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4.2 Les noyaux sous-corticaux

4.2.2 Rôles fonctionnels

Les noyaux sous-corticaux sont essentiels à de très nombreuses fonctions cérébrales, comme la sélection de l’action, l’apprentissage, la motivation et l’émo-tion, et leur dysfonctionnement peut provoquer ou participer à des maladies graves. La structure qui va particulièrement nous intéresser est le striatum. Il est au moins impliqué dans :

• Le mouvement volontaire ou automatique ;

• Les comportements appétitifs ou aversifs, en particulier la motivation alimen-taire ou sexuelle (striatum ventral) ;

• La nociception ou la gestion de la douleur, via le système dopaminergique et/ou les endorphines, et dans l’effet placebo ;

• La cicatrisation et parfois la régénérescence de certains tissus cérébraux (neuro-genèse secondaire) après une blessure neuronale ou un stress ayant induit la mort de nombreux neurones (ischémie / accident vasculaire cérébral) ;

• Certaines maladies :

- La maladie de Huntington est une maladie héréditaire due une dégénéres-cence du striatum, avec comme conséquence une motricité fortement perturbée (chorée).

- La maladie de Parkinson est due à une perte de l’innervation dopaminer-gique du striatum provenant de la substance noire (laquelle dégénère au cours de la maladie).

- Les phénomènes d’addiction dépendent de la plasticité des synapses du striatum.

La connectivité dense qui relie le striatum au cortex préfrontal implique un lien important entre ces deux régions, via des boucles fronto-basales, dans un grand nombre de processus cognitifs : des théories récentes présentent les noyaux sous-corticaux comme le nœud cérébral primitivement responsable du tri de l’information, et de son acheminement sélectif aux régions adéquates [226]. Cet ensemble de structures formerait donc une "boîte à outils" centrale, conser-vée par l’évolution, permettant l’organisation basique de l’information cérébrale et son traitement par les systèmes moteurs, limbiques et cognitifs.

L’intégrité des noyaux sous-corticaux est nécessaire pour observer des com-portements de task-switching. Lorsque l’on compare les performances de deux groupes de patients, un premier groupe avec des lésions préfrontales, et un second avec des lésions basales, les patients du deuxième groupe montrent de grandes difficultés à changer de tâche [246]. Ce déficit est également observé chez des patients atteints de la maladie de Parkinson [41]. Cependant, le rôle des noyaux sous-corticaux ne se limite pas à l’implémentation des commandes motrices né-cessaires au changement de tâche : de nombreux travaux prouvent en effet que ces structures sont essentielles à l’apprentissage fondé sur la valeur, tel que l’ap-prentissage par renforcement.

L’apprentissage par renforcement correspond à l’apprentissage d’informa-tions au sujet de stimuli ou d’acd’informa-tions uniquement sur la base des récompenses et des punitions (les renforcements) qui leur sont associées. L’apprentissage par renforcement est un apprentissage peu supervisé dans la mesure où aucune

in-4.2. LES NOYAUX SOUS-CORTICAUX 69 formation explicite n’est fournie pour déterminer quelle action doit être effectuée dans une situation donnée. Seuls les renforcements sont informatifs pour l’ap-prentissage d’associations stimulus-réponse.

Plusieurs études s’appuient sur la méthode model-based (voir 10.3) pour illustrer la façon dont les humains apprennent à prendre des décisions adapta-tives dans un milieu incertain afin de maximiser leurs récompenses, notamment à l’aide de modèles du type apprentissage par renforcement [66][102][105] [171] . La prise de décision peut alors être dissociée en deux composantes distinctes selon le modèle dit "acteur/critique" [227] (voir figure 4.7) :

- Le "critique" prédit les récompenses futures associées à un ensemble particu-lier de stimuli ou d’actions au cours de l’apprentissage. Il s’appuie sur la notion centrale d’erreur de prédiction qui correspond à la différence entre la récompense effectivement obtenue et celle prédite.

- L’"acteur" sélectionne l’action selon une stratégie de choix qui permet de maxi-miser les gains.

Wolfram Schultz et ses collaborateurs ont été les premiers à avoir mis en évidence l’existence de signaux d’erreur de prédiction dans le cerveau en enregis-trant l’activité de neurones dopaminergiques chez le primate non humain éveillé pendant une tâche de conditionnement pavlovien classique [207]. O’Doherty et ses collaborateurs ont mis en évidence le même type de signal d’erreur de prédiction dans le cerveau humain, en particulier le striatum ventral et le cortex orbitofron-tal, deux régions cibles des neurones dopaminergiques [171]. Par la suite, Mon-tague puis O’Doherty et leurs collaborateurs ont proposé que le striatum ventral et le striatum dorsal implémentent respectivement le "critique" et l’"acteur" dans des tâches de choix d’actions.

Chapitre 5

Bases cérébrales de l’inférence

5.1 Cortex préfrontal ventromédian et prédictions

La distinction entre le cortex orbito-frontal et le cortex préfrontal ventro-médian n’est pas toujours claire étant donné la grande proximité anatomique des deux structures et l’usage variable que différents auteurs font de cette termino-logie. La séparation entre ces deux aires se fait parfois plutôt sur des critères de connectivité que sur des critères anatomiques [14].

Le cortex préfrontal ventro-médian possède des connexions majeures avec des structures sous corticales telles que l’amygdale et le striatum ventral, ainsi que d’autres aires préfrontales (principalement le cortex préfrontal dorso-latéral), le lobe temporal supérieur antérieur et le cortex cingulaire postérieur [44]. De par sa connectivité avec de nombreuses structures impliquées dans l’apprentissage, la mémoire, l’encodage de la récompense et les indices de récompense, le cortex préfrontal ventro-médian est bien placé pour intégrer des informations et produire un comportement adapté [163].