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Contexte

Dès le début de l'étude, l'identification des points de recharge indirecte est apparue comme primordiale, compte tenu de notre connaissance des processus. Les conclusions du chapitre précédent (déficit de la recharge) confirment la nécessité de mieux caractériser les zones potentielles d'infiltration profonde.

L'essentiel du terrain réalisé au cours de cette thèse s'est focalisé sur l'inventaire et la mise en évidence des aires d'infiltration privilégiée. En août 2002, nous avons eu l'opportunité de réaliser une étude expérimentale en collaboration avec l'UR GEOVAST (IRD) et rendue possible grâce à un financement alloué par l'Ecole Doctorale "Sciences de la Terre et de l'Eau" de l'Université de Montpellier II. L'objectif était de déterminer si les zones d'épandage sableuses (§II.3.2) participaient à l'infiltration profonde au même titre que les mares ou les zones humides.

L’étude concerne la zone d’épandage sableuse (6 ha dont 1 ha de chenaux sableux en 1998), formée à mi-versant sur le bassin élémentaire de Wankama, et sous laquelle, la nappe phréatique se situe entre 32 et 41 m de profondeur. La modélisation hydrologique suggère que 92% des volumes alimentant la zone d’épandage s’infiltrent sur le premier hectare amont (Cappelaere et al., 2003b) et qu'aucun écoulement issu de l'amont du bassin ne franchit les quelques centaines de mètres de canaux sableux.

Méthode

L'expérimentation géophysique s’appuie sur les mesures de la conductivité électrique, paramètre très influencé par l’humidité et la minéralisation des eaux contenues dans les formations (Descloitres et al., 2003). Les prospections suivantes ont été menées :

- Cartes de conductivité apparente par électromagnétisme (EM) fréquentiel (EM34) à 10, 20 et 40 m d’écartement avec un maillage de mesures au pas de 10 et 40 m - Panneau de conductivité 2D en travers de la zone d’épandage avec des dispositifs

Wenner α et β (écartement inter électrode unitaire a=4 m)

- Diagraphies électriques sur 8 forages jusqu’à 25 m de profondeur en zone non saturée avec une sonde de diagraphie électrique, dispositif pôle-pôle (AM= 0,25 m)

Les deux sondages les plus profonds ont été réalisés en août 2002 et les six autres en mars 2003. Ils ont été forés à la tarière motorisée afin de permettre des prélèvements réguliers de sol sur lesquels les analyses physico-chimiques suivantes ont été effectuées :

- humidité pondérale, - succion matricielle, - granulométrie, - diffraction X, - conductivité, - pH,

- analyse des ions majeurs.

Résultats et discussion

Les diagraphies de conductivité dans la zone non saturée montrent que pour certains points la conductivité électrique reste toujours inférieure à 10 µS.cm-1. Alors que pour d’autres, dans une tranche située systématiquement entre 5 et 10 m de profondeur, elle peut dépasser 100 µS.cm-1. Parallèlement, les mesures de conductivité électrolytique effectuées sur les prélèvements de sols dilués (20 g pour 50 ml d’eau distillée), affichent une forte corrélation avec la résistivité électrique mesurée en forage.

Les analyses de diffraction X ont montré que les niveaux stratigraphiques de deux forages distants de 230 m sont composés d’argiles de même nature, et la granulométrie suggère une continuité de la composition des dépôts sédimentaires. La teneur en eau est la même sur tous les profils, seule la teneur en électrolytes diffère entre les forages. L’analyse des ions majeurs révèle que les ions NO3-, Ca2+ et Na+ sont responsables des conductivités électrolytiques plus élevées.

Pour les forages situés au voisinage d’un chenal sableux, les conductivités électrolytiques restent faibles sur toute la profondeur (de 0 à 25 m), représentatives d'une teneur faible en ions. Pour les autres forages, les conductivités électrolytiques sont plus élevées, entre 5 et 10 m de profondeur, indiquant une accumulation des ions. L’interprétation des panneaux de résistivité apparente 2D, à partir des observations ponctuelles des forages, révèle la présence d’une couche plus conductrice entre 5 et 10 m sous la surface, interrompue à l’aplomb du passage des chenaux sableux. Les cartes réalisées avec l’EM34 (écartement 20 m) indiquent également que les faibles conductivités apparentes coïncident avec le passage des chevelus sableux en surface. Un faible décalage est parfois observé, expliqué par la différence entre les dynamiques anciennes du lessivage et du déplacement récent en surface du lit des chenaux (cf. §II.7.2.4).

L'homogénéité, entre les forages, des facteurs influençant la conductivité électrique (teneur en eau, nature du sol), ajoutée à la corrélation établie avec la conductivité électrolytique, permettent d'interpréter cette bande plus conductrice comme une zone où la solution du sol est relativement plus minéralisée. La détermination de l'origine de l'accumulation nécessite des analyses plus approfondies, mais elle signifie que les eaux de surface ne percolent pas au-delà de cette profondeur de 5 à 10 m. Inversement, la faible minéralisation suggère un lessivage épisodique, emportant les solutés au moins au-delà de notre profondeur d’investigation géophysique (c.-à-d -25 m ; Fig.VI-1).

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Conclusion

Les multiples chenaux sableux de la zone d’épandage seraient épisodiquement le siège d’une infiltration profonde. Les volumes concernés d'après la modélisation hydrologique ne sont pas négligeables, environ 1 000 à 24 000 m3 par an sur la dernière décennie (sachant que le ruissellement calculé par Zarbhy sur les 377 bassins élémentaires est en moyenne de 70 000 m3 par an.). Les volumes maximums calculés arrivant dans la zone d'épandage, sont supérieurs aux volumes minimums calculés arrivant dans la mare exutoire du bassin où une recharge saisonnière a été démontrée (Desconnets et al., 1997).

Cette étude corrobore les résultats des analyses chimiques réalisées depuis plusieurs années. Dans les puits proches des zones de recharge, les crues de la nappe s'accompagnent fréquemment d’un pic de conductivité (Elbaz-Poulichet et al., 2002). L'origine des pics de nitrate observés à distance de toute zone source en surface (Favreau et al., 2003) pourrait être expliquée par le lessivage occasionnel de la zone d’accumulation mise en évidence entre 5 et 10 m de profondeur.

Fig.VI-1 : schéma du fonctionnement possible de la recharge profonde dans la zone d’épandage de Wankama, avec accumulation des électrolytes dans la frange de reprise évaporatoire et lessivage ponctuel sous les ravines lors de certains événements pluvieux. (cliché J.L. Rajot, 1998)

Deep infiltration through a sandy alluvial fan in semiarid