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Dialogue entre composantes immunitaire et métabolique dans les atteintes du tissu adipeux

and Nef Induce Senescence in Adipose Tissue and Human Adipose Stem Cells, Resulting

F. Dialogue entre composantes immunitaire et métabolique dans les atteintes du tissu adipeux

Dans l’obésité, le développement de la fibrose et de l’augmentation de la quantité de TGF-β est parallèle à la mise en place de l’inflammation avec l’accumulation des macrophages M1 et M2

(Spencer et al. 2010). Les macrophages, outre leur rôle dans l’inflammation, l’inhibition de l’adipogenèse et la résistance à l’insuline, induisent un phénotype pro-fibrosant des précurseurs adipocytaires (Bourlier et al. 2012, Vila et al. 2014) et des adipocytes (O'Hara et al. 2009, Catalan et al. 2012). Dans ce contexte, un projet en cours au laboratoire vise à étudier le dialogue réciproque entre cellules adipocytaires (ASC, adipocytes) et immunitaires (macrophages, lymphocytes T) dans la mise en place des dysfonctions et la fibrose du TA dans le cadre de l’infection par le VIH. Grâce à nos différents modèles d’études nous souhaitons déterminer le phénotype de ces macrophages et connaitre leur implication dans la mise en place de la fibrose du TA en réponse au VIH et aux INI.

Dans un contexte d’infection par le VIH, les patients contrôlés sous ARV présentent une inflammation de bas grade, une activation immune et une immunosénescence en systémique et localement dans le TA (Deeks 2011, Couturier et al. 2015, Damouche et al. 2015, Lagathu et al. 2017). L’inflammation pourrait être orchestrée par des macrophages et des lymphocytes infiltrés, réservoirs du virus, mais aussi par les ASC et les adipocytes. Chez les patients contrôlés sous ARV, l’inflammation du TA persiste suggérant un rôle des ARV. Cependant, des études cliniques montrent que les INI diminuent la concentration circulante de médiateurs inflammatoires comme le facteur soluble sCD14 (Lake et al. 2014, Hileman et al. 2015, Asundi et al. 2019, Lombardi et al. 2019) mais aucune donnée de la littérature n’a étudié l’impact des INI sur l’inflammation et l’activation immune au sein du TA, d’une part, et sur, la sécrétion de molécules inflammatoires par les ASC et les adipocytes, d’autre part. Il serait donc intéressant d’étudier l’impact des INI sur la sécrétion d’IL-6 et d’IL-8 notamment des ASC et des adipocytes, puis en combinaison avec les protéines virales Tat et Nef mais aussi au sein du TASC et du TAV de macaques infectés ou non et traités par des INI.

Le TA est un acteur immunitaire important du fait de la présence de nombreuses cellules immunitaires résidentes. Par ailleurs, le TA est un site d’accumulation de lymphocytes T mémoires, cibles préférentielles du VIH. Le TA est donc un organe de choix pour l’étude de la réponse immune et de la persistance du réservoir dans le contexte d’infection par le VIH. Les cellules immunitaires résidentes du TA favorisent un environnement immunosuppresseur et jouent un rôle protecteur lors de réponses anti-infectieuses (Han et al. 2017). Cependant, la capacité fonctionnelle des cellules immunitaires reste à être mieux caractérisée (Feuerer et al. 2009, Laparra et al. 2019). Le TA est en étroite communication avec les structures lymphoïdes secondaires dont l’exemple le plus révélateur est la proximité anatomique et la communication entre le TAV omental et les clusters de leucocytes (milky spots) (Kaminski and Randall 2010,

Meza-Perez and Randall 2017). De façon plus générale, les lymphocytes T résidents des tissus non lymphoïdes comme le TA, contribueraient à la réponse anti-infectieuse en migrant vers les organes lymphoïdes secondaires tels que les ganglions lymphatiques où le virus se réplique (Beura et al. 2018). Les perturbations de la réponse immune liées à l’infection par le VIH pourraient donc avoir un impact in situ dans le TA mais également systémique en agissant sur les organes lymphoïdes secondaires. Au cours de l’infection par le VIH, on observe non seulement une fibrose du TA, mais également une fibrose des ganglions lymphatiques qui contribuerait à une déplétion des lymphocytes T CD4+ (Diaz et al. 2010, Lake et al. 2017, Utay et al. 2018). La fibrose du TA qui perturbe l’homéostasie métabolique et sécrétoire, mais qui pourrait également perturber les capacités de migration, le recrutement et la remobilisation des lymphocytes T. L’équipe développe actuellement un projet en collaboration avec l’équipe du Pr O. Lambotte dont le but est d’identifier les nœuds d’interaction entre métabolisme et immunité locale dans le TA et au niveau des ganglions de proximité dans le contexte de l’infection par le VIH.

Au sein du TA, de multiples interactions entre cellules adipocytaires et de l’immunité existent (Duffaut et al. 2009, Meijer et al. 2010, Brestoff and Artis 2015). En effet, les ASC possèdent des propriétés immunomodulatrices en induisant la différenciation des lymphocytes Treg et la polarisation M2 des macrophages (Saillan-Barreau et al. 2003, Puissant et al. 2005, Yanez et al. 2006, Engela et al. 2013, Luz-Crawford et al. 2013, Frazier et al. 2014). Les ASC exprimant CD73, une ecto-nucléotidase, qui dégrade l’AMP en adénosine, nucléoside qui pourrait avoir une forte activité immunosuppressive (Bourin et al. 2013). Dans le contexte d’infection par le VIH, il serait intéressant d’établir le lien entre le niveau d’expression de CD73 et les capacités immunosuppressives et de différenciation adipocytaire des ASC.

La dysfonction, la sénescence, et l’épuisement du stock des ASC pourrait contribuer aux perturbations immunitaires des patients infectés par le VIH sous ARV ou bien à l’inverse le virus et les ARV altèrent la fonction du système immunitaire qui troublerait l’homéostasie des cellules adipeuses (ASC et adipocytes).

Afin d’ouvrir le champ des possibles et au regard de l’actualité 2020 et de la pandémie du SARS-CoV-2, il est important de noter que le TA est un réservoir de nombreux virus autres que le VIH comme le virus de la grippe Influenza A ou le cytomégalovirus (Bouwman et al. 2008, Contreras et al. 2019) Le vieillissement et la surcharge pondérale (surpoids et obésité) sont des facteurs majeurs de la sévérité de la maladie COVID-19. En effet, avec l’âge, le phénomène

d’inflammaging pourrait exacerber l’orage cytokinique observé chez ces patients qui accentue la

sévérité de la maladie (Meftahi et al. 2020). Plusieurs hypothèses adipocentrées sont envisageables et pourraient expliquer cette sévérité. Premièrement, le récepteur d’entrée du virus dans les cellules est l’ACE2 (angiotensin-converting enzyme 2) qui est exprimé dans le TA et augmenté au cours de l’obésité (Gupte et al. 2008, Ryan and Caplice 2020). Des études ont montré une corrélation entre la sévérité de la pathologie et une expression élevée de ACE2 dans le TA (Gheblawi et al. 2020). La question en suspens est donc de savoir si le TA est un réservoir du SARS-CoV-2 qui continue à produire et relarguer du virus même après son élimination dans les poumons. Concernant l’orage cytokinique, deux hypothèses sont possibles. 1/Le TA, de par sa fonction endocrine, pourrait contribuer à la production de facteurs inflammatoires participant à cet orage (Malavazos et al. 2020, Ritter et al. 2020, Ryan and Caplice 2020). 2/Parmi les cytokines sécrétées spécifiquement par l’adipocyte, la leptine pourrait également jouer un rôle clé dans la sévérité de l’infection SARS-CoV-2. En effet, la leptine module l’immunité au niveau local et systémique avec une action pro-inflammatoire. La sécrétion de leptine étant proportionnelle à la masse grasse et les patients obèses sont susceptibles d’avoir un taux plasmatique élevé de leptine qui pourrait contribuer et aggraver l’orage cytokinique (Rebello et al. 2020).

Ces hypothèses adipocentrées mettent en lumière l’importance récurrente du tissu adipeux au-delà des pathologies cardiométaboliques.

V. Conclusion générale :

pourquoi le tissu adipeux est une cible privilégiée