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Résultats des estimations

Dans le document UNIVERSITÉ D ORLÉANS THÈSE (Page 77-82)

1.4. Le rôle des préconditions dans l’adoption du ciblage d’inflation au sein des économies émergentes : une évaluation empirique économies émergentes : une évaluation empirique

1.4.3. Résultats des estimations

Le modèle que nous estimons est un modèle probit binaire à effets aléatoires individuels. Nous sommes ici contraints d’utiliser un modèle à effets aléatoires du fait que, par définition, les économies de notre groupe de contrôle n’ont pas connu d’événement (c.à.d.

adoption du ciblage d’inflation) au cours de la période considérée. Pour ces pays, la variable endogène IT est donc par conséquent égale à 0 sur l’ensemble de la période. Comme nous le montrerons ci-dessous, l’utilisation d’un tel modèle repose toutefois sur une hypothèse relativement forte, impliquant que nos résultats devront être interprétés avec une relative précaution.

Formellement, comme tout modèle dichotomique, le modèle probit se présente sous la forme suivante :

ܫܶ௜௧ ൌ ൜ͳݏ݅ܫܶ௜௧כ ൐ Ͳ

Ͳݏ݅ܫܶ௜௧כ ൑ ͲሺͳǤͶሻ où la variable latente ܫܶ௜௧כ est définie par :

65 ܫܶ௜௧כ ൌ ߙ ൅ ߚܺ௜௧൅ ߝ௜௧ሺͳǤͷሻ

avec ߝ௜௧ ൌ ߦ ൅ ߟ௜௧ et ൬ ߦߟ௜௧൰ ̱ܰ ቆͲǡ ൬ߪ Ͳ Ͳ ͳ൰ቇ

où ߝ௜௧ correspond au résidu total, qui se décompose ici en un effet spécifique individuel ߦ, qui représente l’ensemble des facteurs inobservables caractérisant chaque pays, et en un processus stochastique ߟ௜௧, qui désigne la composante du résidu total orthogonale aux effets individuels.

Etant donnés (1.4) et (1.5), la probabilité qu’un pays adopte et poursuive une stratégie de ciblage d’inflation à la période t peut alors être réécrite de la manière suivante :

ܲݎሺܫܶ௜௧ ൌ ͳሻ ൌ ܲݎሺߙ ൅ ߚܺ௜௧൅ ߝ௜௧ ൐ Ͳሻ

ൌ ܲݎሺെߝ௜௧ ൏ ߙ ൅ ߚܺ௜௧

ൌ ߔሺߙ ൅ ߚܺ௜௧ሻሺͳǤ͸ሻ

où Φ(.) correspond à la fonction de répartition de la loi normale centrée réduite26.

Avant de présenter et de discuter les résultats de nos estimations, nous tenons à souligner que ces derniers doivent être interprétés avec précaution pour deux raisons principales. La première est liée au fait que l’utilisation d’un modèle à effets aléatoires repose sur l’hypothèse que les effet spécifiques individuels ߦ, censés capter et contrôler l’hétérogénéité inobservable, ne sont pas corrélés aux variables explicatives du modèle. Dans le cas où cette hypothèse n’est pas respectée, c’est-à-dire dans le cas où les variables explicatives sont corrélées au terme d’erreur, l’estimateur du maximum de vraisemblance est biaisé. Or, dans la réalité, ces effets spécifiques ont de grandes chances d’être corrélés aux variables explicatives du modèle, en particulier les variables structurelles. Une autre source potentielle d’endogénéité peut provenir du fait que l’adoption du ciblage d’inflation a pu impacter les variables macroéconomiques et institutionnelles considérées dans le modèle.

Toutefois, contrairement aux travaux précédents sur données de panel, nous avons pris soin de tenir compte de ce possible biais en retardant d’une période le taux d’inflation et le taux de croissance du PIB réel par tête, deux des principales variables considérées ici ayant pu être fortement impactées par l’adoption du ciblage d’inflation.

26 La fonction de répartition de la loi normale centrée réduite s’écrit : ߔሺݓሻ ൌ ׬ିஶ ξଶగ ݁ି೥మ݀ݖ

66 Différentes spécifications du modèle probit sont testées successivement dans le tableau 1.6. La spécification (1), dite « de base », inclut l’ensemble des variables macroéconomiques et institutionnelles relatives aux préconditions à l’adoption du ciblage d’inflation. La spécification (2) inclut quant à elle les variables de contrôle discutées précédemment. Puis, dans les spécifications (3) et (4), nous remplaçons successivement le crédit domestique au secteur par les deux indicateurs complémentaires de développement financier que sont le rapport de l’agrégat monétaire M2 sur le PIB et la capitalisation boursière. L’indicateur d’indépendance de jure de la banque centrale (CWN Index) est ensuite pris en compte, séparément (spécification 5) puis conjointement (spécification 6) avec l’indicateur d’indépendance de facto (TOR_5). Enfin, dans la dernière colonne du tableau 1.6 (spécification 7), nous considérons la dette externe à la place de la dette publique totale afin d’analyser dans quelle mesure le niveau d’endettement en devises étrangères a pu jouer un rôle dans le choix des pays émergents d’adopter le ciblage d’inflation.

67 Tableau 1.6. Résultats des estimations probit sur données de panel pour la période 1990-2007

(1) (2) (3) (4) (5) (6) (7) l’ensemble des variables économiques et institutionnelles considérées dans le cadre de cette étude sont significatives et ont le signe attendu. Ainsi, nous trouvons une relation négative entre l’inflation, la dette publique, la dette externe, et la probabilité qu’un pays fasse le choix d’adopter le ciblage d’inflation. Les résultats concernant l’inflation semblent indiquer que les

68 économies émergentes aient fait le choix d’adopter le ciblage d’inflation après avoir mis en œuvre une politique active de désinflation visant à ramener l’inflation à un niveau relativement faible. En ce qui concerne la dette publique, les résultats que nous obtenons sont conformes à ceux trouvés par Samaryna et de Haan (2011), et confirment l’argument avancé par Gonçalves et Carvalho (2008a) selon lequel les pays relativement les moins endettés et les moins dépendants du financement monétaire sont également ceux les plus enclins à adopter le ciblage d’inflation. En outre, la relation inverse entre le degré d’endettement extérieur et la probabilité qu’un pays adopte le ciblage d’inflation conforte l’argument énoncé dans la première section de ce chapitre, à savoir qu’un fort endettement en devises étrangères peut s’avérer potentiellement risqué pour la stabilité du système bancaire et financier en cas de forte dépréciation du change.

Cette vulnérabilité du système bancaire et financier aux fluctuations du change est d’autant plus forte que la banque centrale ne cible pas le taux de change. Or, comme l’indiquent les résultats, le degré de flexibilité du change et la probabilité d’adopter le ciblage d’inflation sont reliés positivement, suggérant une relative flexibilité du change au sein des pays émergents cibleurs d’inflation. Ce résultat, qui sera approfondi dans le dernier chapitre de cette thèse, doit toutefois être interprété avec précaution, du fait que nombre d’économies de notre groupe de contrôle sont en régime de changes fixes. En ce qui concerne l’indépendance de la banque centrale, les résultats montrent une relation respectivement négative et significative entre le taux de rotation des gouverneurs et la probabilité d’adoption du ciblage d’inflation, et positive et significative entre l’indicateur CWN et cette même probabilité. Ce résultat conforte l’idée que l’indépendance de la banque centrale est un pré-requis essentiel à l’adoption du ciblage d’inflation. Mais il reflète surtout l’effort des autorités des économies émergentes ayant adopté le ciblage d’inflation à mettre en œuvre des réformes institutionnelles profondes visant à rendre plus indépendante leur autorité monétaire.

Les résultats les plus mitigés concernent la relation entre le développement financier et la probabilité qu’un pays adopte le ciblage d’inflation. En effet, tout comme Samaryna et de Haan (2011), nous trouvons une relation positive et significative entre le rapport de l’agrégat monétaire M2 sur le PIB, la capitalisation boursière, et la probabilité d’adoption du ciblage d’inflation. Toutefois, cette relation apparaît non significative lorsque le développement financier est mesuré à l’aide du crédit domestique au secteur privé. D’après ce dernier résultat, il semblerait alors que les économies émergentes aient fait le choix d’adopter le ciblage d’inflation, alors même que la précondition de développement financier n’était pas

69 remplie. Ce choix peut néanmoins s’expliquer par le fait qu’au sein de nombreux pays émergents cibleurs d’inflation, la transition vers un régime de changes flottants s’est effectuée de manière relativement progressive, réduisant ainsi de fait la vulnérabilité du secteur bancaire et financier aux fluctuations du change.

Enfin, concernant les variables de contrôle, seuls le PIB par tête, l’ouverture commerciale, et la volatilité du taux de croissance de la masse monétaire, apparaissent statistiquement significatifs et, positivement reliés à la probabilité d’adoption du ciblage d’inflation. Les coefficients associés au taux de croissance du PIB et à la variable binaire crise de change ont quant à eux le signe attendu, mais sont non significatifs aux seuils de risque usuels. Dans le paragraphe suivant, nous effectuons des tests de sensibilité qui ont pour objectif de tirer des conclusions quant à la validité des résultats obtenus ci-dessus.

Dans le document UNIVERSITÉ D ORLÉANS THÈSE (Page 77-82)