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Chapitre IV. Vers une vision quantitative : caractérisation

1. CARACTERISATION HYDRODYNAMIQUE Essais de pompages Essais de pompages

1.1.1. Résolution des essais de pompages

Les caractéristiques des essais de pompages réalisés au sein des forages non exploités sont résumées dans le Tableau IV-1. Comme précisé dans le chapitre 1, les méthodes d’interprétations classiques de type Theis et Jacob, développées pour des aquifère homogènes, ne décrivent pas de façon adéquate les circulations au sein de l’aquifère de l’Ursuya. Nous nous sommes donc appuyés sur les concepts de double porosité (Warren et Root, 1963) et sur le modèle d’aquifère semi-captif (Hantush, 1956). Ces deux méthodes d’interprétation sont en effet celles qui correspondent le mieux aux variations de charges observées lors des essais de pompages effectués. Après avoir rappelé le principe de ces modèles d’interprétation, nous présenterons les résultats des tests réalisés.

Tableau IV-1. Caractéristiques des essais de pompages effectués

Ouvrages Pompage Observation de

la remontée (s) Position de la pompe (m/sol) Durée (s) Q (m3 h–1)

Pe4 12,76 7680 5 22260

Pe5 14,70 8040 4,6 7560

Ip2 18,50 7740 4,5 9540

Osp9 25,00 12780 4,6 9480

1.1.1.1. Le modèle de double porosité

Selon le concept de double porosité, la formation fracturée est considérée comme une combinaison de deux systèmes : le réseau de fractures et la matrice rocheuse, chacun ayant ses caractéristiques propres. Deux porosités et deux perméabilités sont considérées : la porosité primaire et la perméabilité faible de la matrice, la perméabilité forte et l’emmagasinement faible des fractures. Cette méthode est basée sur les hypothèses suivantes (Kruseman et Rider, 2000) :

 l’aquifère est confiné et d’extension infinie ;

 l’épaisseur de l’aquifère est uniforme sur toute la surface influencée par le pompage ;

 le puits traverse au moins une fracture dans son intégralité ;

 le pompage est à débit constant ;

 avant le pompage, la surface piézométrique est horizontale sur toute la surface qui sera influencée par le pompage ;

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Parmi les différents modèles développés à partir du concept de double porosité, certains considèrent un régime pseudo-permanent des écoulements entre la matrice rocheuse et les fractures (Warren et Root, 1963). Pour d’autre le régime d’écoulements est supposé transitoire entre ces deux milieux (Kazemi, 1969), et l’interprétation de l’essai de pompage nécessite alors des informations supplémentaires sur les échanges entre les discontinuités et la matrice. Nous avons donc utilisé le modèle d’interprétation de Warren et Root qui présument que la distribution des charges à l’intérieur des blocs de la matrice rocheuse est indéfinie. Les fractures et la matrice présentent chacune des charges hydrauliques propres, moyennées dans un volume élémentaire représentatif (Kruseman et Rider, 2000).

L’ampleur de l’écoulement induit est proportionnelle à la différence de charge hydraulique (Moench, 1984). Ce type de modèle a été utilisé pour déterminer les caractéristiques hydrodynamiques de l’aquifère au droit du forage Ip2. En plus des paramètres classiques (perméabilité K en m s–1, transmissivité T en m² s–1 et emmagasinement S, sans dimension) le concept de double porosité s’appuie sur la définition du coefficient d’interposrosité ( , sans dimensions) qui définit la capacité du fluide à passer de la matrice rocheuse aux fractures selon la formule suivante :

Équation 31

Avec

α : facteur de forme, caractéristique de la géométrie de la matrice (sans dimensions) ; : rayon du puits (m) ;

Km et Kf : respectivement les perméabilités de matrice et de fissures (m s–1).

Le coefficient d’interporosité, le facteur de forme et le rapport de perméabilité sont déterminés par ajustement des rabattements théoriques avec les rabattements observés, de même que les paramètres hydrodynamiques habituels.

1.1.1.2. Le modèle de Hantush

Quand un puits capte une nappe développée dans un aquifère semi-captif, l’eau est extraite non seulement de l’aquifère lui-même, mais également de la couche semi-perméable surincombant. Dans le contexte qui nous intéresse, on comprend que le rôle de couche semi-perméable peut être joué par la couche d’altérite surmontant l’horizon capté. Cette épaisseur de matériel peu perméable, issu de l’altération de la roche, possède une forte capacité d’emmagasinement de l’eau précipitée, celle-ci pouvant être transmise au système inférieur par le biais des fissures et fractures développées dans la roche composant le massif.

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Plusieurs solutions existent pour interpréter les essais de pompages en milieux semi-captifs. La méthode utilisée (Hantush, 1960) prend en compte l’emmagasinement au sein de la formation semi-perméable et est basée sur les hypothèses suivantes (Kruseman et Ridder ; 2000) :

 l’aquifère est semi-captif ;

 l’aquifère et la couche semi-perméable ont une extension infinie ;

 l’aquifère et la couche semi-perméable sont homogènes, isotropes, et d’épaisseur constante sur la surface influencée par le pompage ;

 avant le pompage, la surface piézométrique est horizontale sur toute la surface qui sera influencée par le pompage ;

 le débit de pompage est constant ;

 le puits pénètre toute l’épaisseur de l’aquifère et les écoulements sont horizontaux ;

 les écoulements dans la couche semi-perméable sont verticaux ;

 le rabattement au sein de la couche semi-perméable est négligeable ;

 la couche semi-perméable est incompressible ;

 le régime d’écoulement est transitoire.

Cette méthode prend en compte le paramètre de résistance hydraulique de la couche semi-perméable (en secondes) définit par :

Équation 32

Avec

: l’épaisseur de la formation semi-perméable (m) ;

: la perméabilité de la formation semi perméable (m s–1).

1.1.2.Résultats

Pour les forages Osp9 et Ip2, les résultats ont été interprétés directement au puits de pompage du fait de l’absence de puits d’observation au voisinage. En revanche, la proximité des forages Pe4 et Pe5 (Figure I-22 et Tableau I-6) nous a permis d’utiliser ces derniers comme puits d’observations, afin de nous affranchir des perturbations liées aux effets de puits. Ainsi, le pompage au sein du forage Pe4 a été interprété grâce aux rabattements observés dans Pe5 et inversement. Les méthodes d’interprétations classiques (Theis et Jacob) ont été testées, mais comme attendu celles de Warren et Root et Hantush retranscrivent mieux les rabattements observés (Figure IV-1 et Tableau IV-2).

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Tableau IV-2. Résumé des résultats des essais de pompages

IP2 Osp9 Pe4 Pe5

K (m s–1) 6,70×10–6 2,20×10–7 6,75×10–5 1,10×10–4 S 5,70×10–2 2,30×10–2 9,50×10–5 9,30×10–5 T (m² s–1) 3,80×10–4 1,10×10–5 3,80×10–3 5,20×10–3 Méthode de calcul Double porosité (Warren et Root) Nappe semi-captive (Hantush) Nappe semi-captive (Hantush) Nappe semi-captive (Hantush)

1.1.2.1. Forage Ip2

Le rabattement induit par le pompage est relativement faible (moins de 50 cm ; Figure IV-1) montrant une forte productivité de l’ouvrage liée à une transmissivité de fissures relativement bonne pour ce type d’aquifère (3,80×10–4 m² s–1 ; Tableau IV-2). On trouve souvent dans la littérature des valeurs proches de 1×10–5 m² s–1 (Taylor et Howard, 2000) et jusqu’à 5×10–6 m² s–1 (Maréchal et al., 2004) pour des aquifères du même type. Les valeurs de transmissivité comprises entre 1×10–4 m² s–1 et 1×10–1 m² s–1 apparaissent en général dans des zones où d’importantes fractures tectoniques sont définies, ces valeurs s’accompagnant de coefficients d’emmagasinement compris entre 1×10–3 et 1×10–1 (Dewandel et al., 2005). Nous nous trouvons donc dans cette situation avec un coefficient d’emmagasinement de 5,66×10–2 (Tableau IV-2).

En revanche, la lenteur de la remontée montre la difficulté de l’aquifère à se régénérer, du fait d’une perméabilité relativement faible (6,67×10–6 m s–1). Cette valeur de perméabilité englobe les écoulements qui ont lieu à la fois au sein des fractures et de la matrice, ce qui peut expliquer cette faible valeur. Les valeurs de λ et α sont respectivement de 10 et de 2×103. Selon l’Équation 31, on obtient un rapport Km / Kf de 0,42. La perméabilité de fracture est donc à peine deux fois plus élevée que la celle de la matrice rocheuse. Il faut cependant noter que la théorie veut que cette formule soit appliquée entre deux puits, c'est-à-dire r correspondant à la distance entre le puits de pompage et un puits d’observation. Malheureusement, nous ne disposons pas de puits d’observations. Ce résultat est donc à nuancer. Nous sommes finalement en présence d’un aquifère fracturé, fortement productif car situé sur une zone très fracturée, mais dont la perméabilité globale ne permet pas une remise à l’équilibre rapide.

1.1.2.2. Forage Osp9

La nappe captée par le forage Osp9 est semi-captive. En effet, le modèle de Hantush pour un aquifère semi-captif est celui qui permet le mieux de corréler les données de rabattements théoriques avec les rabattements observés (Figure IV-1). D’autre part, nous avons vu dans le chapitre 3 que les caractéristiques physico-chimiques de l’eau captée par ce forage montrent des signes de confinement. Cependant, du fait de la très faible résistance hydraulique de la couche semi-perméable déterminée par ajustement des rabattements simulés avec les rabattements observés (4,40×105 s soit 5 jours), il est clair que le confinement est très léger. Ceci peut être dû à une épaisseur d’altérites faible ou à une perméabilité conséquente de cet horizon. Nous observons une transmissivité moyenne (1×10–5 m² s–1), et une conductivité hydraulique particulièrement faible (2,20×10–7 m s–1 ; Tableau IV-2).

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La fin de la courbe de rabattement est marquée par une diminution de pente signifiant une alimentation extérieure à l’aquifère. Les eaux de surface peuvent constituer cette limite d’alimentation. En effet, les eaux du ruisseau s’écoulant à quelques mètres en aval du captage ont pu être sollicitées par le pompage. On peut également imaginer la présence d’une fracture plus productrice à proximité du forage qui n’aurait été sollicitée qu’après environ 95 minutes de pompage.

Nous sommes donc ici en présence d’un aquifère semi-captif, les altérites sus-jacentes jouant le rôle d’éponte semi-perméable. Cet horizon peu perméable contient tout de même de l’eau, du fait d’une importante porosité caractéristique des matériaux d’altérations. Cette eau est transmise à l’aquifère proprement dit par la création d’un gradient hydraulique local, engendré par le pompage. Les caractéristiques hydrauliques de l’aquifère capté sont relativement médiocres, malgré l’existence d’une zone d’alimentation cependant difficile à caractériser et à identifier.

1.1.2.3. Forages Pe4 et Pe5

Les forages Pe4 et Pe5 étant peu éloignés l’un de l’autre nous avons pu les utiliser à tour de rôle comme puits de pompage et comme piézomètre d’observation. Ainsi, lors du pompage en Pe4, la descente et la remontée du niveau d’eau ont également été enregistrées au sein du forage Pe5 et inversement. Nous avons fait le choix de présenter les courbes de rabattements (Figure IV-1) et les résultats obtenus aux piézomètres d’observation, afin de nous affranchir des effets de puits pouvant influencer les observations. Les résultats aux puits de pompages sont en effet souvent différents de ceux aux piézomètres car entachés de bruit de fond induit par les pertes de charges quadratiques et les effets pariétaux. Les transmissivités et les coefficients d’emmagasinement calculés sont proches pour les deux ouvrages (Tableau IV-2). Les transmissivités élevées (3,83×10–3 m² s–1 pour Pe4 et 5,25×10–3 m² s–1 pour Pe5) sont caractéristiques d’une fracturation importante contrastant avec les faibles coefficients d’emmagasinement (entre 9,50×10–5 et 9,33×10–5). Ces derniers dénotent une faible fonction capacitive du réservoir. Les perméabilités (6,75×10–5 m s–1 et 1,12×10–4 m s–1), comme les transmissivités, sont plus élevées que celles observées pour les puits Osp9 et Ip2.

1.1.3.Bilan

Les paramètres hydrodynamiques déterminés par ces investigations permettent de mettre en évidence d’un point de vue physique l’hétérogénéité de l’aquifère de l’Ursuya. Les propriétés hydrodynamiques déterminées mettent en évidence des modalités d’écoulements très variables en fonction des horizons considérés (milieu fissuré, roche altérée poreuse et perméable, altérites plus ou moins perméables en fonction du degré d’altération). Le rôle de confinement des altérites est ici illustré avec des influences plus ou moins importantes suivant la mise en place du profil d’altération (degré d’altération, épaisseur). Les propriétés hydrodynamiques des quatre ouvrages investigués sont peu propices aux écoulements avec des valeurs de perméabilité et/ou des coefficients d’emmagasinement assez faibles.

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Toutefois, compte-tenu de la variabilité verticale des matériaux traversés par les forages investigués, il est intéressant de déterminer lesquels d’entre eux sont les plus productifs. Cette information a été évaluée grâce aux diagraphies de productivité.