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épidémiologiques et géologiques

5.4.2. Résultats de l’enquête géologique et minéralogique

Généralités

L’étude géologique et les prélèvements d’échantillons potentiellement amiantifères ont été réalisés préférentiellement dans les zones de vie des cas de mésothéliome, mais également sur les affleurements rencontrés dans les trajets de liaison entre ces zones.

Plusieurs environnements géologiques sont traversés de la côte Ouest à la côte Est, en passant par la Chaîne centrale. On distingue :

- à l’Ouest les formations sédimentaire (Crétacé) et volcanique (Unité de Poya) dominées par le massif de péridotites du Koniambo,

- au centre l’unité polymétamorphique de la Boghen,

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Mésothéliome et amiante environnemental en NC Page 147 Ces environnements sont représentés sur l'extrait de la carte géologique à l'échelle du 1/1 000 000 de Nouvelle-Calédonie qui a servi à établir la figure 20. Les données analytiques des échantillons sont présentées dans les tableaux 3 à 5 de l’annexe 4.

Le secteur Ouest

Les formations géologiques du secteur Ouest semblent peu propices à l’affleurement de roches potentiellement amiantifères (Figure 21).

Figure 21 - Carte géologique du secteur Ouest à partir du levé au 1 / 50 000 (en rouge les échantillons contenant des fibres amiantifères, observation MOLP sur frottis)

Dans la tribu de Koniambo, seule la semelle serpentineuse du massif du Koniambo est connue pour contenir occasionnellement des filonnets de chrysotile. Aucun affleurement n’a révélé de roche ou de terre potentiellement amiantifères, d’où l’absence d’échantillon. La tribu est installée sur des altérites et colluvions développées sur les basaltes et argilites de l’unité de Poya.

Mésothéliome et amiante environnemental en NC Page 148 Dans le site de Tiaakana, au Nord de la tribu de Koniambo, près d’un affleurement de sédiments schistosés probablement crétacé (présence de nodules), nous avons observé une case ancienne, non habitée mais utilisée pour stocker du matériel, enduite de Pö blanc. Une femme âgée nous a conduits sur le gisement de ce Pö, dans les berges argileuses d’un creek ; les échantillons récoltés sur ce site se sont révélés non fibreux.

Le frottis du Pö observé au MOLP (Annexe 4 – Tableau 3) révèle 100 % de petites fibres (longueur 20 µm, diamètre 1 µm en moyenne) très droites, certainement des amphiboles de la série trémolite-actinote ; il est donc probable que ce matériel n’a pas été collecté au lieu indiqué mais plus à l’Est, dans l’unité proche de la Boghen.

Différents filons de serpentinite, de type antigorite, ainsi que des filonnets de chrysotile et de lizardite, ont été relevés sur le massif minier du Koniambo (photos 40 à 42).

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Photographie 410 – Veines de chrysotile - massif du Koniambo - D Lahondère - BRGM

Photographie 42 – Veines de lizardite - massif du Koniambo - D Lahondère - BRGM

La chaîne centrale

Cette zone couvre l’ensemble des territoires autour des tribus d’Atéou, Tiaoué, Noéli, Néami, Netchaot sur le versant Est, et de Bobope sur le versant Ouest de la chaîne.

La carte géologique (figure 21) montre que toutes ces tribus sont installées sur les formations polymétamorphiques de l’unité de la Boghen, elles mêmes entrelardées de corps de toutes tailles (kilométriques à métriques) de serpentinite. Ces formations sont dominées au Nord par le massif de péridotites « minier » (non exploité) du Tchingou.

Mésothéliome et amiante environnemental en NC Page 150 La situation est tout à fait comparable à ce que nous avons observé dans l’environnement des tribus de la chaîne centrale dans la commune de Houaîlou [Baumann 2007]. Presque tous les affleurements suspectés amiantifères révèlent la présence de fibres minérales au MOLP. Les points rouges de la figure 22 correspondent aux échantillons « positifs».

Figure 22 - Carte géologique du secteur de la chaîne centrale (1 / 50 000) : en rouge les échantillons contenant des fibres amiantifères d'après les observations au MOLP sur frottis.

Dans la tribu d’Ateu, nous avons relevé l’abondance de corps et de filons de serpentinite de toutes dimensions (métriques à kilométriques) le long de la piste d’accès à la tribu. Les affleurements de roches et de terres blanches potentiellement amiantifères sont nombreux, et le matériau serpentinite est utilisé pour recouvrir la piste. On n’a relevé aucune carrière de grandes dimensions, mais une carrière de serpentinite est en cours d’utilisation. Les échantillons collectés, dont les frottis ont été observés au MOLP, s’avèrent contenir de la trémolite et/ou du chrysotile et/ou de l’antigorite fibreuse. Par ailleurs de nombreuses cases ont été recensées « trémolitiques » et démolies dans cette tribu. On nous a indiqué que la tribu était auparavant installée plus bas, en-dessous de cette région serpentineuse.

Mésothéliome et amiante environnemental en NC Page 151 La zone de Pwanaki, située en contrebas de la tribu actuelle d’Atéu, se trouve en-dessous des affleurements de serpentinite et n’est donc pas concernée diorectement par le risque d’exposition sur la route.

Dans la tribu de Tiaoué, plusieurs cases ont été démolies (3 sites d’enfouissement notés) ; une case enduite de Pö présente des fibres de trémolite et d’antigorite. Aucun affleurement potentiellement amiantifère n’a été relevé dans l’environnement des habitations. Par contre, suivant les indications des anciens de la tribu sur les gisements de Pô (vers Atéou et vers Noéli), nous avons localisé plusieurs affleurements dans la montagne à l’Est, à plusieurs kilomètres en amont de la tribu. Dans ces zones, des occurrences de terre blanches apparaissent à nouveau au contact de corps de serpentinite massive et des schistes (photographies 43 et 44) et tous les frottis s’avèrent fibreux (trémolite et antigorite).

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Photographie 44 – Détail de terre blanche de type antigorite au contact serpentinite/micaschiste

Dans les territoires autour des tribus de Noéli et de Poindah, il n’y a pas d’affleurement potentiellement amiantifère visible. Sur la piste de Tiaoué à Noéli, dans la tribu de Noéli, le long des pistes de Noéli ou de Poindah vers la transversale Koné-Tiwaka où dans la tribu de Poindah, les talus de route ou de plateforme montrent un faciès altéré jaune de micaschiste de la Boghen, ou sa couverte d’altérite sableuse. Un petit affleurement dans un talus de route à Poindah présente des terres blanches au contact d’un bloc de serpentinite de type antigorite et de la Boghen. Quelques corps de serpentinite se trouvent sur la piste du captage qui rejoint Néami.

Dans la tribu de Néami et à 1 km le long de la piste qui mène de Néami à la transversale Koné-Tiwaka, le même faciès altéré jaune de l’unité de la Boghen, qui apparaît verte et massive dans les rares affleurements de roche saine en fond de creek, est entrelardé de nombreux filons de serpentinite plus ou moins altérée. Des occurrences fréquentes de terre blanche sont observées au contact serpentinite/micaschiste. L’échantillon d’une passée de talc-schiste montre 100% de fibres hétérogènes, dont l’analyse minéralogique a mis en évidence la nature antigorite. L’école, la maison commune et les aménagements sportifs sont bâtis sur des veines de serpentinite. De nombreux talus de route, au contact serpentinite/Boghen présentent de la terre blanche trémolitique.

Mésothéliome et amiante environnemental en NC Page 153 Dans le territoire de la tribu de Netchaot, on retrouve un environnement géologique similaire, avec l’unité de la Boghen, massive et verte quand la roche est saine, schisteuse et jaune quand elle est altérée, recoupée par des filons de serpentinite. Dans une petite carrière à l’entrée et dans les talus au milieu de la tribu, on observe des terres blanches au contact serpentinite/schiste. Les deux échantillons prélevés révèlent 100% de fibres hétérogènes de trémolite. De nombreux contacts serpentinite altérée – unité de la Boghen sont relevés sur les talus de route, avec des occurrences de terre blanche à esquilles aciculaires.

Aucun affleurement de serpentinite n’est observé dans la tribu de Bobope, mais cette roche, et les terres blanches associées, est présente dans les talus de route et trois anciennes carrières. La carrière du col de Tango est encore utilisée sur la piste d’accès. Les échantillons contiennent quelques fibres de chrysotile et de nombreuses fibres d’antigorite.

Mésothéliome et amiante environnemental en NC Page 154 D’une manière générale, le long de la route transversale Koné-Tiwaka, depuis le col de Tango jusqu’à Bobope, on constate que :

- la route tracée dans l’unité métamorphique de la Boghen recoupe de nombreux corps de serpentinite de toutes tailles (photographie 46), qui contiennent principalement des failles à antigorite en lattes ou fibreuse, et des filonnets millimétriques de chrysotile; - le contact serpentinite/micaschiste est souvent souligné par des terres blanches

constituées de trémolite ; certains faciès de « terres blanches » ne permettent pas de faire la différenciation entre l’antigorite très altérée et la trémolite, seule l’analyse minéralogique permet l’identification minérale.

- des altérations blanches amiantifères de la serpentinite près de la surface, sous la couche végétale du sol, contiennent des fibres de trémolite ;

- de grandes carrières ont été ouvertes dans ces serpentinites schistosées de la Boghen (photographies 45 et 47), pour extraire du matériau ensuite utilisé comme soubassement des pistes et de l'ancienne transversale. Dans les carrières, failles à serpentine (antigorite), filonnets de chrysotile fibreuse et roches tendres soyeuses sont systématiquement observés. La présence de fibres est confirmée par nos observations au MOLP.

Dans cette zone centre, la situation est comparable à celle des tribus de la Chaîne centrale dans la commune de Houaïlou [Baumann 2007], avec une relation étroite entre la présence de terres ou roches riches en fibres de trémolite-actinolite, et la proximité de serpentinites feuilletées contenant des antigorites fibreuses et parfois du chrysoyile, associées à l’unité métamorphique de la Boghen.

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Photographie 46 - Talus de route dans un massif de serpentinite (route de Koné-Tiwaka)

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La côte Est

Figure 23 - Carte géologique du secteur « Côte Est » à partir du levé au 1/50 000 (en rouge les échantillons contenant des fibres amiantifères, observation MOLP sur frottis).

Plus à l’Est et dans les basses vallées de la côte Est, l’unité métamorphique de haute pression du Nord calédonien intègre plusieurs formations lithostratigraphiques (Figure

23). Ce sont essentiellement des siltites, tuffs et grès volcanoclastiques, schistosés ou

foliés, qui présentent en surface le même faciès altéré de schiste jaune. On observe également des roches basiques (basaltes, dolérites et gabbros) et des corps ultrabasiques totalement serpentinisés et schistosés, présentant la même déformation polyphasée que les schistes.

Cet environnement géologique distinct des précédents présente cependant les mêmes terrains potentiellement amiantifères, en relation avec la présence proche de

Mésothéliome et amiante environnemental en NC Page 157 serpentinite. De petites occurrences de talc-schistes ou de pierres « savon » peuvent aussi s’avérer fibreuses, comme dans la région de Hienghène [Picard 2005].

Prés des tribus de Tiwaka ou de Kokengone, des affleurements de terre blanche ont révélé la présence de trémolite, parfois associée à l’antigorite. Une carrière a montré la présence de veines de chrysotile et d’actinolite. Trémolite et antigorite fibreuse ont été mises en évidence dans des échantillons ramassés sur piste.

Au lieu dit Wagap, en rive droite de l’embouchure de la Tiwaka, 200 mètres à l’Ouest de la route côtière, se trouve une grande carrière de serpentinite très friable. On n’y observe pas de terre blanche ; les frottis montrent des grains et des fibres de plusieurs types, la plupart en fines lattes esquilleuses (antigorite ?).

La tribu de Tiéti est située sur de nombreuses lames de serpentinites au contact de l’unité de Poya. Des anciennes carrières sont creusées dans cette serpentinite de type antigorite en plaques, avec quelques filonnets de chrysotile. La serpentinite est largement utilisée comme matériau de recouvrement des pistes. Une école est adossée à un large affleurement de cette serpentinite.

Dans la vallée de l’Amoa, sur les deux rives, affleurent surtout les schistes jaunes altérés et des terres jaunes sableuses alluvionnaires. Un affleurement de schiste blanc talqueux sur un talus de route dans la tribu de Saint-Paul révèle une forte proportion de petites fibres, fines et droites, du type trémolite-actinolite. Près de l’embouchure, la route en rive droite recoupe de la serpentinite, avec de très petits filons de chrysotile qui apparaissent ponctuellement. L’affleurement de serpentinite longe la piste qui dessert toutes les tribus de cette vallée. Des fragments de cette serpentinite sont retrouvés sur la piste jusqu’à la route côtière. L’antigorite, très friable et très altérée, en est le principal constituant.

Le long de la route côtière, depuis Ponérihouen vers Poindimié, des terrains amiantifères sont recoupés en plusieurs lieux. Non loin de la tribu d’Ometteux, il existe une carrière de serpentinite avec des filonnets de chrysotile visibles à l’œil nu. A 100 m au Nord un talus de route recoupe de la serpentinite contenant des blocs de basalte et des filonnets de chrysotile. Une deuxième carrière de serpentinite est trouvée 1 km plus loin, dans laquelle on observe des terres blanches et de la pierre « savon » au contact des schistes. La serpentinite est très friable, composée de plaques d’antigorite

Mésothéliome et amiante environnemental en NC Page 158 se délitant jusqu’à former de fines poussières. Les frottis de terres blanches révèlent des fibres de type trémolite avec de l’antigorite et du talc.

A 1,5 km au nord de la tribu de Ouindo, un talus de route montre le contact entre la serpentinite de type antigorite et les schistes jaunes. On n’observe pas de terre blanche mais un échantillon de serpentinite à filonnets de chrysotile a été prélevé ; l’analyse minéralogique révèle également la présence de fibres d’antigorite.

Enfin au lieu dit Paama, environ 4 km au Sud de Poindimié, une nouvelle carrière ouverte dans la serpentinite montre localement le faciès à filonnets de chrysotile. La piste d’accès est recouverte de serpentinite. Le principal minéral est de l’antigorite, se délitant jusqu’à former une fine poussière.

Dans cette zone Est, la situation est différente de celle de la zone centrale. La présence de terres ou de roches amiantifères, riches en fibres de trémolite-actinolite, est en relation avec la proximité de serpentinites feuilletées, contenant des veines de chrysotile et de l’antigorite fibreuse, associées à l’unité métamorphique. Mais il faut considérer la présence potentielle de passées métriques de talc-schiste à trémolite au sein des schistes jaunes, pas toujours visibles à l’échelle de nos investigations.