque étape du positionnement des noyaux (Gache et al., 2017).

Il semblerait cependant que dans les étapes plus tardives de la maturation cellulaire, ce soit l’actine, la nesprine, l’amphyphysine 2 et N-WASP (facteur qui promeut la nucléation de l’actine) qui soient impliquées dans la migration en périphérie des noyaux et dans le maintien de l’organisation de la triade (Falcone et al., 2014).

Même si l’implication de MAP6 dans le fonctionnement musculaire reste à démontrer, cette protéine pourrait tout de même jouer un rôle dans la liaison entre la tubuline et les mitochondries au sein des muscles striés (Guerrero et al., 2010). Des niveaux anormaux de MAP6 ont, de plus, été trouvés dans des maladies musculaires comme la dystrophie myotonique de type 1 (Velazquez-Bernardino et al., 2012), appuyant l’idée que MAP6 pourrait être impliqué dans le bon fonctionnement musculaire.

Le réseau de microtubules et les protéines qui lui sont associées sont donc des éléments primordiaux pour les mouvements des différentes organelles ainsi que leurs ancrages au sein des cellules. Cependant nous savons également que le cytosquelette de microtubules est impliqué dans le trafic des protéines où il a au moins un rôle à jouer au niveau de la voie de biosynthèse de ces protéines. C’est pourquoi nous avons voulu en savoir plus sur le rôle de cette voie dans le trafic des protéines de la triade.

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Chapitre 4 : Le reticulum et la voie