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Individu décédé

I. Résultats de l’hyperoxalurie primitive type 1 1. Identification de mutations

Le diagnostic moléculaire a été réalisé en premier temps par le séquençage direct des exons sélectionnés 7, 5 et 4 respectivement pour étudier les mutations fréquentes: la mutation Maghrébine, p.Ile244Thr, la mutation arabe, p.Gly190Arg et la mutation de la population caucasienne p.Gly170Ala. Chez les patients hétérozygotes et homozygotes normaux pour les mutations testées, nous avons effectué une analyse moléculaire des exons restants du gène AGXT.

L'analyse des régions codantes et des séquences introniques du gène AGXT ont montré la présence de quatre mutations différentes chez 36 patients (Tableau 11). La mutation c.731T>C (p.Ile244Thr) est la plus fréquente dans notre cohorte (26 homozygotes et 7 patients hétérozygotes). Le séquençage de l'exon 4 et 5 était normal. La mutation c.331C>T (p.Arg111*) a été retrouvée à l'état homozygote dans l'exon 2 chez un patient, cette mutation non-sens produit un changement d’acide aminé Arginine en un codon stop (p.Arg111*). Deux délétions ont été aussi détectées: la première délétion c.976delG (p.Val326Tyrfs*15) a été retrouvée chez deux patients à l’état homozygote et quatre patients à l’état hétérozygote, la deuxième délétion la c.33delC (p.Lys12fs*34) a été identifiée chez un patient à l’état hétérozygote.

Les résultats du séquençage ont montré l'association entre les trois polymorphismes intragéniques suivants, rapportés précédemment comme l'allèle mineur: le premier est un changement dans l’allèle c.32C> T (p.Pro11Leu) qui code pour la leucine au niveau du codon 11 au lieu de la proline. Les autres changements de séquence sur l'allèle mineur étaient la présence de la duplication de 74 pb dans l'intron 1 en plus des substitutions IVS1 + 16A> G, c.166-56C> T, et c.1020A> G. Nous avons également trouvé d’autres polymorphismes dans l'exon 10: c.976G> A et c .1020A>G (Tableau 10).

Chez 19 de nos patients, aucune mutation n'a été détectée par séquençage de Sanger du gène AGXT.

I.2. Prévalence de la mutation récurrente p.Ile244Thr du gène AGXT au Maroc

La fréquence des hétérozygotes pour la mutation p.lle244Thr était 4/250 (1,6%) et la

fréquence de l'allèle muté était de 4/500 (0,8%). Et selon la loi d’Hardy–Weinberg on a trouvé: 1/15625 + 0.0065 × 0.8/100 × 99.2/100 =1/8652.

La proportion des homozygotes pour la mutation récurrente p.lle244Thr chez les patients atteints d’HOP1 était de 74%, étant donné que les patients non mutés auraient soit l’HOP1 sans

mutation détectée par séquençage de Sanger (HOP1 due à des réarrangements du gène AGXT) ou auraient probablement un autre sous-type d’HOP (l’analyse du glycolate urinaire qui distingue les deux types n’est pas disponible au Maroc).

Ensuite, la prévalence estimée de l’hyperoxalurie primitive type 1 considérant les deux hypothèses serait comprise entre 1/7267 à 1/6264.

Tableau 10: Résultats de l'analyse moléculaire du gène AGXT chez les patients HOP1

Marocains.

Variant Position Exon/Intron cDNA Protéine

Mutation rs121908525 Ch2 :241814576 Exon7 c.731T>C p.lle244Thr

rs180177202 Ch 2:241808752 Exon2 c.331C>T p.Arg111* rs180177205 Ch 2:241808315 Exon 1 c.33delC p.Lys12Argfs*34 rs180177301 Ch 2:241817472 Exon 10 c.976delG p.Val326Tyrfs*15

Polymorphisme rs34116584 Ch2:241808314 Exon1 c.32C>T p.Pro11Leu

rs66494441 Ch2:241808463 intron 1 IVS1+16A>G rs72001310 Ch2: entre 241808461 et 241808462 intron1 IVS1+74 bp rs114401766 Ch2:241808531 Intron1 c.166-56C>T rs180177178 Ch2:241808540 Intron 1 c.166-47T>C

rs4426527 Ch2:241817516 Exon10 c .1020A>G p.Ile340Met rs115057148 Ch2:241817472 Exon10 c.976G>A p.Val326Ile

Normal (1)

Homozygote (2)

Hétérozygote (3)

Figure 29: Electrophorégrammes de la mutation c.731T>C (p.lle244Thr) détectée par

séquençage de l’exon 7 du gène AGXT.

(1): Homozygote normal pour la mutation c.731T>C. (2): Homozygote muté pour la mutationc.731T>C. (3): hétérozygote pour la mutation c.731T>C.

Normal (1)

Homozygote (2)

Hétérozygote (3)

Figure 30: Electrophorégrammes de la mutation c.976delG (p.Val326Tyrfs*15) détectée par

séquençage de l’exon 10 du gène AGXT.

(1) Homozygote normal pour la mutation c.976delG. (2) Homozygote muté pour la mutationc.976delG. (3) : hétérozygote pour la mutation c.976delG.

Normal (1)

Homozygote (2)

Figure 31: Electrophorégrammes de la mutation c.331C>T (p.Arg111*) détectée par

séquençage de l’exon 2 du gène AGXT.

Normal (1)

Hétérozygote (2)

Figure 32: Electrophorégrammes de la mutation c.33delC (p.Lys12Argfs*34) détectée par

séquençage de l’exon 1 du gène AGXT.

P a ti en t Ex 1 Ex 2 Ex 3 Ex 4 Ex 5 Ex 6 Ex 7 Ex 8 Ex 9 Ex 10 Ex 11 HTZ/ HMZ Polymorphisme Exon1 c.32C> T Intron1 c.165+16A >G Intron 1 c.165+84C >T Intron1 c.165+93 T>C Dup.74pb P1 p.Ile244Thr HMZ T/T G/G T/T C/C +/+ P2 p.Ile244Thr HTZ C/T A/G C/T T/C +/- P3 p.Ile244Thr HMZ T/T G/G T/T C/C +/+ P4 c.33delC p.Lys12fs p.Ile244Thr HTZ C/T A/G C/T T/C +/- P5 p.Ile244Thr HMZ T/T G/G T/T C/C +/+ P6 p.Ile244Thr HTZ C/T A/G C/T T/C +/- P7 p.Ile244Thr HMZ T/T G/G T/T C/C +/+ P8 p.Ile244Thr c.976delG p.Val326fs HTZ C/T A/G C/T T/C +/- P9 p.Ile244Thr HMZ T/T G/G T/T C/C +/+ P10 p.Ile244Thr HMZ T/T G/G T/T C/C +/+ P11 p.Ile244Thr HMZ T/T G/G T/T C/C +/+ P12 p.Ile244Thr HMZ T/T G/G T/T C/C +/+ P13 p.Ile244Thr HMZ T/T G/G T/T C/C +/+ P14 p.Ile244Thr HMZ T/T G/G T/T C/C +/+

P a ti en t Ex 1 Ex 2 Ex 3 Ex 4 Ex 5 Ex 6 Ex 7 Ex 8 Ex 9 Ex 10 Ex 11 HTZ/ HMZ Polymorphisme Exon 1 c.32 C>T Intron1 c.165+16 A>G Intron 1 c.165+84 C>T Intron 1 c.165+ 93 T>C Dup.74pb P15 c.976delG p.Val326fs HMZ T/T G/G T/T C/C +/+ P16 p.Ile244Thr HMZ T/T G/G T/T C/C +/+ P17 p.Ile244Thr HMZ T/T G/G T/T C/C +/+ P18 p.Ile244Thr HMZ T/T G/G T/T C/C +/+ P19 p.Ile244Thr HMZ T/T G/G T/T C/C +/+ P20 p.Ile244Thr HMZ T/T G/G T/T C/C +/+ P21 p.Ile244Thr HMZ T/T G/G T/T C/C +/+ P22 p.Ile244Thr HMZ T/T G/G T/T C/C +/+ P23 p.Ile244Thr HMZ T/T G/G T/T C/C +/+ P24 N N N N N p.Ile244Thr N N N N HTZ C/T A/G C/T T/C +/- P25 p.Ile244Thr HMZ T/T G/G T/T C/C +/+ P26 p.Ile244Thr HMZ T/T G/G T/T C/C +/+ P27 p.Ile244Thr HMZ T/T G/G T/T C/C +/+

P a ti en t Ex 1 Ex 2 Ex 3 Ex 4 Ex 5 Ex 6 Ex 7 Ex 8 Ex 9 Ex 10 Ex 11 HTZ/ HMZ Polymorphisme Exon1 c.32C> T Intron1 c.165+16A >G Intron 1 c.165+84C >T Intron 1 c.165+ 93 T>C Dup.74 pb P28 N c.976delG p.Val326fs HMZ T/T G/G T/T C/C +/+ P29 p.Ile244Thr HMZ T/T G/G T/T C/C +/+ P30 p.Ile244Thr c.976delG p.Val326fs HTZ C/T A/G C/T T/C +/- P31 p.Ile244Thr HMZ T/T G/G T/T C/C +/+ P32 p.Ile244Thr c.976delG p.Val326fs HTZ C/T A/G C/T T/C +/- P 33 p.Ile244Thr HMZ T/T G/G T/T C/C +/+ P34 c.331C>T p.Arg111X HMZ C/C A/A C/C T/T -/- P35 N N N N N p.Ile244Thr N N N N HTZ C/T A/G C/T T/C +/- P36 p.Ile244Thr HMZ T/T G/G T/T C/C +/+

2-Le résultat du séquençage des exons 1, 6 et 12 du gène ATP6V1B1

L'analyse moléculaire chez nos six patients a permis d’identifier une nouvelle mutation frameshift c.1169dupC (p.Ser391Phefs*51) au niveau de l'exon 12 dans la famille 1 (Figure 33), et la mutation frameshift déjà décrite c.1155dupC (p.Ile386Hisfs*56) dans les familles 2 et 3. Les quatre patients étaient homozygotes et leurs parents étaient hétérozygotes pour ces mutations.

La mutation: c.1169dupC (p.Ser391Phefs*51)

La nouvelle mutation c.1169dupC (p.Ser391Phe*51) frameshift change l'acide aminé 391 de la sérine à la phénylalanine induisant ainsi un décalage du cadre de lecture dont résulte un codon stop prématuré, ce qui produit une protéine tronquée en position 51.

Normal (1)

Homozygote (2)

Hétérozygote (3)

Figure 33: Electrophorégrammes de la mutation c.1169dupC (p.Ser391Phefs*5) détectée par

séquençage de l’exon 12 du gène ATP6V1B1.

(1): Homozygote normal pour la mutation c.1169dupC. (2): Homozygote muté pour la mutationc.1169dupC. (3): hétérozygote pour la mutation c.1169dupC.

La mutation: c.1155dupC (p.Ile386Hisfs*56)

C’est une duplication de la cytosine en position 1155 responsable d’un décalage du cadre de lecture et de l’introduction d’un codon stop, provoquant l’arrêt prématuré de la synthèse protéique (en position 386 de la chaîne d’acides aminés) (Figure 34).

Normal (1)

Homozygote (2)

Figure 34: Electrophorégrammes de la mutation c.1155dupC (p.Ile386Hisfs*56) détectée par

séquençage de l’exon 12 du gène ATP6V1B1.

1ère Partie de l’étude: les différentes mutations du gène AGXT et la prévalence de l’hyperoxalurie primitive type 1 dans la population marocaine.

L’hyperoxalurie primitive type 1 est une maladie génétique rare caractérisée par une hétérogénéité phénotypique. Elle reste sous-diagnostiquée en raison de la grande variabilité de sa présentation clinique et de son âge d'apparition. Sa prévalence estimée varie de 1 à 3/106 en Europe et en Amérique du Nord. L'incidence de l’HOP1 est faible dans ces populations vu leur faible taux de consanguinité. Elle est comprise entre 1,05/106 à 2,9/106 en France, en Suisse et aux Pays-Bas. Toutefois, une fréquence augmentée d’HOP1 a été signalée dans les pays du Moyen-Orient en raison du taux élevé de consanguinité dans ces populations. Elle a été estimée à 5,5/106 dans la population tunisienne (81).

L'épidémiologie de l’HOP1 au Maroc est mal documentée par rapport à ses voisins (Tunisie et Algérie), probablement à cause d'un sous diagnostic de la maladie et le manque d'études génétiques. Il n’existe pas de données disponibles à ce jour sur la prévalence de l’HOP1 au Maroc. Sur la base de cette étude, la prévalence de l’HOP1 au Maroc a été estimée entre 1/7267 et 1/6264. Cette prévalence classe l’HOP1 parmi les maladies les plus fréquentes au Maroc. Ce taux parait supérieur à celui d'autres pays ayant un taux élevé de consanguinité comme la Tunisie. Ceci pourrait être expliqué par le fait que l'étude tunisienne a été réalisée en utilisant l'épidémiologie classique sans tenir compte du spectre mutationnel du gène AGXT chez les tunisiens atteints d’HOP1, alors que dans notre étude, la prévalence a été calculée à l'aide d'outils épidémiologiques tenant compte des mutations du gène AGXT chez les patients marocains.

Jusqu’à ce jour, aucune étude n'a été réalisée concernant la pathologie moléculaire du gène AGXT dans la population marocaine native. Chez nos patients, le diagnostic de l’HOP1 a été initialement basé sur les résultats cliniques, un taux d’oxalate élevé dans le sang et les urines, et la présence d’oxalate de calcium monohydraté pur (whewellite) par analyse spectrophotométrique des calculs rénaux. Nous notons cependant que dans notre étude, les sous-types de l’HOP n'ont pas été identifiés et ce à cause de l’indisponibilité de l'analyse des Glycolate et Glycerate urinaires, deux indicateurs biochimiques qui servent à distinguer les deux premiers types d’hyperoxalurie primitive, au Maroc.

Dans notre cohorte de 55 patients, nous avons d'abord choisi d’analyser l’exon 7 du gène AGXT par séquençage direct. Cette stratégie nous a permis d'identifier une cause génétique chez 33 patients dont 26 à l’etat homozygote, deux à l’etat hétérozygot et 5 à l’etat hétérozygote

composite avec les mutations (c.976delG et c.33delC), (52/70; 74%). Cette fréquence est considérablement élevée, comparée aux autres fréquences rapportées dans des études précédentes concernant d'autres populations tels la Tunisie, l'Espagne et l'Afrique du Nord.

Par la suite, nous avons également pu identifier deux autres mutations du gène AGXT: deux délétions d'une base induisant un décalage du cadre de lecture avec l’apparition d’un codon stop prématuré, ce qui entraine l’apparition d’une protéine tronquée. La première était la c.33delC au niveau de l’exon 1, trouvée à l'état hétérozygote chez un patient. La seconde mutation était la c.976delG, trouvée à l'état hétérozygote chez quatre patients non apparentés et à l’état homozygote chez deux autres patients (4/70; 6%). Nous avons remarqué que cette deuxième mutation a été spécifique aux patients de la région Casablanca-Settat, suggérant ainsi son exploration en premier lieu chez les patients de cette région. Ces deux délétions à l’état hétérozygote composite étaient associées à la mutation p.lle244Thr (c.731T> C).

Une autre mutation non-sens, la c.331C>T, a été identifiée chez un patient à l'état homozygote. Elle entraine le remplacement de l'arginine par un codon stop prématuré. L'analyse de prédiction par utilisation des différents outils bioinformatiques (SIFT, Polyphen, Mutation taster), a montré que cette mutation non-sens devrait conduire à une protéine tronquée (p.Arg111*). Cette mutation a été associée à l’haplotype majeur, défini par les allèles les plus fréquents des polymorphismes du gène AGXT. L'identification de cette mutation augmente le nombre de génotypes impliqués dans l’HOP1 chez notre population et confirme l'hétérogénéité moléculaire de la maladie au Maroc.

Dans notre série nous avons identifié six variants polymorphes (tableau 3). Quatre de ces variants sont introniques (intron 1): IVS1+16A>G, IVS1+74 pb, 56C>T, et c.166-47T>C. Deux autres variants ont été détectés dans l'exon 10, c.1020A>G (p.Ile340Met) et c.976G>A (p.Val326Ile).

En plus de ces six variants, nous avons trouvé un polymorphisme, le c.32C>T, qui modifie l'acide aminé cyclique la proline 11 en acide aminé aliphatique la leucine. Ce polymorphisme C.32C>T (p.Pro11Leu) influe une région hautement conservée N-terminale de la protéine AGT, ce qui est important dans le processus de dimérisation et de stabilisation des deux sous-unités protéiques. Cette substitution, associée à la mutation p.lle244Thr, est prévue altérer considérablement la fonction des protéines (étude in silico par le logiciel de prédiction PolyPhen-2 avec un score de 1). De plus, ce polymorphisme semble apparaître dans une région hautement conservée dans toutes les espèces analysées par l'alignement des protéines de l'AGT chez plusieurs espèces. Les études fonctionnelles ont également montré que ce variant a une

répercussion phénotypique; il réduit l’activité catalytique de l’AGT d’un facteur 3 (76), et à l’état homozygote (4 % de la population caucasienne), et il est susceptible de rediriger 5 % de la protéine dans les mitochondries, facilitant ainsi les effets délétères des mutations les plus communes retrouvées dans les HOP1 (76).

Parmi les 19 patients restants, 5 ont bénéficié d’un séquençage total du gène AGXT et aucune mutation n’a pu être détectée. Ce résultat ne peut pas exclure le diagnostic d’HOP et pourrait être expliqué soit par le fait que ces patients ont un autre sous-type d’HOP ou que la maladie soit due à de grands réarrangements du gène AGXT, indétectables par séquençage Sanger.

Le diagnostic moléculaire de l’HOP1 chez nos patients leur a permis de recevoir systématiquement des mesures thérapeutiques conservatrices, comprenant l'hydratation, la prise d’inhibiteurs de cristallisation et la pyridoxine. Il a été signalé que l’administration de fortes doses thérapeutiques de la vitamine B6 chez les patients sensibles à la pyridoxine, induit une amélioration de la fonction rénale et une diminution des taux plasmatique et urinaire de l’oxalate (148). Une fois la capacité rénale pour la clairance des oxalates est dépassée, les dépôts d’oxalate de calcium deviennent importants et peuvent engager le pronostic vital sauf en cas de transplantation rénale ou hépatique, d’où l’intérêt d’un traitement précoce des patients présymptomatiques afin de prévenir la survenue d’une insuffisance rénale terminale.

2ème Partie de l’étude: Aspects cliniques et moléculaires des familles marocaines avec acidose tubulaire rénale distale et surdité: identification d’une nouvelle mutation du gène

ATP6V1B1.

Le rein joue un rôle majeur dans la régulation et le maintien de l’équilibre acidobasique dans l’organisme. Ceci est assuré grâce à deux mécanismes: la réabsorption des bicarbonates et l’excrétion des protons au niveau distal par l'intermédiaire du tube collecteur des néphrons. Au niveau apical, la pompe H+-ATPase des cellules α-intercalaires est composée de multiples sous-unités et responsables de l'acidification de l'urine. L’acidose tubulaire rénale distale est caractérisée par une acidose métabolique hyperchlorémique résultant d’un déficit de l’excrétion rénale de protons au niveau de la partie distale du néphron.

L’acidose tubulaire rénale distale (ATRd) est un groupe hétérogène de maladies génétiques caractérisé par une défaillance du processus d'acidification de l'urine conduisant à une sévère acidose hyperchlorémique. Les formes autosomiques récessives d’ATRd constituent des entités rares d’une prévalence inconnue (105). Les deux gènes majeurs impliqués sont ATP6V1B1 et ATP6V0A4 (107). La présence ou l'absence d’une altération de l’audition est le principal critère phénotypique pour corréler la pathologie à l'un des deux gènes et diriger ainsi l’analyse moléculaire.

L'analyse moléculaire chez nos six patients a permis d’identifier une nouvelle mutation frameshift c.1169dupC (p.Ser391Phefs*51) au niveau de l'exon 12 dans la famille 1, et une mutation frameshift déjà décrite c.1155dupC (p.Ile386Hisfs*56) dans les familles 2 et 3. Les quatre patients étaient homozygotes et leurs parents étaient hétérozygotes pour ces mutations. La nouvelle mutation frameshift change l'acide aminé 391 de la sérine à la phénylalanine induisant un décalage du cadre de lecture dont résulte un codon stop prématuré, ce qui produit une protéine tronquée en position 51. Ce variant n'a pas été trouvé dans 40 exomes marocains (base de données interne du département de Génétique Médicale), ni dans d’autres bases de

données, telles: des mutations du génome humain HGMD;

(Http://www.hgmd.cf.ac.uk/ac/index.php), Exome variant server

(http://evs.gs.washington.edu/EVS) et Exome aggregation consortium (http://exac.broadinstitute.org). Les données obtenues en utilisant Expacy, Mutation taster Phyre2 bioinformatics soft ont apporté un argument supplémentaire à l'effet pathogène de la nouvelle mutation. Chez les deux familles restantes nous n’avons pas trouvé de mutations au

niveau des exons étudiés du gène ATP6V1B1 (exons 1,6 et 12), suggérant le séquençage de la totalité du gène ATP6V1B1 et éventuellement le gène ATP6V0A4

A l’exception d’un seul cas, tous les patients rapportés dans notre cohorte ont présenté la forme classique de la maladie définie par un retard de croissance, une acidose métabolique sévère, une hypokaliémie, un pH urinaire alcalin avec une surdité neurosensorielle depuis la petite enfance.

Nous avons utilisé avec succès la stratégie diagnostique basée sur la présence de surdité neurosensorielle pour choisir le gène à analyser en premier lieu entre les deux gènes ATP6V1B1 et ATP6V0A4, responsables de la forme autosomique récessive. Ensuite, avant le séquençage de tous les exons codant du gène ATP6V1B1, nous avons choisi d’amplifier l’exon 12 de ce gène en premier, car la mutation la plus récurrente la c.1155dupC chez les patients d'Afrique du Nord a été décrite dans cet exon. En effet, la mutation frameshift c.1155dupC (p.I386Hfs*56) a été identifiée dans deux familles parmi les cinq étudiées (familles 2 et 3). Cette insertion conduit à un décalage du cadre de lecture et une terminaison prématurée de la traduction de la protéine codée à la position 441. La mutation p.I386Hfs*56 a déjà été décrite chez un patient marocain avec ATRd et surdité et rapportée avec une forte prévalence dans la population Nord-Africaine suggérant un effet fondateur. Aussi, une étude récente a démontré que la mutation p.Ile386Hisfs*56 du gène ATP6V1B1 est due à un ancêtre commun en Tunisie. Toutefois, une autre étude réalisée chez six familles avec la mutation p.I386Hfs*56 a trouvé que les patients présentaient des haplotypes différents. Ceci pourrait être expliqué par l’ancienneté de la mutation fondatrice. En effet, l'haplotype qui lui correspond semble avoir

divergé suite à des événements de recombinaison ultérieurs. Il semble également possible que le codon Ile386 est une mutation hotspot potentielle due à une succession de sept résidus cytosine en cette position. L'identification de la nouvelle mutation p.Ser391Phefs*51 a également permis d'enrichir le spectre mutationnel d’ATRd au Maroc.

La présence des deux mutations p.Ser391Phefs*51 et p.Ile386Hisfs*56 au niveau de l'exon 12 du gène ATP6V1B1 peut faciliter et aider le diagnostic génétique rapide de l’ATRd dans la population marocaine.