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Chapitre 1: Introduction générale

1. Le récepteur éboueur de type B: le CD36

1.5. Rôle du récepteur CD36 dans le métabolisme lipidique

1.5.1. Le CD36: un récepteur-clé dans le transport des acides gras

Le transport des acides gras peut se faire par diffusion passive à travers la membrane plasmique, cependant il y plusieurs évidences qui montrent que les acides gras traversent la membrane par transport facilité grâce à des protéines membranaires comme le FAT/CD36, la protéine de liaison des acides gras (FABP) et la protéine de transfert des acides gras (FATP) (Ehehalt et al., 2006; Su & Abumrad, 2009). Le transporteur FAT/CD36, l’homologue murin du CD36 humain, joue un rôle important dans le transport et le métabolisme des acides gras à longues chaînes dans les adipocytes et les muscles cardiaque et squelettique. Le mécanisme précis du transport des acides gras à travers la membrane plasmique reste à déterminer; cependant différents modèles, d

ans lesquels le FAT/CD36 joue un rôle-clé, ont été proposés: 1) le FAT/CD36, seul ou de concert avec la FABP membranaire (FABPpm), pourrait concentrer les acides gras à la membrane plasmique favorisant leur diffusion passive ou 2) transporter directement les acides gras à travers la membrane dans le cytosol, où les acides gras vont se lier à une FABP cytosolique (FABPc); 3) le FAT/CD36 pourrait servir de récepteur pour les acides gras et ainsi les acheminer à proximité des transporteurs FATP1 et FATP6 pour être internalisés (Schwenk et al., 2010; Schwenk et al., 2008) (Figure 4). Dans ces tissus riches en FAT/CD36, le récepteur est emmagasiné dans des vésicules intracellulaires formées à partir des endosomes de recyclage, et est transloqué à la membrane plasmique en réponse à l’insuline ou à une

Figure 4. Transport des acides gras par le récepteur CD36

Comme le mécanisme exact du transport transmembranaire des acides gras à longues chaînes (AGLC ou LCFA, en anglais) est encore inconnu, différents modèles ont été proposés. (1) Compte tenu de leur caractère hydrophobe, les LCFA pourraient traverser la membrane cytoplasmique par diffusion passive. Cependant, l’internalisation des LCFA dépend en grande partie du récepteur CD36, mais il n'est pas spécifié si (2) le CD36, seul ou conjointement avec la FABPpm, concentre les LCFA à la surface cellulaire pour favoriser la diffusion passive, ou si (3) le CD36 transporte activement les LCFA à travers la membrane plasmique. (4) Le CD36 pourrait également servir de récepteur pour les LCFA et les acheminer à proximité des transporteurs FATP1 et FATP6 ce qui pourrait faciliter le transport des LCFA. Le CD36 est aussi exprimé au niveau de la mitochondrie où il joue un rôle dans l’oxydation des acides gras, de concert avec la carnitine palmitoyltransférase (CPT-1) (Figure modifiée de (Schwenk et al., 2008).

contraction musculaire, où il intervient alors dans l’internalisation des acides gras (Bonen et al., 2007; Schwenk et al., 2008). Campbell et al. ont montré que le FAT/CD36 est aussi exprimé au niveau des mitochondries et joue un rôle dans l’oxydation des acides gras, de concert avec la carnitine palmitoyltransférase I (CPT I) (Campbell et al., 2004). L’apparition des modèles de souris qui surexpriment ou qui sont déficientes en FAT/CD36 a permis de confirmer le rôle crucial de ce transporteur dans le transport des acides gras.

Une surexpression du FAT/CD36 dans le muscle entraîne une augmentation de l’oxydation des acides gras après une contraction et diminue les niveaux de lipides plasmatiques chez la souris (Ibrahimi et al., 1999). À l’opposé, une déficience en FAT/CD36 diminue

significativement le captage et le métabolisme des acides gras dans les muscles cardiaque et squelettique ainsi que dans les adipocytes et engendre une élévation des taux d’acides gras libres non estérifiés (AGNE) et des triglycérides plasmatiques, ainsi qu’une résistance à l’insuline au niveau hépatique (Hajri & Abumrad, 2002; Goudriaan et al., 2003). Le CD36 est aussi impliqué dans la perception sensorielle. Chez les rongeurs, le CD36 est exprimé à la membrane apicale des cellules sensorielles situées dans les papilles linguales entraînant une préférence pour les aliments riches en lipides. La prise de nourriture riche en acides gras, comme l’acide linoléique, transmet un signal aux fibres nerveuses conduisant à la perception du goût et à la sécrétion d’acides biliaires, préparant ainsi le système digestif pour l’absorption des acides gras.

De plus, le FAT/CD36 est fortement exprimé dans le petit intestin (Nassir et al., 2007; Chen et al., 2001a). Le FAT/CD36 est principalement localisé au niveau de la membrane apicale des entérocytes, sur les 2/3 supérieurs des villosités. L’expression du FAT/CD36 et sa localisation au niveau intestinal suggère un rôle dans l’absorption des lipides mais cette fonction a longtemps été controversée. Chez les souris déficientes en FAT/CD36, il n’y a pas de modification significative de l’absorption intestinale des acides gras. Cependant, une déficience en FAT/CD36 diminue l’absorption intestinale des acides gras à très longues chaînes (AGTLC) chez les souris sous diète à haute teneur en gras (Drover et al., 2008). De plus, l’ablation du FAT/CD36 engendre une diminution de la sécrétion des chylomicrons au niveau de l’intestin proximal et la production de chylomicrons de plus petites tailles avec moins d’apoB-48, en plus d’entraîner une diminution de la clairance des lipoprotéines riches en triglycérides due à l’inhibition de la lipase endothéliale (Drover et al., 2005; Goudriaan et al., 2005; Nauli et al., 2006). Ces données indiquent donc que le FAT/CD36 joue un rôle dans la formation et la sécrétion des chylomicrons mais ne montrent pas que le FAT/CD36 peut contribuer à l’absorption des acides gras au niveau intestinal. Récemment, Nassir et al. ont montré que le FAT/CD36 est impliqué dans le captage du cholestérol et des acides gras dans l’intestin proximal (voir section 2.2.3.2.1.). Ils ont observé une perturbation de la sécrétion des lipoprotéines par les entérocytes ainsi qu’une diminution de la production des apoB48 et apoA-IV. De plus, une augmentation de la protéine Niemann Pick C1 like 1 (NPC1L1) est observée chez les souris déficientes en FAT/CD36 suggérant une coopération entre les deux protéines dans l’absorption du cholestérol (Nassir et al., 2007).

1.5.2. Le CD36 : un récepteur-clé dans l’internalisation des lipoprotéines oxydées et le développement de l’athérosclérose

Le CD36 exprimé à la surface des macrophages joue un rôle dans l’internalisation des lipoprotéines modifiées et dans le développement des lésions athérosclérotiques. Des études

ont montré que la délétion du gène CD36 chez les souris déficientes en apoE nourries avec une diète enrichie en cholestérol et en lipides entraînent une réduction de 80% des lésions athérosclérotiques associée à une diminution de l’internalisation des LDLox dans les macrophages (Febbraio et al., 1999; Febbraio et al., 2000). Pour bien comprendre les effets anti-athérosclérotiques des ligands du récepteur CD36, il est essentiel de bien comprendre les différentes étapes du développement de l’athérosclérose.

Le CD36 exprimé à la surface des macrophages joue un rôle important dans l’internalisation des LDLox. C’est la fraction lipidique des LDLox qui est à l’origine de leur interaction avec le récepteur CD36, contrairement à leur interaction avec les autres récepteurs scavengers qui se fait plutôt via la fraction protéique (Nicholson et al., 1995). On retrouve sur le récepteur CD36 un domaine composé d’un groupement de trois lysines chargées positivement, lysine 164-166 (Kar et

al., 2008), qui permet l’interaction avec les LDLox qui sont chargées négativement (Doi et al.,

1994). Podrez et al. ont identifié une famille de phospholipides oxydés formés lors de l’oxydation des particules de LDL ou des phospholipides cellulaires, particulièrement la phosphatidylcholine (PC), contenant des acides gras polyinsaturés (PCoxCD36). Ces phospholipides oxydés, contenant un acide gras avec un groupement carbonyl insaturé présentant un groupe γ-hydroxy(ou oxo)-α,β, estérifié en position sn-2, sont responsables de la liaison de haute affinité avec le récepteur CD36 (Figure 5) (Podrez et al., 2002a; Podrez et al., 2002b). En plus du PCoxCD36, 36

d’autres phospholipides oxydés ont récemment été identifiés comme ligands potentiels des récepteurs scavengers de type B (Figure 5) (Gao et al., 2010).

Figure 5. Schéma des différents phospholipides oxydés formés lors de l’oxydation du 1-palmitoyl-2-arachidonoyl-sn-glycero-3-phosphorylcholine (PAPC) (Figure tirée de

(Ashraf et al., 2009)).

L’activation du récepteur CD36 peut engendrer d’une part, l’internalisation et la dégradation des LDLox qui entraînent la libération d’oxystérols et de dérivés d’acides gras oxydés comme 9 et 13-HODE, des ligands des récepteurs nucléaires LXRα et PPARγ, respectivement (Brown et al., 1996; Brown et al., 2000; Janowski et al., 1999; Nagy et al., 1998). L’activation du PPARγ par les 9- et 13-HODE s’accompagne d’une augmentation de la transcription du récepteur CD36, régulant ainsi à la hausse l’internalisation des LDLox (Tontonoz et al., 1998). Cependant, l’activation de ce récepteur nucléaire entraîne aussi la régulation des gènes impliqués dans le métabolisme lipidique (Tontonoz et al., 1998; Nagy et al., 1998; Moore et al., 2001; Chinetti et al., 2001; Li et al., 2004). La signalisation intracellulaire résultant de l’activation du PPARγ par le LDLox via le récepteur CD36 peut induire l’activation d’une PKC conventionnelle (Feng et al., 2000). De plus, le CD36, en dépit de ses courts domaines intracytoplasmiques, engendre une cascade de signalisation lorsque le récepteur CD36 est activé par ses divers ligands. Cette cascade implique le recrutement, au domaine C-terminal intracytoplasmique du CD36, de tyrosine kinase de la famille des src (fyn, lyn et yes) (Moore et al., 2002; Medeiros et al., 2004; Jimenez et al., 2000; Janabi et al., 2000; Bamberger et al., 2003). Leur activation conduit à l’activation de MAPK spécifiques, c-Jun N-terminal kinase (JNK) 1 et 2 (Rahaman et al., 2006). Cette voie de signalisation est impliquée dans la formation de cellules spumeuses puisque l'inhibition pharmacologique de JNK conduit à une réduction de l'athérosclérose, tout comme l’athéroprotection observée chez les souris déficientes en JNK2 et en src kinase lyn (Sumara et al., 2005; Ricci et al., 2004; Miki et al., 2001). De plus, des études plus récentes ont montré que la liaison du CD36 avec les LDLox peut entraîner l’activation de la kinase p44/42 et de COX-2, et ainsi augmenter la production de 15d-PGJ2 menant à l’activation du PPARγ (Taketa et al., 2008).

Bien que ces mécanismes montrent que le récepteur CD36 joue un rôle-clé dans la formation des cellules spumeuses, l’internalisation des LDLox par les macrophages est aussi associée à la sécrétion de facteurs pro-inflammatoires (section 1.5).