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Partie II /Modes d’action : interactions organo-minérales et interparticulaires

5. Interactions interparticulaires en présence de polymère hydrosoluble

5.1. Répulsion stérique

5.1.1. Le modèle de Gay et Raphaël

La conformation en solution des copolymères en peigne est décrite de manière qualitative par le modèle de Gay et de Raphaël, qui a été réutilisé par la suite dans un grand nombre de travaux [74]. Ce dernier se propose de caractériser les différentes architectures des copolymères en peigne selon trois critères structuraux (voir Figure 1-21). Le premier, n, est le nombre de motifs de répétition dans la chaîne linéaire du squelette carboné (aussi appelés segments) ; étant donné qu’on considère qu’il n’y a qu’une seule chaîne latérale par motif de répétition, n représente aussi le nombre total de chaînes latérales par macromolécule. Le

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second, N, est le nombre de monomères de la chaîne principale dans un même motif de répétition. On remarque immédiatement que plus la valeur de N est grande, et plus les chaînes latérales sont espacées entre elles, sur la structure macromoléculaire. Enfin le troisième paramètre, P, est simplement le nombre de monomères inclus dans chacune des chaînes latérales.

A partir de ces définitions, Gay et Raphaël établissent un diagramme qui présentent 5 conformations différentes du copolymère peigne en solution, en condition de bon solvant et en fonction des paramètres structuraux précédemment définis (Figure 1-22). Ces conformations sont caractérisées par trois rayons de giration : celui de la macromolécule globale, R, celui uniquement du squelette carboné principal, Rn,N et celui d’une chaîne

latérale, Rp. Alors que les chaînes peuvent occuper un espace très large, elles peuvent

éventuellement s’enchevêtrer ou au contraire se recroqueviller sur elles-mêmes. Dans ce cas, les valeurs Rc, nc et Pc, respectivement définies comme étant le rayon, le nombre de chaînes

latérales et le nombre de monomères dans chaque chaine latérale d’un ou du noyau (cœur ou région centrale de la macromolécule) sont plus appropriées pour caractériser la conformation du copolymère peigne en solution.

Figure 1-21. Représentation schématique des copolymères en peigne selon le modèle de Gay et Raphaël.

Suivant leurs paramètres structuraux, ils peuvent alors adopter les conformations présentées ci-dessous :

CD, Chaînes Décorées : les chaînes latérales sont courtes par rapport à la chaîne principale (P < N). Le copolymère en peigne se comporte comme une simple chaîne constituée de nN monomères et « décorée » par quelques chaînes latérales. [R = Rn,N]

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ESF et ESE, Etoile avec Squelette Flexible et Etoile avec Squelette Etiré : les chaînes latérales sont longues par rapport à la chaîne principale (P > N). Le copolymère peigne adopte une conformation en forme d’étoile avec n bras de longueur P [Pc<P, nc= n , R=Rp et Rc=

Rn,N]. De plus, si N < n, la chaîne principale est complètement étirée, il s’agit de la

conformation ESE. A l’inverse, si N > n, la chaîne principale n’est que légèrement étirée, il s’agit de la conformation ESF.

VSF et VSE, Ver avec Squelette Flexible et Ver avec Squelette Etiré : si la valeur de P est très faible, de l’ordre de Pc , alors l’étoile se résume à son noyau. De plus, si n > nc, alors la

structure s’apparente à une succession de noyaux (ou de blobs) de taille Rc. Cette structure

peut être plus ou moins étirée en fonction de la taille des chaînes latérales, et donc de Rp et Rc.

En dessous d’une certaine valeur de P, la structure est de type VSF, au-delà de la valeur de P, la structure est de type VSE. [Pc = P, n >n c, R = Rn,N et Rc = Rp]

Figure 1-22. Diagramme de la conformation des copolymères peigne en bon solvant établie par Gay et Raphaël.

L’avantage de ce diagramme est qu’il reste valable pour une macromolécule adsorbée sur une surface minérale. L’inconvénient est que les limites définies entre les différentes conformations ne sont pas exactes mais indicatives. La plupart des superplastifiants de type polycarboxylates utilisés dans les formulations de bétons se situent dans les domaines VSF ou bien VSE du diagramme.

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5.1.2. Conformation des copolymères en peigne en solution

En 2008, Flatt rédige une publication d’importance majeure qui constitue la première, et à ce jour la seule tentative de description quantitative de la conformation de superplastifiants de type copolymères en peigne, en solution et adsorbé sur une surface minérale. L’objectif de ce travail [16] est de relier la conformation des macromolécules adsorbées aux résultats des courbes force/distance obtenues à partir de la microscopie à force atomique (AFM). Il convient à ce stade de préciser que tous les développements mathématiques décrits dans cette publication n’ont pour but que de modéliser la force de répulsion stérique que les polycarboxylates génèrent et qui interagit avec la pointe de la sonde AFM. Flatt précise que les équations proposées dérivent toutes de lois d’échelle et ne peuvent donc pas être utilisées pour obtenir des valeurs numériques exactes. Enfin, au cours du développement mathématique, de nombreuses hypothèses fortes sont posées.

Pour résumer, Flatt s’intéresse d’abord aux homopolymères en peigne (un seul monomère constitue le motif de répétition) qui se situent dans le domaine VSF du modèle de Gay et Raphaël (voir Figure 1-22). En faisant un raisonnement basé sur la minimisation de l’énergie libre de Flory, Flatt décrit l’homopolymère en peigne comme un enchaînement de « blobs » (assimilés à des sphères) ayant un rayon de giration noté Rc. Le rayon de giration

correspond à la distance moyenne entre l’extrémité de chaque segment et le centre de masse de la pelote statistique ; sa valeur peut être déterminée avec l’Équation 1-23

“” = ‚• 2 –—– … ˜™š

›œ•™˜žŸh˜™˜ž

Équation 1-23. Valeur du rayon de giration d’un blob pour un homopolymère en peigne en solution.

Rc est le rayon de giration d’un blob sur l’homopolymère en peigne. χ est le paramètre de Flory.

a est la taille d’un monomère.

P est le nombre d’unités dans chaque chaîne latérale.

N est le nombre de monomère dans chaque motif de répétition.

On notera toutefois que Flatt ne définit pas ce que revêt le terme de « taille d’un monomère ».

Puis, les formules qui permettent de calculer le rayon de giration global de la macromolécule en fonction de ses paramètres structuraux sont données en Équation 1-24 :

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“& =&“ ‚¡¡…N™š = 7• 2 –—<˜™š›œO™šŸ˜™š¡N™š

Équation 1-24 : rayon de giration d’un homopolymère en peigne en solution.

A partir de ces équations, Flatt transpose son raisonnement à la structure d’un copolymère en peigne. Le rayon de giration d’un blob et celui de la macromolécule sont données par les équations suivantes :

“” = d›¢ £ O7• 2 –—< – e ˜™š ›¢œ•™˜žŸh˜™˜ž

Équation 1-25 : rayon de giration d’un blob pour un copolymère en peigne en solution.

“ = d‚›£ ¢… O7• 2 –—< – e ˜™š ›¢œO™šŸ˜™š¡N™š

Équation 1-26 : rayon de giration d’un copolymère en peigne en solution.

Rc est le rayon de giration d’un blob sur le copolymère en peigne. R est le rayon de giration du copolymère en peigne.

χ est le paramètre de Flory.

aN est la taille d’un monomère dans la chaîne principale. aP est la taille d’un monomère dans la chaîne latérale. P est le nombre d’unités dans chaque chaîne latérale.

N est le nombre de monomère dans chaque motif de répétition. n est le nombre de motifs de répétition.

5.1.3. Conformation des copolymères en peigne sur une surface minérale

L’idée directrice de Flatt est de considérer qu’une fois adsorbés sur une surface minérale, les polycarboxylates ne peuvent plus être vus comme une succession de blobs mais plutôt comme une suite de demi-blobs adsorbés. Chaque demi-blob est décrit comme étant une demi-sphère parfaite qui possède son propre rayon de giration. En utilisant le même raisonnement que précédemment, à savoir la minimisation de l’énergie libre de Flory, Flatt donne la possibilité de calculer ce rayon de giration (Équation 1-27).

“¤”= ‚–¥–7• 2 –—<›¢ £…

˜™š

›¢œ•™˜žŸh˜™˜ž

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De plus, l’auteur développe en annexe la formule permettant d’estimer l’aire de la surface minérale occupée par chaque macromolécule adsorbée (Équation 1-28).

! ¦ = § ¥–›£›¢‚–¥–7• 2 –—< ›¢ ›£… O™š œ¨™˜žŸN™˜ž¡ Équation 1-28 : aire de la surface occupée par un blob adsorbé.

5.1.4. Force de répulsion stérique générée par les copolymères adsorbés

Considérons deux surfaces minérales s’approchant suffisamment l’une de l’autre pour que les couches de polymère adsorbées s’interpénètrent ; une force de répulsion stérique va se développer. Flatt estime que dans ce cas, seule la distance perpendiculaire du blob à la surface, notée H*, varie, et pas la dimension latérale de l’hémisphère, en particulier lorsque la surface minérale est saturée. Tout se passe comme si, plus les surfaces minérales s’approchent, et plus le blob adsorbé est « compressé » (diminution de H*). Cette idée est illustrée dans la Figure 1-23.

Figure 1-23. Représentation schématique de l’approche de deux surfaces minérales dont les surfaces sont recouvertes de blobs adsorbés. Pour (a) et (b), il n’y a pas de forces de répulsion stérique et les paramètres géométriques des blobs adsorbés sont

inchangés. Pour (c), une force de répulsion stérique se créé et la valeur de H* devient égale à D/2 [16].

En dérivant une nouvelle fois l’énergie libre de Flory, Flatt obtient la pression osmotique, c’est-à-dire la force exercée par unité d’aire d’un blob de polymère. L’Équation 1-29 a été réécrite pour exprimer la valeur de cette pression osmotique uniquement en

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fonction des paramètres structuraux du copolymère en peigne, du paramètre de Flory et de H*. © =& œhO¨™NžŸh˜N™Nž §–hN™˜ž ªš™N›£«7• 2 –—< ›£¢¬ O™˜š-®h˜™Nc• 2 ‚“-”®… š™N f

Équation 1-29 : expression de la pression osmotique exercée par un blob adsorbé en fonction des paramètres structuraux de la macromolécule et de H*.

Cependant, pour établir cette équation, de fortes hypothèses de calculs ont dû être posées et ne peuvent être valides qui si et seulement si le copolymère se trouve dans le régime VSF du modèle de Gay et Raphaël.

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