7.3 Etude de faisabilité de l’inversion des traceurs
7.3.2 Résultats de l’inversion
Inversion de la chlorophylle seule
Dans cette partie, on inverse l’image représentant l’instantané de la chlorophylle du jour
d’étude (figure 7.2a). Le tourbillon principal au nord de l’image (marqué d’une croix sur
la figure 7.5) est difficile à détecter sur le traceur avec nos méthodes car les filaments sont
nombreux. En effet, on voit sur la figure 7.4a que les structures filamentaires détectées sur
la norme du gradient de la chlorophylle binarisée sont discontinues. Ce tourbillon est alors
mal corrigé avec notre méthode car il est difficile de détecter proprement les gradients sur
l’image de la chlorophylle.
Le courant au sud de l’image (entouré en rose sur la figure 7.10a) est lui partiellement
corrigé.
a Vitesse corrigée b FSLE issu de la vitesse corrigée
c Module de l’erreur restante sur la vitesse
corri-gée
Figure 7.10 – Vitesse corrigée en m.s
−1(a), FSLE correspondant en jour
−1(b) et
module de la différence entre la vitesse corrigée et la vitesse vraie (c) pour l’inversion
de l’image chlorophylle.
On peut voir l’amplitude de la correction effectuée sur la figure 7.10c. Cette correction est
faible sans doute à cause de la mauvaise qualité de l’image chlorophylle, où de nombreux
filaments relativement courts sont détectés.
On a vu précédemment que la chlorophylle n’est pas tout à fait un traceur passif car les
phénomènes biogéochimiques ont un temps caractéristique similaire à celui de la
dyna-mique à sous-mésoéchelle. Il est alors difficile d’extraire les filaments importants pour la
dynamique et d’effectuer une bonne correction. Il existe une erreur de représentativité
im-portante entre le FSLE issu de la vitesse et l’image chlorophylle. On constate malgré tout
qu’une correction cohérente est apportée à la vitesse et que le processus d’inversion ne
détériore en aucun cas la circulation.
Inversion dans la SST seule
On inverse maintenant l’image de SST seule (figure 7.2b). Sur cette image, les filaments
sont moins nombreux que sur l’image de chlorophylle et les structures frontales sont mieux
marquées. Nos algorithmes de détection des structures frontales un peu rudimentaires
permettent alors une meilleure extraction de la dynamique, comme on peut le voir sur la
figure 7.4b représentant la norme binarisée du gradient du traceur. Le tourbillon situé au
nord et le courant au sud de l’image peuvent être facilement détectés car les gradients
de ces structures sont importants. L’inversion de la SST permet d’améliorer grandement
l’estimation de l’erreur. On a donc corrigé près de la moitié de l’erreur (45%) grâce à cette
méthode d’inversion (voir figure 7.11)
a Vitesse corrigée b FSLE issu de la vitesse corrigée
c Module de l’erreur restante sur la vitesse
corri-gée
Figure 7.11 – Vitesse corrigée en m.s
−1(a), FSLE correspondant en jour
−1(b) et
module de la différence entre la vitesse corrigée et la vitesse vraie (c) pour l’inversion
de l’image SST.
On peut voir sur la figure 7.11c que le tourbillon marqué d’une croix s’est légèrement
recalé vers le nord-est et commence à être assez bien corrigé. De plus, l’écoulement au sud
de l’image entouré d’un cercle est lui aussi partiellement reconstruit. Le FSLE issu de la
vitesse corrigée (figure 7.11b) est effectivement modifié pour être en meilleur accord avec
la structure visible sur l’image SST. La carte du module de l’erreur sur l’estimation de la
vitesse (figure 7.11c) montre aussi une nette amélioration de l’estimation de la circulation
grâce à l’apport des informations SST.
Inversion conjointe des images SST et chlorophylle
On peut maintenant s’intéresser à l’inversion des deux quantités SST et chlorophylle pour
estimer la dynamique, comme cela a été fait dans le chapitre 6 avec les données réelles.
On a vu précédemment que l’erreur sur la correction par rapport à celle sur le premier
estimé est comparable à celle trouvée pour l’inversion de la SST. La vitesse estimée grâce
à l’inversion de la chlorophylle et de la SST (voir la figure 7.12a) et le FSLE correspondant
( 7.12b) sont très similaires à la vitesse et le FSLE estimés lors de l’inversion de la SST
seule (figure 7.11). La carte représentant le module de l’erreur sur la vitesse corrigée (7.12c)
montre une amplitude de correction similaire à celles de l’expérience précédente.
On peut alors comparer plus précisément les résultats de l’expérience 2 et de l’expérience
3 pour mesurer l’apport de la chlorophylle sur l’estimation de la dynamique par rapport
à une inversion de la SST seule. On voit alors sur la figure 7.13a représentant le module
de la différence entre la vitesse corrigée résultant de l’expérience 3 et la vitesse corrigée
résultant de l’expérience 2 que l’apport de l’information chlorophylle sur l’estimation de
la circulation est faible. La figure 7.13b représente la différence entre le module de l’erreur
sur la vitesse corrigée résultant de l’expérience 3 et le module de l’erreur sur la vitesse
cor-rigée résultant de l’expérience 2. Cette figure montre donc l’amélioration de l’estimation
de la dynamique apporté par l’image chlorophylle. Dans les zones bleues (respectivement
jaunes), la différence entre l’erreur sur l’estimation de la circulation provenant de
l’expé-rience 3 et celle provenant de l’expél’expé-rience 2 est négative (respectivement positive). Cela
signifie que l’erreur est donc plus grande (respectivement petite) dans l’expérience 2 que
dans l’expérience 3. Or, on constate sur la figure 7.13b de nombreuses zones bleues qui
correspondent aux endroits où les structures dynamiques sont bien détectées par la
chloro-phylle. L’estimation de la vitesse effectuée grâce aux images SST et chlorophylle est alors
un peu améliorée par rapport à l’estimation de la vitesse effectuée grâce à l’image de la
SST seule.
Dans cet exemple, l’apport important de la chlorophylle par rapport à l’inversion de la
SST seule consiste en l’amélioration de la vitesse de convergence de la fonction coût ainsi
qu’en un enrichissement supplémentaire du signal dynamique.
Inversion de la structure
On a vu grâce à l’étude de la fonction coût et de l’évolution de l’erreur (figure 7.9) que
l’inversion de l’image « structure » donne une bonne correction. On voit sur la carte d’erreur
(figure 7.14c) que la distance entre la vitesse vraie et la vitesse corrigée est maintenant très
faible. La majorité de l’écoulement est bien reconstruit. Le FSLE issu de la vitesse corrigée
a Vitesse corrigée b FSLE issu de la vitesse corrigée
c Module de l’erreur restante sur la vitesse
corri-gée
Figure 7.12 – Vitesse corrigée en m.s
−1(a), FSLE correspondant en jour
−1(b) et
module de la différence entre la vitesse corrigée et la vitesse vraie (c) pour l’inversion
des images chlorophylle et SST.
a Norme de la différence entre les vitesse
esti-mées
b Différence entre les erreurs sur les estimations
de la vitesse
Figure 7.13 – Norme de la différence entre la vitesse corrigée par l’inversion de la
SST et la vitesse corrigée par l’inversion de la SST et de la chlorophylle en m.s
−1(a) et différence entre l’erreur sur la vitesse corrigée par l’inversion de la SST et de
la chlorophylle et l’erreur sur la vitesse corrigée par l’inversion de la SST seule en
m.s
−1(b).
(figure 7.14b) est très similaire à l’image « structure » ainsi qu’au FSLE issu de la vitesse
vraie (figure 7.6a). Sur la figure 7.14a, on constate que le tourbillon au nord (marqué par
une croix sur la vitesse) est décalé vers le nord-est, conformément à ce qui est observé
sur l’image « structure ». La circulation au sud (dans le cercle rose sur la vitesse) est par
contre moins bien corrigée, sans doute parce que les observations traceurs apportent moins
d’informations dans la zone.
On a bien conscience dans l’expérience 4, que l’image structure n’a pas de sens physique,
mais correspond du point de vue des mathématiques à une technique pour améliorer
l’ex-traction des structures dynamiques. Cette image est représentative de la détection des
structures filamentaires dynamiques dans un cas de traceur purement passif et dont l’image
est non bruitée. Cette expérience est d’autant plus intéressante qu’elle met en valeur le fait
que les informations apportées par les structures dynamiques présentes sur les images
tra-ceurs pourraient être grandement améliorés avec des extractions filamentaires de meilleure
qualité.
Conclusion
La validité de la méthode d’inversion des traceurs chlorophylle et SST pour le contrôle
de la circulation océanique est confirmée. L’utilisation d’un modèle de processus couplé
physique-biogéochimique permet d’étudier le comportement de l’inversion des traceurs, en
négligeant les incertitudes sur le lien entre les traceurs et la dynamique, liées aux forçages
externes comme les forçages atmosphériques ou la bathymétrie. Grâce aux sorties de ce
modèle, plusieurs expériences d’inversion ont été testées afin de quantifier l’apport des
informations contenues dans les différents traceurs sur l’estimation de la dynamique. On a
a Vitesse corrigée b FSLE issu de la vitesse corrigée
c Module de l’erreur restante sur la vitesse
corri-gée
Figure 7.14 – Vitesse corrigée en m.s
−1(a), FSLE correspondant en jour
−1(b) et
module de la différence entre la vitesse corrigée et la vitesse vraie (c) pour l’inversion
de l’image structure.
estimé la circulation océanique grâce aux informations contenues dans l’image chlorophylle
seule (expérience 1), dans l’image SST seule (expérience 2) et dans les images de SST et
de chlorophylle (expérience 3) ainsi que dans l’image représentant la fusion des données
dynamiques provenant de la SST et de la chlorophylle (expérience 4). Toutes les expériences
montrent une amélioration de la circulation lors de l’inversion des traceurs. Néanmoins, il
est difficile d’extraire des informations dynamiques pertinentes de l’image chlorophylle car
ce traceur n’est pas toujours passif et les structures filamentaires sont difficiles à détecter.
L’inversion de l’image SST seule donne par contre des résultats assez bons et permet
une correction de la moitié de l’erreur sur la vitesse. L’inversion simultanée des images
SST et chlorophylle montre que les informations dynamiques contenues dans la SST et
dans la chlorophylle ne sont pas redondantes. L’utilisation de l’image chlorophylle en plus
de l’image SST permet d’améliorer un peu l’estimation de la circulation mais surtout
améliore notablement la convergence de la fonction coût. Cette expérience montre donc
la complémentarité des différentes sources d’informations. Il est alors toujours pertinent
d’utiliser toutes les images traceurs disponibles pour contrôler la circulation dynamique.
Cette étude montre aussi les faiblesses de la méthode, que ce soit la difficulté de définir
un sous-espace d’erreur cohérent, l’importance d’avoir une première estimation de la
cir-culation assez proche de la vérité, ou encore la complexité pour extraire des structures
filamentaires générées par la dynamique des images traceurs. L’amélioration de ce dernier
point peut permettre d’augmenter considérablement l’efficacité de la méthode d’inversion.
Le modèle couplé physique-biogéochimie, utilisé pour produire des observations
synthé-tiques et étudier le comportement de l’inversion dans ce chapitre, est très idéalisé car de
nombreux phénomènes océaniques y sont négligés. Néanmoins, il permet de simuler de
ma-nière assez réaliste des processus tourbillonnaires à mésoéchelle et de multiples structures
à sous-mésoéchelle résultant des interactions des ces structures mésoéchelles. A cet égard,
nous pensons qu’il donne une bonne idée de ce qui se passerait dans l’océan réel par des
processus mésoéchelles. Dans la suite, nous essayons d’aller encore plus loin dans la mise
en œuvre réaliste de la méthode et de sa validation. Le but du chapitre suivant est alors
de démontrer la faisabilité de l’inversion des traceurs grâce à un modèle sub-mesoscale
permitting réaliste de la mer des Salomon. Tout comme cela a été fait dans ce chapitre, on
étudie le comportement de l’inversion des traceurs présents dans le modèle. La composante
biogéochimique n’est pas intégrée dans le modèle, les traceurs utilisés dans la suite sont la
SST et la SSS.
Inversion of submesoscale patterns
from a high-resolution Solomon Sea
model : feasibility assessment
Contents
8.1 Introduction . . . 145
8.2 The image inversion method . . . 146
8.2.1 The tracer image . . . 147
8.2.2 The dynamical flow image : FSLE . . . 147
8.2.3 Cost function . . . 148
8.3 Tools and data . . . 149
8.3.1 High resolution model . . . 149
Description . . . 149
Mesoscale and submesoscale activity . . . 150
Turbulence and wavenumber spectrum . . . 150
8.3.2 Tracer images . . . 154
8.4 Definition of the twin experiments . . . 157
8.4.1 True and background velocities . . . 157
8.4.2 Error sub-space . . . 160
8.4.3 Experiments . . . 160
8.5 Results . . . 161
8.5.1 Comparison of structures from tracers and FSLE . . . 161
8.5.2 Inversion of the FSLE . . . 164
8.5.3 Study of the cost functions . . . 165
8.5.4 Results of the different inversions . . . 168
8.6 Conclusion . . . 170
Inversion of submesoscale patterns from a high-resolution Solomon
Sea model: feasibility assessment
L. Gaultier
(1,2), B. Djath
(1,2), J. Verron
(1,2), J. M. Brankart
(1,2), P. Brasseur
(1,2)and
A. Melet
(3)(1)