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3.3 Mesures de la durée de vie effective : nouvelles techniques développées

3.3.1 Photoluminescence en régime continu

3.3.1.3 Résultats de mesures

Pour déterminer le spectre quantitatif de photoluminescence, il est nécessaire de connaître avec précision la quantité de photons réellement émise par l’échantillon à partir de la fraction mesurée par le système de détection, et cela pour chaque énergie du spectre. La méthode de calibration généralement employée consiste à placer une source lumineuse connue à la place de l’échantillon et à mesurer son spectre avec le système de détection du banc [63]. Cela n’a pas été possible sur le banc du LGEP pour des raisons d’accès à l’emplacement de l’échantillon, les sources disponibles étant trop volumineuses. Néanmoins, le système optique décrit ci-dessus, combiné avec le faible angle d’émission du silicium (l’indice de réfraction du silicium étant nc−Si=3,5, seuls les photons ayant un angle plus petit que θ=16,6° avec la normale de la surface sont transmis hors de l’échantillon) permettent de collecter la majorité des photons émis. Nous allons montrer que cette affirmation est raisonnable à travers un exemple concret.

La figure 3.19 montre l’évolution du signal de photoluminescence en fonction de l’intensité lumi-neuse (pour plus de clarté sur le graphique, nous indiquons la valeur du courant aux bornes de la diode laser ILD, proportionnelle au flux émis) obtenue pour un wafer de silicium FZ 1-5 Ω.cm passivé en face avant par une couche de (p) a-Si :H et par un BSF en face arrière (échantillon PBer-1a, fourni par le HZB). Une couche métallique a aussi été déposée en face arrière, mais pas de couche antireflets en face avant. On considère les coefficients de réflexion RF AV=0,3 et RF AR=0,7 (la valeur en face arrière importe peu pour la détermination de la différence des quasi-niveaux de Fermi à haute énergie).

Figure 3.19 – Spectres de photoluminescence expérimentaux obtenus pour l’hétérojonction de silicium décrite dans de texte, pour différentes valeurs de flux incident. Les modélisations calculées pour chaque courbe sont indiquées en pointillés.

Les pointillés sont les résultats des fits réalisés au niveau des hautes énergies à partir de l’équation (3.95), où le seul paramètre inconnu est la différence entre les deux quasi-niveaux de Fermi. La modélisation reproduit correctement les résultats expérimentaux sur la majeure partie du spectre. On ne retrouve pas un épaulement aussi prononcé que celui attendu dans la gamme des énergies comprises entre 1,02 et 1,06 eV. Cette différence peut provenir d’un problème d’étalonnage de la photodiode InGaAs ou d’absorptions intervenant dans le système optique. Néanmoins, il est possible de reproduire fidèlement la gamme des hautes énergies et de déterminer la différence des quasi-niveaux de Fermi. Les valeurs ainsi déduites pour EF,n− EF,p sont données dans le tableau 3.1. Sur ce même échantillon, une mesure de QSSPC a été effectuée avant le dépôt de la métallisation en face arrière. Les valeurs de la tension de circuit-ouvert Vco,impl calculée au cours de cette mesure (voir équation (3.74)) sont aussi indiquées en fonction du flux incident dans le tableau.

Les valeurs de EF,n− EF,p et Vco,impl sont en bon accord dans l’ensemble, avec une légère sures-timation constante de près de 15 meV pour la valeur déterminée par photoluminescence. Celle-ci peut provenir d’une intégration du signal lumineux par la photodiode sur plusieurs longueurs d’onde (mauvaise sélectivité du monochromateur) ou d’hypothèses sur les conditions de mesures légèrement différentes. Par exemple, la feuille de calcul pour la QSSPC considère par défaut la température T=298 K pour le calcul de Vco,impl (la mesure ayant été réalisée au HZB, nous n’avons pas la possibi-lité de connaître la température réelle lorsqu’elle a été effectuée), et T intervient à deux reprises dans le calcul (en préfacteur du logarithme et dans n2

i, voir équation (3.74)). De notre côté, la température de la salle où se situe le banc de photoluminescence est régulée à T=296 K par une climatisation et nous avons déterminé les valeurs pour EF,n− EF,p à cette température. Il est par ailleurs important

ILD (mA) Flux (Soleils) EF,n− EF,p (meV) τEff,PL (µs) Vco,impl (mV) τEff,QSSPC (µs) 60 0,14 595 397 80 0,29 615 360 100 0,44 625 318 611,3 269 120 0,59 635 314 618,8 250 140 0,74 640 287 624,5 230 150 0,82 645 295 626,8 225

Tableau 3.1 – Valeurs des différences entre les quasi-niveaux de Fermi et de la durée de vie effective des porteurs obtenues par photoluminescence à T=296 K pour l’échantillon PBer-1a en fonction de l’excitation lumineuse (spectres de la figure 3.19), tel que 1 Soleil ⇔ 2,77 × 1017 cm−2.s−1. Les résultats sont comparés aux tensions de circuit-ouvert Vco,impl et aux durées de vie effectives déterminées pour le même échantillon par la mesure de QSSPC, tel que T=298 K.

de signaler que l’estimation de EF,n− EF,p à partir du fit de la courbe expérimentale de photolu-minescence à 1,3 eV est précis à 2 meV. Pour une valeur de flux incident φ0=0,82 Soleil, l’erreur d’estimation sur la durée de vie est de 20 µs. Dans ces conditions, l’erreur finale sur la détermination de EF,n− EF,p = qVco est inférieure à 5 % pour les deux grandeurs. D’autre part, les durées de vie effectives obtenues par les deux techniques évoluent bien de la même manière mais avec un écart relatif de près de 20 % est observé.

Le banc de photoluminescence permet également de réaliser des cartographies du signal émis par un échantillon avec une résolution spatiale de l’ordre de 500 × 500 µm. Pour cela, l’échantillon est excité par la diode laser à un flux fixe, une longueur d’onde du spectre de photoluminescence est choisie et les platines de translation déplacent l’échantillon sous le système d’excitation et de détection. L’acquisition est faite à la volée, c’est-à-dire en même temps que le déplacement des platines (vplatine=3 mm.s−1), tous les points de mesure pris à la même vitesse ce qui permet une intégration de signal de luminescence identique pour chaque point. La figure 3.20montre la cartographie du signal de photoluminescence de l’échantillon wafer-P1 mesuré à 1,1 eV (ce qui correspond à la longueur d’onde λ = 1130 nm), dont la cartographie de durée de vie a déjà été effectuée par la technique de

µW-PCD (voir p.139).

Sur cette cartographie, nous indiquons la tension mesurée par le système (proportionnelle à la photoluminescence) sur une échelle qui s’étend de 0,3 mV à 10 mV. On retrouve bien les mêmes formes pour les zones de la surface du wafer ayant été dégradées que lors de la précédente observation obtenue avec la technique de µW-PCD (figure 3.13), pour une résolution spatiale similaire.

À ce stade, notre outil est donc capable de réaliser des cartographies du signal de photoluminescence avec une assez bonne résolution, ce qui permet de détecter facilement des inhomogénéités de surface et de volume dans un échantillon. L’avantage de cette technique de cartographie comparée à celle de µW-PCD est qu’elle peut être mise en œuvre à chaque étape du procédé de fabrication d’une cellule photovoltaïque, du wafer passivé à la cellule finale avec couche anti-reflet et métallisations. De plus, nous avons montré qu’il était possible de déterminer la durée de vie effective des porteurs à partir du fit du spectre de photoluminescence. Il serait envisageable d’effectuer les cartographies en se fixant à une énergie assez élevée pour que l’absorbance ne soit affectée que par le coefficient de réflexion en face avant, de façon à ce que le spectre de photoluminescence ne dépende que de la différence des quasi-niveaux de Fermi. En établissant l’équivalence entre la tension mesurée et la

Figure 3.20 – Cartographie du signal de photoluminescence détecté à 1,1 eV (λ=1130 nm) pour l’échan-tillon wafer-P1 avec une excitation constante Φincident≈ 2 × 1017 cm−2.s−1 (ILD=140 mA).

différence EF,n− EF,p pour un point de mesure, parcourir l’échantillon à flux constant doit permettre de réaliser des cartographies de durée de vie en régime permanent sans nécessiter d’étalonner le banc à l’aide d’un second système tel la QSSPC. Il serait encore plus judicieux de coupler notre système à une caméra CCD afin de réaliser une cartographie instantanée de la surface, sans plus avoir à déplacer l’échantillon15. Il faudra alors éclairer l’échantillon de manière homogène sur toute sa surface mais on peut dans ce dernier cas envisager une acquisition de la cartographie de la durée de vie effective en quelques secondes (il faudra au préalable établir une correspondance entre la tension mesurée avec la photodiode InGaAs et l’intensité lumineuse d’un pixel de l’image de cartographie pour une même région de l’échantillon).

Durant la thèse, nous n’avons pas essayé de mettre à exécution cette solution. Nous avons plu-tôt utilisé une autre méthode pour déterminer la durée de vie, à partir de mesures du signal de photoluminescence en régime modulé.