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maturation : aspects chimiques

3.2.1.3. Rôles des polyphénols chez les plantes

3.2.1.3. Rôles des polyphénols chez les plantes

De manière générale, les polyphénols végétaux sont impliqués dans différentes fonctions comme la résistance des plantes contre les microbes ou les herbivores (actions antibiotiques et « antifeeding »), la protection contre le rayonnement solaire (écrans limitant les dommages sur l'ADN par les rayons UV-B), la reproduction, la nutrition et la croissance, notamment grâce à des interactions avec des organismes tels que les insectes, les champignons symbiotiques, et les bactéries (Daayf & Lattanzio, 2009).

Les interactions de van der Waals et la formation des liaisons hydrogènes ont souvent des effets complémentaires, que les composés phénoliques des plantes peuvent utiliser, pour interagir physiquement avec d'autres biomolécules comme les protéines (Daayf & Lattanzio, 2009). La présence d'au moins deux groupes hydroxy adjacents sur un noyau phényle favorise la chélation des métaux (Andjelković et al., 2006), qui est un élément important des composés phénoliques notamment pour la pigmentation des plantes (Yoshida et al., 2009). Les composés phénoliques peuvent aussi être transformés chimiquement en agissant comme des bases carbonées ou oxygénées nucléophiles dans diverses réactions ioniques. Les phénols sont également sensibles aux processus d'oxydation qui vont produire des radicaux phénoxy. Cette capacité des phénols à libérer un atome d'hydrogène est un processus fondamental conditionnant les propriétés antioxydantes de ces molécules. Les phénols peuvent être oxydés en ortho-quinones ou en

α-hydroxy-ortho-quinones. Ces espèces réactives pourraient être des intermédiaires pour

l'élaboration de polyphénols plus complexes dans les plantes (Tanaka, 2008). Ils peuvent aussi réagir comme électrophiles dans la modification covalente de biomolécules nucléophiles telles que les protéines (Feldman et al., 1996).

Parmi les composés non-flavonoïdes, les acides phénols sont impliqués dans la germination, la floraison ou la croissance des organes végétatifs (Weidner & Paprocka, 1996), dans la régulation de la voie de biosynthèse des composés phénoliques (Blount et al., 2000) et dans la couleur des pellicules du raisin.

40 L’accumulation des composés flavonoïdes peut être induite par divers agents biotiques ou abiotiques (Macheix et al., 2005). Ils permettent également une meilleure adaptation lors d’interactions plantes-insectes (Aron & Kennedy, 2008). Les flavonoïdes (anthocyanes et flavonols) participent activement à la coloration des fleurs et des fruits. La coloration des fleurs faciliterait leur attraction par les insectes pour la pollinisation. Certains de ces composés comme les tannins peuvent être synthétisés de manière accrue et se lier avec les polysaccharides pariétaux pour renforcer les parois cellulaires (Hanlin et al., 2010).

3.2.1.4. Rôles des polyphénols en œnologie

Les quantités totales de polyphénols dans les vins rouges se situent entre 2000 et 6000 mg L-1, avec la plus grande contribution provenant des oligomères de flavanols (1000-5000 mg L-1), la catéchine représente 100-200 mg L-1

et l'épicatéchine environ 80 mg L-1, alors que les teneurs en anthocyanes varient de 100 à 1500 mg L-1 (Forester & Waterhouse, 2009). L'un des composants polyphénoliques mineurs du vin, le trans-resvératrol se trouve à des concentrations de 0,1 à 8 mg L-1 et 1 à 50 mg L-1 pour son glucoside (Moreno-Labanda et al., 2004). La structure phénolique d'un vin est à la fois dépendante de la qualité des raisins, mais également des traitements réalisés au cours de la vinification, de l'élevage et du vieillissement du vin. La localisation des anthocyanes dans les vacuoles des cellules de la pellicule facilite la diffusion du tissu végétal vers le vin. Les traitements que le vin va subir vont modifier l'extraction de ce type de molécules. La diffusion va être tributaire de la température, du poids et de la taille des molécules, des gradients de concentration, de la perméabilité cellulaire, de la surface de contact et de la composition du milieu d'extraction tel que l'éthanol (Ribéreau-Gayon & Milhé, 1970, Aron & Kennedy, 2008). En fonction des conditions de macération et d’extraction, les vins vont être plus ou moins colorés. Il est connu que des anthocyanes dérivées du raisin vont être modifiées par d'autres composés présents dans les vins rouges. Par exemple, des anthocyanines peuvent se combiner avec des métabolites de levures comme l'acide pyruvique pour former

41 notamment la Vitisine A (Fulcrand et al., 1998, Bakker & Timberlake, 1997). Cette molécule formée rapidement après la fermentation (Schwarz et al., 2003) est de couleur rouge brique (caractéristique des vins vieux), par opposition à un vin nouveau qui est dominé par une absorption à 520 nm. Lors du vieillissement, le vin est exposé à l'oxygène et l'éthanol va être transformé en éthanal (Wildenradt & Singleton, 1974). Cet éthanal va intervenir dans des mécanismes de condensation qui vont modifier la couleur des vins (Drinkine et al., 2007, Bakker & Timberlake, 1997).

En général, l’extraction des tannins pelliculaires est souhaitée par les viticulteurs plutôt que celle des tannins de pépins. Les tannins des pellicules sont généralement extraits au début de la fermentation et plus le temps de macération va augmenter, plus les tannins des pépins vont être extraits (Peyrot des Gachons & Kennedy, 2003). Les techniques de vinification jouent un rôle important sur l’extraction des tannins. La concentration en éthanol, la durée et la température de macération (Koyama et al., 2007), le collage (Cichova et al., 2008), l’oxygénation et la micro-oxygénation (Pérez-Magariño et al., 2009), la possibilité d’utiliser des champs électriques pulsés (López et al., 2008). Sacchi et al. indiquent que la température de fermentation, les thermovinifications, l’utilisation de carboglace, les saignées, l’utilisation d’enzymes pectolytiques et une macération longue favorisent l’extraction des tannins (Sacchi et al., 2005). Les cinq monomères (Cat, Epi, ECG, gallocatéchine et épigallocatéchine), des procyanidines dimères et oligomères composés exclusivement d’unités (épi)catéchine, ou en mélange avec des unités (épi)gallocatéchine et certains dimères gallates en quantités relativement faibles, sont retrouvés dans le vin rouge (De Freitas et al., 2000, De Pascual-Teresa et al., 2000, Monagas et al., 2003). Le degré de polymérisation moyen des tannins du vin se situe entre 6,4 et 9 (Fulcrand et al., 1999, Chira et al., 2012) alors que la catéchine et le dimère B1 (Carando et al., 1999) sont généralement les composés les plus abondants dans les vins rouges. Plusieurs réactions, qui ne seront pas décrites ici, vont modifier la structure des tannins et donc leurs propriétés sensorielles. Il est considéré que les tannins du vin sont capables de se lier et de faire

42 précipiter des protéines salivaires entraînant une perte de lubrification de la bouche, c’est la sensation tactile appelée "astringence" (Gawel, 1998). De plus, les tannins peuvent conduire à de l’amertume, en fonction de leur poids moléculaire et de leurs concentrations (Noble, 1994). La perception de l'astringence des vins est influencée par de nombreux facteurs comme l'éthanol et le pH (Fischer & Noble, 1994, Fontoin et al., 2008), l'acidité (Peleg et al., 1998), la viscosité (Smith et al., 1996), les sucres simples (Boselli et al., 2004), les polysaccharides et les anthocyanes (Vidal et al., 2004).

3.2.2. Les protéines

Les protéines sont responsables de la majorité des transformations biologiques qui affectent le développement des plantes et des fruits. Elles sont impliquées dans la restauration et les défenses cellulaires, dans la production de métabolites et dans la transduction de signaux. Le raisin contient naturellement une large gamme de protéines différentes mais en proportion faible par rapport à d’autres fruits. Le développement, depuis quelques années, des techniques de protéomique a permis de mieux comprendre les mécanismes impliqués dans le développement, la maturation et les réponses aux stress de la vigne et du raisin.

3.2.2.1. Protéomique et maturation

Deytieux et al. (Deytieux et al., 2007) ont comparé le protéome des pellicules au cours de la maturation du raisin de Cabernet Sauvignon du stade début véraison jusqu'à maturité. Les protéines impliquées dans la photosynthèse, dans le métabolisme des sucres et dans la réponse au stress ont été identifiées comme étant surexprimées au début de la véraison, tandis que la fin de la véraison est accompagnée par une augmentation des protéines liées à la biosynthèse des anthocyanes. À la récolte, les protéines dominantes sont impliquées dans la défense, comme les « pathogenesis related proteins » (protéines PR), de type chitinase et des isoformes β-glucanase. Negri et al. (Negri et al., 2008) ont effectué la même étude sur le cépage Barbera. L'analyse a souligné que la

43 plupart des changements qui interviennent quelques semaines après la véraison implique des protéines liées à la réponse au stress, au métabolisme général et au métabolisme des acides aminés. Giribaldi et al. (Giribaldi et al., 2007) ont étudié la modification du profil protéique des baies entières du cépage Nébbiolo à un mois après la floraison jusqu'à la maturité. La plupart des 118 spots protéiques différentiellement exprimés au cours du développement correspond au métabolisme général, au métabolisme énergétique et à la synthèse et la dégradation des protéines. Les résultats suggèrent une diminution générale de la glycolyse et une augmentation des protéines PR au cours de la maturation. Il a également été signalé une diminution des protéines liées au stress oxydatif et au réarrangement du cytosquelette. Certaines protéines sont retrouvées dans toutes ces études comme les thaumatines, des chitinases, des ATPases, des glycéraldéhydes phosphates déshydrogénases, des énolases et des alcools déshydrogénases. Ce sont les protéines les plus abondantes dans la baie, et elles sont directement reliées au développement et à la maturation.

3.2.2.2. Protéomique et stress

Différents travaux utilisant la protéomique ont été menés sur des cultures de racines, de rameaux et de feuilles pour étudier l’effet de plusieurs stress abiotique et biotique. Les résultats montrent que des traitements herbicides engendrent une fragmentation du Rubisco, une induction des protéines antioxydantes appartenant à la photorespiration, une altération des flux carbonés et une stimulation des défenses dans les feuilles (Castro et al., 2005); en présence de NaCl il a été noté une augmentation d’abondance d’un spot protéique correspondant à une PR-10 dans des tiges et des feuilles (Jellouli et al., 2008). En condition de stress hydrique les principales protéines modifiées sont impliquées dans la réduction de photosynthèse et dans la dégradation et la synthèse de protéines (Vincent et al., 2007). Dans l’étude de la maladie de Pierce, il est démontré qu’une ß-1,3-glucanase, une peroxydase de classe III sécrétoire, et une sous-unité « oxygen evolving enhancer protein 1 », sont différentiellement exprimées dans des espèces tolérantes (V. rotundifolia), alors qu’elles étaient absentes dans les variétés sensibles (V.

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vinifera) dans la sève (Basha et al., 2010). Une étude similaire dans le cas de

l’oïdium indique que les principales protéines dont l’abondance est modifiée entre des feuilles infectées par rapport à des feuilles saines sont impliquées dans la détoxification des espèces réactives de l'oxygène, le métabolisme primaire et secondaire, la synthèse des protéines, la photosynthèse et le stress (Marsh et al., 2010).

Le stress hydrique fait partie des premiers stress abiotiques étudiés au niveau du raisin (Grimplet et al., 2009). Dans la pellicule, les principales protéines mises en évidence sont des PR-protéines, des chaperones, des protéines impliquées dans les phases sombre et claire de la photosynthèse, dans la biosynthèse des phénylpropanoides et des acides aminés ; dans la pulpe, les protéines retrouvées sont des "ripening-related proteins" ou des protéines impliquées dans la réponse aux stress oxydatif et abiotique ; dans les pépins, les protéines les plus abondantes sont des globulines et des "Late Embryogenesis".

3.2.2.3. Cas particulier des « Pathogenesis related proteins » ou