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B. INTRODUCTION

VI. Le réseau cortico-thalamique

VI. 1. Structure et fonction des cortex

Les cortex forment la partie la plus superficielle du cerveau, représentant 77 % du volume cérébral et sont parmi les structures cérébrales les plus complexes de par leur structure interne, leur connectivité, leurs fonctions respectives et les processus cognitifs résultants (Swanson, 1995). Les cortex sont constitués de 6 couches numérotées depuis la surface vers la profondeur et dont les couches 5 et 6 sont elles-mêmes subdivisées (Ramon y Cajal, 1894 ; DeFelipe, 2011). Ces couches sont constituées de neurones excitateurs aux propriétés différentes mais présentent également des neurones inhibiteurs (interneurones) présents dans différentes couches. La délimitation et classification historique était leur morphologie, fortement liée à leurs propriétés et leur connectivité (Ramon y Cajal, 1894). Ces deux dernières

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étant par définition corrélées à la fonction des neurones dans les différents réseaux qu’ils forment. Les propriétés de différents neurones excitateurs ou inhibiteurs sont spécifiques mais peuvent être retrouvées à travers tous les cortex, avec toutefois l’existence de variations comme l’absence de couche 4 dans le cortex moteur. Les délimitations des différentes aires corticales se basent sur des critères histologiques et fonctionnels. Ainsi, les aires visuelles sont distinctes des aires somatosensorielles ou encore des aires motrices. Au-delà de la cytoarchitecture en couches, certaines aires corticales sont également organisées en colonnes fonctionnelles qui impliquent que les neurones de différentes couches vont créer un micro réseau fonctionnel local qui va répondre et traiter l’information issue d’un même stimulus (Mountcastle, 1957 ; Keller et Carlson, 1999). C’est le cas notamment des cortex somatosensoriels primaires qui vont traiter localement l’information issue de différentes parties du corps et respecter une somatotopie sensitive représentative du corps, appelée homonculus (Lubke et Feldmeyer, 2007). Cette spécialisation et lien entre structure et fonction est valable également pour les connectivités entre les différentes aires corticales. Ainsi, les aires primaires reçoivent l’information issue de modalités sensorielles et motrices, et se projettent aux noyaux thalamiques réciproquement. Mais d’autres aires corticales reçoivent ces informations et sont appelés aires secondaires (voire tertiaire, quaternaire etc pour les cortex visuels) en raison d’afférences moins spécifiques plus diffuses et qui amènent des informations de nature multimodale. A ces aires sensorielles et motrices de divers ordres se rajoutent les aires associatives qui intègrent en majorité des informations déjà traitées, relayées par d’autres aires corticales et qui sont responsables des processus cognitifs dits complexes.

VI. 2. Propriétés électrophysiologiques des neurones corticaux

Les neurones corticaux sont répartis en différentes catégories principalement caractérisées par leurs propriétés électrophysiologiques qui sont également liées la plupart du temps à des caractéristiques morphologiques (figure 15A, B ; Steriade, 2004 ; Dimitrov et coll., 2011). La majorité des neurones corticaux (70 à 80 %) sont glutamartergiques excitateurs, et sont représentés par les neurones pyramidaux des couches 2 – 3 et 5 – 6. La couche 4 quant à elle est composé de neurones dits épineux étoilés, qui comme les neurones pyramidaux utilisent le glutamate comme neurotransmetteur. Les autres neurones sont inhibiteurs et utilisent le GABA comme neurotransmetteur (Markram et coll., 2004 ; DeFelipe et coll., 2013). La classification

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rejoint ces séparations fonctionnelles. La classe des neurones déchargeant en décharge régulière – regular spiking – (RS) correspond principalement à des neurones excitateurs pyramidaux ou épineux étoilés. Lors d’une élévation du potentiel menant à la décharge de PA, leur décharge est régulière même si une sous-catégorisation permet de mettre en évidence des différences d’adaptation (Connors et Gutnick, 1990 ; Contreras, 2004). Contrairement aux neurones RS, d’autres neurones peuvent décharger régulièrement mais présentent des décharges en bouffées de PA – intrinsic

bursting – (IB) lorsque leur potentiel atteint le seuil de déclenchement des PA. Ces

neurones sont moins nombreux et appartiennent généralement aux neurones excitateurs pyramidaux. Lors d’une dépolarisation suffisante, les neurones IB vont générer ces bouffées constituées d’au moins 3 PA dont l’amplitude diminue en raison de l’inactivation rapide des canaux sodiques du PA. Ces neurones IB peuvent présenter les deux types de décharge RS et IB tout comme certains peuvent ne faire que des bouffées et être en mode une bouffée ou rien. La troisième classe majeure de neurones est constituée de neurones à la décharge très rapide – fast spiking – (FS) (Contreras, 2004 ; Steriade, 2004). Ces neurones ont la capacité de pouvoir maintenir un rythme de décharge très élevé, notamment grâce à des PA plus courts, et ne présentent pas de phénomène d’adaptation (Stériade, 2004). Tous les neurones FS sont GABAergiques et peuvent être catégorisés en sous-types selon les propriétés de leur PA, leur morphologie, leur fonction et leur emplacement ; bien que la classification soit encore sujette à débats (DeFelipe et coll., 2013). La dernière classe de neurones est constituée de neurones qui vont décharger par des bouffées rythmiques rapides – fast rhythmic bursting – (FRB) (Contreras, 2004). Ces bouffées présentent là-encore au moins 3 PA qui se succèdent très rapidement (jusqu’à 600 Hz) et peuvent se succéder en peu de temps. Des neurones excitateurs types pyramidaux ou inhibiteurs peuvent présenter ce type de décharges.

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Figure 15 : Morphologie et type de décharge des principaux types de neurones corticaux. A, neurone pyramidal. B, neurones non pyramidaux. 1: neurone en arcade ; 2: neurone en double bouquet ; 3: neurone en petit panier ; 4: neurone en chandelier ; 5: neurone « à peptide » ; 6: neurone étoilé non pyramidal de la couche 6 (excitateur) ; 7: cellule de type neuroglial ; 8: neurone en grand panier. C, enregistrements intracellulaires de neurones corticaux. Patron temporel de décharge de neurones de type RS, FRB, FS et IB en réponse à un échelon de courant dépolarisant (0,8 nA, 200 ms). A, d’après Spruston, 2008 ; B, d'après Jones, 1975b ; C d’après Steriade, 2004.

VI. 3. Projections cortico-corticales

Les projections qui restent au sein du cortex peuvent être de plusieurs natures : elles peuvent rester au sein d’une même couche (intralaminaires), ou projeter verticalement, renforçant ainsi le réseau dans une même colonne fonctionnelle (intracolumnaire) ou vers d’autres colonnes (transcolumnaire) (Markram et coll., 1997 ; Feldmeyer et coll., 1999, 2002, 2006). Les connexions peuvent également être translaminaires et parvenir à d’autres couches du cortex comme les connexions au cortex somatosensoriel primaire qui reçoit les informations issues des vibrisses. Les différentes couches corticales reçoivent les informations issues de différents noyaux thalamiques et/ou autres structures. Les projections intracorticales permettent ainsi de transférer de l’information prétraitée et de complexifier le codage pour les aires corticales associatives (Bureau et coll., 2006 ; Ferezou et coll., 2007). Les cortex des deux

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hémisphères sont aussi connectés, permettant leur synchronie, l’intégration et l’échange d’informations issues de chaque latéralité corporelle. Les lésions du corps calleux mènent d’ailleurs à des symptômes spécifiques tels que l’impossibilité de faire des gestes moteurs en lien avec un côté ou encore de ressentir ou voir un objet dans la main d’un côté (Schulte et coll., 2010 ; Smith et Alloway, 2014). Une apraxie et des troubles de synchronie motrice sont courants également en cas de dommages à ces connexions entre hémisphères (Berlucchi, 2012).

VI. 4. Projections cortico-thalamiques

Les projections cortico-thalamiques à destination des noyaux relais du thalamus sont issues des neurones pyramidaux des couches 5 et 6 (Bourassa et coll., 1995 ; Zhong et Deschenes, 1998 ; Mercer et coll., 2005 ; Zarrinpar et Callaway, 2006). Les neurones de la couche 6 vont envoyer des connexions topographiques réciproques à celles reçues par le cortex où ils sont localisés, avec une projection collatérale allant au nRT (Liu et Jones, 1999). Les pyramides de la couche 5 envoient eux des projections vers d’autres types de noyaux en plus des noyaux relais et c’est une collatérale qui vient exciter les neurones des noyaux relais (Bourassa et coll., 1995). Il est important de préciser que les synapses venant des projections de la couche 6 corticale vers le nRT représente 70 % des synapses pour le nRT (Liu et Jones, 1999). Cela traduit la force avec laquelle les différents cortex vont exciter le noyau inhibiteur du thalamus afin de moduler les autres noyaux dont les noyaux relais. Il convient de mentionner également les projections des neurones ayant des neurotransmetteurs modulateurs (dopamine, acétylcholine, adrénaline, noradrénaline sérotonine et adénosine) qui vont venir affecter le potentiel membranaire de nombreux neurones dont les neurones thalamiques (McCormick, 1992). Les neurones qui ont ce type de neurotransmetteurs sont organisés sous forme de noyaux et projettent vers toutes les différentes structures cérébrales avec une importance toute particulière vers le cortex et le thalamus.

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