Chapitre 3 La mobilité comme ressource ? Quarante ans d’effets positionnels de la mobilité
3. Le rôle de la mobilité résidentielle dans les transitions socioprofessionnelles
On terminera l’étude de l’articulation des mobilités résidentielles et des mobilités socio- professionnelles par un temps d’analyses toutes choses égales par ailleurs. Pour ce faire, on a modélisé l’effet de la mobilité résidentielle sur trois variables :
− Devenir professionnel des chômeurs et étudiants (ont trouvé un emploi / sont restés hors de l’emploi)
− Devenir professionnel des chômeurs et étudiants – détaillé (ont trouvé un emploi stable / ont trouvé un emploi précaire / sont restés hors de l’emploi)
− Mobilité occupationnelle des salariés (mobilité ascendante / mobilité descendante / pas de changement de catégorie socioprofessionnelle).
Comme dans le chapitre 2, on a ici choisi d’avoir recours au logit multinomial. La mobilité résidentielle étant une variable très discriminante, il est difficile de la croiser avec d’autres
174
variables comme l’âge ou le sexe. L’introduction d’effets croisés crée des situations de séparation quasi-complète des données qui font échouer la modélisation173.
3.1. Mobilité résidentielle et mouvements dans l’emploi
Le premier temps de l’analyse toutes choses égales par ailleurs concerne les mouvements des individus dans l’emploi. On verra d’abord que la mobilité résidentielle a un effet positif sur la probabilité de trouver un emploi, mais que cet effet est de moins en moins élevé quand il s’agit de trouver un emploi stable. On verra ensuite que la mobilité résidentielle a aussi un effet positif sur la probabilité de perdre un emploi, un effet qui lui aussi diminue progressivement.
a. L’effet ambivalent de la mobilité résidentielle sur les mouvements dans l’emploi…
Le premier modèle concerne la population des individus chômeurs ou étudiants un an avant l’enquête. Il a pour variable-cible le fait d’avoir trouvé ou non un emploi entre (n-1) et (n), et pour variables explicatives le sexe, l’âge et le diplôme. Le modèle peut être reproduit jusqu’en 1968. Il donne des résultats très satisfaisants sur le plan de la significativité, comme le montrent les coefficients estimés en 2011 :
Tableau 19. Modélisation de la probabilité pour les chômeurs et étudiants de trouver un emploi (modèle 3) : coefficients en 2011
Coefficients associés à la probabilité d’être Resté sans emploi Entré dans l’emploi
Intercept Ref -0,4685
Femme Ref -0,1393
Homme Ref Ref
15-29 ans Ref -0,9106
30-39 ans Ref Ref
40-49 ans Ref 0,16832
50-59 ans Ref -0,6262
173 Il est possible de contourner partiellement ce problème en empilant les bases annuelles, par exemple par
périodes de cinq ans. Mais le problème persiste sur certaines périodes quinquennales, notamment lorsque la population est limitée aux chômeurs et étudiants en (n-1).
Sans diplôme Ref -0,8260
< Bac Ref 0,4991
Bac Ref Ref
Bac+2 Ref 0,86766
>Bac +2 Ref 0,55743
Immobile Ref Ref
Mobile-commune Ref 0,85872
Mobile-
département Ref 0,33521
Mobile-région Ref 0,68006
Tous les coefficients sont significatifs au seuil de 0,001%.
Champ : chômeurs et étudiants en (n-1) ; chômeurs, étudiants ou salariés du privé en (n) Les résultats détaillés du modèle 3 sont en annexe (annexe 6).
Par la suite, on représente les odds ratio calculés à partir des coefficients estimés par ce modèle. D’une manière générale, être mobile sur le plan résidentiel est associé à une plus grande probabilité de trouver un emploi :
Graphique 46. Mobilité résidentielle et probabilité de trouver un emploi (odds ratios, modèle 3)
Champ : chômeurs et étudiants en (n-1).
Valeurs de référence= est resté hors de l’emploi, immobilité résidentielle.
On a aussi testé ce modèle en restreignant la population aux 15-29 ans puis aux femmes. Le coefficient associé à la mobilité-commune est légèrement plus élevé pour les moins de trente ans entre 1991 et 2001, mais en règle générale on n’observe pas de différence entre les coefficients obtenus avec ou sans restriction de la population.
0 1 2 3 4 5
176
Toutes choses égales par ailleurs, les chômeurs et étudiants mobiles ont plus de chances de trouver un emploi que les immobiles, et ce quelle que soit la distance parcourue lors de leur mobilité. Indépendamment des caractéristiques personnelles, la mobilité est bien une ressource qui favorise l’insertion dans l’emploi. Cette meilleure insertion dans l’emploi des mobiles s’est affirmée au fil des années 1980 et s’est stabilisée dans les années 1990. Elle a cependant légèrement baissé à la fin des années 2000. On note cependant que l’effet de la mobilité-commune sur l’entrée dans l’emploi est resté stable quand l’effet de la mobilité- département et de la mobilité-région diminuait légèrement.
Pour pouvoir différencier les types d’entrée sur le marché du travail, on utilisera un nouveau modèle (modèle 4) qui reprend le modèle 3 mais change la variable-cible en différenciant le fait d’avoir trouvé un emploi stable ou d’avoir trouvé un emploi précaire.
Tableau 20. Modélisation de la probabilité pour les chômeurs et étudiants de trouver un emploi stable ou précaire (modèle 4) : coefficients en 2011
Coefficients associés à la probabilité d’être Resté sans emploi Entré dans l’emploi précaire Entré dans l’emploi stable Intercept Ref -0,5860 -0,9382 Femme Ref 0,01352 -0,0696
Homme Ref Ref Ref
15-29 ans Ref 1,2930 0,73980
30-39 ans Ref Ref Ref
40-49 ans Ref -0,999 -0,0660
50-59 ans Ref -0,9680 -0,8307
Sans diplôme Ref -0,9973 -1,196
< Bac Ref -0,6296 -0,6217
Bac Ref Ref Ref
Bac+2 Ref 0,39325 0,71056
>Bac +2 Ref 0,12421 0,50005
Immobile Ref Ref Ref
Mobile-commune Ref 0,04173 0,59417 Mobile-département Ref Ns 0,38596
Mobile-région Ref 0,43415 0,36153
Tous les coefficients significatifs le sont au seuil de 0,001%. Ns= non significatif. Champ : chômeurs et étudiants en (n-1) ; chômeurs, étudiants ou salariés du privé en (n). Les résultats détaillés du modèle 4 sont en annexe (annexe 7).
En différenciant les entrées dans l’emploi selon le type de contrat obtenu, on observe une certaine différence dans le rôle que jouent les mobilités :
Graphique 47. Mobilité résidentielle et probabilité d’avoir trouvé un emploi stable (odds ratio, modèle 4)
Champ : chômeurs et étudiants en (n-1).
Valeurs de référence= est resté hors de l’emploi, immobilité résidentielle.
L’effet de la mobilité résidentielle, quelle que soit sa distance, sur la probabilité de trouver un emploi stable a bien évolué depuis 1982. Alors que dans les années 1990 la mobilité résidentielle était nettement associée au fait de trouver un emploi stable, cet effet s’est tendanciellement réduit dans les années 2000. Au contraire, l’effet de la mobilité résidentielle sur la probabilité de trouver un emploi précaire est resté stable :
0 1 2 3 4 5
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Graphique 48. Mobilité résidentielle et probabilité d’avoir trouvé un emploi précaire (odds ratio, modèle 4)
Champ : chômeurs et étudiants en (n-1).
Valeurs de référence= est resté hors de l’emploi ; immobilité résidentielle.
On remarque que les mobilités-département et les mobilités-région ont à peu près les mêmes effets sur la probabilité de trouver un emploi précaire le long de la période. En période de crise économique, comme par exemple en 1984 ou en 2009, on note que la mobilité résidentielle longue est plus fortement associée au fait de trouver un emploi précaire. Cela dit, on retrouve ce phénomène concernant l’emploi stable. En période de crise, les chômeurs entrant dans l’emploi sont plus significativement mobiles que dans les autres périodes, et la distinction entre emploi stable et précaire n’est ici pas déterminante.
On voit que l’effet de la mobilité géographique sur les mouvements des individus dans l’emploi n’est pas que uniformément positif : il est bien plus important quand il s’agit de trouver un emploi précaire que quand il s’agit de trouver un emploi stable. Un nouveau modèle de régression permet montre que la mobilité géographique augmente aussi la probabilité pour les actifs occupés de perdre leur emploi. Le modèle 5 estime la probabilité pour les individus salariés du privé un an avant l’enquête d’avoir quitté l’emploi au cours de l’année écoulée.
0 1 2 3
Tableau 21. Modélisation de la probabilité pour les salariés du privé d’avoir quitté l’emploi (modèle 5) : coefficients en 2011
Coefficients associés à la probabilité d’être : Resté dans l’emploi Sorti de l’emploi
Intercept Ref -3,498
Femme Ref -0,09639
Homme Ref Ref
15-29 ans Ref 0,65491
30-39 ans Ref Ref
40-49 ans Ref -0,1933
50-59 ans Ref -0,423
Sans diplôme Ref 0,21457
< Bac Ref 0,11156
Bac Ref Ref
Bac+2 Ref -0,2329
>Bac +2 Ref -0,0746
Immobile Ref Ref
Mobile-commune Ref -0,1481
Mobile-département Ref 0,42788
Mobile-région Ref 1,2519
Tous les coefficients sont significatifs au seuil de 0,001%.
Champ : salariés du privé en (n-1) ; chômeurs, étudiants ou salariés du privé en (n). Les résultats détaillés de l’effet du modèle 5 sont en annexe (annexe 8).
Là encore, le modèle est efficace, et il est possible de représenter l’effet de la mobilité résidentielle sur les mouvements dans l’emploi des salariés du privé. Le lien paradoxal entre mobilité résidentielle et mouvements dans l’emploi est mis en évidence par le modèle 5, car les individus mobiles ont une probabilité nettement plus forte de perdre leur emploi :
180
Graphique 49. Mobilité résidentielle et probabilité d’avoir perdu un emploi (odds ratio, modèle 5)
Champ : salariés du privé en (n-1).
Valeurs de référence= est resté en emploi ; immobilité résidentielle.
Dans l’ensemble, la mobilité résidentielle augmente très fortement la probabilité de perdre son emploi. Cela dit, on remarque que cet effet se réduit sur la période observée. La mobilité-commune n’a pratiquement plus d’effet sur la perte d’emploi, et les odds ratios associés à la mobilité-région sont passés d’entre 6 et 7 dans les années 1970 à moins de 5 à la fin des années 2000. Dans un contexte de chômage à la fois massif et persistant, on peut penser que les individus sont réticents à vivre une mobilité longue sans avoir assuré leur maintien dans l’emploi auparavant, soit par une mutation soit en ayant trouvé un nouvel emploi avant de déménager. Les individus changeant de région et renonçant à leur emploi en attendant d’en trouver un autre semblent être plus rares aujourd’hui qu’il y a quarante ans. On remarque d’ailleurs que l’effet de la mobilité-région sur la probabilité de perdre son emploi remonte fortement en période de croissance économique, un contexte dans lequel les individus sont plus disposés à « tenter leur chance » et à abandonner leur emploi pour changer de région.
L’analyse toutes choses égales par ailleurs met en évidence l’ambivalence de l’effet de la mobilité géographique sur les mouvements dans l’emploi. Cette ambivalence se retrouve dans l’analyse de l’effet de la mobilité résidentielle sur la mobilité socio-professionnelle des salariés. 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9
b. … et sur la mobilité socio-professionnelle
Le dernier modèle dont on présentera les résultats vise à expliquer l’effet de la mobilité résidentielle sur la probabilité de connaître une promotion ou une démotion socio- professionnelle d’une année sur l’autre, en contrôlant notamment l’effet de la catégorie socio-professionnelle :
Tableau 22. Modélisation de la mobilité socio-professionnelle des salariés du privé (modèle 6) : coefficients en 2011
Coefficients associés à la probabilité d’avoir connu une mobilité socio-professionnelle Ascendante Descendante Pas de mobilité
Intercept ns -3,092 Ref
Femme -0,3395 0,32436 Ref
Homme Ref Ref Ref
15-29 ans 0,27160 0,60398 Ref
30-39 ans Ref Ref Ref
40-49 ans -0,0368 -0,2572 Ref
50-59 ans -0,3825 -0,3622 Ref
Sans diplôme -0,5563 -0,4029 Ref
< Bac -0,2605 -0,3176 Ref
Bac Ref Ref Ref
Bac+2 0,29008 -0,3758 Ref
>Bac +2 0,85346 -1,423 Ref
Immobile Ref Ref Ref
Mobile-commune -0,0501 0,13997 Ref
Mobile-département 0,76031 0,99469 Ref
Mobile-région 1,4372 1,8728 Ref
Cadres Ref Ref Ref
Professions intermédiaires ns -0,3899 Ref
Employés non qualifiés ns ns Ref
Employés qualifiés ns -0,0567 Ref
Ouvriers non qualifiés ns ns Ref
Ouvriers qualifiés ns -6,482 Ref
Tous les coefficients significatifs le sont au seuil de 0,001%. Ns= non significatif (coefficient significatif à un seuil supérieur à 10%).
Champ : salariés du privé en (n-1).
182
Graphique 50. Mobilité résidentielle et mobilité socio-professionnelle (odds ratio, modèle 6)
Champ : Actifs occupés du salarié du privé en (n) et en (n-1).
À quelques exceptions près, les mobilités résidentielles ont chaque année un effet positif sur la probabilité de promotion comme de démotion occupationnelle. On notera que durant les années de crise économique (1993, 2004 et 2009), les mobiles ont plus de chances de connaître une promotion occupationnelle, et moins de chances de connaître une démotion. Ce dernier point peut paraître étonnant ; on peut penser qu’il s’agit de périodes dans lesquelles les plus fragiles des cadres et des professions intermédiaires sont plus exposés au risque de perte d’emploi, qui se substitue au risque de recul dans la hiérarchie socio- professionnelle. La mobilité-région joue un rôle bien plus discriminant que la mobilité- département, dont l’effet reste proche de celui de la mobilité-commune, tant sur la mobilité occupationnelle ascendante que descendante. Les odds ratios élevés qui lui sont associés montrent que les individus acceptent des mobilités très longues compensées par une promotion professionnelle, mais aussi des mobilités très longues associées à des mobilités socio-professionnelles descendantes. Ce résultat invite à considérer autrement l’articulation des trajectoires professionnelles et résidentielles, qui peuvent obéir à des logiques privées autonomes qui l’emportent sur les autres.
L’analyse toutes choses égales par ailleurs confirme le caractère ambivalent des effets de la mobilité sur les transitions socio-professionnelles que connaissent les individus. L’articulation des trajectoires résidentielles et des trajectoires professionnelles suit des
0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 Promotion socio-professionnelle
Commune Département Région
0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 Démotion socio-professionnelle
logiques complexes qui poussent l’analyse toutes choses égales par ailleurs à ces limites, puisque les mêmes variables prises isolément peuvent avoir des effets inverses sur le même phénomène. L’enjeu est maintenant de saisir ces logiques en rendant compte dans les contextes sociaux dans lesquels les mobilités s’articulent.
3.2. Macro et micro : deux logiques d’articulation des mobilités
Pour conclure ce chapitre, on va donc travailler les modalités d’articulation des mobilités résidentielles et socio-professionnelles dans leurs contextes. À l’échelle macro, on étudiera d’abord l’effet des périodes de récession et de forte croissance sur les mobilités. On cherchera ensuite à introduire la dimension micro en comparant les mobilités qui se jouent sur le marché externe du travail et celles qui se jouent sur le marché interne.
a. Mobilité, crise et croissance : un changement de régime ?
Tout d’abord, on a mesuré l’évolution des mobilités en période de récession et de forte croissance économique. On a identifié cinq de ces périodes en France depuis 1970 : trois années de récession (1975, 1993 et 2009) et deux périodes de forte croissance (1976-1979 et 1998-2000) :
Tableau 23. Évolution de la mobilité résidentielle et conjoncture
Années de récession Années de forte croissance 1975 1993 2009 1976-1979* 1998-2000* Taux de croissance du PIB -1,1% -0,7% -3,1% 3,8% 3,5% Variation de la mobilité- commune -3,9% -9,8% -1,7% 2,3% 1,3% Variation de la mobilité- département -1,9% -4% -9,6% -1,2% -0,4% Variation de la mobilité- région 4,1% -4,2% -19,6% -2,3% -0,7% Variation de l’ensemble des mobilités** -1,5% -7,3% -7,9% 2,1% 0,8%
* : taux de croissance annuels moyens ; ** : tous changements de commune.
Les mobilités étant observées sur une période d’un an précédant l’enquête, on utilise ici les taux de mobilité mesurés dans les enquêtes suivant d’un an les années de récession ou de crise. Ainsi, la variation de la mobilité affectée ici à l’année 1975 est l’évolution des taux de mobilité mesurés par l’enquête 1975 et par l’enquête 1976.
184
On constate ici, en cohérence avec les résultats du chapitre 2, que la mobilité résidentielle sous toutes ses formes est bien sensible à la conjoncture : elle diminue en période de récession et augmente en période de forte croissance économique. Mais le lien entre mobilité et conjoncture a nettement évolué en quarante ans. On note tout particulièrement que la crise de 2009 est marquée par une chute brutale de la mobilité-département (-10%) et de la mobilité-région (-20%), alors que la mobilité-commune ne diminue que de 2%.En 1975 et en 1993, la mobilité-commune avait autant ou plus diminué que les mobilités résidentielles longues. On note aussi que les années de croissance de 1998 à 2000 ne correspondent pas à une augmentation de la mobilité résidentielle longue. Il semble bien que quelque chose a changé en matière de mobilité résidentielle en France au cours des quarante années passées : la mobilité longue joue moins son rôle de distribution des individus entre les marchés du travail locaux. Les périodes de récession ne se traduisent plus par des mouvements de population quittant les territoires les plus touchés par la crise et se déplaçant vers les territoires qui ont préservé leur dynamisme économique174.
L’effet de la conjoncture économique sur les déterminants de la mobilité résidentielle a aussi évolué :
Tableau 24. Déterminants de la mobilité résidentielle et conjoncture
Années de récession Années de forte croissance 1975 1993 2009 1976- 1979* 1998- 2000* Femmes vs Hommes Immobile 1,0 0,9 0,9 1,0 0,9 Département 0,8 1,0 0,9 0,9 0,8 Région 0,8 0,9 0,8 0,9 0,8 15-29 ans vs 30-39 ans Immobile 0,5 0,5 0,5 0,5 0,6 Département 1,0 1,0 0,9 1,1 1,1 Région 1,3 0,8 0,8 1,1 1,0 50-59 ans vs 30-39 ans Immobile 4,0 3,2 2,8 3,7 3,3 Département 1,0 0,7 0,7 0,9 1,0 Région 3,0 1,3 1,1 2,1 1,1 Cadres vs professions intermédiaires Immobile 0,9 1,5 1,2 1,0 Département 1,4 2,6 0,9 1,1 Région 1,7 1,1 1,9 1,6 1,2
Ouvriers vs professions intermédiaires Immobile 1,1 0,8 1,0 0,8 Département 0,7 1,1 1,1 0,6 0,7 Région 1,2 0,7 1,0 0,8 0,7 < Bac vs Bac Immobile 1,1 1,4 1,1 1,2 1,3 Département 0,8 0,5 0,5 1,2 0,5 Région 0,8 0,7 0,6 0,8 0,7 > bac +2 vs Bac Immobile 0,8 1,0 0,9 1,0 0,8 Département 1,6 1,0 1,0 1,6 1,1 Région 1,4 1,5 1,7 1,4 1,8
* : moyenne des odds ratio.
Les coefficients présentés ici ont été estimés par le modèle 1 (voir chapitre 2).
L’analyse toutes choses égales par ailleurs confirme bien le caractère ambivalent des mobilités résidentielles, puisque les coefficients associés aux mêmes modalités sont à des niveaux comparables les années de récession et les années de forte croissance. On note cependant là aussi que l’année 2009 a contribué à différencier les comportements en matière de mobilité. Les forts coefficients associés au fait d’être cadre sont aussi liés au fait que les mobilités des cadres se sont maintenues cette année-là, ou tout du moins qu’elles ont nettement moins baissé que celles des autres catégories socio-professionnelles.
Enfin, on a relevé l’évolution de l’effet des mobilités résidentielles sur différents événements socio-professionnels (entrée ou sortie dans l’emploi et promotion ou démotion sociale) :
Tableau 25. Effet des mobilités résidentielles sur différents événements socio-professionnels et conjoncture
Années de récession Années de forte croissance
1975 1993 2009 1976-
1979*
1998- 2000* Avoir trouvé un emploi
vs être resté hors de l’emploi (modèle 3)
Commune 1,4 2,4 2,5 1,5 2,6
Département 0,8 2,2 1,8 1,4 2,3
Région 1,1 1,9 1,2 1,7 2,1
Avoir perdu un emploi vs être resté en emploi
(modèle 5)
Commune 2 1,1 1 1,6 1,3
Département 3,8 2,2 0,8 2,1 2,1
Région 6 4,2 3,6 6,3 5,2
Avoir connu une promotion sociale
(modèle 6)**
Commune 1,1 1,7 1,5
Département 1,1 1,3 1,6
186 Avoir connu une
démotion sociale (modèle 6)**
Commune 0,7 1,5 2,3
Département 3,7 2 4,1
Région 5,9 3 5,3
* : moyenne des odds ratio.
** : valeur de référence= ne pas avoir changé de catégorie socioprofessionnelle.
On constate que les périodes de forte croissance sont aussi associées à des coefficients élevés quant à l’effet des mobilités résidentielles longues sur la probabilité pour les individus d’avoir perdu leur emploi au cours de l’année précédant l’enquête.
Ce résultat n’est pas aussi paradoxal qu’il y paraît. Quand la conjoncture économique est bonne, les individus peuvent être plus disposés à perdre leur emploi à l’occasion d’une mobilité longue s’ils estiment pouvoir retrouver un emploi sans grandes difficultés par la suite. Les temporalités d’une mobilité et d’une recherche d’emploi peuvent être longues, et la période d’observation des mobilités de l’enquête Emploi (à savoir un an) peut être trompeuse. Il faut aussi prendre en compte les effets d’entraînement entre conjoints, qui peuvent expliquer par exemple que la mobilité résidentielle longue ait un effet positif sur les risques de démotion sociale entre 1998 et 2000. En effet, la démotion d’un individu peut être liée au fait qu’il a suivi son conjoint qui peut, lui, avoir connu une mobilité résidentielle associée à une promotion socio-professionnelle.
b. Marchés du travail et différenciation des mobilités
On a proposé comme interprétation du lien entre mobilité résidentielle et mobilité socio- professionnelle que les mobilités résidentielles peuvent permettre d’accéder à de nouvelles ressources. La question reste de savoir où les individus trouvent ces ressources. La mobilité résidentielle est-elle plus efficace sur les marchés internes du travail, c’est-à-dire pour les individus mobiles sans changer d’employeur, ou sur le marché externe ?
Graphique 51. Mobilité occupationnelle des salariés du privé ayant connu une mobilité résidentielle longue
Champ : salariés du privé en (n) et en (n-1) ayant connu une mobilité résidentielle longue (mobilité- département ou mobilité-région).
Les « mutés » ont plus d’un an d’ancienneté, les « embauchés » ont moins d’un an d’ancienneté et ont donc changé d’employeur au cours de l’année écoulée.
Au vu de ces graphiques, on retrouve l’idée selon laquelle la mobilité résidentielle est associée aux mobilités occupationnelles, qu’elles soient ascendantes ou descendantes. La mobilité occupationnelle des embauchés ayant connu une mobilité longue est forte, mais elle est autant descendante qu’ascendante et les deux effets se compensent. Par contre, on