Chapitre 3 La mobilité comme ressource ? Quarante ans d’effets positionnels de la mobilité
1. Mobilité géographique et mobilités socio-profes-sionnelles
La première partie de ce chapitre sera consacrée à décrire et à expliciter les modalités de coïncidence des mobilités résidentielles et des mobilités socio-professionnelles. On différenciera les formes de mobilité résidentielle (immobilité, mobilité-commune, mobilités longues) comme les mobilités socio-professionnelles. Pour appréhender ces dernières, on mesurera deux types de mouvements :
- les mouvements dans l’emploi (trouver un emploi stable ou précaire, perdre un emploi stable ou précaire, conserver un emploi),
- les mouvements dans la hiérarchie socio-professionnelle des salariés (changer de catégorie socio-professionnelle ou non, connaître un déplacement vers le haut ou vers le bas de la hiérarchie),
Dans un premier point, on montrera que les mobilités résidentielles et les mobilités dans l’emploi coïncident largement. On précisera ensuite l’analyse en élaborant les « profils de mobilité » des individus en représentant la place qu’occupent les mobilités résidentielles parmi les mobilités socio-professionnelles.
1.1. Mouvements dans l’emploi et mobilités résidentielles : entre
diffusion et découplage
On étudiera ici les mobilités dans l’emploi en lien avec les mobilités résidentielles, en cherchant à répondre à une question : dans quelle mesure ces deux formes de mobilité coïncident-elles ? On verra d’abord que la sur-mobilité résidentielle des actifs occupés connaissant des mobilités dans l’emploi diminue régulièrement depuis quarante ans. On confirmera ce constat en présentant la mobilité » résidentielle des individus entrant dans
l’emploi. On verra enfin que la mobilité résidentielle coïncide tant avec des mobilités socio- professionnelles ascendantes que descendantes.
a. Mobilité résidentielle et devenir des actifs occupés
On commencera par étudier le devenir professionnel des salariés du privé dans leur ensemble. On a sélectionné tous les individus salariés du privé un an avant l’enquête, qu’on a différenciés selon leur situation dans l’emploi à la date de l’enquête :
Graphique 33. Mobilités dans l’emploi des salariés du privé
Note : le total des trois mesures n’atteint pas 100%, la part de salariés entrant dans l’inactivité chaque année n’étant pas représentée ici.
Champ : salariés du privé en (n-1).
On voit que le devenir professionnel des actifs occupés est très sensible à la conjoncture. Ainsi, la part d’actifs occupés restant en emploi mais changeant d’employeur chute pour atteindre des minimums en 1984, 1994 et 2004165. L’effet de la récession de 2009 est cependant plus mesuré. En période de crise, les mouvements internes à l’emploi se réduisent fortement ; les employeurs offrent moins d’opportunités de changer d’emploi, dans des conditions salariales sûrement moins attrayantes, et les salariés sont moins disposés à prendre le risque de changer d’employeur.
Si l’évolution des mouvements des actifs occupés dans l’emploi est essentiellement conjoncturelle, leur lien avec la mobilité résidentielle suit une nette tendance à long terme,
165 Ce qui correspond donc à des changements d’employeurs ayant eu lieu entre 1983 et 1984, 1993 et 1994
ou 2003 et 2004. 50% 60% 70% 80% 90% 100% 0% 2% 4% 6% 8% 10% 12% Changement d'employeur Au chômage
150
comme le montre la déclinaison des sur- et sous-mobilités résidentielles selon la situation dans l’emploi (on reprend ici la mesure des sur- et sous-mobilités utilisée dans le chapitre 2) :
Graphiques 34. Sur- et sous-mobilité des actifs occupés selon leur devenir dans l’emploi
Champ : salariés du privé en (n-1).
Les individus changeant d’employeur et entrant au chômage sont plus mobiles que les autres, quelle que soit la distance à laquelle se joue la mobilité. On note cependant que cette sur-mobilité se réduit, notamment en ce qui concerne la mobilité-commune. Mobilités résidentielles et mobilité dans l’emploi vont moins systématiquement de pair aujourd’hui
-40% 0% 40% 80% 120% 160% 200% a. Mobilité-commune
Changement d'employeur Au chômage
-100% 0% 100% 200% 300% 400% b. Mobilité-département
Changement d'employeur Au chômage
0% 200% 400% 600% 800% c. Mobilité-région
qu’elles ne le faisaient au début des années 1970, même si les mobilités longues restent discriminantes.
b. Mobilité résidentielle et devenir des sans-emploi
Chaque année, entre 15 et 20% des individus chômeurs ou étudiants un an avant l’enquête deviennent actifs occupés à la date de l’enquête :
Graphique 35. Part de chômeurs et d’étudiants entrant dans l’emploi salarié privé
Champ : chômeurs et étudiants en (n-1), hors salariés du public et indépendants en (n)
Cette part, qui ne tient pas compte du devenir des inactifs autres qu’étudiants, a remonté au milieu des années 2000 pour retrouver son niveau de 1970. Les mouvements du chômage et des études vers l’emploi sont donc plus fréquents, mais sont moins associés aux mobilités résidentielles qu’il y a quarante ans :
5% 10% 15% 20% 25%
152
Graphique 36. Sur- et sous-mobilité résidentielle des individus entrant dans l’emploi salarié privé selon le type de mobilité
Champ : individus hors de l’emploi en (n-1) et salariés du privé en (n).
On peut tirer trois constats de ce graphique. Premièrement, les chômeurs et étudiants entrant dans l’emploi sont plus mobiles que les autres. Deuxièmement, il s’agit là d’une des rares situations dans lesquelles la nature de la mobilité résidentielle ne fait pas la différence. Troisièmement, cette sur-mobilité résidentielle a fortement diminué en quarante ans. L’entrée dans l’emploi n’engage plus autant les choix résidentiels qu’elle le faisait il y a quarante ans, soit que les individus trouvent du travail dans un territoire restreint, soit qu’ils aient recours à des mobilités quotidiennes plus longues et plus rapides pour accéder à des marchés du travail locaux distants sans avoir à changer de résidence principale.
c. Mobilité résidentielle et mobilité socio-professionnelle
La mesure de la mobilité socio-professionnelle, définie comme changement de catégorie socio-professionnelle, pose des problèmes de méthode bien connus. Dès la vague d’enquête 1975-1981, l’INSEE a constaté que les changements de profession étaient mal déclarés et mal pris en compte (Affichard 1987). Pour étudier la mobilité socio-professionnelle par l’enquête Emploi, Lalé (2010, 2012) propose une stratégie de correction de la mesure des changements d’occupation par l’utilisation d’informations auxiliaires166. Sans correction
166 Il utilise un éventuel changement d’employeur ou de classification de l’emploi. On notera que Lalé
propose aussi un traitement très complet permettant d’attribuer une probabilité de changement d’occupation aux individus anciennement sans emploi, ainsi qu’une méthode de calcul de mobilités socio-professionnelles « nettes » (Lalé 2012). 0% 50% 100% 150% 200%
des données brutes, la mesure de la mobilité socio-professionnelle fait apparaître deux périodes suspectes :
Graphique 37. Taux de mobilité occupationnelle apparente
Notes : la population est ici restreinte aux actifs occupant un employé salarié en (n) et en (n-1) La valeur 1982 est manquante, le codage défaillant des professions cette année donnant des résultats non fiables.
La correction du taux de démotion en 2003 et 2004 a été fait par ajustement affine local sur les années 2001-2005.
Lecture : en 1993, 1,75% des salariés du privé occupent une catégorie socioprofessionnelle inférieure à celle qu’ils occupaient un an auparavant.
Champ : salariés en prix en (n) et en (n-1).
On constate que la mobilité occupationnelle descendante, la « démotion » sociale, est nettement surévaluée entre 1970 et 1976, ainsi qu’entre 2003 et 2004. On remarque aussi que l’écart entre promotion et démotion est anormalement élevé entre 1976 et 1981. Ce problème ne concerne pas la mesure de la promotion sociale. Il faudra par la suite manipuler la mesure de la mobilité socio-professionnelle avec précautions, une part de cette mesure étant probablement un « bruit »167. D’une manière générale, la structure socio- professionnelle identifiée chaque année en (n-1) est légèrement décalée par rapport à celle identifiée en (n). On constate notamment une sur-évaluation de la part des cadres mesurée par le bloc (n-1) par rapport à la part mesurée par le bloc (n) entre 1990 et 2002, qui est cohérente avec les observations de Lalé (2012, p. 376) mais qui perturbe fortement la
167 En s’inspirant de Lalé (2012), on a essayé de corriger les années 1993-2002 en utilisant des variables
extérieures, en ne considérant comme valable que les changements de catégorie socio-professionnelle qui correspondent à un changement de fonction (variables FONCT et FONCTP). Cette méthode donne des
0% 2% 4% 6% Promotion Démotion
154
mesure de la mobilité occupationnelle. Mais en supposant que ce bruit soit indépendant de la mobilité résidentielle des individus et en se gardant d’accorder une confiance excessive aux valeurs mesurées, on peut dégager une tendance quant à l’articulation de la mobilité résidentielle et de la mobilité socio-professionnelle :
Graphiques 38. Sur- et sous-mobilité résidentielle des individus selon leur mobilité occupationnelle
Lecture : en 2003, le taux de mobilité-département était 57% plus élevé parmi les individus ayant connu une mobilité occupationnelle ascendante.
Champ : salariés du privé en (n-1) et en (n).
On peut identifier la même tendance que celle qu’on avait repérée concernant l’articulation des mobilités résidentielles et du devenir des actifs occupés et des chômeurs. Les individus connaissant une mobilité socioprofessionnelle sont plus mobiles sur le plan résidentiel que les autres, et ce quelle que soit la distance de la mobilité résidentielle. Mais la surmobilité
-50% 0% 50% 100% 150% 200% 250% a. Mobilité-commune Ascendante Descendante -100% 0% 100% 200% 300% b. Mobilité-département Ascendante Descendante -100% 0% 100% 200% 300% 400% 500% 600% 700% c. Mobilité-région Ascendante Descendante
résidentielle des individus connaissant une mobilité socio-professionnelle diminue depuis le début des années 1990. Les mobilités socio-professionnelles sont donc de moins en moins liées à des mobilités résidentielles : c’est ce que montre l’évolution des « profils de mobilité » dans le temps.
1.2. Les « profils de mobilité » : convergence et moyennisation
Dans ce point, on réutilise les « profils de mobilité » qu’on avait fait apparaître dans le chapitre 2 pour décrire la répartition des mobilités dans l’espace des groupes sociaux. On le rappelle, les « profils de mobilité » sont construits en représentant des couples taux de mobilité résidentielle/part des mobilités longues dans un repère. Ici, on ajoute une dimension supplémentaire : la dimension temporelle. En effet, on va représenter les « profils de mobilité » d’individus définis par différentes situations de mobilité socio- professionnelle (« a perdu son emploi », « a progressé dans la hiérarchie socio- professionnelle » etc…) à différentes dates et dans le même repère.
La représentation de ces profils risque d’être perturbée par la grande variabilité dont peuvent faire preuve les taux de mobilité d’une année sur l’autre. Ce risque est lié au fait qu’on restreindra la population étudiée en choisissant des jeux de caractéristiques très discriminantes, comme par exemple le fait d’être hors de l’emploi un an avant l’enquête et d’être entré dans l’emploi au cours de l’année précédant l’enquête. Pour réduire ce risque, on présentera donc les « profils de mobilité » moyens par périodes de cinq ans.
Enfin, on a choisi de représenter les profils et leur évolution dans le temps dans des repères, à la fois pour mettre en valeur les proximités et les distances entre les profils en fonction des situations socio-professionnelles étudiées, et pour observer le rapprochement ou l’éloignement de ces profils au fil du temps. Ces représentations graphiques n’étant pas toujours aussi lisibles qu’on pourrait le souhaiter, on présente aussi les valeurs détaillées de chaque profil aux différentes dates étudiées.
156
Figure 6. « Profil de mobilité » résidentielle des actifs occupés selon leur devenir dans l’emploi
Lecture : entre 1972 et 1976, le taux de mobilité résidentielle moyen parmi les actifs occupés ayant changé d’employeur était de 28% et 60% de ces mobilités ont été des mobilités longues (département et plus).
Note : la distinction entre salariés ayant changé d’employeur et des salariés n’ayant pas changé d’employeur n’est possible qu’à partir de 1975. On ne représente donc pas la période 1972-1976.
Champ : salariés du privé en (n-1).
Tableau 11. « Profil de mobilité » résidentielle des actifs occupés selon leur devenir dans l’emploi – données détaillées
1977-
1981 1982-1986 1987-1991 1992-1996 1997-2001 2002-2006 2007-2011 Même
employeur
Part des mobilités
longues (en %) 26,3 26,9 29,8 30,9 32,7 32,0 26,3
Taux de mobilité
(en %) 4,5 4,8 5,2 6,0 6,4 5,9 4,5
Changement d’employeur
Part des mobilités
longues (en %) 60,8 60,3 59,9 60,7 61,6 61,5 60,8
Taux de mobilité
(en %) 22,3 21,2 20,0 20,8 18,7 18,2 22,3
Au chômage
Part des mobilités
longues (en %) 61,1 61,3 59,2 56,7 56,4 55,4 61,1
Part des mobilités
longues (en %) 15,5 15,5 14,0 15,3 15,4 13,9 15,5
Le profil de mobilité des actifs occupés suit deux tendances de 1972 à 2011 : leur taux de mobilité se réduit (individus ayant changé d’employeur ou ayant perdu leur emploi) ou stagne (individus n’ayant pas changé d’employeur), et la part des mobilités longues se réduit fortement (même employeur, changement d’employeur) ou légèrement (au
72-76 07-11 72-76 07-11 72-76 07-11 0% 5% 10% 15% 20% 25% 30% 25% 35% 45% 55% 65% Ta u x d e m o b ili té ( co m m u n e et p lu s)
Part des mobilités longues (département et plus)
chômage). Les actifs occupés apparaissent donc moins mobile entre 2007 et 2011 qu’entre 1977 et 1981, et cette évolution est plutôt régulière au cours de la période.
Les mobilités occupationnelles (changement de catégorie socio-professionnelles) sont elles aussi concernées par cette moins grande mobilité résidentielle :
Figure 7. « Profil de mobilité » résidentielle des actifs occupés selon leur mobilité occupationnelle
Lecture : entre 2007 et 2011, le taux de mobilité résidentielle moyen parmi les actifs occupés ayant connu une mobilité occupationnelle ascendante était de 7,1% et 51,2% de ces mobilités ont été des mobilités longues (département et plus).
Champ : salariés du privé en (n-1) et en (n).
Tableau 12. « Profil de mobilité » résidentielle des actifs occupés selon leur mobilité occupationnelle – données détaillées
1982-
1986 1987-1991 1992-1996 1997-2001 2002-2006 2007-2011 Mobilité
occupationnelle ascendante
Part des mobilités
longues (en %) 57,8 59,9 49,4 46,7 46,5 51,2
Taux de mobilité
(en %) 16,3 14,1 15,6 17,4 13,9 12,2
Immobilité occupationnelle
Part des mobilités
longues (en %) 40,8 39,5 37,8 36,8 34,8 34,3 Taux de mobilité (en %) 6,3 6,6 6,6 7,5 7,5 7,1 Mobilité occupationnelle descendante
Part des mobilités
longues (en %) 54,5 52,9 53,2 49,7 47,6 52,0
Taux de mobilité
(en %) 18,5 16,2 15,6 18,3 12,3 15,4
Qu’il s’agisse de monter ou de descendre dans la hiérarchie socio-professionnelle, les individus sont en moyenne moins mobiles sue le plan résidentiel et le sont sur des distances
07-11 77-81 07-11 77-81 07-11 0% 5% 10% 15% 20% 25% 30% 25% 35% 45% 55% 65% Ta u x d e m o b ili té ( co m m u n e et p lu s)
Part des mobilités longues (département et plus)
158
plus courtes. On note cependant que le taux de mobilité résidentiel moyen et la part moyenne des mobilités résidentielles longues augmentent pour les individus connaissant une mobilité occupationnelle descendante entre 2002-2006 et 2007-2011. Les périodes de crise économique semblent propices à une plus grande mobilité résidentielle des individus en situation de démotion sociale. On peut penser que ces années voient se multiplier des formes de mobilité plus contraintes, plus défensives pour les individus, qui payent le prix fort d’une mobilité résidentielle et d’une démotion sociale pour préserver leur emploi.
Le profil de mobilité des individus hors emploi suit une toute autre tendance : le taux de mobilité résidentielle total ainsi que la part des mobilités longues parmi les mobilités résidentielles augmente tant pour les individus qui ont trouvé un emploi que pour ceux qui sont resté hors de l’emploi :
Figure 8. « Profil de mobilité » résidentielle des chômeurs et étudiants selon leur devenir dans l’emploi
Lecture : entre 1992 et 1996, le taux de mobilité résidentielle moyen parmi les individus entrés dans l’emploi était de 15,2% et 51,1% de ces mobilités ont été des mobilités longues (département et plus).
Champ : chômeurs et étudiants en (n-1). [REFCELL] [REFCELL] [REFCELL] [REFCELL] 0% 2% 4% 6% 8% 10% 12% 14% 16% 18% 20% 45% 50% 55% 60% 65% Ta u x d e m o b ili té ( co m m u n e et p lu s)
Part des mobilités longues (département et plus) En emploi Hors emploi
Tableau 13. « Profil de mobilité » résidentielle des chômeurs et étudiants selon leur devenir dans l’emploi – données détaillées
1972- 1976 1977- 1981 1982- 1986 1987- 1991 1992- 1996 1997- 2001 2002- 2006 2007- 2011 Entrés dans l’emploi
Part des mobilités
longues (en %) 54,4 55,0 55,7 53,1 51,1 55,4 53,2 54,8
Taux de mobilité
(en %) 53,7 52,6 51,8 52,6 52,3 52,4 54,3 55,3
Restés hors de l’emploi
Part des mobilités
longues (en %) 14,1 14,4 14,2 14,6 15,2 16,9 15,9 16,5
Taux de mobilité
(en %) 5,1 5,7 5,5 6,1 7,5 7,9 7,8 8,3
Contrairement aux actifs occupés, les individus hors emploi présentent donc un profil qui devient plus mobile sur le plan résidentiel au fil du temps. La remontée des taux de mobilité résidentielle depuis les années 1980 ne s’est pas faite par les mobilités des actifs occupés, mais bien par celle des chômeurs et des inactifs. On remarque que le profil des individus entrant dans l’emploi est le plus mobile (tant en taux de mobilité résidentielle que de part des mobilités longues) entre 1997 et 2001. La mobilité résidentielle en tant que modalité d’insertion dans le marché du travail est propre aux périodes de rebond conjoncturel, quand les opportunités sont plus nombreuses et les perspectives de revenu plus élevées. La mobilité résidentielle n’est pas une ressource pour desserrer les contraintes propres à un marché du travail déprimé, mais pour mieux valoriser les ressources d’un marché du travail dynamique.
On peut tirer deux enseignements principaux de l’étude des mobilités résidentielles et des mobilités socio-professionnelles. Tout d’abord, on a constaté que les deux ordres de mobilité coïncident. Comme nous observons les mobilités sur une période courte d’une année, l’immobilité (résidentielle et socio-professionnelle) est la règle. Mais les individus qui connaissent une mobilité résidentielle ont de fortes chances de connaître une mobilité socio-professionnelle. La mobilité est bien l’« expérience sociale totale » qu’on évoquait en introduction. Deuxièmement, on a vu que la place des mobilités résidentielles dans les mobilités socio-professionnelles diminue régulièrement depuis quarante ans, signe d’un resserrement des mobilités individuelles sur des territoires restreints. L’évolution des « profils de mobilité » est marquée par la convergence et une tendance à la moyennisation de ces profils. La question qui se pose maintenant est celle de la nature de l’articulation entre mobilités résidentielles et mobilités socioprofessionnelles : à quels mouvements dans
160
l’emploi et dans la hiérarchie professionnelle les mobilités résidentielles correspondent- elles ?