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- D’autre part, Donoso, Collins et Kœchlin observent une activation latéra-lisée à gauche pour les évènements de récupération réactive [74].

13.3 Réseaux cérébraux des processus de

récupé-ration

Les réseaux des processus d’inférence décrits dans la partie précédente cor-respondent, en grande partie, à la reproduction des résultats de l’étude de Donoso, Collins et Kœchlin [74]. Notre étude permet donc de confirmer ces résultats tout en y intégrant la dimension contextuelle.

En revanche, jusqu’à présent, aucune étude n’a tenté d’identifier les réseaux spécifiques des récupérations réactive et proactive. Nos résultats montrent que ces deux processus, bien que de nature similaire, dépendent de réseaux distincts. Rappelons que la récupération se définit comme le processus par lequel une information stockée en mémoire est rendue disponible pour effectuer une opéra-tion cognitive. Ce processus s’effectue typiquement via l’utilisaopéra-tion d’un indice de récupération qui permet d’identifier la représentation à récupérer.

13.3.1 Récupération réactive

La récupération réactive correspond à la récupération d’un task-set en mé-moire de travail d’après les feedbacks observés. Autrement dit, aucun indice ex-térieur ne permet de déterminer le task-set correct. L’observation des feedbacks permet d’accumuler des preuves en faveur d’un éventuel task-set stocké en mé-moire. Ainsi, on peut considérer que l’indice de récupération correspond à la quantité cumulée de preuves en faveur de ce task-set, quantité qui se reflète dans la valeur du signal de fiabilité. L’indice de récupération est donc généré de façon interne. Or, nous avons vu (voir 7.2.3) que le cortex frontopolaire est impliqué dans le traitement d’information générée de façon interne et semble lié au processus de récupération. L’activation frontopolaire que nous observons lors des évènements de récupération réactive est donc cohérente. Ce résultat rejoint d’ailleurs le rôle de cette région dans le monitorage des options alternatives et notamment de la fiabilité ex-post actualisée selon les récompenses obtenues. Au-trement dit, ce type de récupération est intimement lié aux processus d’inférence du système exécutif.

13.3. RÉSEAUX CÉRÉBRAUX DES PROCESSUS DE RÉCUPÉRATION 191

13.3.2 Récupération proactive

Lors de la récupération proactive, l’indice de récupération (le contexte) est donné dans l’environnement. Il est directement observable. Il est donc légitime d’observer un réseau distinct du précédent pour ce type de récupération. Le réseau que nous observons est un réseau ventral très spécifique qui inclut l’hippocampe, le striatum ventral et le cortex préfrontal ventro-médian. Nous proposons ici une interprétation quant au rôle de chacune de ces régions.

Réactivation du task-set dans l’hippocampe

Comme nous l’avons vu (voir 7.2.2), l’hippocampe est une région clé des processus mnésiques. Il ne contient pas le contenu mnésique en lui même mais, à la présentation de l’indice de récupération, il permet la réactivation du contenu associé à cet indice. Ainsi, lors de la présentation de l’indice contextuel connu, le task-set correspondant pourrait émerger par mémoire associative via l’hippo-campe.

L’hippocampe entretient par ailleurs des connexions avec le cortex préfron-tal ventro-médian et le striatum [250]. Ainsi l’hippocampe pourrait transmettre des représentations mnésiques à ces modules d’estimation que nous observons également [120].

Il est possible que la représentation réactivée par l’hippocampe corresponde à la combinaison de chiffres plutôt qu’à l’ensemble des associations stimulus-réponse du task-set correspondant. Autrement dit, il ne s’agirait pas d’une re-présentation de mémoire procédurale (d’un task-set) mais d’une rere-présentation de mémoire déclarative. Cela dit, comme le soulève Oberauer [168], ces deux types de représentations sont intimement liés puisque toute représentation déclarative est "traduite" en représentation procédurale pour permettre la sélection d’une action.

Nous pouvons également relier ce résultat au modèle de dual-process (voir 14.1). Rappelons qu’il existe trois interprétations quant au rôle de l’hippocampe dans ce modèle :

1) Il pourrait être spécifique du processus de recollection ; 2) Il pourrait être corrélé à la "force" du souvenir ;

3) Il encoderait uniquement l’information contextuelle.

Dans le cadre du modèle PROBE, nous envisageons la récupération (proac-tive ou réac(proac-tive) en mémoire de travail comme un processus de recollection.

Nous observons une activation de l’hippocampe uniquement lors des évène-ments de récupération proactive. Nous pouvons donc supposer que l’hippocampe est spécifique du processus de recollection lorsqu’un indice de récupération est présent dans l’environnement. Or ce processus dépend également d’une "force d’activation" (la valeur du signal de fiabilité) qui elle-même, pour la récupération proactive, dépend de la force d’association avec les indices contextuels. Autrement dit, les trois interprétations concernant le rôle de l’hippocampe dans le modèle de dual-process semblent compatibles, au moins dans le cadre de notre étude.

Validation dans le striatum ventral

Le striatum ventral est connecté à l’hippocampe et au cortex préfrontal. Il est donc au carrefour des informations provenant de ces deux régions. On pourrait ainsi supposer que, lors de la récupération proactive, le striatum reçoit d’une part une représentation bottom-up provenant de l’hippocampe ; et d’autre part une re-présentation top-down sélectionnée par le cortex préfrontal dorso-latéral lors du processus d’inférence proactive. L’adéquation de ces deux représentations pour-rait être interprétée comme un signal de renforcement positif. Autrement dit, la représentation qui émerge de façon spontanée depuis l’hippocampe et celle sélec-tionnée de façon contrôlée par le cortex préfrontal dorso-latéral sont identiques, ce qui permet la validation de cette représentation par le striatum ventral.

On peut se demander quel est l’intérêt de ce dédoublement du processus de récupération. Lorsqu’un task-set est fortement associé à un contexte donné (par exemple parce que leur occurrence simultanée est très fréquente), il semble avan-tageux que la récupération ce de task-set devienne quasiment automatique et qu’il émerge de façon bottom-up sans passer par le système exécutif. Cependant, il est tout à fait possible que ce processus de récupération nécessite un certain contrôle qu’effectuerait le cortex préfrontal dorso-latéral. Prenons un exemple pour illustrer notre propos. Admettons que je sois chez moi et que le téléphone sonne. A priori, dès que je suis dans le contexte "à la maison", je récupère au-tomatiquement le task-set "habitudes à la maison". Par conséquent, au stimulus "sonnerie du téléphone" je devrais associer l’action de "répondre". Cependant, supposons qu’un soir je reçois des amis à dîner. Si le téléphone sonne, par souci de bienséance, je me retiendrai de répondre. Ainsi, on pourrait supposer que dans ce cas, la représentation provenant de l’hippocampe nécessite d’être inhibée car une information contextuelle supplémentaire (la présence de mes amis), intégrée par le cortex préfrontal dorso-latéral, induit un autre comportement.

Ainsi, contrairement à la récupération réactive, la récupération proactive semble partiellement indépendante des processus d’inférence. Elle reste cependant sous son contrôle.

Prédiction dans le cortex préfrontal ventro-médian

Ainsi que nous l’avons déjà mentionné, le cortex préfrontal ventro-médian semble représenter le task-set acteur. On peut donc penser qu’une fois qu’un task-set alternatif a été sélectionné et validé par les régions précédemment dé-crites, le cortex préfrontal ventro-médian intègre l’ensemble des informations et implémente le nouveau task-set acteur.

Remarquons que nous n’observons pas d’activation dans le cortex préfrontal ventro-médian lors de la récupération réactive. Ceci pourrait s’expliquer par le fait que lors de la récupération proactive, on passe directement d’un task-set acteur fiable à un autre task-set acteur fiable. La récupération proactive correspond

13.3. RÉSEAUX CÉRÉBRAUX DES PROCESSUS DE RÉCUPÉRATION 193 au seul cas où ce type de transition se produit. On change donc entièrement de prédiction. En revanche, pour la récupération réactive, on ne fait "que" rejeter un probe non fiable. Ceci pourrait expliquer la forte activation du cortex préfrontal ventro-médian lors de la récupération proactive et non lors de la récupération réactive.

Afin de confirmer ces interprétations, il serait nécessaire d’effectuer des ana-lyses de connectivité et/ou d’utiliser une méthode dont la résolution temporelle est meilleure que celle de l’IRM fonctionnelle. En effet, ces interprétations sou-lèvent des hypothèses quant à l’ordre de recrutement de ces diverses régions (hip-pocampe et cortex préfrontal dorso-latéral dans un premier temps, puis striatum ventral, et enfin cortex préfrontal ventro-médian).

Chapitre 14

Limites et perspectives

14.1 Limites du modèle PROBE et du protocole