3.4 Similitudes entre le FSLE et le traceur
3.4.1 Mesurer la qualité de l’image
3.5 Conclusion . . . 57
3.1 Introduction
Dans le chapitre 2, on a étudié la diversité et la complémentarité des observations de la
surface océanique. On dispose notamment de deux types d’observations : d’une part les
mesures de la SSH (et les vitesses géostrophiques correspondantes) à mésoéchelle provenant
de l’altimétrie, d’autre part les images de la SST et de la chlorophylle à haute résolution
provenant des capteurs satellites du visible et de l’infra-rouge. Cette étude vise à
utili-ser conjointement ces deux types d’obutili-servation. Plus précisément, on cherche l’estimation
optimale de la dynamique grâce à l’information image traceur et l’information du flot
dynamique. Pour ce faire, on mesure la distance entre ces deux quantités. Or, comparer
un champ de vitesse avec une image traceur n’est pas chose aisée car ces deux variables
ont des significations physiques très différentes. Une variable intermédiaire est définie afin
d’établir un dialogue entre l’image traceur et les vecteurs vitesses. Des études récentes ont
démontré l’efficacité des outils lagrangiens pour rapprocher les propriétés turbulentes du
flot des structures filamentaires des traceurs. Parmi ces outils, les champs de FTLE
(Finite-Time Lyapunov Exponents) et de FSLE (Finite-Size Lyapunov Exponents) identifient les
variétés stables et instables du fluide.
On construit alors une image de la dynamique grâce aux FSLE ou FTLE, que l’on peut
comparer avec les structures frontales présentes dans l’image du traceur. On peut alors
mesure l’écart entre l’image du flot dynamique (le FSLE ou le FTLE) et l’image structure
des traceurs. Pour comparer des variables similaires, on construit une image de la
dyna-mique grâce aux structures lagrangiennes cohérentes. On peut alors mesurer l’écart entre
l’image du flot dynamique et l’image structure des traceurs.
Ce chapitre a pour but de détailler les stratégies choisies pour identifier une image du flot
dynamique (section 3.2) et une image représentant les structures présentes dans le traceur
(section 3.3). La section 3.4 évoque l’écart intrinsèque entre ces deux images, dues au fait
qu’elles ne représentent pas tout à fait les mêmes phénomènes.
3.2 Les structures Lagrangiennes Cohérentes
3.2.1 Les variétés instables
Le transport des traceurs dans un fluide est fortement dépendant de la topologie des
struc-tures cohérentes du fluide (appeléesLagrangian Coherent Structure, LCS,Haller and Yuan
(2000)). Ces structures agissent comme des barrières de transport et délimitent des régions
de tourbillons, étirement ou contraction du traceur. Les définitions et les études de ces
structures sont nombreuses depuis quelques années (Wiggins, 2005;Mancho et al., 2004).
En supposant un champ de vitesse stationnaire, on peut détecter les points hyperboliques
du flot (intersections entre les régions de convergence et de divergence) en regardant les
vitesses. Haller (2011) a défini des critères quantitatifs et robustes pour déterminer ces
points hyperboliques. En pratiques, ils sont souvent déterminés en étudiant les lignes de
maximum de FTLE ou FSLE (Haller, 2001b; Shadden et al., 2005; Mathur et al., 2007).
Ces points sont particulièrement importants pour la formation de structures filamentaires.
Effectivement, comme le montre Lehahn et al.(2007), un traceur passif positionné proche
à la variété stable du point), et est étiré le long de la direction de divergence (variété
in-stable). Le traceur s’approche du point hyperbolique en s’alignant le long de la ligne de
divergence sans la traverser, les variétés instables des points hyperboliques agissent alors
comme des barrières de transport et contrôlent la formation des fronts (voir figure 3.1).
Figure3.1 – Variété stable et instable sur la figure de gauche, étirement d’un traceur
passif par la variété instable sur la figure de droite. Image extraite de Lehahn et al.
(2007).
Dans le cadre d’un champ de vitesse non stationnaire, la détermination des barrières de
transport est possible si la vitesse de propagation des structures tourbillonnaires est
infé-rieure aux vitesses présentes dans le tourbillon. Cela est le cas dans la dynamique océanique
et on peut détecter les barrières de transport grâce aux LCS. Au fur et à mesure que la
variété évolue, le traceur est étiré et transporté. Dans un cadre instationnaire, le
mouve-ment de la variété instable permet l’intrusion de traceurs dans d’autres régions et contrôle
ainsi l’échange et le mélange.
Les FTLE (Finite-Time Lyapunov Exponents) ou FSLE (Finite-Size Lyapunov Exponents)
sont souvent utilisés pour déterminer les LCS. Ces outils commencent à être largement
uti-lisés par la communauté des géosciences, parce qu’ils sont très adaptés pour des problèmes
de dimension finie comme c’est le cas pour l’étude de données discrétisées et sur un domaine
fini. D’Ovidio & al se sert notamment de ces outils afin étudier les mécanismes dynamiques
qui impactent la présence et le comportement de différents organismes marins. Il a ainsi
utilisé les FSLE afin d’étudier les interactions entre la dynamique et la biogéochimie, et
a pu montrer que les différentes espèces de phytoplancton s’organisent selon des motifs
façonnés par les filaments à sous-mésoéchelle (d’Ovidio et al., 2010). On a choisi pour cette
étude de travailler avec les FSLE, dans la continuité scientifique des recherches publiées
par d’Ovidio et al. (2004),d’Ovidio et al.(2009),Lehahn et al.(2007).
3.2.2 Finite-Time Lyapunov Exponent, les FTLE
Une étude préliminaire a été effectuée dansTitaud et al.(2011) sur l’exploitation du FTLE
de l’inversion d’images est menée grâce à une configuration idéalisée à haute résolution
couplé physique biogéochimie d’un petit domaine dans l’océan Atlantique Nord (Krémeur
et al., 2009). La stratégie d’assimilation des données images est alors présentée. La partie
observée de la fonction coût peut être définie de deux façons : soit on mesure la distance
entre l’image FTLE et les structures filamentaires visibles sur l’image traceur (la norme du
gradient du traceur), soit on mesure la distance entre les FTLV et le gradient de l’image
traceur. Une étude de sensibilité de la fonction coût montre alors la pertinence de
l’utili-sation des FTLE et des FTLV pour l’assimilation d’image. Ce travail précurseur a permis
de poser les bases de l’assimilation de données images dans les modèles numériques pour le
contrôle de la dynamique. On a choisi de reprendre une stratégie similaire pour l’inversion
des données images en utilisant comme outil lagrangien le FSLE à la place du FTLE. Ce
choix est motivé par les travaux de d’Ovidio et al.(2009),Lehahn et al.(2007), qui montre
une très bonne adéquation entre les FSLE et les structures dynamiques visibles sur les
traceurs chlorophylle et SST.
3.2.3 Finite-Size Lyapunov Exponent, les FSLE
Définition des Exposants de Lyapunov
Le concept d’exposant de Lyapunov a été introduit par Aleksandr Lyapunov. Le
coeffi-cient de Lyapunov mesure le taux de séparation de trajectoires initialement proches. Deux
particules initialement séparées d’une distance infinitésimale |δ
0| sont supposées diverger
de façon exponentielle et seront donc distantes de |δx(t)| ≈e
λt|δ
0|au bout d’un temps t.
L’exposant de Lyapunov est défini comme le taux exponentiel de séparation des particules,
moyenné sur un temps infini. Dans des cas réalistes comme dans l’océan, il n’est pas
pos-sible d’intégrer les trajectoires sur un temps infini. La notion d’exposants de Lyapunov de
taille finie, les FTLE et les FSLE ont alors été introduites. Le FSLE mesure l’inverse du
temps mis par les particules pour être séparées d’une distance fixe δ
f. Le FTLE est aussi
un inverse du temps mais il varie en fonction de la distance finale entre les particules qui
ont été advectées pendant un temps fixé au préalable. On détaille dans la section suivante
le calcul pratique du FSLE, qui est la quantité utilisée pour notre étude.
Calcul pratique des FSLE
Soit x(t) la position d’une particule lagrangienne. Cette particule se situe en x
0à t=t
0.
Elle est advectée par un fluide de vitesseu(x,t)(la vitesse varie avec le temps) pendant une
durée maximale deT (entret
0etT
o+T), sur le domaineΩ. On note aussix(t) =x(t;x
0,t
0)
la position de la particule au temps t(t∈[t
0, t
o+T]), qui était à la position initialex
0au
temps t
0et a été advectée par la vitesseu(x,t). On a alors le système suivant :
Dx(t)
Dt =u(x(t), t),
x(t
0) =x
0(3.1)
avec
D Dt=
∂t∂+ (u.∇)la dérivée lagrangienne.
peut alors écrire pour t∈[t
0, t
o+T]:
Dδx(t)
Dt =∇u(x(t),t).δx(t),
δx(0) =δ
0, x(0) =x
0(3.2)
Le FSLE représente l’inverse du temps mis par le fluide pour s’étirer de la distance δ
0à la distance δ
f. Pour le mesurer, on calcule alors le tenseur de Cauchy-Green avec les
différentes particules :
∆ =h∇Φ
t0+Tt0
(x
0)i∗h∇Φ
t0+Tt0