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Au niveau cellulaire, l’arrêt du signal insulinique a lieu lorsque l’insuline est internalisée avec son récepteur, puis le complexe est adressé aux endosomes. En physiologie, le nombre de RI reste constant à la membrane plasmatique car un faible nombre de RI est dégradé lors de l’internalisation. Divers acteurs moléculaires agissent sur la voie insulinique et jouent un rôle inhibiteur. Les phosphotyrosine phosphatases PTPases comme PTP-B déphosphorylent le RI et IRS-1 ce qui les désactivent. L’insuline exerce ainsi une boucle de rétrocontrôle négative (Kido et al. 2001). Par ailleurs, les phosphorylations sur les sérine-thréonine du RI et de IRS-1 ont une action inhibitrice (Longo et al. 2019). De nombreux facteurs phosphorylent IRS-1 sur la sérine 312 comme PKC θ, IKK β (inhibitor of NFκB) (Gao et al. 2004), JNK (c-JUN NH2-terminale kinase) (Fujishiro et al. 2003), IRAK (interleukin-1 receptor-associated kinase) (Kim et al. 2005). Enfin, divers stress cellulaires comme le stress oxydant (Furukawa et al. 2004), l’hypoxie (Regazzetti et al. 2009) ou encore le stress du RE (Xu et al. 2010) altèrent la voie de signalisation de l’insuline dans les adipocytes.

Au niveau de l’organisme, la résistance à l’insuline subvient lorsqu’un défaut d’induction de la voie de signalisation est observé dans ses tissus cibles (foie, TA, muscle). Au cours de l’obésité, différents éléments participent à la mise en place de la résistance à l’insuline du TA : l’infiltration immunitaire (McLaughlin et al. 2017), la sécrétion de facteurs inflammatoires comme TNFα (Ruan and Lodish 2003) et IL-6 (Lagathu et al. 2003), la concentration élevée d’acide gras (Nguyen et al. 2005), la diminution d’adiponectine (Ryo et al. 2004) et la fibrose (Alba et al. 2018, Hasegawa et al. 2018).

F. Lipotoxicité et complications cardiométaboliques

Une expansion limitée du TASC favorise une accumulation dans le TAV connu pour être plus délétère pour l’organisme (Alligier et al. 2013). Le défaut de stockage du TASC peut être lié à la lipoatrophie, à la lipohypertrophie ou à l’obésité. Ainsi, une expansion excessive du TAV participe à la mise en place d’une lipotoxicité et de comorbidités comme une dyslipidémie, une résistance à l’insuline, un diabète, une stéatose hépatique, et des maladies cardiovasculaires (Heilbronn et al. 2004, Lee et al. 2013) (Figure 13).

Figure 13 : Relation entre les pathologies du tissu adipeux et le risque de développer des comorbidités adaptés de C. Lagathu et (Ahima and Lazar 2013).

TA : tissu adipeux, TASC : tissu adipeux sous-cutané, TAV : tissu adipeux viscéral.

Les acides gras libres (AGL) et les métabolites lipidiques (céramides) sont cytotoxiques (Chaurasia and Summers 2015) et peuvent être stockés dans d’autres tissus périphériques, c’est la lipotoxicité (Figure 14). L’augmentation des AGL dans le sang favorise également la résistance à l’insuline des organes périphériques (Rochford 2010, Tchkonia et al. 2010). Les AGL se fixent à TLR4 et activent les voies JNK et IKK β qui phosphorylent IRS1 sur ses résidus sérine (Nguyen et al. 2005). Ils peuvent induire des stress oxydants et du RE responsables de la résistance à l’insuline. Les AGL inhibent le transport du glucose (Boden 2011).

Figure 14 : Schéma de la lipotoxicité, stockage ectopique des graisses dans les tissus périphériques.

Lorsque le TASC et e TAV n’assurent plus leur fonction de stockage, les AGL vont se stocker dans d’autres tissus comme le muscle squelettique, le foie, le cœur, le pancréas et les vaisseaux.

La dyslipidémie est définie comme l’augmentation de la quantité de triglycérides (TG) dans le sang associé à une diminution des HDL (lipoprotéines de haute densité). L’HDL est riche en esters de cholestérol, qui les transporte jusqu’au foie où ceux-ci sont éliminés. La dyslipidémie favorise l’athérosclérose. L’athérosclérose est un élément clé des maladies cardiovasculaires. Elle consiste en la formation de plaques d’athérome constituées d’un cœur lipidique et d’une chappe fibreuse qui touchent les artères. La rupture de la plaque peut participer à des évènements cardiovasculaires selon sa localisation (accidents vasculaires cérébraux, infarctus du myocarde, troubles circulatoires des membres inférieurs). Par ailleurs, la lipotoxicité et l’athérosclérose peuvent aussi favoriser les cardiomyopathies et une dysfonction cardiaque (Ferrara et al. 2019). Chez les patients infectés par le VIH, l’hypertension et les maladies cardiovasculaires sont plus importantes que dans la population générale et sont favorisées par l’accumulation de TAV (Balasubramanyam et al. 2004, Lake et al. 2017, Beraldo et al. 2018, Srinivasa et al. 2018).

La stéatose hépatique non-alcoolique (non alcoholic fatty liver disease ou NAFLD) se caractérise par l’accumulation de lipides dans le foie. Elle favorise l’inflammation du foie et peut évoluer en NASH (non-alcoholic stéatohepatitis) puis en fibrose hépatique qui altère les fonctions du tissu. Sans traitement et prise en charge, cela peut conduire au développement d’un hépatocarcinome. La prévalence de la stéatose hépatique est augmentée avec les maladies métaboliques comme la résistance à l’insuline, le diabète de type 2 et l’hypertension (Ferrara et al. 2019).

Lorsque ces tissus métaboliques deviennent résistants à l’insuline, ils ne répondent plus en présence d’insuline et ne stockent plus le glucose, entrainant une hyperglycémie, c’est stade pré-diabétique. Le diabète de type 2 fait alors suite à un épuisement des cellules β du pancréas. L’incidence du diabète augmente depuis quelques décennies aussi bien chez les personnes infectées par le VIH que dans la population générale (Rasmussen et al. 2012, Nansseu et al. 2018).

Lors de pathologies qui touchent le TA, des altérations et une redistribution sont observées et contribuent au développement de pathologies cardiométaboliques. Au cours de l’infection par le VIH, des atteintes du TA sont observées à la fois liées au virus mais aussi aux traitements antirétroviraux.

II. Altérations du tissu adipeux chez les patients

infectés par le VIH traités par des antirétroviraux

A. Infection par le VIH et impact sur le tissu adipeux

1) Origine et histoire naturelle de la maladie

L’infection par le VIH (Virus de l’Immunodéficience Humaine) est une pandémie mondiale dont les premiers cas ont été détectés en Californie et à New-York dans le début des années 1980. Le virus du VIH est responsable du SIDA (Syndrome de l’immunodéficience Acquise), stade ultime de la maladie, favorisant le développement de pathologies opportunistes comme le sarcome de Kaposi ou la tuberculose, mais aussi des syndromes généralisés comme des pneumonies et des lymphadénopathies (Rolston and Bodey 1986). Le virus a été isolé pour la première fois en 1983 par Françoise Barré-Sinoussi et Luc Montagnier (Barre-Sinoussi et al. 1983).