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c) La différenciation adipocytaire

D. La matrice extracellulaire, un nouvel acteur du tissu adipeux

1) Les composants de la matrice extracellulaire

La MEC du TA a été originellement décrite en 1963 comme un réseau de fibres de collagènes entourant les adipocytes et les capillaires (Napolitano 1963). La MEC est un réseau complexe de macromolécules (protéines et polysaccharides) formant un lien entre les différents groupes de cellules. Elle joue un rôle dans l’architecture, le soutien et la communication intercellulaire et cellule-matrice au sein du tissu. La majorité des composants de la MEC du TA est sécrétée par les précurseurs adipocytaires, les macrophages et d’une moindre façon par les adipocytes (Divoux and Clement 2011, Vila et al. 2014).

La MEC du TA est composée de protéines de structure : les collagènes fibrillaires I et III, et les collagènes non fibrillaires IV et VI mais également d’élastine.

Le collagène a pour unité de base la chaine α appelé préprocollagène. Le préprocollagène est adressé au RE et devient un procollagène par clivage de sa séquence signal. Le procollagène est maturé par hydroxylation puis par glycosylation dans le RE et dans l’appareil de Golgi. Dans le RE, les trois chaines α s’assemblent pour former une triple hélice. Les procollagènes sont sécrétés par exocytose dans des vésicules sous forme inactive et sont clivés par des protéases : les BMP en Nter et les ADAMTs (A Disentegrin and Metalloproteinase with Thrombospondin

motifs) en Cter (Colige et al. 2005). La LOX (lysyl oxidase) permet l’assemblage des collagènes

fibrillaires sous forme de fibrille (Figure 4). Chez le sujet sain, la quantité de collagènes est plus importante dans le TASC que dans le TAV (Divoux et al. 2010).

Figure 4 : Schéma de la formation et de la maturation du collagènes adapté de (Kadler et al. 2007).

BMP bone morphogenic proteins, ADAMT : a disentegrin and metalloproteinase with thrombospondin motifs, LOX : lysyl oxidase.

L’élastine, confère des propriétés d’élasticité au tissu et subit une maturation similaire à celle des collagènes (Mithieux and Weiss 2005). La MEC du TA contient également des protéines d’adhérence (Sun et al. 2013). En effet, l’adipocyte mature est entouré d’une lame basale contenant un réseau de collagène IV, laminine, fibronectine et d’héparane sulfate (Pierleoni et al. 1998) (figure 5).

Figure 5 : Images des fibres de collagènes dans le tissu adipeux en microscopie électronique (A) et sur une coupe histologique colorée au rouge Sirius (B). Les images sont adaptées de (Panettiere et al. 2011, Sun et al. 2013).

Le rouge Sirius colore tous les collagènes.

La fibronectine est un dimère ubiquitaire impliqué dans la migration et l’adhérence cellulaire au cours du développement et favorise le thrombus lors d’une lésion vasculaire (Wang and Ni 2016). Les protéoglycanes comme la décorine et le perlécane sont composés de noyaux ou

cores protéiques et d’oses : les glycosaminoglycanes. Ils ont pour fonctions d’hydrater le tissu et

de limiter la biodisponibilité des facteurs de croissance ou des MMP (métalloprotéinases matricielles) qui dégradent des composants de la MEC (Christiaens and Lijnen 2006). De façon générale, les protéines d’adhérence contiennent des sites de liaison aux collagènes et aux intégrines. Ces récepteurs membranaires activent des voies de mécano-transduction en transformant un signal mécanique en signal chimique intracellulaire. Les intégrines reçoivent des signaux de modifications de la MEC et engendrent des changements du cytosquelette (microtubules et microfilaments d’actine) ayant pour conséquence une régulation de l’expression des gènes et la présence ou non de récepteurs à la membrane plasmique (Figure 6). Ainsi, les intégrines sont impliquées dans des processus cellulaires variés comme la prolifération, la migration, et l’apoptose mais aussi dans la différenciation.

Figure 6 : Schéma de la composition de la matrice extracellulaire tiré de (Divoux 2012).

Les intégrines font le lien entre le cytosquelette intracellulaire et des composants de la MEC comme les collagènes au niveau extracellulaire.

2) Le remodelage de la MEC, un processus dynamique

La MEC est le résultat d’un équilibre dynamique entre synthèse et dégradation de ses composants. Les MMP en particulier, mais aussi les protéases sérines et les cathepsines (des cystéines protéases), dégradent la MEC. Il existe différents types de MMP : collagénases, gélatinases, stromélysines et matrilysines. Elles sont produites en majorité par les précurseurs adipocytaires mais aussi par les macrophages dans le TA. Les MMP jouent un rôle important dans tous les processus physiologiques nécessitant le remodelage de la MEC comme le développement ou la réparation tissulaire suite à une lésion. Les MMP favorisent aussi l’expansion du TA et permettent d’augmenter la taille des adipocytes au cours de la croissance chez l’homme mais aussi lors de l’adipogenèse (Napolitano 1963, Cinti et al. 1984, Scherer et al. 1998, Bouloumie et al. 2001, Meissburger et al. 2011).

Les composants de la MEC possèdent de multiples rôles dans le TA. Un remodelage de la MEC du TA comme une fibrose peuvent être associés à des dysfonctions de cet organe observées dans certaines pathologies du TA.

3) Le remodelage de la MEC, un événement nécessaire à l’adipogenèse

Le remodelage de la MEC est un événement précoce de l’adipogenèse avec une diminution de la quantité de la fibronectine, des collagènes I et III au profit d’une augmentation de la quantité de la laminine et des collagènes IV, V et VI indiquant un passage d’un réseau de collagènes fibrillaires à non fibrillaires (Lilla et al. 2002, Vila et al. 2014). Ce remaniement de la MEC induit un remaniement du cytosquelette des adipocytes en cours de différentiation et active l’expression de gènes de la lipogenèse comme GAPDH (glycéraldéhyde 3 phosophate deshydrogénase) et FAS (Divoux and Clement 2011). En parallèle, les MMP agissent sur la rigidité des collagènes péricellulaires et permettent aux préadipocytes de se gorger de lipides et d’augmenter en volume. Elles induisent aussi la libération locale de facteurs de croissance (Sun et al. 2013). Les MMP2, MMP9 et MMP14 jouent un rôle important dans l’adipogenèse et le métabolisme lipidique in vitro et in vivo (Bouloumie et al. 2001, Lilla et al. 2002, Chun et al. 2006, Bourlier et al. 2012, Vila et al. 2014). De plus, les cathépsines K, S, et L dégradent la fibronectine qui empêche les modifications du cytosquelette et inhibent la différenciation adipocytaire (Spiegelman and Ginty 1983, Taleb et al. 2006). Le remodelage de la MEC est donc indispensable pour l’adipogenèse.