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Il n'existe que très peu d'endroits sur la zone d'étude où la nappe phréatique est affleurante ou sub-affleurante. Il s'agit de la vallée fossile du dallol Bosso, de l'aval de son affluent fossile (kori de Dantiandou à Boula Kouara) et d'une partie du kori de Ouallam (Labou Titiloua). Ailleurs, du fait de la profondeur de la nappe par rapport au réseau hydrographique (cf. §V.3), les circulations d'eau s'effectuent dans le sens unique de la surface vers le souterrain.

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II.5.1 Les zones d'infiltration profonde

Des suivis réguliers de l’humidité des sols ont été effectués à différentes profondeurs lors d'études antérieures (Desconnets et al., 1996 ; Peugeot et al., 1997 ; Galle et al., 1999). Ajoutés à des travaux basés sur la piézométrie de la nappe phréatique (Leduc et al., 1997, 2001), ils permettent d'effectuer la caractérisation des zones d'infiltration profondes à l'échelle de la toposéquence (cf. Fig.II-13b).

Sur les sols nus de plateaux latéritiques, la lame infiltrée lors de la saison des pluies ne dépasse pas 60 cm de profondeur, et sous les bandes de brousse tigrée, l'humidité se répartit sur une profondeur supérieure à 6 m. En saison sèche la quasi-totalité de l'eau infiltrée est évaporée, une partie (inconnue) s'est potentiellement écoulée sous la végétation. Derive (2003) estime par modélisation, que la reprise évaporatoire depuis la brousse tigrée est supérieure à 95% des précipitations.

La vidange des mares de plateau est très lente et concerne des volumes faibles. Selon Desconnets (1994), le volume infiltré est vraisemblablement stocké dans le sol sableux entre le fond de la mare et la couche latéritique imperméable, et alimente en saison sèche la végétation dense autour des mares de plateau. S'appuyant sur l'existence d'eaux peu évaporées dans la zone non saturée, Bromley et al. (1997) n'excluent cependant pas une possibilité d'infiltration profonde. La profondeur de la nappe sous les plateaux est en moyenne de 50 à 75 m et aucune fluctuation saisonnière n'a été enregistrée jusqu'à présent sur des points proches d'accès à la nappe. Si une alimentation profonde existe, elle est vraisemblablement extrêmement faible.

D'importantes pertes par infiltration directe interviennent au cours du transfert des écoulements dans le réseau. Le lit des ravines composé de sable détritique remanié autorise de fortes capacités d'infiltration (450 mm.h-1, mesurés par Estèves, 1995). L'occurrence d'une infiltration profonde depuis le réseau de drainage n'a cependant pas encore été démontrée mais peut être envisagée d'après certaines chroniques piézométriques.

Sur les glacis sableux, l'encroûtement des sols ne favorise pas l'infiltration. De plus, l'instrumentation de parcelles de jachère ou cultivées (mil : Pennisetum typhoïdes), montre que l'eau infiltrée est entièrement restituée à l'atmosphère en saison sèche (Peugeot, 1995). En plein cœur de l'hivernage 2002, le creusement d'une fosse pédologique sur une parcelle cultivée, nous a permis de repérer le front d'humectation à 60 cm sous la surface. Une infiltration profonde semble donc peu probable à ce niveau de la toposéquence. Cependant, localement, les zones d'accumulation d'eau temporaires (mares ou zones humides) qui se développent en contrebas des glacis (ourlets) sont susceptibles d'infiltrer une partie du ruissellement amont. Les mesures d'humidité montrent une infiltration au-delà de 6 m de profondeur de lames d'eau atteignant 2 fois la lame de pluie (Desconnets, 1994). Une infiltration profonde est illustrée par les fluctuations saisonnières des puits situés à proximité de certaines mares de versant. En revanche, aucune preuve de l'infiltration profonde sous les zones d'épandage sableuses n'a actuellement été avancée, bien que les multiples chenaux sableux qui les constituent puissent être intuitivement considérés comme propices à l'infiltration profonde.

Les investigations hydrologiques et hydrogéologiques (Desconnets et al., 1997, Leduc

et al., 1997, 2001) montrent que les systèmes endoréiques de bas fonds sont des aires

d’infiltration profonde privilégiées. Les mares de kori, partiellement colmatées par des dépôts argileux, recueillent de forts volumes ruisselés.

II.5.2 Recharge de la nappe

II.5.2.1 Recharge directe

La caractérisation des zones d'infiltration profonde sur la zone d'étude décrite supra montre que la plupart des aires d'infiltration diffuse ne conduisent pas les eaux au-delà des premiers mètres du sol. L'humidité accumulée lors de l'hivernage est entièrement reprise par évapotranspiration en saison sèche.

Sous les bosquets de brousse tigrée des plateaux latéritiques, une faible recharge peut éventuellement être concevable. La vitesse de transit serait alors de l'ordre de 0,1 m.an-1 (Bromley et al., 1997) et les eaux d'infiltration actuelles mettraient plusieurs siècles pour rejoindre la nappe.

Dans la vallée très plane du dallol Bosso, la pénétration des eaux de pluie jusqu'à la nappe sub-affleurante est possible. Une recharge saisonnière directe en saison des pluies peut donc être envisagée. En contrepartie, en saison sèche, la nappe est aussi fortement sollicitée par l'évapotranspiration du fait de sa proximité avec la surface.

II.5.2.2 Recharge indirecte

A l'inverse de la recharge directe, la recharge indirecte ou ponctuelle a lieu à la faveur d'une concentration préalable des écoulements. Parmi les zones d'infiltration profonde énoncées supra, les aires potentielles de recharge indirecte sont constituées par les drains (dont les zones d'épandage sableuses), et les zones d'accumulation temporaire du ruissellement. Actuellement les études réalisées sur la zone ne nous permettent pas de confirmer la recharge sous les drains. En revanche, les suivis de la nappe effectués à proximité des mares temporaires prouvent leur importance majeure pour la recharge (Desconnets et al., 1997). Par conséquent nous retiendrons pour cette étude que l'essentiel de la recharge indirecte s'effectue par l'intermédiaire des mares.

a) fonctionnement de la recharge indirecte

Au cours d'un événement pluvieux, les mares accumulent le ruissellement, permettant ainsi une infiltration massive vers la nappe. Ce phénomène a été mis en évidence et décrit à partir des fluctuations saisonnières de la piézométrie mesurée près des mares (Leduc et al., 1997). La crue est suivie de la formation d'un dôme piézométrique local de quelques centaines de mètres de diamètre et de plusieurs mètres d'amplitude (variable selon la taille de la mare et l'intensité de la crue). Au cours de la saison sèche, le dôme se résorbe par diffusion dans l'aquifère et généralement un niveau statique est de nouveau atteint en fin de saison.

Le début de réponse de la nappe est variable mais toujours très rapide (quelques heures à quelques jours). Il varie selon le moment de la saison, le type de mare et la profondeur de la nappe (Leduc et al., 1997).

La proportion de l'infiltration diffère selon le type de mare. Le dépôt d'argiles dans le lit crée une zone colmatée qui s'oppose à l'infiltration. Les mares colmatées peuvent rester en eau plusieurs mois après la saison des pluies et le transfert des flux s'opère préférentiellement à travers les marges plus sableuses des bordures. Ce phénomène s'observe notamment par une double phase de vidange (Desconnets, 1994 ; Martin-Rosales et Leduc, 2003). En revanche, les mares non colmatées ne stockent les écoulements que quelques heures à quelques jours, minimisant ainsi la reprise évaporatoire. Le bilan hydrologique effectué par Desconnets

31 (1994) montre que 90% des eaux qui transitent dans les mares colmatées rejoignent la nappe alors que sous les mares non colmatées, la quasi-totalité s'infiltre.

b) estimations actuelles de la recharge

Les estimations de l’infiltration à partir des apports depuis les mares, concernent des volumes entre 40 000 et 90 000 m3.an-1 pour certaines mares de kori (p. ex. Banizoumbou 1996-2002 d'après Sou, 2003 ; Wankama 1992-2000 d'après Cappelaere et al., 2003a) et de 30 000 à 320 000 m3.an-1 pour des mares non colmatées de versant (p. ex. Kafina 1997-1999 d'après Fourcade, 2000 et Sama Dey 1993 d'après Desconnets et al., 1997). Les valeurs calculées à partir de la vidange fournissent une estimation de la recharge entre 10 et 80 mm.an-1 (Desconnets et al., 1997). L'infiltration depuis les mares de versants est très variable, quantitativement et spatialement. Cependant elle représente très certainement une part importante de la recharge totale.

L'évolution de la nappe représente une intégration spatiale et temporelle de la variabilité des apports de surface. C'est pourquoi la plupart des évaluations de la recharge se basent sur les eaux souterraines. Le Galle La Salle et al. (2001) soulignent cette hétérogénéité de la recharge en déterminant, par modélisation isotopique, des taux de renouvellement de 0,03% à 3% depuis la dernière période humide jusqu'à l'actuel (soit un taux médian d'environ 5 mm.an-1). Selon les approches, les fourchettes publiées sont plus ou moins larges, mais toujours du même ordre de grandeur (Leduc et al., 1996 ; Leduc et al., 1997, Leduc et al., 2001, Favreau et al., 2002b). L'estimation la plus récente, proposée à partir des données hydrodynamiques de la dernière décennie (1992-1999), fait état d'une recharge comprise entre 20 et 50 mm.an-1. Les autres études déterminent des intervalles voisins de l'ordre de 25, 50 à 60 mm.an-1.