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Comme cité plus haut, les précurseurs adipocytaires jouent un rôle central dans la synthèse de MEC en physiologie mais aussi en pathologie dans la fibrose du TA. En effet, des facteurs pro-fibrotiques comme TGF-β et CTGF induisent la transition épithélio-mésenchymateuse des précurseurs adipocytaires vers un phénotype myofibroblastique qui exprime αSMA (α smooth

muscle actin), augmente leur production de collagènes et diminue leur potentiel adipogénique

al. 2019). D’autres protéines sont caractéristiques d’un phénotype pro-fibrosant des ASC comme CD9high et PDGFRα (Marcelin et al. 2017). Le TGF-β est un facteur pro-fibrotique majeur, sécrété notamment par les adipocytes et les macrophages (Wynn 2008). Son activité est modulée par des composants de la MEC comme la trombospondine 1, le luminican ou encore la décorine (Sun et al. 2013). Par ailleurs, les macrophages régulent la fibrose du TA. Ils attirent les cellules du système immunitaire via la sécrétion des chimiokines et cytokines, synthétisent des composants de la MEC tels que des collagènes I et VI et de la fibronectine et sécrètent les MMP2 et MMP9 (Bourlier et al. 2008). Dans un contexte inflammatoire, les macrophages produisent du TGF-β et de l’activine A qui activent les précurseurs adipocytaires (Vila et al. 2014). L’activine A augmente également la production de composants de la MEC par les précurseurs adipocytaires (Keophiphath et al. 2009, Zaragosi et al. 2010). Les adipocytes sont également impliqués dans la fibrose du TA mais de façon moindre. Cependant, en réponse à certains stimuli comme l’hypoxie, le TGF-β ou l’inflammation, l’adipocyte augmente sa production de collagènes (Pellegrinelli et al. 2014).

Deux hypothèses se distinguent au cours de l’obésité sur l’origine de la fibrose et le lien avec l’inflammation. La première hypothèse suggère que l’inflammation cause la fibrose du TA. Une étude de fibrose du TAV chez la souris a montré que la surexpression des gènes de l’inflammation précède celle des composants de la MEC. D’autres études de cinétique sont cependant nécessaires chez l’homme (Kwon et al. 2012). Les adipocytes hypertrophiques meurent plus facilement par apoptose ou nécrose. Cela induit le recrutement des cellules immunitaires et la formation de CLS. Les facteurs comme IL-6, TNFα et TGF-β sont augmentés et induisent ainsi la prolifération et la production de composants de la MEC par les précurseurs adipocytaires participant ainsi à la mise en place d’une fibrose du TA (Lacasa et al. 2007, Wynn 2008, Keophiphath et al. 2009, Bourlier et al. 2012, Marcelin et al. 2017, Unamuno et al. 2019).

La deuxième hypothèse propose que l’inflammation soit une conséquence de la fibrose. Lors d’une augmentation rapide et soutenue d’apport énergétique, l’hypertrophie peut être associée à des zones hypoxiques au sein du TA. Cette hypoxie trop importante est délétère sur l’angiogenèse et en conséquence, une raréfaction des vaisseaux est observée. De plus, l’angiogenèse n’est donc plus synchrone avec l’adipogenèse. L’activation de HIF-1α favorise la dysfonction des adipocytes (Halberg et al. 2009, Jiang et al. 2011, Krishnan et al. 2012), la prolifération des ASC (Russo et al. 2014) et induit la fibrose du TA (Halberg et al. 2009, Sun et al. 2013) (Figure 10). Parallèlement, la rigidité des collagènes contraint les adipocytes et favorise

leur nécrose (Chun et al. 2006, Khan et al. 2009). Les cellules immunitaires sont alors recrutées et créent une inflammation locale (Lin et al. 2016).

Figure 10 : Schéma de l’expansion pathologique du tissu adipeux et du remodelage de la matrice extracellulaire adapté de (Sun et al. 2011).

Les préadipocytes se différencient en adipocytes, c’est l’adipogenèse. Lorsque la balance énergétique est positive, les adipocytes deviennent hypertrophiques. Puis lorsque la capacité maximale de stockage est atteinte et que l’angiogenèse n’est plus synchrone avec l’adipogenèse, l’expansion du TA devient pathologique. Des zones d’hypoxie se créent et induisent le développement d’une fibrose du TA. Parallèlement, certains adipocytes hypertrophiques meurent et favorisent l’infiltration de macrophages M1 et M2 qui forment des crown-like structures. Le TA devient alors inflammatoire et résistant à l’insuline.

Ces deux hypothèses sont complémentaires. Une étude suggère que la fibrose du TASC résulterait de la production de collagènes par les macrophages et que celle du TAV serait induite suite à une hypoxie (Villaret et al. 2010). Par ailleurs, il est important de noter que fibrose et inflammation ne sont pas toujours liées (Marcelin et al. 2017). En accord, au laboratoire nous avons mis en évidence une fibrose non inflammatoire dans le TASC hypertrophique cervical des patients lipodystrophiques (Bereziat et al. 2011).

5) Résistance à l’insuline : défaut de signalisation insulinique

a) Voies de signalisation de l’insuline

L’adipocyte mature est sensible à l’insuline. L’insuline est une hormone sécrétée par les cellules β des îlots de Langerhans du pancréas. Elle diminue la concentration de glucose dans le sang afin qu’il soit stocké dans les organes périphériques comme le foie, le muscle ou le TA.

Le récepteur à l’insuline est un récepteur à tyrosine kinase composé de quatre sous-unités, 2 α extracellulaires qui se lient à l’insuline (RIα) et deux β kinase (RIβ) transmembranaires. Lorsque l’insuline se fixe, le RI change de conformation permettant le rapprochement des deux RIβ qui se trans-autophosphorylent et activent ses substrats par phosphorylation sur les tyrosines (Jensen and De Meyts 2009).

L’insuline se fixe à son récepteur et active potentiellement plusieurs voies de signalisation. Parmi elles, la voie PI3K/Akt est impliquée dans les réponses métaboliques et la voie des MAPK (Mitogen-activated protein kinase) régule la prolifération et la différenciation cellulaire.

1. Effet prolifératif de l’insuline : la voie des MAPK

L’activation de la voie des MAPK implique les effets pro-survie et prolifératifs de l’insuline. Le RI active SHC (src homologous and collagen protein) d’une part, et IRS-1 d’autre part qui vont tous deux recruter le complexe Grb2/Sos (Growth factor receptor-bound protein 2/Son of

Sevenless). Celui-ci active alors la protéine G Ras qui active la MAPKK RAF (Rapidly Accelerated Fibrosarcoma). Une cascade de phosphorylations permet ainsi l’activation des deux

MAPK ERK1/2 (extracellular signal-regulated kinase) (Saltiel and Kahn 2001) (Figure 11). Les deux ERK activent la kinase p90rsk et en parallèle entrent dans le noyau pour activer la transcription de gènes impliqués dans la prolifération cellulaire.

Figure 11 : Schéma des voies mitogéniques et métaboliques de l’insuline adapté de (Capeau 2003) et de C. Lagathu.

Lorsque l’insuline se fixe à son récepteur RI, il s’autophosphoryle et active par phosphorylation l’insulin recpetor substrat IRS1/2. IRS-1 active alors la voie mitogénique MAPK (vert) et la voie métabolique Akt/PKB (rose). RAF : Rapidly Accelarated Fibrosarcoma, MAPKK : mitogene-activated protein kinase kinase, ERK : extracellular signal-regulated kinase, p90rsk et p70 rsk : ribosomal s6 kinases, PI3K : phosphatidylinositol-kinase de type 3, PIP2 : phosphoinositide-4,5-biphosphate, PIP3 : phosphoinositide-3, 4, 5-triphosphate, PDK : PKCζ/λ : protéine kinase Cζ/λ, Bad, PDE : phosphodiestérase mTOR : mammalian target of rapamycin.

2. Effets métaboliques de l’insuline : la voie Akt/PKB

IRS1 (Insulin Receptor Substrat 1) phosphorylé active la PI3K (phosphinositide 3 kinase), qui phosphoryle ses substrats en position 3 les phosphoinositides membranaires. Il active alors la kinase PDK (phosphoinositide-dependent protein kinase) qui phosphoryle et active Akt/PKB (protéine kinase B) afin d’exercer ses effets métaboliques. Akt active également la voie mTOR (mammalian target of rapamycin) en inhibant TSC1/2 (tuberous sclerosis complex). mTOR phosphoryle alors la kinase p70rsk et induit la synthèse protéique et la prolifération cellulaire. Akt active l’expression de SREBP1c qui favorise la lipogenèse (Kim et al. 1998, Dif et al. 2006). Akt a une action anti-lipolitique en activant la phosphodiestérase (PDE) qui diminue la concentration intracellulaire d’AMPc et diminue ainsi l’activité de la LHS. Akt favorise la survie cellulaire en inhibant le facteur pro-apoptotique Bad (Maiuri et al. 2010) (Figure 11). Enfin, PDK et Akt activent toutes les deux la PKC ζ/λ favorisant la translocation des vésicules contenant GLUT4 de l’appareil de Golgi à la membrane plasmique (Figure 12). De façon intéressante, GLUT4 est d’avantage exprimé dans le TAV que dans le TASC et la captation du glucose est plus élevée dans le TAV (Virtanen et al. 2002, Veilleux et al. 2009, Christen et al. 2010).

Figure 12 : Schéma du transport du glucose insulino-dépendant adapté de (Capeau 2003).

Lorsque l’insuline se fixe à son récepteur RI, il s’auto-phosphoryle et active par phosphorylation l’insulin receptor substrat IRS1/2 d’une part, le changement du cytosquelette d’actine est induit suite à l’activation de la GTPase TC10 (A) et d’autre part, l’activation de la voie AKT / PKCζ/λ permet de mobiliser les vésicules contenant GLUT4 (B). A l’aide d’une polymérisation des fibres d’actine grâce à MyoC, elles vont fusionner afin de localiser le transporteur de glucose GLUT4 à la membrane plasmique. PI3K : phosphatidylinositol-kinase de type 3, PIP2 : phosphoinositide-4,biphosphate, PIP3 : phosphoinositide-3, 4, 5-triphosphate, PKCζ/λ : protéine kinase Cζ/λ,Vamp2 :Vesicle-associated membrane protein 2, Syn4 : Syntaxin 4, Munc18c : mammalian uncoordinated-18, Synip : Syntaxin 4-interacting protein, SNAP23, synaptosomal-associated protein 23, CAP : c-CbI associated protein, C3G : Crk adaptator protein.

Lorsque l’insuline se fixe à son récepteur RI il s’autophosphoryle et active par phosphorylation l’insuline receptor substrat IRS1/2 d’un part, le changement du cytosquelette d’actine est induit (A) et d’autre part, l’activation de la voie AKT / PKCζ/λ permet de mobiliser les vésicules contenant GLUT4 (B).